Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 28 octobre 2015, et des pièces complémentaires enregistrées le 2 décembre 2015, M.E..., représenté par Me A..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 7 juillet 2015 ;
2°) d'annuler l'arrêté en date du 23 février 2015 par lequel le préfet de la Gironde a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Gironde de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice.
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Vu :
- les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- l'arrêté du 9 novembre 2011 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Philippe Pouzoulet a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M.E..., ressortissant de nationalité canadienne, entré en France le 29 juin 2014, a sollicité la délivrance d'un titre de séjour le 30 juillet 2014 en faisant valoir son état de santé et ses liens personnels en France. Il relève appel du jugement du 7 juillet 2015 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 23 février 2015 du préfet de la Gironde portant refus de séjour, obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de renvoi.
Sur la compétence du signataire de l'arrêté attaqué :
2. Il ressort des pièces du dossier que l'arrêté du 23 février 2015 a été signé par M. Jean-Michel Bedecarrax, secrétaire général de la préfecture de la Gironde, qui disposait d'une délégation de signature consentie par un arrêté du 8 octobre 2014, régulièrement publié au recueil des actes administratifs n° 80 d'octobre 2014, aux fins de signer " tous arrêtés, décisions, circulaires, rapports, requêtes, mémoires, correspondances et documents, concernant les attributions de l'Etat dans le département de la Gironde (...) " à l'exception de trois types d'actes au nombre desquels ne figurent pas les décisions prises en matière de police des étrangers. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté attaqué doit être écarté comme manquant en fait.
Sur la décision portant refus de séjour :
3. En premier lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence (...) ". Aux termes de l'article R. 313-22 de ce code : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour temporaire au vu d'un avis émis par le médecin de l'agence régionale de santé compétente au regard du lieu de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général. (...) / L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin agréé ou un médecin praticien hospitalier et, d'autre part, des informations disponibles sur l'existence d'un traitement dans le pays d'origine de l'intéressé. (...) ". Enfin, aux termes de l'article 4 de l'arrêté du 9 novembre 2011 susvisé, relatif aux conditions d'établissement et de transmission des avis rendus par les agences régionales de santé : " Au vu de ce rapport médical et des informations dont il dispose, le médecin de l'agence régionale de santé émet un avis précisant : / - si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale ; / - si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé ; / - s'il existe dans le pays dont il est originaire, un traitement approprié pour sa prise en charge médicale ; / - la durée prévisible du traitement. / Dans le cas où un traitement approprié existe dans le pays d'origine, il peut, au vu des éléments du dossier du demandeur, indiquer si l'état de santé de l'étranger lui permet de voyager sans risque vers ce pays. / Cet avis est transmis au préfet sous couvert du directeur général de l'agence régionale de santé. Celui-ci, s'il estime, sur la base des informations dont il dispose, qu'il y a lieu de prendre en compte des circonstances humanitaires exceptionnelles susceptibles de fonder une décision d'admission au séjour, transmet au préfet un avis complémentaire motivé. / Par ailleurs, dès lors que l'intéressé porterait à la connaissance du préfet des circonstances humanitaires exceptionnelles susceptibles de fonder une décision d'admission au séjour, le préfet saisit pour avis le directeur général de l'agence régionale de santé, qui lui communique son avis motivé dans un délai d'un mois. ".
4. Si le requérant soutient que l'avis du médecin de l'agence régionale de santé d'Aquitaine du 10 février 2015 n'a pas été adressé au préfet de la Gironde sous le couvert du directeur de l'agence régionale de santé en méconnaissance des dispositions combinées précitées du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile précité, du troisième alinéa de l'article R. 313-22 du même code et de l'article 4 de l'arrêté du 9 novembre 2011, il ne ressort pas des pièces du dossier, qu'à la supposer établie, une telle irrégularité de procédure puisse être regardée comme ayant, en l'espèce, privé le requérant d'une garantie ou exercé une influence sur le sens de la décision contestée alors que le requérant ne soutient pas ni a fortiori ne justifie qu'il aurait invoqué des circonstances humanitaires exceptionnelles au sens des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code justifiant que le directeur général de l'agence régionale de santé soit saisi pour avis.
5. En deuxième lieu, le requérant soutient que le préfet de la Gironde se serait cru lié par l'avis du médecin de l'agence régionale de santé du 10 février 2015, qui précise que l'état de santé du requérant nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, qu'il existe, dans son pays d'origine, le Canada, un traitement approprié et que son état de santé lui permet de voyager sans risque vers son pays d'origine. Il ressort toutefois des termes mêmes de l'arrêté du 23 février 2015 que la décision portant refus de séjour a été prise après un examen approfondi de la situation de l'intéressé et compte tenu de l'ensemble des éléments produits par l'intéressé, dont les certificats médicaux émis le 2 septembre 2014 par le Dr D...et le 17 novembre 2015 par le DrB..., ce dernier d'ailleurs postérieur à la décision attaquée, qui ne permettent pas de remettre en cause l'avis du médecin de l'agence régionale de santé. Par suite, le préfet de la Gironde n'a pas méconnu l'étendue de sa compétence.
6. En troisième lieu, aux termes des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1- Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2- Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ". Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 7º A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ; (...). ".
7. M. E...fait valoir qu'il vit en concubinage avec une ressortissante de nationalité française. Cependant il ressort des pièces du dossier, et en particulier du certificat de vie commune délivré le 8 août 2014, qu'à la date du refus de séjour en litige, M. E...ne partageait une communauté de vie avec sa compagne que depuis quelques mois seulement même si la relation entretenue à distance par le requérant avec cette Française est plus ancienne. Il est en effet constant que le requérant, âgé de soixante-dix ans, est entré en France le 29 juin 2014 dans le but de rendre une visite à cette personne avec laquelle il entretient une relation, tout en demeurant au..., depuis l'année 2010. Par suite, eu égard notamment au caractère récent de son séjour en France et de la nature de la relation qu'il entretient avec sa compagne depuis l'année 2010, et alors même qu'en raison de leur état de santé respectif, le requérant et sa compagne s'apportent l'un à l'autre un soutien mutuel, M.E..., qui ne justifie pas, néanmoins, que l'assistance permanente de sa compagne française lui est indispensable compte tenu de son état de santé, n'est pas fondé à soutenir que la décision de refus de séjour aurait porté au droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs qui la fondent. Dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté. Pour les mêmes motifs, la décision contestée n'est pas entaché d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des conséquences qu'elle emporte sur la situation personnelle du requérant.
Sur l'obligation de quitter le territoire français :
8. En premier lieu, et compte tenu de ce qui précède, M. E...n'est pas fondé à soutenir qu'il ne peut pas faire l'objet d'une mesure d'éloignement, dans la mesure où il ne peut pas prétendre à la délivrance d'un titre de séjour de plein droit sur le fondement des 7° et 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. En outre, son état de santé n'y fait pas obstacle.
9. En second lieu, et pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 7, M. E...n'est pas fondé à soutenir que la décision portant obligation de quitter le territoire français méconnaitrait l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme ni qu'elle serait entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.
10. Il résulte de tout ce qui précède que M. E...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 23 février 2015 par lequel le préfet de la Gironde a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire et a fixé le pays de destination. Par voie de conséquence il y a lieu de rejeter ses conclusions à fins d'injonction, ainsi que celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DECIDE
Article 1er : La requête de M. E...est rejetée.
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N° 15BX03523