Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 11 aout 2016, M. D...représenté par Me C..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulouse du 23 juin 2016 ;
2°) de l'admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire ;
3°) d'annuler l'arrêté contesté, ensemble les décisions du préfet de la Haute-Garonne du 29 septembre 2015 rejetant son recours gracieux et celle du ministre de l'intérieur du 29 octobre 2015 rejetant son recours hiérarchique ;
4°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Garonne de lui délivrer un titre de séjour " compétences et talents ", dans un délai de quinze jours à compter la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.
Il soutient que :
- la décision de refus de séjour contestée est insuffisamment motivée, au regard des dispositions de la loi du 11 juillet 1979 sur la motivation des actes administratifs, ce qui ne permet pas de vérifier que le préfet de la Haute-Garonne aurait procédé à un examen particulier de sa situation ;
- la procédure contradictoire prévue par les dispositions de l'article 24 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 n'a pas été respectée ;
- la décision est entachée d'une erreur de droit dès lors que l'article L. 315-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile n'est pas limité au bénéfice d'une activité salariée et ne lui imposait pas de se rapprocher de son pays d'origine pour solliciter un visa ;
- le préfet a commis une erreur d'appréciation en considérant que son projet ne présentait pas de viabilité économique à moyen terme et qu'il ne participait pas de façon significative et durable au développement de la France et de son pays d'origine ;
- son projet ne peut pas être poursuivi au Niger dans la mesure où les accès internet sont limités ;
- la décision porte une atteinte disproportionnée au respect de sa vie privée et familiale dès lors qu'il vit en France depuis plus de quatre ans et que plusieurs membres de sa famille sont installés en France.
Par un mémoire en défense, enregistré le 27 septembre 2016 le préfet de la Haute-Garonne conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que :
- le requérant n'ayant soulevé que des moyens de légalité interne en première instance, les moyens de légalité externe, soulevés pour la première fois en appel, sont irrecevables en vertu de la jurisprudence Intercopie ;
- il demande au tribunal de procéder à une neutralisation de motif en fondant la décision contestée sur la seule circonstance que le projet du requérant ne remplit pas les conditions exigées par l'article L. 315-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile notamment en matière de viabilité économique du projet ;
- il n'a pas commis d'erreur d'appréciation en considérant que le projet de M. D... n'était pas viable économiquement dès lors que l'intéressé ne produit que des budgets prévisionnels ne reposant sur aucun élément vérifiable et dont l'origine des recettes reste inconnue ;
- le projet de M. D...peut être mené dans son pays d'origine ;
- la décision n'a pas pour objet ni pour effet d'éloigner le requérant ou de le séparer de sa famille et ne porte donc pas atteinte à sa vie privée et familiale.
Par ordonnance du 22 aout 2016, la clôture d'instruction a été fixée au 18 octobre 2016 à midi.
Un pièce complémentaire présentée pour M. D...a été enregistrée le 8 novembre 2016.
M. D...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle en date du 8 septembre 2016.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. A...Larroumec a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M.D..., de nationalité nigérienne, est entré en France le 27 septembre 2012 sous couvert d'un visa étudiant. A l'issue de ses études, il a bénéficié d'une autorisation provisoire de séjour d'un an valable jusqu'au 7 octobre 2015. Le 16 juin 2015, il a formulé une demande de changement de statut en vue d'obtenir une carte de séjour portant la mention " compétences et talents ". Par une décision du 6 aout 2015, le préfet de la Haute-Garonne a rejeté sa demande. M. D...a formé un recours gracieux le 24 aout 2015, rejeté le 29 septembre 2015, puis un recours hiérarchique auprès du ministre de l'intérieur rejeté le 29 septembre 2015. M. D...relève appel du jugement n° 1505827 du 23 juin 2016 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande d'annulation de ces décisions.
Sur les conclusions tendant au bénéfice de l'aide juridictionnelle à titre provisoire :
2. M. D...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle du 8 septembre 2016. Par suite, ses conclusions tendant au bénéfice de l'aide juridictionnelle à titre provisoire sont devenues sans objet. Dès lors, il n'a plus lieu d'y statuer.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
3. M. D...n'ayant, en première instance, soulevé que des moyens de légalité interne, les moyens de légalité externe, soulevés pour la première fois en appel, sont irrecevables.
