- enfin, de mettre à la charge solidaire de M. G..., de la société Colas et de la société Île de France Pavage les frais d'expertise.
Par un jugement n° 1602203 du 21 novembre 2018, le tribunal administratif de Poitiers a condamné la société Colas Sud-Ouest à verser à la commune de Vars la somme de 7 062,26 euros HT en réparation des désordres et a mis à la charge de cette société les frais et honoraires d'expertise, taxés à la somme de 19 825,68 euros.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 17 janvier et 19 juillet 2019, la société Colas Sud-Ouest, représentée par Me D..., demande à la cour :
1°) d'annuler l'article 2 du jugement du tribunal administratif de Poitiers du 21 novembre 2018 mettant à sa charge les frais et honoraires de l'expertise ;
2°) de mettre ces frais à la charge de la commune de Vars ;
3°) à titre subsidiaire, de limiter à 30 % la part de ces frais mise à sa charge déduction faite des factures de la société ERI SUD OUEST d'un montant de 5 664 euros et de limiter ainsi sa condamnation à la somme de 4 248,50 euros HT ;
4°) de mettre à la charge solidaire de la commune de Vars la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
La société Colas Sud-Ouest soutient que :
- si les dépens sont normalement supportés par la partie perdante, des circonstances particulières à l'espèce peuvent justifier que le juge les partage entre les parties et même qu'il les mette à la charge de la partie gagnante ;
- en l'espèce, les désordres expertisés ne lui sont, pour la plupart, pas imputables et les frais et honoraires d'expertise résultent majoritairement des opérations consacrées aux désordres apparus sur la route départementale, qui ne lui sont pas imputables ; il en va ainsi des deux factures de la société Eri Sud-Ouest de 2 328 euros HT et 3 336 euros HT ;
- la commune de Vars a pourtant sollicité la réalisation d'une expertise portant sur les désordres apparus sur les voies départementales, a demandé à plusieurs reprises l'extension de ces opérations d'expertise et a engagé une action contentieuse, alors qu'elle n'avait pas qualité pour engager une action décennale.
Par des mémoires en défense, enregistrés les 28 mars et 13 septembre 2019, la commune de Vars, représentée par Me F..., conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 3 000 euros soit mise à la charge de la société Colas Sud-Ouest au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que les moyens de la requête ne sont pas fondés.
Par un mémoire, enregistré le 19 mars 2020, M. A... G..., représenté par Me E..., demande à la cour de juger qu'aucune somme ne doit être mise à sa charge au titre des frais d'expertise et à ce que la somme de 1 000 euros soit mise à la charge de la commune de Vars ou de tout succombant au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code des marchés publics ;
- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme L...,
- les conclusions de Mme B... C...,
- et les observations de Me J..., substituant Me D..., représentant la société Colas Sud-Ouest, et Me I..., représentant M. G....
Considérant ce qui suit :
1. Par acte d'engagement du 29 avril 2003, la commune de Vars (Charente) a confié l'exécution des lots n° 1 et n° 2 du marché de maîtrise d'oeuvre des travaux d'aménagement de la place du bourg à M. G... et la société Constance Ingénierie est intervenue en qualité de sous-traitante pour la partie technique. Par acte d'engagement du 13 mai 2004, la société Colas Sud-Ouest s'est vu confier la réalisation du lot n° 1 " terrassement - voirie - réseaux divers " et a sous-traité à la société Île-de-France Pavage la pose des pavés, du béton désactivé, des bordures et des caniveaux. Les travaux ont été réceptionnés le 7 septembre 2005 sans réserve. Des désordres sont apparus en 2007 et la commune de Vars a saisi le tribunal administratif de Poitiers d'une demande tendant, sur le fondement de la garantie décennale, à la condamnation des constructeurs à l'indemniser des préjudices subis. La société Colas Sud-Ouest relève appel du jugement du 21 novembre 2018 en tant que le tribunal administratif de Poitiers a mis à sa charge l'intégralité des frais et honoraires de l'expertise pour un montant de 19 825,68 euros.
2. Aux termes de l'article R. 761-1 du code de justice administrative : " Les dépens comprennent les frais d'expertise, d'enquête et de toute autre mesure d'instruction dont les frais ne sont pas à la charge de l'État. / Sous réserve de dispositions particulières, ils sont mis à la charge de toute partie perdante sauf si les circonstances particulières de l'affaire justifient qu'ils soient mis à la charge d'une autre partie ou partagés entre les parties (...) ".
