2°) d'annuler les décisions du 16 février 2018 par laquelle le préfet de la Gironde a refusé de renouveler son titre de séjour et l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours ;
3°) d'annuler la décision du 29 septembre 2017 par laquelle le préfet de la Gironde a refusé de lui délivrer une carte de résident ;
4°) d'enjoindre au préfet de la Gironde de lui délivrer un titre de séjour en qualité de résident ou un titre de séjour mention " vie privée et familiale ", et à défaut, de procéder au réexamen de sa situation, et dans cette attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour, dans le délai de huit jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;
5°) de mettre à la charge de l'État le versement au profit de son conseil de la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sous réserve que Me A..., avocat de l'appelante, renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État.
Elle soutient que :
En ce qui concerne la décision portant refus de renouvellement de titre de séjour :
- le signataire de l'acte est incompétent ;
- l'arrêté est insuffisamment motivé ;
- cette décision est entachée d'un vice de procédure dès lors que l'avis médical du collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration rendu le 22°décembre 2017 ne mentionne pas le nom du médecin rapporteur de sorte qu'il n'est pas possible de s'assurer de la régularité de la composition du collège de médecins ; elle a ainsi été privée d'une garantie ;
- il n'est pas établi que le collège de médecins aurait rendu son avis à l'issue d'une délibération, conformément à l'article 6 de l'arrêté du 27 décembre 2016 ; l'absence de délibération en formation collégiale l'a privée d'une garantie ;
- cet avis n'est pas conforme aux exigences fixées par l'article 6 de l'arrêté du 27°décembre 2016 dès lors qu'il ne prend pas position sur l'existence d'une offre de soins dans le pays d'origine ;
- le préfet a commis une erreur manifeste dans l'appréciation de son état de santé ;
- cette décision méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
En ce qui concerne la décision portant refus de titre de séjour en qualité de résident, le préfet a commis une erreur de droit en ne faisant pas application des dispositions du 2° de l'article R. 314-1-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :
- elle est illégale du fait de l'illégalité de la décision portant refus de séjour ;
- cette décision méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; elle est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur sa situation personnelle.
Par un mémoire en défense, enregistré le 4 avril 2019, le préfet de la Gironde conclut au rejet de la requête en s'en remettant à ses écritures de première instance dont il joint une copie.
Mme E... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 22 novembre 2018 du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Bordeaux.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention franco-camerounaise relative à la circulation et au séjour des personnes du 21 février 1974 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Rey-Bèthbéder, président-rapporteur,
- et les observations de Me A..., représentant Mme E....
Considérant ce qui suit :
1. Mme E..., ressortissante camerounaise, déclare être entrée en France le 6 janvier 2012. Elle a bénéficié d'un titre de séjour en qualité d'étranger malade, renouvelé à plusieurs reprises jusqu'au 20 octobre 2017. Le 1er août 2017, elle a sollicité un renouvellement de ce titre. À cette même date, elle a demandé la délivrance d'une carte de résident sur le fondement des articles L. 314-8 et L. 314-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un courrier du 29 septembre 2017, le préfet de la Gironde a refusé de lui délivrer une carte de résident. Par un arrêté du 16 février 2018, cette même autorité a refusé de renouveler son titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. Mme E... relève appel du jugement du 26 juin 2018 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur les conclusions en annulation :
En ce qui concerne l'arrêté portant refus de renouvellement de titre de séjour :
2. En premier lieu, par un arrêté du 9 février 2018, régulièrement publié au recueil spécial des actes administratifs de la préfecture de la Gironde du même jour n° 33-2018-011, le préfet de ce département a donné à M. C... B..., sous-préfet d'Arcachon, une délégation générale de signature pour assurer la suppléance de M. Thierry Suquet, secrétaire général de la préfecture de la Gironde, lui-même habilité à signer les décisions de la nature de celles en litige en vertu d'un arrêté préfectoral du 29 janvier 2018 régulièrement publié au recueil des actes administratif spécial n°33-2018-008 le 30 janvier 2018. Par suite, le moyen tiré de ce que l'arrêté attaqué aurait été édicté par une autorité incompétente manque en fait et doit être écarté.
