2°) d'annuler l'arrêté susmentionné du préfet de la Gironde du 23 mai 2017 ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Gironde d'autoriser le bénéfice du regroupement familial au profit de son épouse et de ses deux enfants mineurs ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros à verser à son conseil en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- il justifie de ressources financières suffisantes au regard de l'article L. 411-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; le préfet n'a pas mentionné dans l'arrêté la majoration d'un dixième par rapport au SMIC appliquée par les premiers juges ;
- l'arrêté méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- il méconnaît également les articles 3-1 et 16 de la convention internationale des droits de l'enfant.
Par un mémoire en défense, enregistré le 4 avril 2019, le préfet de la Gironde conclut au rejet de la requête.
Il soutient qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.
Par une ordonnance du 27 février 2019, la clôture d'instruction a été fixée, au 24 avril 2019 à 12h00.
M. E... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 20 mars 2019.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale des droits de l'enfant ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Le rapport de Mme D... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. E..., ressortissant angolais né le 25 juillet 1974 à Cabinda (Angola), est entré en France en 2004 pour solliciter l'asile dont il a été débouté. Il s'est vu délivrer un titre de séjour en qualité d'étranger malade à partir du 7 décembre 2006 et bénéficie d'une carte de résident depuis avril 2016. Le 22 juillet 2016, il a demandé au préfet de la Gironde l'admission au bénéfice du regroupement familial de son épouse avec laquelle il s'est marié en septembre 2015 et de deux de ses trois enfants, Justinio Pedro né en 1999 et Rosa, née en 2016, de nationalité angolaise. Son troisième enfant né en 1997 est majeur. Par un arrêté du 23 mai 2017, le préfet de la Gironde a rejeté sa demande. M. E... relève appel du jugement du 11 décembre 2018 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur la légalité de l'arrêté du 23 mai 2017 :
2. Aux termes de l'article L. 411-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Le ressortissant étranger qui séjourne régulièrement en France depuis au moins dix-huit mois, sous couvert d'un des titres d'une durée de validité d'au moins un an prévus par le présent code ou par des conventions internationales, peut demander à bénéficier de son droit à être rejoint, au titre du regroupement familial, par son conjoint, si ce dernier est âgé d'au moins dix-huit ans, et les enfants du couple mineurs de dix-huit ans. ". L'article L. 411-5 du même code dispose que : " Le regroupement familial ne peut être refusé que pour l'un des motifs suivants : 1° Le demandeur ne justifie pas de ressources stables et suffisantes pour subvenir aux besoins de sa famille. Sont prises en compte toutes les ressources du demandeur et de son conjoint indépendamment des prestations familiales, de l'allocation équivalent retraite et des allocations prévues à l'article L. 262-1 du code de l'action sociale et des familles, à l'article L. 815-1 du code de la sécurité sociale et aux articles L. 5423-1, L. 5423-2 et L. 5423-8 du code du travail. Les ressources doivent atteindre un montant qui tient compte de la taille de la famille du demandeur. Le décret en Conseil d'Etat prévu à l'article L. 441-1 fixe ce montant qui doit être au moins égal au salaire minimum de croissance mensuel et au plus égal à ce salaire majoré d'un cinquième (...) ". Aux termes de l'article R. 411-4 du même code : " Pour l'application du 1° de l'article L. 411-5, les ressources du demandeur et de son conjoint qui alimenteront de façon stable le budget de la famille sont appréciées sur une période de douze mois par référence à la moyenne mensuelle du salaire minimum de croissance au cours de cette période. Ces ressources sont considérées comme suffisantes lorsqu'elles atteignent un montant équivalent à : - cette moyenne pour une famille de deux ou trois personnes ; - cette moyenne majorée d'un dixième pour une famille de quatre ou cinq personnes ; - cette moyenne majorée d'un cinquième pour une famille de six personnes ou plus. ". Le caractère stable et suffisant des ressources de l'intéressé s'apprécie à la date de la décision attaquée.
