M. A...C...a demandé au tribunal administratif de Pau d'une part, d'annuler l'arrêté en date du 20 juin 2016 par lequel le préfet des Hautes-Pyrénées lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi, d'autre part, d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour en qualité d'accompagnant d'étranger malade.
Par un jugement n° 161673,161674 du 8 novembre 2016, le tribunal administratif de Pau, après avoir joint les deux requêtes, a annulé ces arrêtés et ordonné au préfet des Hautes Pyrénées de délivrer à Mme C...une carte de séjour portant la mention " vie privée et familiale " en qualité d'étranger malade sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée du séjour des étrangers et du droit d'asile et de délivrer à M. C...un titre de séjour en qualité d'accompagnant d'étranger malade.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 16 décembre 2016, le préfet des Hautes-Pyrénées demande à la cour d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Pau du 8 novembre 2016.
Il soutient que le jugement attaqué est entaché d'une erreur de droit ; en effet, dans sa rédaction issue de la loi n° 2011-672 du 16 juin 2011 en vigueur à la date des arrêtés litigieux, le 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée du séjour des étrangers et du droit d'asile fait dépendre le droit au séjour des étrangers malades de la seule inexistence d'un traitement approprié dans le pays d'origine, sans que l'accès effectif de l'étranger à ce traitement ne soit pris en compte.
Par un mémoire en défense et des pièces complémentaires, enregistrés le 21 février 2017, M. et Mme A...C..., représentés par MeB..., concluent au rejet de la requête du préfet et à ce que la somme de 1 200 euros soit mise à la charge de l'Etat sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.
Ils soutiennent que les moyens invoqués par le préfet ne sont pas fondés.
Par ordonnance du 9 janvier 2017, la clôture d'instruction a été fixée au 27 février 2017 à 12h00.
M. et Mme A...C...ont été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décisions du 26 janvier 2017.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Florence Madelaigue,
- les conclusions de Mme Frédérique Munoz-Pauziès, rapporteur public,
Considérant ce qui suit :
1. M. et Mme C...sont entrés irrégulièrement en France le 17 décembre 2012 avec leurs deux enfants et ont sollicité l'asile politique. Par décision du 5 mars 2013, restée inexécutée, le préfet de Tarn-et-Garonne a pris une décision de réadmission en Suisse. Les époux C...ont déposé une nouvelle demande d'asile le 20 août 2014 qui a été rejetée le 31 mars 2015 par l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides, puis le 30 septembre 2015 par la Cour nationale du droit d'asile. Mme C...a ensuite déposé le 14 avril 2016 une demande de titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " en qualité d'étranger malade, et M. C... a déposé le même jour une demande de titre de séjour en qualité d'accompagnant de malade. Le préfet des Hautes-Pyrénées relève appel du jugement du tribunal administratif de Pau du 8 novembre 2016 qui a annulé ses décisions du 20 juin 2016, refusant de délivrer des titres de séjour aux épouxC... et prescrit de délivrer à Mme C...une carte de séjour portant la mention " vie privée et familiale " en qualité d'étranger malade sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée du séjour des étrangers et du droit d'asile et un titre de séjour en qualité d'accompagnant d'étranger malade à M.C....
2. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : / (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l' absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé (...) ". En vertu de l'article R. 313-22 du même code : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour temporaire au vu d'un avis émis par le médecin de l'agence régionale de santé compétente au regard du lieu de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général (...) / L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin agréé ou un médecin praticien hospitalier et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de traitement dans le pays d'origine de l'intéressé (...) / Le préfet peut, après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, prendre en considération une circonstance humanitaire exceptionnelle pour délivrer la carte de séjour temporaire même s'il existe un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé (...) ".
3. Les premiers juges ont constaté que l'hypothyroïdie suite à une thyroïdectomie dont souffrait Mme C...comportait une forte probabilité de mortalité si elle n'était pas soignée. Ils ont annulé le refus de séjour pour les motifs suivants : " il ressort des pièces du dossier que le Kosovo, le pays d'origine de MmeC..., ne propose pas une couverture des traitements de l'hypothyroïdie à un coût accessible à l'essentiel de la population ; aucune pièce du dossier ne suggère que Mme C...pourrait y accéder aux soins et au suivi indispensables compte tenu de son niveau de ressources et du coût des traitements requis ; ainsi, s'il est vrai que le préfet des Hautes-Pyrénées a examiné expressément si le cas de Mme C...constituait une circonstance humanitaire exceptionnelle, le dossier révèle qu'il a, dans les circonstances particulières de l'espèce et compte tenu de la forte probabilité de mortalité en cas de défaut de soins d'une hypothyroïdie, commis une erreur d'appréciation ".
4. Il résulte en réalité de cette motivation comme aussi des points 4 et 5 du jugement fondés sur l'article 2 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, que le tribunal administratif s'est fondé, à juste titre, sur les circonstances humanitaires exceptionnelles caractérisant la situation de Mme C...au regard de la gravité de son état de santé, que d'ailleurs, le préfet ne conteste pas, pour censurer l'erreur manifeste d'appréciation ayant entaché les refus de séjour opposés par le préfet à l'intéressée et à son mari en qualité d'accompagnant d'une personne malade.
5. Ainsi, en se bornant à soutenir que les dispositions précitées de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne font pas obligation au préfet d'examiner l'accessibilité effective aux soins dès lors qu'il existe un traitement approprié dans le pays d'origine du ressortissant étranger, le préfet des Hautes-Pyrénées ne critique pas utilement le jugement attaqué.
6. Il résulte de ce qui précède que le préfet des Hautes-Pyrénées n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Pau a annulé les arrêtés attaqués du 20 juin 2016 et lui a prescrit de délivrer un titre de séjour " vie privée et familiale " à Mme C...et un titre de séjour en qualité d'accompagnant de malade à M.C....
7. M. et Mme C...ont obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle. Par suite, leur avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 et il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me B...renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 200 euros qu'ils demandent.
DECIDE
Article 1er : La requête du préfet des Hautes-Pyrénées est rejetée.
Article 2 : L'Etat versera à l'avocat de M. et Mme C...la somme de 1 200 euros en application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve de la renonciation de Me B...à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur, à M. et Mme A...C...et à Me B.... Copie en sera adressée au préfet des Hautes-Pyrénées.
Délibéré après l'audience du 9 mars 2017 à laquelle siégeaient :
M. Philippe Pouzoulet, président,
Mme Marianne Pouget, président-assesseur,
Mme Florence Madelaigue, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 5 avril 2017.
Le rapporteur,
Florence MadelaigueLe président,
Philippe PouzouletLe greffier,
Florence Deligey
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 16BX04137