Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 14 décembre 2016, M. B..., représenté par MeA..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 31 octobre 2016 ;
2°) d'annuler les décisions susvisées du 15 juin 2016 du préfet de la Dordogne lui ayant fait obligation de quitter le territoire français et ayant fixé le pays de renvoi ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Dordogne de lui délivrer un titre de séjour dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ou à défaut, de réexaminer sa situation administrative dans le même délai et d'assortir cette injonction d'une astreinte de 80 euros par jour de retard.
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros à lui verser au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- la décision est entachée d'incompétence dans la mesure où M. C...ne disposait pas d'une délégation de signature le 15 juin 2016 ; en effet, la préfète de la Dordogne n'a été nommée que le 9 juin 2016 par un arrêté publié le lendemain et la délégation de signature au profit de M. C...est datée du 6 juillet suivant. L'arrêté de délégation émanant du précédent préfet, publié le 11 juin 2015, était donc caduc ;
- la mesure d'éloignement porte une atteinte disproportionnée à son droit de mener une vie privée et familiale normale, en violation de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Contrairement à ce qu'a estimé le tribunal, il établit l'ancienneté de sa relation avec une ressortissante française, laquelle remonte à 2012, et ils prévoient d'ailleurs de se marier. Ils ont toujours vécu ensemble chez la grand-mère de sa compagne, dans un premier temps à Paris, puis en Dordogne ;
- la mesure d'éloignement est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il a obtenu un diplôme de mécanicien en France où il réside depuis plus de cinq ans. Il a été apprenti durant un an et demi et disposait d'un contrat de travail pour une durée de huit mois. Il a travaillé durant seize mois entre les mois d'octobre 2011 et de mars 2013. Le préfet n'a pas apprécié l'ensemble des éléments relatifs à sa situation, notamment au regard de sa qualification, son expérience et ses diplômes, ainsi que les caractéristiques de l'emploi auquel il postulait. Le Préfet n'a pas transmis le dossier employeur à la DIRRECTE conformément à l'article R5221-15 du code du travail ;
- la décision fixant le pays de renvoi doit être annulée en raison de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour.
Par un mémoire en défense, enregistré le 5 janvier 2017, le préfet de la Dordogne conclut au rejet de la requête de M. B...en soutenant que les moyens de ce dernier ne sont pas fondés.
Il soutient que :
- M.C..., était compétent pour édicter l'arrêté en litige ;
- l'intéressé n'établit pas, par les documents produits, l'ancienneté de sa communauté de vie avec une ressortissante française. Il a encore sa mère dans son pays d'origine, un pays où il a vécu jusqu'à l'âge de 20 ans ;
- il ne pouvait bénéficier de la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, étant arrivé pour la dernière fois en France en 2015, et n'ayant pas occupé d'emploi depuis plus de trois ans, après l'obtention de son CAP de mécanicien ;
- ces décisions ne sont pas entachées d'une erreur manifeste d'appréciation dans la mesure où il n'établit pas l'ancienneté de sa communauté de vie avec une ressortissante française, qu'il ne justifie pas d'une intégration professionnelle, ni de considérations exceptionnelles ou de motifs humanitaires.
Par ordonnance du 23 décembre 2016, la clôture de l'instruction a été fixée au 8 février 2017 à 12h00.
M. B...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 1er décembre 2016.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi du 10 juillet 1991 modifiée relative à l'aide juridique ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Sabrina Ladoire a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M.B..., ressortissant mauricien, né en 1990, est entré régulièrement, pour la première fois en France, le 24 août 2010, muni d'un visa étudiant. Son titre de séjour " étudiant " a régulièrement été renouvelé jusqu'au 11 septembre 2013. Il a sollicité, le 27 avril 2016, la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, en se prévalant d'un contrat de travail. Par un arrêté du 15 juin 2016, le préfet de la Dordogne a rejeté sa demande de titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. Le 28 octobre 2016, l'intéressé a fait l'objet d'une assignation à résidence. M. B...relève appel du jugement du 31 octobre 2016 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du 15 juin 2016 par lesquelles le préfet de la Dordogne lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de renvoi.