3. En deuxième lieu, l'arrêté en litige, qui vise les dispositions dont il fait application, notamment la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, rappelle l'obtention par Mme E... de plusieurs cartes de séjour en qualité d'étranger malade, régulièrement renouvelées jusqu'au 20 octobre 2017, sa demande de délivrance d'une carte de résident sur le fondement des articles L. 314-8 et L. 314-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ou le renouvellement de son titre de séjour en qualité d'étranger malade. Il mentionne le refus du préfet en date du 29 septembre 2017 de lui délivrer une carte de résident. Concernant l'état de santé de l'intéressée, il précise que, selon l'avis du 22 décembre 2017 du collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, son état de santé nécessite une prise en charge médicale mais que le défaut de celle-ci ne devrait pas entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qu'elle peut voyager sans risque vers son pays d'origine. Il comporte également des considérations quant à sa situation personnelle et familiale et précise que Mme E... ne démontre pas que la décision litigieuse contrevient à l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Il indique également qu'elle ne démontre pas être personnellement exposée à des traitements inhumains ou dégradants contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en cas de retour dans son pays d'origine. Dès lors, cet arrêté comporte les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement. Par suite, le moyen tiré de ce que l'arrêté serait insuffisamment motivé doit être écarté.
4. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa version en vigueur à la date de l'arrêté litigieux : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'État. (...) ".
5. L'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose que : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. / L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé. / Les orientations générales mentionnées à la quatrième phrase du 11° de l'article L. 313-11 sont fixées par arrêté du ministre chargé de la santé ".
6. Aux termes de l'article R. 313-23 du même code, dans sa version en vigueur à la date de l'arrêté litigieux : " Le rapport médical visé à l'article R. 313-22 est établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration à partir d'un certificat médical établi par le médecin qui le suit habituellement ou par un médecin praticien hospitalier inscrits au tableau de l'ordre, dans les conditions prévues par l'arrêté mentionné au deuxième alinéa de l'article R. 313-22. Le médecin de l'office peut solliciter, le cas échéant, le médecin qui suit habituellement le demandeur ou le médecin praticien hospitalier. Il en informe le demandeur. Il peut également convoquer le demandeur pour l'examiner et faire procéder aux examens estimés nécessaires. Le demandeur présente au service médical de l'office les documents justifiant de son identité. À défaut de réponse dans le délai de quinze jours, ou si le demandeur ne se présente pas à la convocation qui lui a été fixée, ou s'il n'a pas présenté les documents justifiant de son identité le médecin de l'office établit son rapport au vu des éléments dont il dispose et y indique que le demandeur n'a pas répondu à sa convocation ou n'a pas justifié de son identité. Il transmet son rapport médical au collège de médecins. / Sous couvert du directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration le service médical de l'office informe le préfet qu'il a transmis au collège de médecins le rapport médical. En cas de défaut de présentation de l'étranger lorsqu'il a été convoqué par le médecin de l'office ou de présentation des examens complémentaires demandés dans les conditions prévues au premier alinéa, il en informe également le préfet ; dans ce cas le récépissé prévu à l'article R. 311-4 n'est pas délivré. / Le collège à compétence nationale, composé de trois médecins, émet un avis dans les conditions de l'arrêté mentionné au premier alinéa du présent article. La composition du collège et, le cas échéant, de ses formations est fixée par décision du directeur général de l'office. Le médecin ayant établi le rapport médical ne siège pas au sein du collège. (...) Le collège peut demander au médecin qui suit habituellement le demandeur, au médecin praticien hospitalier ou au médecin qui a rédigé le rapport de lui communiquer, dans un délai de quinze jours, tout complément d'information. Le demandeur en est simultanément informé. Le collège de médecins peut entendre et, le cas échéant, examiner le demandeur et faire procéder aux examens estimés nécessaires. Le demandeur présente au service médical de l'office les documents justifiant de son identité. Il peut être assisté d'un interprète et d'un médecin. Lorsque l'étranger est mineur, il est accompagné de son représentant légal. / L'avis est rendu par le collège dans un délai de trois mois à compter de la transmission par le demandeur des éléments médicaux conformément à la première phrase du premier alinéa. Lorsque le demandeur n'a pas présenté au médecin de l'office ou au collège les documents justifiant son identité, n'a pas produit les examens complémentaires qui lui ont été demandés ou n'a pas répondu à la convocation du médecin de l'office ou du collège qui lui a été adressée, l'avis le constate. / L'avis est transmis au préfet territorialement compétent, sous couvert du directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. "
