Par une requête et un mémoire, enregistrés les 16 mars 2020 et 25 novembre 2020, l'association Baignes-Sainte-Radegonde sans nuisances éoliennes, représentée par Me B..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Poitiers du 16 janvier 2020 ;
2°) d'annuler l'arrêté préfectoral du 16 avril 2018 ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- elle justifie d'un intérêt à agir au regard de son objet et de son champ d'action géographique ;
- le tribunal a omis de se prononcer sur l'insuffisance de l'étude d'impact au regard de la légalité externe et n'a jugé cette question que sous l'angle de la légalité interne ;
- l'arrêté préfectoral du 16 avril 2016 portant autorisation unique est insuffisamment motivé ;
- l'enquête publique est entachée d'irrégularité en raison du manque d'impartialité du commissaire enquêteur dès lors qu'il a accueilli chez lui des responsables de la société porteuse du projet et minimisé volontairement le nombre d'avis défavorables au projet ;
- l'étude d'impact est lacunaire sur le volet acoustique dès lors qu'une seule campagne de vent a été menée du 15 avril au 12 juin, correspondant à la période végétative alors qu'elle aurait dû également comporter une campagne de vent en hiver ; par ailleurs, l'effet cumulé avec les autres projets ICPE en cours et notamment le projet porté par la société EDF-EN sur la commune de Baignes-Sainte-Radegonde n'a pas été analysé alors que plusieurs hameaux seront situés à équidistance des parcs ; en outre, l'étude acoustique n'a pas pris en compte le passage de la RN10 en 2x2 voies qui aura pour effet d'augmenter les niveaux de bruits de circulation routière de 1,7 dbA ;
- l'étude d'impact est également lacunaire sur le traitement de la biodiversité et notamment l'avifaune et les chiroptères ; l'étude des impacts cumulés est incomplète ; il n'est pas démontré que la présence de deux parcs à moins de 3 kilomètres l'un de l'autre n'aura pas d'effet sur l'avifaune, notamment l'effet barrière pouvant potentiellement être engendré par ces deux projets n'est pas étudié ; en outre, ainsi que l'a relevé l'autorité environnementale, la problématique de l'aménagement foncier agricole, pourtant largement susceptible d'engendrer des effets cumulés, n'a pas été abordée ;
- le projet méconnaît l'article R. 122-5 du code de l'environnement dès lors que le dossier de demande d'autorisation unique ne précisait pas les impacts du raccordement électrique sur la biodiversité ;
- l'autorisation d'exploiter n'est pas conforme aux articles L. 511-1 et L. 181-3 du code de l'environnement ; le projet aura un impact négatif sur plusieurs espèces de chiroptères et d'oiseaux et plus particulièrement sur le Circaète Jean le Blanc ; le projet de la société se trouve en pleine forêt, à proximité immédiate de plusieurs zones Natura 2000 abritant plusieurs espèces de chiroptères et plusieurs ZNIEFF de type I et II, ainsi que de plusieurs zones humides et certains habitats inclus dans l'aire d'étude rapprochée sont reconnus en tant que composante de la Trame Verte et Bleue locale ; l'arrêté ne prévoit aucune mesure de réduction des impacts sur l'avifaune en se bornant à prévoir un suivi ornithologique qui constitue une obligation règlementaire ; les éoliennes qui seront implantées à moins de 100 mètres de haies et de boisements, contrairement aux prescriptions d'Eurobats, porteront une atteinte démesurée aux chiroptères ;
- un dossier de demande de dérogation aux interdictions mentionnées aux 1°, 2° et 3° de l'article L. 411-1 du code de l'environnement aurait dû être déposé au regard de la perte de site de reproduction pour le Circaète Jean Le Blanc, le Busard Saint Martin et l'Engoulevent d'Europe et des risques de collisions qui ne peuvent non plus être exclus ;
- le projet portera atteinte à la commodité du voisinage du fait de sa visibilité depuis plusieurs bourgs et hameaux ;
- le projet présente un risque d'atteinte à la sécurité publique compte tenu du risque de projection de glace depuis les pales des machines et du risque incendie en raison de l'implantation du projet dans le massif forestier de la Double où les incendies sont fréquents ; il ne ressort pas de l'étude de danger que le risque incendie aurait été correctement appréhendé et que les moyens mis en oeuvre pour une intervention au sol uniquement seraient suffisants.
