Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 21 juillet 2020, M. A..., représenté par Me D..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement n° 1906495 du tribunal administratif de Toulouse ;
2°) d'annuler l'arrêté préfectoral en litige ;
3°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter du délai d'un mois suivant la notification de l'arrêt à intervenir ; sinon, d'enjoindre au préfet de réexaminer sa demande ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros au titre des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- l'arrêté en litige est insuffisamment motivé, notamment parce qu'il n'insiste pas suffisamment sur les liens privés et familiaux qu'il a tissés en France ;
- le préfet ne lui a pas communiqué les avis de l'Office français de l'immigration et de l'intégration rendus sur sa demande de titre de séjour ;
- son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut aura pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité comme le montrent les certificats médicaux qu'il produit ; il ne pourra accéder à un traitement approprié dans son pays d'origine en raison des ruptures de stocks de médicaments qui s'y produisent ; ainsi, le préfet a méconnu les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le préfet a porté atteinte à l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et à l'article L. 313-11-7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; il vit en France depuis près de 10 ans ; il y a suivi des études qui lui ont permis d'obtenir des diplômes ; il a travaillé pour diverses sociétés l'essentiel du temps qu'il a passé en France.
Par un mémoire en défense, enregistré le 21 octobre 2020, le préfet de la Haute-Garonne conclut au rejet de la requête.
Il soutient que tous les moyens de la requête doivent être écartés comme infondés.
M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 17 septembre 2020.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative et le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. E... C... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. A... est un ressortissant mauritanien né le 12 février 1980 qui est entré sur le territoire français en septembre 2009 muni d'un visa de long séjour portant la mention " étudiant ". Il a bénéficié de plusieurs renouvellements de son titre de séjour jusqu'au 30 septembre 2016, après quoi le préfet a pris à son encontre un arrêté du 23 février 2017 rejetant sa dernière demande de renouvellement et l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours. M. A... s'est maintenu en France et a sollicité, le 6 septembre 2018, un titre de séjour pour raison de santé en application du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 22 octobre 2019, le préfet de la Haute-Garonne a rejeté cette demande, assorti son refus d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, fixé le pays de renvoi et interdit à M. A... de retour sur le territoire français pendant une durée de six mois. M. A... relève appel du jugement rendu le 10 juin 2020 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté préfectoral du 22 octobre 2019.
2. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 1° A l'étranger (...) si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. (...) La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (...) ". Aux termes de l'article R. 313-22 du même code : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. L'avis est émis (...) au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé ". Aux termes de l'article R. 313-23 de ce code : " Le rapport médical visé à l'article R. 313-22 est établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration à partir d'un certificat médical établi par le médecin qui le suit habituellement (...) (...) / Le collège à compétence nationale, composé de trois médecins, émet un avis (...) ".
3. En premier lieu, aucune disposition législative ou réglementaire du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile n'impose au préfet de communiquer à l'étranger l'avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII). Au demeurant, M. A... a reçu communication en première instance des deux avis, produits par le préfet avec ses écritures, que l'office a rendus sur sa demande.
4. En deuxième lieu, le préfet a rappelé, dans les motifs de sa décision, que M. A... est entré en France en 2009 à l'âge de 29 ans, qu'il y a suivi des études pendant sept ans puis s'y est maintenu irrégulièrement depuis que sa dernière demande de renouvellement de son titre de séjour a été rejetée en 2017. Le préfet a souligné que M. A..., qui est célibataire et sans enfant, n'est pas dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine où se trouvent ses parents et où il a vécu la majeure partie de sa vie. Ce faisant, le préfet, qui n'avait pas à retracer en détail tous les éléments caractérisant la situation personnelle de M. A..., a suffisamment motivé son arrêté.
5. En troisième lieu, il résulte de ce qui vient d'être dit que le moyen tiré de l'absence d'examen réel et sérieux de la situation du requérant doit être écarté.