7. L'article 6 de l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile précise que : " Au vu du rapport médical mentionné à l'article 3, un collège de médecins désigné pour chaque dossier dans les conditions prévues à l'article 5 émet un avis, conformément au modèle figurant à l'annexe C du présent arrêté, précisant : a) si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale ; b) si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé ; c) si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont le ressortissant étranger est originaire, il pourrait ou non y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ; d) la durée prévisible du traitement. Dans le cas où le ressortissant étranger pourrait bénéficier effectivement d'un traitement approprié, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, le collège indique, au vu des éléments du dossier du demandeur, si l'état de santé de ce dernier lui permet de voyager sans risque vers ce pays. Cet avis mentionne les éléments de procédure. Le collège peut délibérer au moyen d'une conférence téléphonique ou audiovisuelle. L'avis émis à l'issue de la délibération est signé par chacun des trois médecins membres du collège ".
8. Il ne résulte d'aucune de ces dispositions, non plus que d'aucun principe, que l'avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration devrait porter mention du nom du médecin qui a établi le rapport médical, prévu par l'article R. 313-22, qui est transmis au collège de médecins de l'Office. Si l'article 6 de l'arrêté du 27 décembre 2016 indique que l'avis mentionne " les éléments de procédure ", cette mention renvoie, ainsi qu'il résulte du modèle d'avis figurant à l'annexe C de l'arrêté, rendu obligatoire par cet article 6, à l'indication que l'étranger a été, ou non, convoqué par le médecin ou par le collège, à celle que des examens complémentaires ont été, ou non, demandés et à celle que l'étranger a été conduit, ou non, à justifier de son identité.
9. Il ressort des pièces versées au dossier par le préfet de la Gironde, en particulier de l'indication du nom du médecin qui a établi le rapport médical donnée au préfet par voie électronique par les services de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, que le rapport médical sur l'état de santé de Mme E... prévu à l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile a été établi par un premier médecin et a été transmis pour être soumis au collège de médecins. Il ressort également des pièces du dossier que ce collège, au sein duquel ont siégé trois autres médecins, qui avaient été désignés pour participer aux collèges de médecins de l'Office par décision du directeur général de l'Office en date du 17 janvier 2017 publiée au bulletin officiel du ministère de l'intérieur, s'est réuni le 22 décembre 2017 pour émettre l'avis qui a été transmis au préfet de la Gironde. Il s'ensuit que l'avis a été émis dans le respect des dispositions des articles R. 313-22 et R. 313-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, notamment dans le respect de la règle selon laquelle le médecin ayant établi le rapport médical ne siège pas au sein du collège. Par suite, Mme E... n'est pas fondée à soutenir que la décision litigieuse est entachée d'un vice de procédure.
10. En quatrième lieu, il ressort de l'avis émis le 22 décembre 2017 par le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration qu'il a été rendu " après en avoir délibéré " par trois médecins qui l'ont signé. Si l'appelante soutient qu'il n'est pas établi que cet avis aurait été pris à l'issue d'une délibération collégiale, elle n'apporte aucun élément de nature à corroborer ses allégations et à contredire les mentions figurant sur cet avis. Dès lors, et nonobstant la circonstance que les modalités du délibéré ne sont pas précisées, le moyen tiré de l'irrégularité de la procédure doit être écarté.
11. En cinquième lieu, le collège de médecins n'était pas tenu de se prononcer, dans son avis du 22 décembre 2017, sur l'existence d'un traitement approprié à l'état de santé de l'intéressée dans son pays d'origine dès lors qu'il a estimé que la condition tenant aux conséquences d'une exceptionnelle gravité du défaut d'une prise en charge médicale n'était pas, en l'espèce, remplie. Par suite, Mme E... n'est pas fondée à soutenir que cet avis a méconnu, pour ce motif, les dispositions de l'article 6 précité de l'arrêté du 27 décembre 2016.