Par deux mémoires en défense, enregistrés les 27 mai 2020 et 10 décembre 2020, la société Res, venant aux droits de la société Eole-Res et la société CEPE Terrier de la Pointe, représentées par Me C..., concluent au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 5 000 euros soit mise à la charge de l'association Baignes-Sainte-Ragdegonde sans nuisances éoliennes sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elles font valoir que :
- à titre principal, la requête est irrecevable faute pour l'association requérante de justifier d'un intérêt à agir ;
- subsidiairement, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de l'arrêté est inopérant et, au surplus, infondé, et les autres moyens soulevés par l'association Baignes-Sainte-Radegonde sans nuisances éoliennes ne sont pas fondés.
Par un mémoire en défense, enregistré le 26 novembre 2020, le ministre de la transition écologique conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que :
- le moyen tiré de l'insuffisante motivation de l'arrêté est inopérant et de surcroit infondé ;
- les autres moyens soulevés par l'association appelante ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'environnement ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- l'arrêté du 26 août 2011 relatif aux installations de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent au sein d'une installation soumise à autorisation au titre de la rubrique 2980 de la législation des installations classées pour la protection de l'environnement ;
- le code de justice administrative et le décret n°2020-1406 du 18 novembre 2020.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme D... F...,
- les conclusions de Mme Sylvande Perdu, rapporteur public,
- et les observations de Me B..., représentant l'association Baignes-Sainte-Radegonde sans nuisances éoliennes, de M. A... en sa qualité de président de l'association Baignes-Sainte-Radegonde sans nuisances éoliennes et de Me E..., représentant la société Res et la société CEPE Terrier de la Pointe.
Considérant ce qui suit :
1. Le 30 octobre 2015, la société Eole Res, devenue société Res, a déposé en préfecture de la Charente une demande d'autorisation d'exploiter un parc éolien dénommé " Terrier de la Pointe " composé de six aérogénérateurs d'une hauteur en bout de pale de 180 mètres et de deux postes de livraison sur le territoire des communes de Chantillac et de Baignes-Sainte-Radegonde. Par un arrêté du 16 avril 2018, le préfet de la Charente lui a délivré cette autorisation. L'association Baignes-Sainte-Radegonde sans nuisances éoliennes relève appel du jugement du 16 janvier 2020, par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Il résulte de l'instruction que la requête et le mémoire de l'association appelante enregistrés les 16 mars 2020 et 25 novembre 2020, ne contenaient pas de moyen de légalité externe tiré de l'insuffisance de l'étude d'impact, mais seulement des moyens de légalité interne tirés de l'atteinte aux intérêts décrits dans cette étude. Le moyen tiré de ce que le jugement attaqué serait entaché d'irrégularité faute d'avoir examiné l'insuffisance de l'étude d'impact au regard de la légalité externe doit, par suite, être écarté.
Sur la légalité de l'arrêté préfectoral contesté :
En ce qui concerne l'insuffisance de la motivation de l'autorisation d'exploiter :
3. Aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. ".
4. Pour l'application de ces dispositions, l'appréciation du caractère défavorable d'une décision doit se faire en considération des seules personnes physiques ou morales qui sont directement concernées par elle, et non au regard de celles, le cas échant distinctes, qui sont à l'origine de la demande adressée à l'administration. Or, la décision par laquelle le préfet a autorisé la société pétitionnaire à exploiter un parc éolien ne peut être regardée comme une décision défavorable concernant directement l'association requérante. L'association Baignes-Sainte-Radegonde sans nuisances éoliennes ne peut dès lors utilement se prévaloir de ce que la décision attaquée aurait dû être motivée en application des dispositions précitées de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration.