4. Aux termes de l'article L. 315-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour "compétences et talents" peut être accordée à l'étranger susceptible de participer, du fait de ses compétences et de ses talents, de façon significative et durable au développement économique, au développement de l'aménagement du territoire ou au rayonnement, notamment intellectuel, scientifique, culturel, humanitaire ou sportif, de la France et, directement ou indirectement, du pays dont il a la nationalité. Elle est accordée pour une durée de trois ans. Elle est renouvelable (...) ". L'article L. 315-3 du même code précise : " La carte mentionnée à l'article L. 315-1 est attribuée au vu du contenu et de la nature du projet de l'étranger et de l'intérêt de ce projet pour la France et pour le pays dont l'étranger a la nationalité. (...)".
5. Si M. D...a demandé la délivrance de la carte de séjour " compétences et talents " prévue par les dispositions précitées en se prévalant d'un projet de création d'un site internet d'offre d'emplois en Afrique, il ne ressort pas des pièces du dossier que la viabilité du projet soit objectivement établie. En effet, si l'intéressé fournit un bilan comptable prévisionnel faisant état d'un bilan financier positif, l'origine des recettes demeurent.inconnue Par ailleurs, M. D...ne démontre pas que le projet envisagé contribue au développement économique ou au développement de l'aménagement du territoire de la France et, directement ou indirectement, du pays dont il a la nationalité et ce nonobstant le courrier du 4 février 2016. Enfin, si M. D...soutient que son activité ne pourrait pas être exercée au Niger, pays où les réseaux internet diffèrent de ceux existant en France, il n'apporte aucun élément à même d'étayer ses allégations. Ainsi, si le préfet de la Haute-Garonne s'est fondé sur le motif erroné que le projet présenté par M. D...ne présentait pas le caractère d'une activité salariée pour rejeter sa demande, il s'est également fondé sur le contenu et la viabilité du projet. Il ressort ainsi des pièces du dossier que le préfet aurait pris la même décision en se fondant seulement sur ce dernier motif sans commettre d'erreur de droit ni d'erreur manifeste d'appréciation.
6. M. D...soutient que le préfet a commis une erreur de droit en l'invitant à se rapprocher du consulat de France au Niger afin d'y solliciter un visa conforme à son projet de création de société. Toutefois, c'est sans erreur que le préfet, qui a statué sur sa demande de titre de séjour, a seulement entendu informer l'intéressé des possibilités qui s'offraient à lui à la suite de sa décision de refus. Dès lors, le moyen sera écarté.
7. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1.- Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance./ 2.- Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".
8. M. D...soutient qu'il réside en France depuis 2012, où il a poursuivi ses études et effectué plusieurs stages professionnels et que ses intérêts professionnels se situent en France. Toutefois, M. D...n'a été admis à séjourner sur le territoire français que sous le couvert de titres temporaires " étudiant " jusqu'en 2015 et n'avait donc pas vocation à s'installer durablement en France. M. D...est célibataire, sans enfant, et il n'établit pas avoir des attaches privées ou familiales en France. Dans ces conditions, la décision refusant son admission au séjour n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise.
9. Il résulte de ce qui précède que M. D...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande. Il y a lieu de rejeter, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte, de même que celles tendant à l'application des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991.
DECIDE
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de M. D...tendant à l'admission provisoire au bénéfice de l'aide juridictionnelle.
Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de M. D...est rejeté.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...D...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de la Haute-Garonne.
Délibéré après l'audience du 21 novembre 2016, à laquelle siégeaient :
M. A...Larroumec, président,
M. Antoine Bec, président-assesseur,
M. Pierre Bentolila, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 3 janvier 2017.
Le président-assesseur,
Antoine BecLe président,
Pierre LarroumecLe greffier,
Cindy Virin
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition certifiée conforme.
Le greffier,
Cindy Virin
N° 16BX02806 2