Sur la légalité des décisions :
En ce qui concerne la mesure d'éloignement :
2. En premier lieu, à l'appui du moyen tiré de l'incompétence du signataire des décisions attaquées, le requérant ne se prévaut devant la cour d'aucun élément de fait ou de droit nouveau par rapport à l'argumentation développée en première instance et ne critique pas la réponse apportée par le tribunal administratif. Par suite, il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption du motif pertinemment retenu par le tribunal.
3. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étranger et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : / (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. ". En vertu de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1°) Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2°) Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
4. M. B...soutient qu'il entretient une relation avec une ressortissante française depuis le mois de juillet 2012, et qu'ils ont d'ailleurs un projet de mariage. Cependant, les documents qu'il a produits, à savoir un témoignage de sa compagne et deux attestations de la grand-mère de cette dernière dont la première mentionnait qu'elle aurait hébergé le couple depuis le mois de septembre 2015 à Sarlat, et la seconde précisait qu'elle les aurait également hébergés entre les mois de février et d'octobre 2014 à Paris, ne sauraient suffire à établir l'ancienneté de leur communauté de vie, alors que les factures de téléphone au nom du requérant et de sa compagne, les bulletins de salaires de cette dernière et le contrat à durée déterminée que M. B...a conclu en avril 2016 ne permettent d'établir l'existence d'une communauté de vie entre les intéressés qu'à compter du mois de janvier 2016, soit depuis moins de six mois à la date de l'arrêté attaqué. En outre, il ne ressort pas des pièces du dossier que M. B...serait isolé dans son pays d'origine où il a vécu jusqu'à l'âge de vingt ans et où réside sa mère. Par suite, et en tout état de cause, le moyen tiré de ce que la mesure d'éloignement porterait une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale et méconnaîtrait ainsi les dispositions et stipulations précitées ne peut qu'être écarté.
5. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7 [...] ".
6. M. B...fait valoir que le caractère exceptionnel de sa demande doit se déduire de sa résidence continue depuis 2010 sur le territoire national, de la réalité et de l'intensité de ses attaches personnelles en France, et en particulier de sa relation avec une ressortissante française, ainsi que de l'insertion professionnelle dont il justifie. Toutefois, en estimant que les circonstances qu'il a obtenu un CAP de mécanicien en France, qu'il bénéficie d'un contrat à durée déterminée, et que sa relation avec une ressortissante française avec laquelle il n'établit au demeurant pas l'ancienneté de sa communauté de vie, ne constituent pas des motifs exceptionnels ni des considérations humanitaires, le préfet de la Dordogne, qui a procédé à un examen circonstancié de la situation de l'intéressé, n'a pas entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions précitées.
7. En quatrième et dernier lieu, le préfet n'a pas l'obligation, dans le cadre de l'exercice de son pouvoir de régularisation, de transmettre à la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRECCTE) la demande d'autorisation de travail dont il est saisi à l'appui d'une demande d'admission exceptionnelle au séjour. Par suite, et en tout état de cause, le moyen tiré de ce que le préfet aurait du transmettre le dossier employeur à la DIRRECTE ne peut qu'être écarté.
En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :
8. Il résulte de ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de la mesure d'éloignement à l'appui de ses conclusions tendant à l'annulation de la décision fixant le pays de renvoi.
9. Il résulte de tout ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du préfet de la Dordogne du 15 juin 2016 portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de renvoi. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte, et celles tendant à l'application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent être rejetées.
DECIDE
Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... B..., au ministre de l'intérieur et à Me A.... Copie en sera adressée au préfet de la Dordogne.
Délibéré après l'audience du 7 mars 2017 à laquelle siégeaient :
M. Didier Péano, président,
Mme Chrstine Mège, président-assesseur,
Mme Sabrina Ladoire, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 4 avril 2017.
Le rapporteur,
Sabrina Ladoire
Le président,
Didier Péano Le greffier,
Evelyne Gay-Boissières
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition certifiée conforme.
Le greffier,
Evelyne Gay-Boissières
6
N° 16BX04073