Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 9 janvier 2019, M. et MmeD..., représentés par Me B...E..., demandent à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir ces arrêtés ;
3°) d'enjoindre au préfet de l'Oise de leur délivrer les titres de séjour sollicités dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
--------------------------------------------------------------------------------------------------------
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Les rapports de M. Christian Boulanger, président de chambre, ont été entendus au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. et Mme D..., ressortissants arméniens nés le 13 septembre 1983 et le 25 mai 1984, déclarent être entrés en France respectivement en 2010 et 2011. Leurs demandes d'asile ont été rejetées, pour M. D..., le 18 mai 2010 par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et le 26 avril 2011 par la Cour nationale du droit d'asile, et, pour Mme D..., le 31 mai 2012, par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et le 12 juin 2013, par la Cour nationale du droit d'asile. Suite au rejet de ces demandes d'asile, le préfet de l'Oise a rejeté, les 3 et 4 avril 2014, les demandes de titre de séjour des requérants et a assorti ses décisions d'une obligation de quitter le territoire français. En outre, M. D... a fait l'objet d'un refus de titre en qualité d'étranger malade le 31 août 2011 et d'une nouvelle obligation de quitter le territoire français le 5 février 2016. Enfin, par deux arrêtés du 20 août 2018, le préfet de l'Oise a rejeté les demandes d'admission au séjour à titre exceptionnel déposées par les intéressés. Ces derniers relèvent appel du jugement du 13 novembre 2018 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation des arrêtés du 20 août 2018.
2. Aux termes du premier alinéa de l'article L. 114-5 du code des relations entre le public et l'administration : " Lorsqu'une demande adressée à l'administration est incomplète, celle-ci indique au demandeur les pièces et informations manquantes exigées par les textes législatifs et réglementaires en vigueur. Elle fixe un délai pour la réception de ces pièces et informations ".
3. Il ressort des pièces des dossiers que le préfet de l'Oise ne s'est pas fondé sur l'absence de documents ou de justificatifs nécessaires à l'instruction des dossiers des requérants, mais sur la circonstance qu'ils ne remplissaient pas les conditions de fond permettant de leur délivrer les titres de séjour sollicités. Dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 114-5 précité doit être écarté.
4. Si l'administration a estimé, à tort, que les requérants n'avaient que deux jeunes enfants alors qu'ils sont parents de trois filles dont l'aînée avait treize ans à la date de l'arrêté attaquée, ces circonstances de fait n'ont pas eu d'incidence sur l'appréciation qu'a portée le préfet sur la possibilité d'admettre les requérants au séjour à titre exceptionnel, comme l'ont relevé les premiers juges. Par suite, le moyen tiré de l'erreur de fait doit être écarté.
5. Lorsqu'il est saisi d'une demande de délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'une des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet n'est pas tenu, en l'absence de dispositions expresses en ce sens, d'examiner d'office si l'intéressé peut prétendre à une autorisation de séjour sur le fondement d'une autre disposition de ce code, même s'il lui est toujours loisible de le faire à titre gracieux, notamment en vue de régulariser la situation de l'intéressé.
6. Il ressort des pièces du dossier que M. et Mme D... ont sollicité une admission au séjour à titre exceptionnel sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Ainsi, ils ne peuvent utilement invoquer le moyen tiré de la méconnaissance du 7° de l'article L. 313-11 du même code, à l'encontre du refus du préfet de l'Oise opposé à des demandes de titres de séjour qui n'ont pas été présentées, ni examinées, sur le fondement de cet article.
7. Aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 313-2. / (...) ".
8. En présence d'une demande de régularisation présentée, sur le fondement de ces dispositions, par un étranger qui ne serait pas en situation de polygamie et dont la présence en France ne présenterait pas une menace pour l'ordre public, il appartient à l'autorité administrative de vérifier, dans un premier temps, si l'admission exceptionnelle au séjour par la délivrance d'une carte portant la mention " vie privée et familiale " répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard de motifs exceptionnels et, à défaut, dans un second temps, s'il est fait état de motifs exceptionnels de nature à permettre la délivrance, dans ce cadre, d'une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " ou " travailleur temporaire ". Il appartient seulement au juge administratif, saisi d'un moyen en ce sens, de vérifier que l'administration n'a pas commis d'erreur manifeste dans l'appréciation qu'elle a portée sur l'un ou l'autre de ces points.
9. M. et MmeD..., mariés et parents de trois filles, n'établissent pas séjourner en France de manière continue depuis 2010 ou 2011, dates alléguées de leur entrée sur le territoire français. Leurs demandes d'asile ont été rejetées par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et par la Cour nationale du droit d'asile ainsi qu'il a été dit au point 1. Ils ont ensuite fait l'objet de décisions d'éloignement auxquelles ils n'ont pas déféré. Les requérants se sont ainsi maintenus en France, tout d'abord au bénéfice de l'examen de leur demande d'asile puis de manière irrégulière. Ils ne justifient pas d'une intégration sociale ou professionnelle particulière. La décision attaquée n'a pas pour effet de mettre fin à l'unité de la cellule familiale et il ne ressort pas des pièces du dossier que les enfants du couple, âgés de treize ans, de six ans et de presque un an à la date de l'arrêté attaqué, ne pourraient pas se réinsérer en Arménie, alors même qu'elles sont scolarisées pour les deux plus âgées. Les intéressés n'établissent pas être dépourvus de toute attache en Arménie où ils ont vécu tous deux au moins jusqu'à l'âge de vingt-sept ans. Dans ces conditions, les requérants ne démontrent pas pouvoir se prévaloir de considérations humanitaires ou de motifs exceptionnels propres à justifier leur admission exceptionnelle sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
10. Pour les motifs mentionnés au point précédent, M. et Mme D... ne sont pas fondés à soutenir que le préfet de l'Oise aurait méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ou qu'il aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle des intéressés.
11. Il ne ressort pas des pièces du dossier que les enfants ne pourraient pas suivre leurs parents en Arménie et y reprendre leur scolarité. Par suite, la décision attaquée ne méconnaît pas les stipulations du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.
12. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme D...ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté leurs demandes. Par voie de conséquence, leurs conclusions à fin d'injonction et celles présentées au titre des frais liés au litige doivent être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : Les requêtes de M. et Mme D...sont rejetées.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...D..., à Mme A...D..., au ministre de l'intérieur et à Me B...E....
Copie en sera transmise pour information au préfet de l'Oise.
N°19DA00050 4