En ce qui concerne le défaut d'impartialité du commissaire enquêteur :
5. A l'appui du moyen tiré de ce que l'enquête publique serait entachée d'irrégularité en raison de l'impartialité du commissaire enquêteur, l'association appelante ne se prévaut devant la cour d'aucun élément de droit ou de fait nouveau par rapport à son argumentation devant les premiers juges. Il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs pertinents exposés aux points 3 à 6 du jugement attaqué.
En ce qui concerne l'insuffisance de l'étude d'impact :
6. D'une part, l'article R. 122-5 du code de l'environnement définit le contenu de l'étude d'impact, qui doit être proportionné à la sensibilité environnementale de la zone susceptible d'être affectée par le projet, à l'importance et à la nature des travaux, ouvrages et aménagements projetés et à leurs incidences prévisibles sur l'environnement ou la santé humaine. D'autre part, les inexactitudes, omissions ou insuffisances d'une étude d'impact ne sont susceptibles de vicier la procédure et donc d'entraîner l'illégalité de la décision prise au vu de cette étude que si elles ont pu avoir pour effet de nuire à l'information complète de la population ou si elles ont été de nature à exercer une influence sur la décision de l'autorité administrative.
S'agissant de l'étude acoustique :
7. Il résulte de l'instruction que l'étude acoustique a été réalisée sur la base d'une compagne de mesures de bruit de l'état initial menée du 15 avril au 12 juin par référence à la norme NFS 31-114 selon la méthodologie explicitée en page 8 à 10 de l'étude. Les mesures effectuées en dix points au niveau d'habitations localisées dans un rayon de 2 kilomètres autour du projet, ont permis d'établir que les émergences admissibles seront respectées en période diurne comme en période nocturne. En se bornant à soutenir qu'une étude acoustique aurait dû être effectuée en hiver, l'association n'apporte pas d'éléments permettant d'estimer que les mesures effectuées seraient insuffisantes ni que la réalisation d'une campagne de mesures en hiver, période de moindre couverture végétale, aurait abouti à des résultats différents alors que la société pétitionnaire a fait le choix d'une modélisation conservatrice conduisant à des niveaux sonores émis par le parc plus élevé qu'avec d'autres paramètres. Elle n'apporte pas davantage d'éléments permettant de retenir l'insuffisance de l'étude au regard de l'effet cumulé avec le projet de parc éolien d'EDF-EN qui se situe au-delà des zones à émergence réglementée concernées par le projet en litige. Si l'association appelante soutient que l'étude acoustique n'a pas pris en compte le passage de la RN10 en 2x2 voies qui aura pour effet d'augmenter les niveaux de bruits de circulation routière de 1,7 dbA, cette seule circonstance n'est pas de nature à démontrer un état initial de bruit erroné ni à corroborer que les mesures effectuées n'auraient pas permis d'assurer une information suffisante du public et de l'administration alors en outre que l'article 9 de l'arrêté litigieux impose la réalisation d'une mesure de la situation acoustique dans un délai de six mois à compter de la mise en service du parc éolien pour vérifier la conformité des mesures effectuées. Ainsi, il ne résulte pas de l'instruction que l'étude d'impact aurait, en l'espèce, minimisé l'impact des nuisances sonores.
S'agissant du raccordement électrique :
8. Contrairement à ce que soutient l'association requérante, les dispositions de l'article R. 122-5 du code de l'environnement n'imposent pas au pétitionnaire de préciser les modalités de raccordement des installations projetées au réseau électrique qui incombe aux gestionnaires de transport de distribution et de transport d'électricité de ces réseaux et qui relève d'une autorisation distincte. Cette obligation ne résulte pas davantage des dispositions de l'article L. 122-1 du même code. Dès lors, l'association appelante ne peut utilement soutenir que l'étude d'impact, faute de comporter des indications relatives aux modalités de raccordement envisagées, serait entachée d'insuffisances.
