Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 6 août 2015, M.A..., représenté par Me Francos, demande à la cour :
1°) de l'admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle à titre provisoire ;
2°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Toulouse du 16 juillet 2015 ;
3°) d'annuler les décisions susmentionnées du 10 juillet 2015 et du 13 juillet 2015 ;
4°) d'enjoindre au préfet du Tarn de produire le relevé AGDREF de M. A...et de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, et à titre subsidiaire de procéder au réexamen de sa situation administrative ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros en application des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ou dans le cas où ne lui serait pas accordé l'aide juridictionnelle, de lui accorder la même somme sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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Vu :
- les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
- la loi n°2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Florence Madelaigue,
- les conclusions de Mme Frédérique Munoz-Pauziès, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. M.A..., de nationalité marocaine, a été incarcéré à.... Par arrêté du 10 juillet 2015, le préfet du Tarn lui a notifié une décision portant refus de séjour, assortie d'une obligation de quitter le territoire français sans délai de départ volontaire, a fixé le pays de renvoi et, par une décision du 13 juillet 2015, le préfet a placé M. A...en rétention administrative pour l'exécution de cette mesure d'éloignement. M. A...a demandé au tribunal administratif de Toulouse l'annulation de ces décisions. Le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse a, par jugement du 16 juillet 2015, rejeté ces conclusions. M. A... relève appel de ce jugement.
Sur la demande d'aide juridictionnelle provisoire :
2. Par décision du 10 septembre 2015 du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Bordeaux, M. A...a été admis à l'aide juridictionnelle totale. Ses conclusions tendant au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire sont, dès lors, devenues sans objet.
Sur la régularité du jugement attaqué :
3. Aux termes de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. - L'étranger qui fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français et qui dispose du délai de départ volontaire mentionné au premier alinéa du II de l'article L. 511-1 peut, dans le délai de trente jours suivant sa notification, demander au tribunal administratif l'annulation de cette décision, ainsi que l'annulation de la décision relative au séjour, de la décision mentionnant le pays de destination et de la décision d'interdiction de retour sur le territoire français qui l'accompagnent le cas échéant. L'étranger qui fait l'objet de l'interdiction de retour prévue au troisième alinéa du III du même article L. 511-1 peut, dans le délai de trente jours suivant sa notification, demander l'annulation de cette décision. / L'étranger peut demander le bénéfice de l'aide juridictionnelle au plus tard lors de l'introduction de sa requête en annulation. Le tribunal administratif statue dans un délai de trois mois à compter de sa saisine. /Toutefois, si l'étranger est placé en rétention en application de l'article L. 551-1 ou assigné à résidence en application de l'article L. 561-2, il est statué selon la procédure et dans le délai prévus au III du présent article. II. - L'étranger qui fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire sans délai peut, dans les quarante-huit heures suivant sa notification par voie administrative, demander au président du tribunal administratif l'annulation de cette décision, ainsi que l'annulation de la décision relative au séjour, de la décision refusant un délai de départ volontaire, de la décision mentionnant le pays de destination et de la décision d'interdiction de retour sur le territoire français qui l'accompagnent le cas échéant./Il est statué sur ce recours selon la procédure et dans les délais prévus au I. Toutefois, si l'étranger est placé en rétention en application de l'article L. 551-1 ou assigné à résidence en application de l'article L. 561-2, il est statué selon la procédure et dans le délai prévus au III du présent article. III. - En cas de décision de placement en rétention ou d'assignation à résidence en application de l'article L. 561-2, l'étranger peut demander au président du tribunal administratif l'annulation de cette décision dans les quarante-huit heures suivant sa notification. Lorsque l'étranger a fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français, le même recours en annulation peut être également dirigé contre l'obligation de quitter le territoire français et contre la décision refusant un délai de départ volontaire, la décision mentionnant le pays de destination et la décision d'interdiction de retour sur le territoire français qui l'accompagnent le cas échéant, lorsque ces décisions sont notifiées avec la décision de placement en rétention ou d'assignation. Toutefois, si l'étranger est assigné à résidence en application du même article L. 561-2, son recours en annulation peut porter directement sur l'obligation de quitter le territoire ainsi que, le cas échéant, sur la décision refusant un délai de départ volontaire, la décision mentionnant le pays de destination et la décision d'interdiction de retour sur le territoire français ".
En ce qui concerne la régularité du jugement attaqué en tant qu'il rejette les conclusions tendant à l'annulation de la décision de refus de séjour :
4. M. A...a saisi le tribunal le 13 juillet 2013 de conclusions d'annulation dirigées contre la décision du préfet portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire français sans délai alors qu'il faisait aussi l'objet d'une mesure de rétention également contestée dans la demande introductive d'instance. Le magistrat du tribunal administratif, qui a statué sur le litige selon la procédure du III de l'article L. 512-1 précité du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, a déduit à juste titre des dispositions de l'article L. 512-1 qu'il ne lui appartenait pas de statuer sur les conclusions de M. A...tendant à l'annulation du refus de séjour opposé par le préfet du Tarn. Mais il en a conclu à tort que de telles conclusions étaient irrecevables devant le tribunal alors qu'il devait les renvoyer devant une formation collégiale pour qu'il y soit statué. Il a ainsi entaché le jugement d'une première irrégularité.