3. Il résulte de ces dispositions que le juge administratif peut, en raison des circonstances particulières d'une affaire, décider de faire supporter les frais d'expertise à la partie qui l'emporte. Il peut également les mettre, entièrement ou pour partie, à la charge de la partie qui l'emporte lorsque leur montant a été augmenté par le comportement de cette dernière.
4. Il résulte de l'instruction que le rapport de M. H..., expert désigné par le président du tribunal administratif de Poitiers, dresse une liste de cinq désordres, classés de A à E, et évalue le coût total hors taxes des réparations nécessaires à la somme de 57 528,76 euros. Or, ainsi que le fait valoir la société appelante, seuls les désordres B (4 700 euros HT) et une partie des désordres D (2 000 euros HT) sont imputables à la société Colas Sud-Ouest. Les autres désordres sont imputables à la commune, à l'architecte, M. G..., et à la société Île-de-France Pavage, sous-traitant de la société Colas Sud-Ouest. Toutefois, le tribunal administratif a rejeté les conclusions de la commune dirigées contre M. G..., au motif que les désordres imputables à ce dernier portaient sur une portion de route départementale et que la commune de Vars n'avait pas qualité pour rechercher la responsabilité décennale des constructeurs. Il a également rejeté les conclusions dirigées contre la société Île-de-France Pavage, au motif qu'elles étaient portées devant un ordre de juridiction incompétent pour en connaître. Dès lors, seule la société Colas Sud-Ouest, responsable de moins d'un huitième des désordres, s'est vu condamnée à indemniser la commune de Vars.
5. La société Colas Sud-Ouest fait valoir également que le comportement fautif de la commune a augmenté la durée de l'expertise et les frais afférents, dès lors que cette dernière a demandé que l'expertise porte, outre sur les désordres affectant la voirie communale, sur ceux affectant des voies appartenant au domaine public routier du département de la Charente, alors qu'elle n'avait pas qualité pour réclamer une indemnisation de ces désordres au titre de la garantie décennale. Il résulte toutefois de l'instruction que le département de la Charente, par convention du 31 mars 2005, a délégué à la commune de Vars la maîtrise d'ouvrage des travaux portant sur la voirie départementale traversant le territoire de la commune. Si la société appelante fait valoir que l'article 5 de cette convention stipule que " La commune de Vars restera responsable de la saisine des entreprises en cas de dommages liés à l'exécution des travaux couverts par les différentes garanties contractuelles, ainsi que des réparations nécessaires dans le cadre de ces garanties ", ce qui exclut l'action en garantie décennale, qui n'est pas une garantie contractuelle, il résulte de l'instruction que c'est en toute bonne foi que la commune s'est crue fondée à demander que l'expertise porte sur la voirie départementale traversant son centre bourg.
6. Il résulte de ce qui précède qu'il y a lieu de ramener le montant que le tribunal administratif de Poitiers a mis à la charge de la société Colas Sud-Ouest au titre des frais et honoraires d'expertise à la somme de 9 913 euros HT. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de la commune de Vars, au profit de la société Colas Sud-Ouest, la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de rejeter les conclusions présentées sur ce fondement par la commune et M. G....
DÉCIDE :
Article 1er : La somme mise à la charge de la société Colas Sud-Ouest au titre des frais et honoraires de l'expert par l'article 2 du jugement attaqué est ramenée de 19 825,68 euros à 9 913 euros.
Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Poitiers du 21 novembre 2018 est réformé en ce qu'il est contraire au présent arrêt.
Article 3 : La commune de Vars versera à la société Colas Sud-Ouest la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de la société Colas Sud-Ouest, ainsi que les conclusions de la commune de Vars et de M. G... tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sont rejetés.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la société Colas Sud-Ouest, à la commune de Vars et à M. A... G....
Délibéré après l'audience du 19 novembre 2020 à laquelle siégeaient :
M. Éric Rey-Bèthbéder, président,
Mme K..., présidente-assesseure,
Mme Florence Madelaigue, premier-conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 décembre 2020.
Le président de chambre,
Éric Rey-Bèthbéder
La République mande et ordonne au préfet de la Charente en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 19BX00249