S'agissant des impacts du projet sur les chiroptères et l'avifaune :
9. S'agissant de l'impact du projet sur l'avifaune, l'étude d'impact repose sur un pré-diagnostic des espèces potentiellement présentes sur la zone, établi sur la base de données mises à disposition notamment par la direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement et par l'inventaire national du patrimoine naturel, suivi des observations réalisées après quatre passages sur site en période nuptiale entre mai et juillet 2013, sept passages en période de migrations postnuptiales entre septembre et novembre 2013, deux journées de prospection en période hivernale en janvier et février 2014 et six passages en période de migrations prénuptiales de mars à avril 2014. Cette étude comporte outre l'inventaire complet des oiseaux, des développements détaillés sur les intérêts faunistiques en jeu et recense les effets du projet sur les différentes espèces d'oiseaux nicheuses et migratoires en fonction de l'implantation des différentes éoliennes. Il résulte de l'instruction qu'à la suite de la demande de l'autorité environnementale de relativiser les données statistiques de la mortalité de l'avifaune, notamment des rapaces, en prenant en compte la rareté des espèces, le pétitionnaire a fait réaliser par un bureau d'étude indépendant une étude complémentaire sur le Circaète Jean Le Blanc dont la présence du nid sur le site a été établie, laquelle étude a permis de confirmer, hors hypothèse de l'abandon de l'aire, l'impact résiduel faible en phase de travaux et d'exploitation après la stricte application des mesures d'évitement et de réduction spécifiques.
10. S'agissant de l'impact du projet sur les chiroptères, les écoutes continues réalisées entre le 5 avril 2013 et le 4 avril 2014 ont permis de recenser 22 espèces de chauves-souris avec la forte prédominance de la Pipistrelle commune et de la Sérotine commune. Parmi les espèces recensées, la Barbastelle d'Europe et le Minioptère de Schreibers représentent les niveaux d'enjeux les plus forts. L'étude d'impact comporte également des développements consacrés aux mesures d'évitement et de réduction des risques tenant à l'absence d'éclairage automatique des portes d'accès aux éoliennes, au maintien d'une végétation rase au niveau des plateformes et à la mise en place d'un système de bridage des éoliennes entre juin et mi-octobre, pendant 3 heures après le coucher du soleil, par vent inférieur à 5,5 m/s et par température supérieure à 10 °C, lesdites mesures pouvant être adaptées selon les résultats du suivi post-implantation. L'autorité environnementale a relevé que les inventaires réalisés ont couvert un cycle biologique complet et permettent de tirer des conclusions fiables.
11. Contrairement à ce que soutient l'association appelante, l'étude d'impact procède, aux pages 231 et 232, à l'analyse des effets cumulés du projet et des autres parcs éoliens connus dans le secteur dont le projet d'EDF-EN sur le site de Baignes-Sainte-Radegonde. Les impacts cumulés avec les autres projets ont également été pris en compte dans l'analyse des photomontages aux pages 96 et suivants de l'étude paysagère et patrimoniale (volume 6). L'association appelante n'apporte aucun élément de nature à remettre en cause l'absence d'effet barrière cumulatif à l'égard des oiseaux migrateurs au regard des parcs éoliens existants mentionnés au point 2.2.1 et 2.4 de l'étude. Les impacts des différents projets éoliens sur le Circaète Jean Le Blanc ont fait l'objet d'une analyse détaillée dans l'étude complémentaire consacrée à cette espèce. Enfin, si l'autorité environnementale a recommandé d'apporter des compléments quant aux interactions du projet avec le projet d'aménagement foncier agricole et forestier (AFAF), il résulte de l'instruction que le projet d'AFAF ne constituait pas, pour l'étude d'impact sur l'environnement du projet " Terrier de la Pointe ", un projet connu au sens des dispositions du 4° l'article R. 122-5 du code de l'environnement alors applicable dès lors qu'il résulte du mémoire en réponse de la société pétitionnaire à l'avis de l'autorité environnementale, sans que cela ne soit contesté, que l'avis de l'autorité environnementale sur le projet d'AFAF, en date du 2 décembre 2015, est postérieur à l'étude d'impact de la société pétitionnaire déposée le 30 octobre 2015.