12. En sixième lieu, pour refuser à Mme E... le renouvellement de son titre de séjour en tant qu'étranger malade, le préfet de la Gironde s'est fondé sur l'avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration du 22 décembre 2017, qui indique que son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut ne devrait pas entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qu'elle peut voyager sans risque vers son pays d'origine. Si Mme E... produit, en première instance, un compte-rendu d'échographie de l'épaule droite du 18 juillet 2017, un autre compte-rendu attestant de la réalisation d'une l'infiltration lombaire du 21 décembre 2017 et un certificat médical du 8 mars 2018 établi, postérieurement à l'arrêté litigieux, par un praticien hospitalier du centre hospitalier Charles Perrens de Bordeaux, ces éléments médicaux, peu circonstanciés, ne suffisent pas à remettre en cause l'appréciation portée par le collège de médecins. Au demeurant, l'intéressée ne démontre pas qu'elle ne pourrait effectivement bénéficier d'un traitement approprié à son état de santé dans son pays d'origine. Par suite, le moyen tiré de ce que le préfet a entaché sa décision d'une erreur d'appréciation de son état de santé doit être écarté.
13. En septième et dernier lieu, aux termes des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. /2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ". Pour l'application des stipulations précitées, l'étranger qui invoque la protection due à son droit au respect de sa vie privée et familiale en France doit apporter toute justification permettant d'apprécier la réalité et la stabilité de ses liens personnels et familiaux effectifs en France au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine.
14. Si Mme E... se prévaut de la durée de sa présence en France, elle n'établit cependant pas avoir tissé sur le territoire national des liens personnels intenses et stables. En outre, la présence de sa fille en situation régulière sur le territoire ne lui confère aucun droit au séjour. De plus, il ressort des pièces du dossier qu'elle n'est pas dépourvue de toute attache familiale dans son pays d'origine, où résident quatre de ses cinq enfants et sa fratrie et où elle a vécu jusqu'à l'âge de 50 ans. Il ressort, de surcroît, des termes mêmes de l'arrêté contesté qu'elle n'a pas rompu tout lien avec son pays d'origine puisqu'elle y a effectué un séjour du 19 janvier au 9 mars 2017. Elle ne justifie pas davantage d'une intégration professionnelle à la date de la décision en litige. Dans ces conditions, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, le préfet n'a pas porté au droit au respect de la vie privée et familiale de l'intéressée une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise et son arrêté ne peut donc être regardé comme méconnaissant les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Pour les mêmes motifs, l'appelante n'est pas fondée à soutenir que la décision de refus de renouvellement de titre était, à la date de son édiction, entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de sa situation personnelle.
