Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 15 octobre 2015 et des pièces complémentaires enregistrées le 7 décembre 2015, M.C..., représenté par MeB..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 9 juillet 2015 du tribunal administratif de Toulouse ;
2°) d'annuler l'arrêté du 29 janvier 2015 du préfet de la Haute-Garonne ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Garonne de lui délivrer un titre de séjour dans le délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard, ou à tout le moins, de procéder au réexamen de sa demande ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à verser à son conseil en application des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- le refus d'admission au séjour contesté est entaché d'une insuffisance de motivation en fait ; cette motivation révèle un défaut d'examen de sa situation personnelle et familiale ;
- la décision portant refus d'admission au séjour est entachée d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences d'une exceptionnelle gravité qu'elle emporterait sur sa situation, compte tenu des risques encourus en cas de retour en Albanie du fait de l'engagement politique de son père au sein du parti démocratique albanais ;
- il ne peut pas mener en Albanie une vie privée et familiale normale ;
- l'obligation de quitter le territoire français contestée est privée de base légale du fait de l'illégalité du refus de titre de séjour ;
- l'obligation de quitter le territoire français contestée est entachée d'erreur de droit liée à la méconnaissance des articles L. 742-6 et L. 741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le préfet s'est cru tenu par la seule circonstance qu'il est originaire d'un pays considéré comme sûr par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, et n'a pas procédé à un examen individuel de sa situation ;
- le préfet aurait dû attendre que la Cour nationale du droit d'asile ait statué définitivement sur son recours avant de prendre une mesure d'éloignement à son encontre ;
- la décision fixant le pays de renvoi contestée est insuffisamment motivée ;
- cette décision est illégale par voie de conséquence de l'illégalité du refus de titre de séjour et de l'obligation de quitter le territoire français ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le préfet s'est cru lié par la décision de rejet de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides.
Par un mémoire en défense, enregistré le 16 décembre 2015, le préfet de la Haute-Garonne conclut au rejet de la requête de M.C....
Il réitère les observations formulées en première instance.
Par ordonnance du 26 octobre 2015, la clôture de l'instruction a été fixée au 29 décembre 2015 à 12 heures.
M. A...C...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 24 septembre 2015.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Pierre Larroumec a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. A...C..., ressortissant albanais né le 20 mai 1993, est entré irrégulièrement en France le 2 février 2014 en compagnie de ses parents et de son frère, également de nationalité albanaise. Il a présenté, le 5 février 2014, une demande d'asile qui a été traitée selon la procédure prioritaire et a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 26 août 2014, faisant l'objet d'un recours pendant devant la Cour nationale du droit d'asile. Par un arrêté du 29 janvier 2015, le préfet de la Haute-Garonne a refusé l'admission de M. C...au séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. M. C...relève appel du jugement du 9 juillet 2015 du tribunal administratif de Toulouse, qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
En ce qui concerne la légalité du refus de séjour :
2. M. C...reprend dans les mêmes termes qu'en première instance, et sans apporter d'élément nouveau, les mêmes moyens tirés de l'insuffisance de motivation de la décision de refus de séjour et du défaut d'examen particulier de sa situation personnelle. Il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs pertinemment retenus par les premiers juges.
3. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. /2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l' exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".
4. Si le requérant fait valoir que la décision contestée méconnaît son droit de mener une vie privée et familiale normale, il ressort toutefois des pièces du dossier que M. C...est entré irrégulièrement en France à l'âge de 21 ans avec ses parents et son frère et n'a été autorisé à y séjourner que le temps nécessaire à l'instruction de sa demande d'asile. Il n'établit ni même n'allègue être dépourvu d'attaches familiales en Albanie où la cellule familiale peut se reconstituer, dès lors que ses parents font également l'objet d'un refus de titre séjour et d'une mesure d'éloignement, par arrêtés du même jour. Dans ces conditions, et compte tenu de la brièveté du séjour en France de M.C..., le refus de séjour contesté n'a pas porté à son droit à une vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard de ses motifs, et n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
5. Si M. C...invoque la circonstance que lui-même et sa famille encourent des risques de représailles dans son pays d'origine du fait de l'engagement politique de son père au sein du parti démocratique albanais, et que ce dernier a été agressé par des membres du parti politique adverse lors des élections de mai 2011 et juin 2013, il n'apporte toutefois aucun élément probant de nature à établir la réalité des risques personnels et actuels allégués en cas de retour dans son pays d'origine, risques dont l'Office français de protection des réfugiés et apatrides n'a d'ailleurs pas reconnu l'existence. Par suite, le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation des conséquences d'une exceptionnelle gravité que la décision portant refus de séjour emporterait sur sa situation personnelle ne peut qu'être écarté.
En ce qui concerne la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :
6. En l'absence d'illégalité du refus de titre de séjour contesté, le moyen tiré du défaut de base légale de la décision portant obligation de quitter le territoire français doit être écarté.