12. Il résulte de tout ce qui précède que le moyen tiré de l'insuffisance de l'étude d'impact doit être écarté en toutes ses branches.
En ce qui concerne les atteintes mentionnées à l'article L. 511-1 du code de l'environnement :
13. Aux termes de l'article L. 181-3 du code de l'environnement : " I. - L'autorisation environnementale ne peut être accordée que si les mesures qu'elle comporte assurent la prévention des dangers ou inconvénients pour les intérêts mentionnés aux articles L. 211-1 et L. 511-1 (...) ". Aux termes de l'article L. 511-1 du même code : " Sont soumis aux dispositions du présent titre les usines, ateliers, dépôts, chantiers et, d'une manière générale, les installations exploitées ou détenues par toute personne physique ou morale, publique ou privée, qui peuvent présenter des dangers ou des inconvénients soit pour la commodité du voisinage, soit pour la santé, la sécurité, la salubrité publiques, soit pour l'agriculture, soit pour la protection de la nature, de l'environnement et des paysages, soit pour l'utilisation rationnelle de l'énergie, soit pour la conservation des sites et des monuments ainsi que des éléments du patrimoine archéologique. ". Aux termes de l'article L. 512-1 dudit code : " Sont soumises à autorisation préfectorale les installations qui présentent de graves dangers ou inconvénients pour les intérêts visés à l'article L. 511-1. L'autorisation ne peut être accordée que si ces dangers ou inconvénients peuvent être prévenus par des mesures que spécifie l'arrêté préfectoral. ".
S'agissant de l'impact sur l'avifaune :
14. Si l'étude d'impact identifie plusieurs espèces d'intérêt patrimonial et mentionne que les principaux impacts pressentis du projet avant mesures consistent en un dérangement fort accompagné de risques d'abandon de nichées à l'encontre du Busard Saint Martin, de l'Engoulevent d'Europe, de la Fauvette Pitchou, d'un risque assez fort sur le Circaète Jean-le-Blanc du fait du risque d'abandon du site de nidification situé à 500 de l'éolienne E5, le risque de dérangement en phase de travaux pouvant en outre entrainer un échec de la reproduction, toutefois, elle conclut que les sites de reproduction certains ou probables des espèces d'oiseaux marquées par un niveau de patrimonialité fort seront préservés dans leur quasi-totalité, que les effets permanents attendus du fonctionnement du parc éolien de Terrier de la Pointe à l'encontre des espèces les plus remarquables observées sur le site comme l'Alouette lulu, le Bouvreuil pivoine, l'Engoulevent d'Europe, la Fauvette pitchou, le Gobemouche gris, la Linotte mélodieuse, la Mésange noire, le Milan royal, le Pic noir, la Pie-grièche écorcheur, le Pipit farlouse et le Pouillot fitis seront non significatifs et que la réalisation du projet n'induira pas à long terme de risque de mortalité, de perturbations ou de destruction d'habitat de nature à remettre en cause le bon accomplissement des cycles biologiques et le maintien en bon état de conservation des populations d'oiseaux protégées. Elle précise qu'en cas d'abandon du nid par le Circaète Jean-le-Blanc, un report du couple nicheur vers une pinède mature au sein du territoire actuel est vraisemblable selon les cas d'exemples de tels reports suite à la destruction de l'aire lors de coupes forestières alors en outre que les éoliennes seront implantées dans un secteur peu favorable aux activités de chasse de cette espèce mais également du Busard cendré et du Busard Saint-Martin. Il résulte de l'étude complémentaire sur le Circaète Jean-le-Blanc que cette espèce est peu sensible au risque de collision et que la mise en oeuvre du projet aura pour principale répercussion le déplacement plausible du couple nicheur bien que le risque de perte d'utilisation de l'habitat de nidification soit jugé lui-même faible au regard du domaine vital du couple. Contrairement à ce que soutient l'association appelante, les mesures d'évitement et de réduction proposées ne se limitent pas à un suivi ornithologique mais comportent également une adaptation du calendrier des travaux à la période de reproduction, outre des mesures spécifiques pour le Circaète Jean-le-Blanc telles que l'encadrement scientifique du chantier par un ornithologue, la recherche d'une nouvelle aire du couple en cas d'abandon du nid et le conventionnement de parcelles de pinèdes matures à des fins de gestion dirigées vers des îlots de vieillissement. Par ailleurs, il résulte de l'étude d'impact dont les éléments ne sont pas utilement contestés, que le projet n'aura pas d'incidence particulière sur le site Natura 2000 et les autres zones naturelles écologiques faunistiques et floristiques situées à proximité de l'aire d'étude.