En ce qui concerne la décision portant refus de délivrance d'une carte de résident :
15. Aux termes de l'article 12 de la convention susvisée du 24 janvier 1994 : " Après trois années de résidence régulière et non interrompue, les nationaux de chacun des États contractants établis sur le territoire de l'autre État peuvent obtenir un titre de séjour de dix ans dans les conditions prévues par la législation de l'État de résidence. Ce titre de séjour est renouvelable de plein droit, et les droits et taxes exigibles lors de sa délivrance ou de son renouvellement le sont conformément à la législation en vigueur dans l'État de résidence ". Aux termes de l'article L. 314-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors applicable à la date de l'arrêté en litige : " Une carte de résident portant la mention " résident de longue durée-UE " est délivrée de plein droit à l'étranger qui justifie : / (...) 2° De ressources stables, régulières et suffisantes pour subvenir à ses besoins. Ces ressources doivent atteindre un montant au moins égal au salaire minimum de croissance. Sont prises en compte toutes les ressources propres du demandeur, indépendamment des prestations familiales et des allocations prévues à l'article L. 262-1 du code de l'action sociale et des familles ainsi qu'aux articles L. 5423-1, L. 5423-2 et L. 5423-3 du code du travail. La condition prévue au présent 2° n'est pas applicable lorsque la personne qui demande la carte de résident est titulaire de l'allocation aux adultes handicapés mentionnée à l'article L. 821-1 du code de la sécurité sociale ou de l'allocation supplémentaire mentionnée à l'article L. 815-24 du même code ". Aux termes de l'article R. 314-1-1 du même code : " L'étranger qui sollicite la délivrance de la carte de résident portant la mention " résident de longue durée-UE " doit justifier qu'il remplit les conditions prévues aux articles L. 314-8, L. 314-8-1 ou L. 314-8-2 en présentant, outre les pièces mentionnées aux articles R. 311-2-2 et R. 314-1, les pièces suivantes : (...) 2° La justification qu'il dispose de ressources propres, stables et régulières, suffisant à son entretien, indépendamment des prestations et des allocations mentionnées au 2° de l'article L. 314-8, appréciées sur la période des cinq années précédant sa demande, par référence au montant du salaire minimum de croissance ; lorsque les ressources du demandeur ne sont pas suffisantes ou ne sont pas stables et régulières pour la période des cinq années précédant la demande, une décision favorable peut être prise, soit si le demandeur justifie être propriétaire de son logement ou en jouir à titre gratuit, soit en tenant compte de l'évolution favorable de sa situation quant à la stabilité et à la régularité de ses revenus, y compris après le dépôt de la demande. ".
16. Il ressort des pièces du dossier que l'appelante a cessé de travailler à compter du 8 novembre 2016. Mme E... ne démontre pas disposer de ressources propres, stables et régulières, atteignant un montant au moins égal au montant du salaire minimum interprofessionnel de croissance. Si elle fait valoir qu'elle est hébergée à titre gratuit chez sa fille, l'attestation de sa fille, établie le 5 mars 2018, soit postérieurement à la décision refusant de lui délivrer une carte de résident, ne précise pas la date à compter de laquelle elle héberge sa mère. Ainsi, aucun élément ne permet de démontrer que l'intéressée était hébergée à titre gratuit par sa fille à la date de la décision de refus de délivrance d'une carte de résident. De plus, l'appelante n'apporte aucun document permettant de démontrer qu'elle avait informé le préfet, avant qu'il ne refuse de lui délivrer une carte de résident le 29 septembre 2017, de ce qu'elle était, avant cette date, hébergée à titre gratuit par sa fille. Par ailleurs, elle ne justifie d'aucune perspective de progression favorable de sa situation quant à la stabilité et à la régularité de ses revenus. Du reste, s'il ressort des pièces du dossier qu'elle s'est vu reconnaître la qualité de travailleur handicapé du 3 mai 2017 au 31 mai 2022, elle n'était toutefois pas, à la date de la décision litigieuse, bénéficiaire de l'allocation aux adultes handicapés. Ainsi, la condition de ressources lui était, à la date de la décision en litige, opposable. Dans ces conditions, c'est à bon droit que le préfet a refusé de lui délivrer une carte de résident.
En ce qui concerne l'arrêté portant obligation de quitter le territoire français :
17. Il résulte de ce qui précède que l'appelante n'est pas fondée à exciper de l'illégalité de la mesure d'éloignement à l'encontre de la décision de refus de séjour.
18. Les moyens tirés de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de la décision sur sa situation personnelle doivent être écartés pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 14.
19. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité des conclusions tendant à l'annulation de la décision du 29 septembre 2017 portant refus de carte de résident, que Mme E... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte et celles tendant à l'application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme E... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... E... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de la Gironde.
Délibéré après l'audience du 5 septembre 2019 à laquelle siégeaient :
M. Éric Rey-Bèthbéder, président-rapporteur,
Mme Frédérique Munoz-Pauziès, président-assesseur,
Mme Florence Madelaigue, premier-conseiller.
Lu en audience publique, le 3 octobre 2019.
Le président assesseur,
Frédérique Munoz-PauzièsLe président-rapporteur,
Éric Rey-Bèthbéder
Le greffier,
Caroline Brunier
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 18BX04533