I - Par une requête enregistrée sous le numéro 21DA00274 le 8 février 2021, Lille Métropole Habitat, représenté par Me E... A..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) de mettre à la charge de M. B... la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
II - Par une requête enregistrée le 8 février 2021 sous le numéro 21DA00275, Lille Métropole Habitat, représenté par Me E... A..., demande à la cour de surseoir à l'exécution du jugement du 18 décembre 2020 en application des articles R. 811-15 et R. 811-17 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces des dossiers.
Vu :
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code de l'urbanisme ;
- la loi n° 2020-1379 du 14 novembre 2020 autorisant la prorogation de l'état d'urgence sanitaire ;
- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;
- le code de justice administrative.
Considérant ce qui suit :
1. Il y a lieu de joindre les requêtes susvisées pour y statuer par une seule ordonnance.
Sur la légalité de la délibération du 4 mai 2017 :
2. Le dernier alinéa de l'article R. 222-1 du code de justice administrative dispose : " (...) les présidents des formations de jugement des cours (...) peuvent (...) par ordonnance, rejeter (...) les requêtes d'appel manifestement dépourvues de fondement. (...) ".
3. L'article L. 5211-9 du code général des collectivités territoriales dispose : " (...) Le président de l'établissement public de coopération intercommunale peut, par délégation de son organe délibérant, être chargé d'exercer (...) les droits de préemption (...) Il peut également déléguer l'exercice de ces droits à l'occasion de l'aliénation d'un bien, dans les conditions que fixe l'organe délibérant de l'établissement. Il rend compte à la plus proche réunion utile de l'organe délibérant de l'exercice de cette compétence. (...) ". Selon l'article L. 5211-10 : " (...) Le président, les vice-présidents ayant reçu délégation (...) peuvent recevoir délégation d'une partie des attributions de l'organe délibérant (...) ".
4. L'article L. 5211-9 autorise ainsi l'organe délibérant à déléguer l'exercice du droit de préemption au président et celui-ci à conférer une subdélégation ponctuelle de ce pouvoir. Il se déduit de cette disposition spéciale que la disposition générale de l'article L. 5211-10 n'a pas pour objet et ne saurait avoir pour effet d'autoriser l'organe délibérant à déléguer l'exercice de ce droit à un vice-président ou le président à conférer en la matière une subdélégation permanente de pouvoir à un vice-président. Si l'article L. 5211-10 autorise le président à conférer en la matière une délégation de signature à un vice-président, celui-ci est alors habilité à exercer les pouvoirs du président mais, en l'absence de texte législatif ou réglementaire le permettant, il n'est pas autorisé, même avec l'accord du président, à les subdéléguer.
5. Par délibération du 5 janvier 2017, le conseil de la métropole européenne de Lille a délégué à son président la " décision d'exercer le droit de préemption et de déléguer l'exercice de ce droit à l'occasion de l'aliénation d'un bien au profit de Lille Métropole Habitat " et a autorisé son président à déléguer à un vice-président " l'exercice des attributions définies ci-dessus ". Par arrêté du 23 février 2017, le président a délégué sa signature au vice-président Patrick D... pour la " décision d'exercer le droit de préemption et de déléguer l'exercice de ce droit au profit de Lille Métropole Habitat ". Par décision du 26 avril 2017, M. D... a décidé de " déléguer l'exercice du droit de préemption à Lille Métropole Habitat " sur le bien litigieux.
6. Il résulte de ce qui a été dit au point 4 que la délibération du 5 janvier 2017 et l'arrêté du 23 février 2017 n'ont pu légalement autoriser M. D... à subdéléguer l'exercice du droit de préemption à Lille Métropole Habitat. La subdélégation du 26 avril 2017 est donc illégale et, par voie de conséquence, la délibération du 4 mai 2017 prise sur son fondement.
7. Dans ces conditions, Lille Métropole Habitat n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a annulé la délibération du 4 mai 2017.
Sur les conséquences de l'annulation de la délibération du 4 mai 2017 :
8. Il appartient au juge administratif, saisi de conclusions en ce sens par l'ancien propriétaire ou par l'acquéreur évincé et après avoir mis en cause l'autre partie à la vente initialement projetée, d'exercer les pouvoirs qu'il tient des articles L. 911-1 et suivants du code de justice administrative afin d'ordonner, le cas échéant sous astreinte, les mesures qu'implique l'annulation, par le juge de l'excès de pouvoir, d'une décision de préemption, sous réserve de la compétence du juge judiciaire, en cas de désaccord sur le prix auquel l'acquisition du bien doit être proposée, pour fixer ce prix. A ce titre, il lui appartient, après avoir vérifié, au regard de l'ensemble des intérêts en présence, que le rétablissement de la situation initiale ne porte pas une atteinte excessive à l'intérêt général, de prescrire au titulaire du droit de préemption qui a acquis le bien illégalement préempté, s'il ne l'a pas entre-temps cédé à un tiers, de prendre toute mesure afin de mettre fin aux effets de la décision annulée et, en particulier, de proposer à l'ancien propriétaire puis, le cas échéant, à l'acquéreur évincé d'acquérir le bien, à un prix visant à rétablir, sans enrichissement injustifié de l'une des parties, les conditions de la transaction à laquelle l'exercice du droit de préemption a fait obstacle.
9. Il ressort des pièces du dossier que l'acquéreur évincé M. B... avait pour projet de diviser le terrain en trois lots à usage d'habitation et a déposé en mairie une demande de permis d'aménager le 21 avril 2017. Si le plan local d'urbanisme impose sur la zone un minimum de 20 % de logements locatifs sociaux, il n'est pas démontré que cette contrainte ne pourra pas être prise en compte par le projet de M. B....
10. Si la commune de Quesnoy-sur-Deûle ne remplit pas son obligation légale en matière de logements sociaux, si Lille Métropole Habitat, chargé de la gestion d'un service d'intérêt général en vertu de l'article L. 411-2 du code de la construction et de l'habitation, a le projet de construire quatorze logements sociaux, si le permis de construire correspondant a été délivré en 2019, si les offres des candidats au marché de travaux ont été déposées en 2020 et si la métropole a attribué une subvention à Lille Métropole Habitat qui a déjà exposé des frais et engagé des démarches de commercialisation, les travaux prévus par le projet n'ont pas encore débuté.
11. Il résulte de ce qui précède que Lille Métropole Habitat n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif lui a enjoint de proposer l'acquisition du bien aux anciens propriétaires puis, le cas échéant, à l'acquéreur évincé.
Sur les conclusions à fin de sursis à exécution :
12. Il résulte de ce qui précède qu'il n'y a pas lieu de statuer sur ces conclusions.
Sur les frais exposés et non compris dans les dépens :
13. Les demandes présentées par Lille Métropole Habitat, partie perdante, sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.
ORDONNE :
Article 1er : Les conclusions de Lille Métropole Habitat à fin d'annulation sont rejetées.
Article 2 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de Lille Métropole Habitat à fin de sursis à exécution.
Article 3 : Les demandes présentées par Lille Métropole Habitat au titre des frais exposés et non compris dans les dépens sont rejetées.
Article 4 : La présente ordonnance sera notifiée à Lille Métropole Habitat et à Me C... H... pour M. F... B....
N° 21DA00274, 21DA00275 2