Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 14 juin 2019, M. A... D..., représenté par Me E..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement n° 1803402 du tribunal administratif de Bordeaux ;
2°) d'annuler l'arrêté préfectoral du 6 juillet 2018 ;
3°) d'enjoindre au préfet de réexaminer sa demande d'autorisation de travail ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- l'arrêté en litige est entaché d'erreur de droit car il est fondé sur un motif non prévu à l'article R. 5221-11 du code du travail tiré de ce que M. D... n'a pas maintenu sa résidence habituelle hors de France ;
- cet arrêté est entaché d'une autre erreur de droit car il est fondé sur un motif, non prévu par la réglementation, tiré de ce que M. D... ne peut déposer une demande d'autorisation de travail dès lors qu'il réside déjà en France ;
- enfin, le refus d'autorisation de travail est illégal dès lors qu'il n'est pas établi que l'employeur de M. D... aurait méconnu la législation sur le travail quant à l'activité professionnelle de ce dernier.
Par décision du 18 juillet 2019, le bureau d'aide juridictionnelle du tribunal de grande instance de Bordeaux a rejeté la demande d'aide juridictionnelle de M. D....
Par une ordonnance du 19 septembre 2019, la clôture de l'instruction a été fixée au 23 octobre 2019 à 12h00.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code du travail ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. F... B...,
- et les observations de Me C..., se substituant à Me E..., représentant M. D....
Considérant ce qui suit :
1. M. A... D... est un ressortissant marocain né en 1982 qui a bénéficié d'un titre de séjour pluri annuel en qualité de travailleur saisonnier valable du 21 janvier 2015 au 20 janvier 2018. Le 19 mars 2018, la société FPA Aquitaine a sollicité une autorisation de travail concernant M. D... pour un emploi d'ouvrier ferrailleur en contrat à durée indéterminée. Le préfet de la Gironde a rejeté cette demande par un arrêté du 6 juillet 2018 dont M. D... a demandé l'annulation au tribunal administratif de Bordeaux. M. D... relève appel du jugement rendu le 10 avril 2019 par lequel le tribunal a rejeté sa demande.
2. Aux termes de l'article R. 5221-3 du code du travail : " L'autorisation de travail peut être constituée par l'un des documents suivants : (...) 8° La carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ", délivrée en application du 1° de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ou le visa de long séjour valant titre de séjour mentionné au 7° de l'article R. 311-3 du même code, accompagné du contrat de travail visé (...) ". Aux termes de l'article R. 5221-11 du même code : " La demande d'autorisation de travail relevant des 4°, 8°, 9°, 13° et 14° de l'article R. 5221-3 est faite par l'employeur. ". Aux termes de l'article R. 5221-20 dudit code : " Pour accorder ou refuser l'une des autorisations de travail mentionnées à l'article R. 5221-11, le préfet prend en compte les éléments d'appréciation suivants : 1° La situation de l'emploi dans la profession et dans la zone géographique pour lesquelles la demande est formulée, compte tenu des spécificités requises pour le poste de travail considéré, et les recherches déjà accomplies par l'employeur auprès des organismes concourant au service public de l'emploi pour recruter un candidat déjà présent sur le marché du travail ; 2° L'adéquation entre la qualification, l'expérience, les diplômes ou titres de l'étranger et les caractéristiques de l'emploi auquel il postule (...) 3° Le respect par l'employeur (...) de la législation relative au travail et à la protection sociale ; 4° Le cas échéant, le respect par l'employeur (...) des conditions réglementaires d'exercice de l'activité considérée ; 5° Les conditions d'emploi et de rémunération offertes à l'étranger, qui sont comparables à celles des salariés occupant un emploi de même nature dans l'entreprise ou, à défaut, conformes aux rémunérations pratiquées sur le marché du travail pour l'emploi sollicité ; 6° Le salaire proposé à l'étranger qui, même en cas d'emploi à temps partiel, est au moins équivalent à la rémunération minimale mensuelle (...) ".
3. Pour rejeter la demande d'autorisation de travail dont il était saisi, le préfet de la Gironde a relevé que M. D... n'avait pas maintenu sa résidence habituelle hors de France pendant plus de six mois par an lorsqu'il était titulaire, entre 2015 et 2018, d'un titre de séjour portant la mention " saisonnier ". Toutefois ce motif n'est pas au nombre de ceux qui, conformément aux dispositions précitées de l'article R. 5221-20 du code du travail, permettent à l'autorité compétente de rejeter une demande d'autorisation de travail. Par suite, en retenant un tel motif, le préfet de la Gironde a commis une erreur de droit.
4. Il ressort des termes de la décision attaquée que le préfet a entendu également se fonder sur un motif tiré de ce que M. D... ne résidait pas en France au moment du dépôt de la demande d'autorisation de travail. Ce motif, qui n'est pas au nombre de ceux que l'article R. 5221-20 permet à l'autorité compétente de retenir, est donc lui aussi entaché d'erreur de droit, d'autant que, comme les premiers juges l'ont relevé à bon droit, les dispositions de l'article R. 5221-15 du code du travail envisagent expressément l'hypothèse où la demande est présentée pour un étranger déjà présent sur le territoire français en précisant que, dans ce cas, ladite demande est adressée au préfet du département de résidence de l'intéressé.
5. Mais pour rejeter la demande d'autorisation de travail, le préfet a également retenu un dernier motif tiré de ce que la société FPA Aquitaine n'a pas respecté la législation du travail en employant M. D... depuis le 1er janvier 2017 sans avoir obtenu l'autorisation de travail adéquate. Le préfet a ainsi visé dans sa décision les dispositions du 4° de l'article L. 8211-1 du code du travail en vertu desquelles l'emploi d'un étranger non autorisé à exercer une activité salariée est constitutif d'un travail illégal. En retenant ce motif, le préfet a fait application des dispositions, citées au point 2, du 3° de l'article R. 5221-20 du code du travail et n'a donc pas commis d'erreur de droit. Il n'a pas non plus commis d'erreur de fait dès lors qu'il ressort des pièces du dossier que M. D... travaille pour la société FPA Aquitaine depuis le 1er janvier 2017 en qualité d'ouvrier ferrailleur. Il ressort enfin des pièces du dossier que le préfet de la Gironde aurait pris la même décision de refus en se fondant sur le seul motif tiré de l'application du 3° de l'article R. 5221-20 du code du travail, lequel suffit à justifier légalement la décision de refus en litige.
6. Il résulte de ce qui précède que M. D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37-2 de la loi du 10 juillet 1991 doivent être rejetées.
DECIDE :
Article 1er : La requête n° 19BX02384 présentée par M. D... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... D..., à Me E... et au ministre de l'intérieur. Copie pour information en sera délivrée au préfet de la Gironde.
Délibéré après l'audience 29 octobre 2019 à laquelle siégeaient :
Mme Elisabeth Jayat, président,
M. F... B..., président-assesseur,
Mme Caroline Gaillard, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 26 novembre 2019.
Le rapporteur,
Frédéric B...Le président,
Elisabeth JayatLe greffier,
Virginie Marty
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
N° 19BX02384 2