S'agissant de l'impact sur les chiroptères :
15. Afin de limiter les risques de collision, le pétitionnaire a prévu d'implanter des modèles d'éoliennes d'une hauteur canopée-bas de pale d'au moins 50 mètres, à l'exception de l'éolienne E6 qui est à 47,7 mètres, l'activité des chiroptères étant jugée très faible à hauteur élevée. La société Res a également prévu ainsi qu'il a été dit au point 10, un plan de bridage permettant de suspendre le fonctionnement des éoliennes durant les périodes où l'activité des chiroptères est la plus intense, repris à l'article 6 de l'arrêté en litige du 16 avril 2018, ainsi qu'un suivi comportemental annuel dont les résultats devront être transmis à l'inspection des installations classées. Il résulte des éléments non sérieusement contestés de l'étude d'impact qu'après la mise en place des mesures de réduction et d'accompagnement proposées, les effets sur les chiroptères seront non significatifs. Il ne résulte pas de l'instruction que les mesures contenues dans l'arrêté fixant les prescriptions applicables à l'autorisation d'exploiter seraient insuffisantes au point que le préfet aurait dû assortir le permis de construire en litige de prescriptions complémentaires, notamment en imposant un déplacement des éoliennes pour tenir compte de la recommandation Eurobats, dépourvue de valeur réglementaire, selon laquelle les appareils devraient être implantés à 200 mètres au moins des lisières boisées.
S'agissant de l'atteinte portée à la commodité du voisinage :
16. La circonstance que le projet serait visible depuis les abords des hameaux les plus proches n'est pas de nature à caractériser par elle-même une atteinte au paysage ou à la commodité du voisinage au sens de l'article L. 511-1 du code de l'environnement.
S'agissant de l'atteinte à la sécurité publique :
17. S'il résulte de l'étude de danger que l'aire d'étude rapprochée du projet se trouve dans un massif boisé au risque incendie élevé, ce qui a conduit le pétitionnaire à soumettre pour avis son projet au service départemental d'incendie et de secours (SDIS), il résulte toutefois de cette étude que le risque de sur-accident lié à l'éolienne est considéré comme négligeable. En outre, pour prévenir et limiter le risque d'incendie, la société Res s'est engagée à suivre les recommandations du plan départemental de protection des forêts contre les incendies en procédant au débroussaillement de la totalité de l'aire d'étude rapprochée et à l'entretien des chemins. Ces mesures seront complétées par l'artificialisation autour des éoliennes, l'élargissement des pistes existantes, la création d'un nouveau réseau de chemin, la mise en oeuvre d'un contrôle périodique des installations et l'équipement des éoliennes d'un détecteur d'incendie permettant une information rapide des services d'incendie. Il ne résulte pas de l'instruction que les très nombreux chemins de défense des forêts contre les incendies seraient insuffisants pour permettre la circulation des engins de lutte contre l'incendie de sorte qu'une intervention par voie aérienne serait nécessaire. Il ne résulte pas de l'instruction que le projet porterait en lui-même un risque particulier de projection de glace depuis les pales des machines, l'analyse menée dans le cadre de l'étude de dangers ayant conclu à un risque acceptable pour les personnes, la mise en place d'un système d'arrêt en cas de détection de glace et de procédure de redémarrage réduisant d'autant plus le risque. Par ailleurs, si l'association appelante soutient que la proximité des éoliennes de la RN 10 serait de nature à créer des risques pour la sécurité publique en cas de projection de pales sur les voies, cependant, l'étude de danger qui mentionne que l'éolienne la plus proche E6 est située à 265 mètres de la RN10, a analysé les risques résultant des différents scenarii d'accidents dont la chute d'éléments, la projection de pales ou de fragment de pales et l'effondrement des éoliennes et a conclu à des risques " très faibles " à " faibles ", niveaux de risques considérés comme " acceptables " au titre de la synthèse de l'acceptabilité des risques. L'association appelante n'apporte aucun élément de nature à remettre en cause les conclusions de l'étude et ne démontre pas l'existence d'un risque particulier pour les usagers de cette voie de circulation, susceptible de faire obstacle au projet.