3. Pour démontrer le caractère stable et suffisant de ses ressources, M. E... soutient qu'il est titulaire d'un contrat à durée indéterminée et qu'il a perçu un salaire brut de 1 457,55 euros de juillet 2015 à janvier 2016 puis de 1 466,65 euros à partir de février 2016 soit 17 545,02 euros pour la période de douze mois de référence, ce montant étant très proche du salaire minimum interprofessionnel de croissance pour la même période. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que les ressources dont fait état l'appelant se situent, pour la période de référence, à un niveau mensuel moyen certes proche du salaire minimum interprofessionnel de croissance, mais inférieur au montant fixé à l'article R. 411-4 précité du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, correspondant à ce salaire minimum qui doit être majoré de 10 % dès lors que sa famille compte quatre personnes, soit 19 299,32 euros annuels pour la même période. Dans ces conditions, le préfet, nonobstant la circonstance qu'il a omis de mentionner la majoration d'un dixième prévue par les dispositions précitées dans la motivation de l'arrêté contesté, n'a pas fait une inexacte application des dispositions précitées de l'article L. 411-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en considérant que l'intéressé ne justifiait pas de ressources suffisantes.
4. Aux termes des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1.- Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2.- Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".
5. L'appelant fait valoir qu'il vit seul et isolé de sa famille en France et qu'il justifie de l'entretien et de l'éducation de ses enfants résidants en Angola. Il ressort des pièces du dossier que M. E... a épousé en Angola Mme B... le 24 septembre 2015, et que trois enfants sont nés de sa relation avec cette personne en 1997, 1999 et 2016. Toutefois, le requérant n'établit ni l'existence d'une vie commune antérieure à son mariage récent à la date de la décision contestée avec Mme B..., qui réside en Angola, ni de la stabilité de leur relation alors qu'il a reconnu en 2006 un enfant né en France d'une autre relation le 19 septembre 2005. La production par l'intéressé de justificatifs de trois transferts d'argent effectués en 2005, deux transferts d'argent effectués en 2012 et sept transferts d'argent effectués entre 2013 et 2014 au profit de son épouse et de ses enfants résidant en Angola ne permet pas de considérer qu'il a noué des liens affectifs avec ses enfants dont il vit séparé depuis 2004. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.
6. Aux termes du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale. ". Aux termes de l'article 16 de la même convention : " 1. Nul enfant ne fera l'objet d'immixtions arbitraires ou illégales dans sa vie privée, sa famille, son domicile ou sa correspondance, ni d'atteintes illégales à son honneur et à sa réputation. 2. L'enfant a droit à la protection de la loi contre de telles immixtions ou de telles atteintes " Il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant.
7. Il ressort des pièces du dossier que l'appelant a quitté l'Angola en 2004 pour venir vivre en France, laissant ses deux enfants, alors âgés de 5 et 7 ans dans son pays avec leur mère. Il ne démontre pas avoir maintenu des liens avec ses enfants qui ont toujours vécu en Angola. De plus, ainsi qu'il a été dit au point 3, il ne justifie pas disposer de ressources suffisantes pour la prise en charge de ses deux enfants. Par suite, l'appelant n'est pas fondé à soutenir que la décision contestée méconnaît les stipulations précitées des articles 3-1 et 16 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.
8. Il résulte de tout ce qui précède que M. E... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 23 mai 2017. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent être rejetées.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. E... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... E..., au ministre de l'intérieur et à Me C.... Copie en sera adressée au préfet de la Gironde.
Délibéré après l'audience du 3 septembre 2019 à laquelle siégeaient :
Mme Elisabeth Jayat, président,
M. Frédéric Faïck, président-assesseur,
Mme Caroline D..., premier conseiller,
Lu en audience publique, le 1er octobre 2019.
Le rapporteur,
Caroline D...
Le président,
Elisabeth JAYAT
Le greffier,
Virginie MARTY
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
2
N° 19BX00467