6. En quatrième lieu, le collège des médecins de l'OFII a rendu, le 7 décembre 2018, un avis dans lequel il a estimé que l'état de santé de M. A... nécessite une prise en charge médicale dont le défaut ne devrait pas entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité. A la suite de nouveaux éléments présentés par M. A..., le collège de médecins de l'OFII s'est de nouveau réuni pour rendre le 23 septembre 2019 un second avis allant dans le même sens que celui précédemment rendu.
7. La partie qui justifie d'un avis du collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration qui lui est favorable doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour. Dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il pourrait ou non y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires.
8. Il ressort des pièces du dossier que M. A... souffre d'un rhumatisme inflammatoire chronique de type spondylarthrite ankylosante, de péricardite, d'une hépatite B chronique, d'une gastrite chronique, de troubles fonctionnels intestinaux et d'une hernie discale lombaire. S'il fait valoir que son état de santé évolue en s'aggravant, les deux certificats médicaux du 27 novembre 2018 et du 7 mars 2019 qu'il produit ne permettent pas d'estimer, eu égard à leur teneur, qu'une absence de prise en charge médicale de sa situation l'exposerait à des conséquences d'une exceptionnelle gravité contrairement à ce qu'a estimé le préfet, sur la base des deux avis concordant de l'OFII. Par suite, le préfet n'avait pas à s'interroger sur la possibilité pour M. A... d'accéder effectivement à un traitement approprié dans son pays d'origine. Au demeurant, les allégations de M. A... selon lesquelles un tel accès serait impossible en raison des ruptures de stock de médicaments constatées en Mauritanie ne sont pas établies au dossier pour ce qui concerne les pathologies dont il est atteint. Par suite, en prenant la décision en litige, le préfet n'a pas méconnu les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
9. En cinquième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Pour l'application des stipulations précitées, l'étranger qui invoque la protection due à son droit au respect de sa vie privée et familiale en France doit apporter toute justification permettant d'apprécier la réalité et la stabilité de ses liens personnels et familiaux effectifs en France au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine.
10. Il est vrai que M. A... a séjourné régulièrement en France de 2009 jusqu'au 30 septembre 2016, date d'expiration de son dernier titre de séjour. Durant sept années, il y a suivi des études qui lui ont permis d'obtenir un master II en droit public et un diplôme universitaire " analyse des conflits ". Pour autant, les titres de séjour que M. A... a obtenus en qualité d'étudiant ne lui donnaient pas vocation à demeurer sur le territoire français au-delà de la durée nécessaire à la réussite de son cursus universitaire. De plus, M. A... séjourne irrégulièrement sur le territoire français depuis le 30 septembre 2016 en dépit d'un refus de titre assorti d'une obligation de quitter le territoire français dont il a fait l'objet le 23 février 2017 et qui n'a pas été jugé illégal tant par le tribunal administratif que par la cour d'administrative d'appel de Bordeaux. Par ailleurs, M. A... qui est célibataire et sans charge de famille, est entré en France à l'âge de 29 ans et avait ainsi passé l'essentiel de son existence dans son pays d'origine où vivent ses parents. La circonstance que M. A... a régulièrement travaillé entre 2009 et 2018 dans le cadre de contrats de travail à durée déterminée allant de quelques jours à plusieurs mois n'est pas suffisante, compte tenu de ce qui précède, pour estimer qu'il aurait noué en France des liens suffisamment intenses au point que la décision en litige soit regardée comme portant une atteinte excessive à son droit à mener une vie privée et familiale normale garanti par les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de cet article 8 doit être écarté ainsi que, en tout état de cause, celui tiré de la méconnaissance du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
11. En sixième lieu, il résulte de ce qui précède que le préfet n'a pas commis d'erreur manifeste dans l'appréciation de la situation personnelle de M. A....
12. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions doivent être rejetées ainsi que ses conclusions à fin d'injonction et celles présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
DECIDE :
Article 1er : La requête n° 20BX02281 est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur.
Copie pour information en sera délivrée au préfet de la Haute-Garonne.
Délibéré après l'audience du 26 janvier 2021 à laquelle siégeaient :
Mme Elisabeth Jayat, président,
M. E... C..., président-assesseur,
Mme Caroline Gaillard, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 23 février 2021.
Le président,
Elisabeth Jayat La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
N° 20BX02281 6