7. Aux termes de l'article L. 741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sous réserve du respect des stipulations de l'article 33 de la convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés, l'admission en France d'un étranger qui demande à bénéficier de l'asile ne peut être refusée que si : (...) 2° L'étranger qui demande à bénéficier de l'asile a la nationalité d'un pays pour lequel ont été mises en oeuvre les stipulations du 5 du C de l'article 1er de la convention de Genève susmentionnée ou d'un pays considéré comme un pays d'origine sûr. Un pays est considéré comme tel s'il veille au respect des principes de la liberté, de la démocratie et de l'état de droit, ainsi que des droits de l'homme et des libertés fondamentales. La prise en compte du caractère sûr du pays d'origine ne peut faire obstacle à l'examen individuel de chaque demande ; (...) ". Aux termes de l'article L. 742-6 du même code : " L'étranger présent sur le territoire français dont la demande d'asile entre dans l'un des cas visés aux 2° à 4° de l'article L. 741-4 bénéficie du droit de se maintenir en France jusqu'à la notification de la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, lorsqu'il s'agit d'une décision de rejet. (...) ".
8. Il résulte de ces dispositions, d'une part, que l'étranger dont la demande d'asile entre dans l'un des cas mentionnés aux 2° à 4° de l'article L. 741-4 bénéficie du droit de se maintenir en France jusqu'à la notification de la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, et, d'autre part, qu'un recours formé par l'intéressé contre une éventuelle décision de rejet de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ne présente pas un caractère suspensif.
9. Il ressort des termes mêmes de la décision contestée qu'après avoir indiqué que le conseil d'administration de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides avait classé l'Albanie sur la liste des pays d'origine sûrs, le préfet a néanmoins procédé à l'examen individuel de la situation du requérant prévu par le 2° de l'article L. 741-4 précité du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Dans ces conditions, le requérant n'est pas fondé à soutenir que le préfet de la Haute-Garonne aurait entaché sa décision d'une erreur de droit ou aurait méconnu l'étendue de sa compétence en s'estimant lié par la décision du conseil d'administration de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides.
10. Il ressort des pièces du dossier que M. C...a déposé le 5 février 2014 une demande d'asile auprès de la préfecture de la Haute-Garonne, que le préfet a décidé de transmettre à l'Office français de protection des réfugiés et apatrides selon la procédure prioritaire et a refusé, le 13 mars 2014, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour au motif qu'il avait la nationalité d'un pays considéré comme sûr au sens du 2° de l'article L. 741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par une décision du 26 août 2014, l'Office français de protection des réfugiés et apatrides a débouté M. C...de sa demande d'asile. L'intéressé a formé un recours contre cette décision devant la Cour nationale du droit d'asile. S'il résulte des dispositions précitées de l'article L. 742-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qu'aucune mesure d'éloignement ne peut être mise à exécution avant la décision de l'office, ces dispositions ne concernent pas le recours devant la Cour nationale du droit d'asile. Par suite, M.C..., qui est originaire d'Albanie, pays qui a été classé par le conseil d'administration de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides comme un pays d'origine sûr, n'est pas fondé à soutenir que le préfet aurait commis une erreur de droit en prenant à son encontre une mesure d'éloignement, alors que son recours était pendant devant la Cour nationale du droit d'asile.
En ce qui concerne la légalité de la décision fixant le pays de renvoi :
11. Il résulte de ce qui a été dit précédemment que les décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français n'étant pas illégales, le moyen tiré de l'illégalité de ces décisions, invoqué par voie d'exception à l'encontre de la décision fixant le pays de renvoi, doit être écarté.
12. La décision contestée vise les articles 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et indique que M. C...n'établit pas être exposé à des peines ou traitements personnels réels et actuels contraires à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en cas de retour dans son pays d'origine, au vu, notamment, du rejet de sa demande d'admission au bénéfice de l'asile. La décision fixant le pays de renvoi est ainsi suffisamment motivée.
13. Aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950. ". Selon l'article 3 de cette convention : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants. ".
14. M.C..., dont la demande d'asile a été rejetée par une décision du 26 août 2014 de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, n'apporte aucun élément probant de nature à établir la réalité de risques de traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Par suite, et alors qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet se serait cru lié par la décision de l'office pour fixer le pays à destination duquel M. C...devrait être renvoyé, les moyens tirés de la méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doivent être écartés.
15. Il résulte de ce qui précède que M. C...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.
Sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte :
16. Le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation présentées par M. C... n'appelle aucune mesure d'exécution. Par suite, ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte ne peuvent être accueillies.
Sur les conclusions présentées au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 :
17. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que demande M. C...au profit de son conseil, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
DECIDE
Article 1er : La requête de M. C...est rejetée.
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No 15BX03413