Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 21 février 2019, M.F..., représenté par Me D...E..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté ;
3°) d'enjoindre au préfet de l'Eure de lui délivrer une carte de séjour temporaire valable un an portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, ou, à défaut, d'enjoindre au préfet de l'Eure de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour et de procéder à un nouvel examen de sa situation dans un délai de huit jours à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Christian Boulanger, président-rapporteur, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. B...F..., ressortissant de la République démocratique du Congo, né le 20 janvier 1997, déclare être entré en France le 26 juin 2016 pour y solliciter l'asile. Sa demande a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides le 21 avril 2017 et par la Cour nationale du droit d'asile le 11 décembre 2017. M. F...relève appel du jugement du 24 janvier 2019 par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 26 juin 2018 du préfet de l'Eure rejetant sa demande de titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français et fixant le pays de destination.
Sur la décision de refus de titre de séjour :
2. La motivation de l'arrêté attaqué n'est pas la reproduction d'une formule stéréotypée et comporte l'ensemble des considérations de droit et de fait sur lesquelles il se fonde alors même que les motifs ne reprennent pas l'ensemble des éléments caractérisant la situation personnelle de M. F.... Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de l'arrêté contesté doit être écarté.
3. Il ne résulte ni de la motivation de l'arrêté en litige, ni d'aucune autre pièce du dossier, que le préfet de l'Eure n'aurait pas procédé à un examen particulier de la situation de M. F... avant de prendre la décision contestée. Dès lors, le moyen tiré du défaut d'examen de la situation particulière de l'intéressé doit être écarté.
4. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa version alors applicable : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : / (...) / 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République / (...) ". Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. (...) ".
5. M. F...se prévaut d'une vie commune, depuis le 25 septembre 2017, avec Mme C...A..., une compatriote titulaire d'une carte de résident valable jusqu'au 29 mars 2023, de la naissance de leur fille le 15 septembre 2017, à l'éducation et à l'entretien de laquelle il contribue, ainsi que d'une seconde grossesse de sa compagne, postérieure à l'arrêté attaqué. Il ressort toutefois des pièces du dossier qu'il s'est maintenu irrégulièrement en France après le rejet définitif de sa demande d'asile et n'a pas déféré à une première décision d'obligation de quitter le territoire du 2 février 2018. La circonstance, qui n'est pas démontrée par les pièces du dossier, que ses parents seraient décédés ne suffit pas à considérer qu'il serait dépourvu de toute attache en République démocratique du Congo, pays où il a vécu jusqu'à l'âge de dix-neuf ans et dont sa compagne et sa fille ont également la nationalité. Dès lors, compte tenu des conditions de séjour de l'intéressé et du caractère récent de la vie commune du couple, l'arrêté attaqué, qui au demeurant ne fait pas obstacle à ce que la compagne du requérant demande le bénéfice du regroupement familial dans les conditions prévues par la loi, ne saurait être regardé comme portant à son droit au respect de la vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au but en vue duquel il a été pris. Par suite, les moyens tirés de la méconnaissance des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doivent être écartés. Pour les mêmes motifs, le moyen tiré de ce que le préfet de l'Eure aurait commis une erreur manifeste d'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation de M. F...doit être écarté.
6. Pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 5, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.
7. Aux termes du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale des droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ". Il résulte de ces stipulations, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant. Elles sont applicables non seulement aux décisions qui ont pour objet de régler la situation personnelle d'enfants mineurs mais aussi à celles qui ont pour effet d'affecter, de manière suffisamment directe et certaine, leur situation.
8. Il n'est fait état par l'appelant d'aucune circonstance qui ferait obstacle à ce que la cellule familiale formée par sa compagne, leur enfant mineur et lui-même soit reconstituée en République démocratique du Congo, pays dont ils ont la nationalité. En outre, ainsi qu'il a été dit au point 5, la compagne de M. F...peut solliciter le bénéfice du regroupement familial. Par suite, la décision attaquée ne méconnaît pas les stipulations du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.
9. Il résulte de ce qui précède que la décision de refus de titre de séjour n'est pas entachée d'illégalité.
Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :
10. Il résulte de ce qui a été dit au point 9 que M. F...n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire français.
11. La décision attaquée comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait sur lesquelles elle se fonde. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation doit être écarté.
12. Il ne ressort pas des pièces du dossier, notamment des termes mêmes de la décision attaquée, que le préfet de l'Eure se serait abstenu de procéder à l'examen de la situation personnelle de M. F...avant de l'obliger à quitter le territoire français.
13. Pour les mêmes raisons que celles énoncées au point 5, M. F...n'est pas fondé à soutenir que le préfet de l'Eure aurait méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ou commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle de l'intéressé.
14. Il résulte de ce qui précède que la décision portant obligation de quitter le territoire français n'est pas entachée d'illégalité.
Sur la décision fixant le pays de renvoi :
15. Il résulte de ce qui a été dit au point 14 que M. F...n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français à l'encontre de la décision fixant le pays de destination.
16. La décision attaquée comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait sur lesquelles elle se fonde. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation doit être écarté.
17. Compte tenu de ce qui a été dit aux points 5 et 8, il n'est pas établi que le préfet de l'Eure aurait fait une appréciation manifestement erronée des conséquences de sa décision sur la situation personnelle de l'intéressé en fixant le pays de destination.
18. Il résulte de tout ce qui précède que M. F...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles présentées au titre des frais liés au litige doivent être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. F...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...F..., au ministre de l'intérieur et à Me D...E....
Copie en sera transmise pour information au préfet de l'Eure.
N°19DA00435 5