En ce qui concerne la régularité du jugement en tant qu'il statue sur les conclusions tendant à l'annulation des décisions portant obligation de quitter le territoire français sans délai et fixant le pays de renvoi:
5. Il résulte des dispositions précitées du II de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile reprises au II de l'article R. 776-2 du code de justice administrative que M. A...disposait d'un délai de 48 heures suivant la notification par voie administrative de la décision portant obligation de quitter le territoire sans délai pour en demander l'annulation au président du tribunal administratif. En outre, de l'article L. 512-2 du même code prévoit : " Dès notification de l'obligation de quitter le territoire français, l'étranger auquel aucun délai de départ volontaire n'a été accordé est mis en mesure, dans les meilleurs délais, d'avertir un conseil, son consulat ou une personne de son choix. L'étranger est informé qu'il peut recevoir communication des principaux éléments des décisions qui lui sont notifiées en application de l'article L. 511-1 ". Lorsque les conditions de la notification à un étranger en détention d'une décision portant obligation de quitter le territoire sans délai portent atteinte à son droit à un recours effectif en ne le mettant pas en mesure d'avertir, dans les meilleurs délais, un conseil, son consulat ou une personne de son choix, elles font obstacle à ce que le délai spécial de quarante-huit heures prévu à l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile commence à courir.
6. La décision portant obligation de quitter sans délai le territoire français a été notifiée à M. A...le vendredi 10 juillet 2015 à 14 heures 15 alors qu'il se trouvait encore incarcéré à.... M. A...affirme sans être sérieusement contredit par le préfet qu'il n'a disposé ni d'un téléphone ni d'une télécopie le mettant en mesure d'avertir dans les meilleurs délais un avocat ou une personne de son choix de sorte qu'il n'a pu former un recours dans le délai imparti. Dès lors, les conditions de la notification à M. A... de l'arrêté faisaient obstacle à ce que le délai de quarante-huit heures prévu à l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile commence à courir. Par suite, la demande de M. A... tendant à l'annulation de l'arrêté du 10 juillet 2015, dont il avait saisi le tribunal administratif de Toulouse par une requête enregistrée au greffe le 13 juillet 2015, n'était pas tardive. M. A... est ainsi fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné du tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande comme tardive et donc irrecevable. Le jugement doit dès lors être annulé en tant qu'il statue sur les conclusions d'annulation dirigées contre la mesure d'éloignement en litige, y compris la fixation du pays de destination et le refus de délai de départ volontaire.
7. Il résulte de ce qui précède que le jugement doit être annulé en tant qu'il statue sur la demande d'annulation de l'arrêté du 10 juillet 2015 dans son ensemble. Il y a lieu d'évoquer et de statuer sur ces conclusions et de statuer par la voie de l'effet dévolutif de l'appel sur les conclusions de M. A...dirigées contre la mesure de rétention.
Sur les conclusions à fin d'annulation de l'arrêté du 10 juillet 2015 :
En ce qui concerne la décision de refus de séjour :
8. Il résulte de l'article 1er de l'arrêté attaqué que le préfet a opposé formellement un refus de séjour à M.A.... Or, cette décision n'a pas été prise à la suite d'une demande de l'intéressé. Par suite, M. A...est fondé à soutenir que le préfet du Tarn, qui ne l'a pas mis à même de présenter ses observations, a méconnu les exigences de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000. La décision portant refus de séjour doit dès lors être annulée.
En ce qui concerne les autres décisions :
9. Il résulte des termes de l'arrêté du 10 juillet 2015, y compris de son intitulé, qu'en dépit du visa du 1° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la décision portant obligation de quitter le territoire français ne peut pas être regardée comme ayant été prise par le préfet indépendamment du refus de séjour que ce dernier a opposé irrégulièrement à M.A.... Aussi bien le préfet confirme dans son mémoire en défense avoir notifié à l'intéressé une décision portant refus de séjour " avec obligation de quitter le territoire français ". Par conséquent, l'annulation de la décision portant refus de titre de séjour entraîne celle de la décision portant obligation de quitter le territoire, de la décision fixant le pays de destination et de la décision refusant à M. A...un délai de départ volontaire, qui ont été prises sur le fondement du refus de séjour irrégulier.
Sur les conclusions à fin d'annulation de l'arrêté du 13 juillet 2015 :
10. La décision par laquelle le préfet a décidé le placement en rétention administrative de M. A...ne peut par suite qu'être également annulée par voie de conséquence de l'annulation de la décision portant obligation de quitter le territoire français qui en constitue la base légale. M. A... est ainsi fondé à soutenir que c'est à tort que le premier juge n'a pas fait droit à sa demande d'annulation de l'arrêté du 13 juillet 2015.
11. Il résulte de ce tout qui précède que, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, M. A...est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation des arrêtés contestés.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
12. Eu égard à ses motifs, le présent arrêt n'implique pas qu'il soit enjoint au préfet du Tarn de délivrer un titre de séjour au requérant. Les conclusions à ce titre ne peuvent, par suite, qu'être rejetées. Toutefois, l'annulation prononcée par le présent arrêt implique nécessairement de procéder au réexamen de la situation de M.A.... Il y a lieu d'enjoindre au préfet d'y procéder dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte.
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
13. M. A...a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle. Par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 000 euros à Me Francos, avocat de M.A..., sous réserve que Me Francos renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle.
DECIDE
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de M. A...tendant à ce que lui soit accordé le bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire.
Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Toulouse, l'arrêté du préfet du Tarn du 10 juillet 2015 portant refus de séjour et obligeant M. A...a quitter le territoire français sans délai avec fixation du pays de destination ainsi que l'arrêté du préfet du 13 juillet 2015 plaçant M. A...en rétention sont annulés.
Article 3 : Il est enjoint au préfet du Tarn de procéder au réexamen de la situation de M. A...dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 4 : L'Etat versera la somme de 1 000 euros à Me Francos, en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve qu'il renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État à l'aide juridictionnelle.
Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
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N° 15BX02697