18. Il résulte de ce qui précède que l'association requérante n'est pas fondée à soutenir que l'arrêté du 16 avril 2018 en litige a méconnu les dispositions précitées des articles L. 511-1 et L. 181-3 du code de l'environnement.
En ce qui concerne l'absence de demande dérogatoire à la destruction d'espèces protégées ou de leurs habitats :
19. Aux termes de l'article L. 411-1 du code de l'environnement : " I. - Lorsqu'un intérêt scientifique particulier, le rôle essentiel dans l'écosystème ou les nécessités de la préservation du patrimoine naturel justifient la conservation de sites d'intérêt géologique, d'habitats naturels, d'espèces animales non domestiques ou végétales non cultivées et de leurs habitats, sont interdits : / 1° La destruction ou l'enlèvement des oeufs ou des nids, la mutilation, la destruction, la capture ou l'enlèvement, la perturbation intentionnelle, la naturalisation d'animaux de ces espèces ou, qu'ils soient vivants ou morts, leur transport, leur colportage, leur utilisation, leur détention, leur mise en vente, leur vente ou leur achat ; (...) ". Le 4° du I de l'article L. 411-2 du même code permet à l'autorité administrative de délivrer des dérogations à ces interdictions dès lors que sont remplies trois conditions distinctes et cumulatives tenant à l'absence de solution alternative satisfaisante, à la condition de ne pas nuire " au maintien, dans un état de conservation favorable, des populations des espèces concernées dans leur aire de répartition naturelle " et, enfin, à la justification de la dérogation par l'un des cinq motifs qu'il énumère.
20. L'association appelante soutient qu'une dérogation aux interdictions mentionnées aux 1°, 2° et 3° de l'article L. 411-1 du code de l'environnement aurait dû être déposée au regard de la perte de site de reproduction pour le Circaète Jean Le Blanc, le Busard Saint Martin et l'Engoulevent d'Europe et des risques de collisions qui ne peuvent non plus être exclus. Toutefois, eu égard à ce qui a été dit au point 14, aucun autre élément de l'instruction n'ayant fait apparaître la réalité d'un risque de destruction d'habitats ou d'individus d'espèces protégées, le pétitionnaire n'était pas tenu de joindre à son dossier une demande de dérogation aux interdictions prévues à l'article L. 411-1 du code de l'environnement.
21. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir soulevée en défense, que l'association requérante n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 16 avril 2018.
Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative à l'ensemble des requêtes :
22. Ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme que l'association Baignes-Sainte-Radegonde sans nuisances éoliennes demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'association requérante la somme demandée par la société Res et la société CEPE Terrier de la Pointe au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DECIDE :
Article 1er : La requête de l'association Baignes-Sainte-Radegonde sans nuisances éoliennes est rejetée.
Article 2 : Les conclusions des parties présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à l'association Baignes-Sainte-Radegonde sans nuisances éoliennes, au ministre de la transition écologique, à la société Res et à la société CEPE Terrier de la Pointe.
Une copie en sera adressée au préfet de la Charente.
Délibéré après l'audience du 26 janvier 2021 à laquelle siégeaient :
Mme Elisabeth Jayat, président,
M. Frédéric Faïck, président-assesseur,
Mme D... F... premier conseiller,
Rendu public par mise à disposition au greffe le 23 février 2021.
Le président,
Elisabeth Jayat La République mande et ordonne au ministre de la transition écologique en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 20BX00979