Par une requête, enregistrée le 14 janvier 2019, M. B...H..., représenté par Me C...G..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté ;
3°) d'enjoindre au préfet de l'Eure de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " valable un an, dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, à défaut, de procéder au réexamen de sa situation et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans l'attente dans un délai de huit jours à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 61-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Paul-Louis Albertini, président de chambre, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M.H..., ressortissant de la République démocratique du Congo né le 11 février 1980, déclare être entré en France le 23 décembre 2012. Sa demande d'asile a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides le 3 avril 2014 et par la Cour nationale du droit d'asile le 24 octobre 2014. En raison de son état de santé, il a obtenu, le 6 mars 2016, un titre de séjour sur le fondement des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile valable jusqu'au 5 mars 2017. Il a sollicité, le 28 février 2017, le renouvellement de son titre de séjour. Par un arrêté du 27 décembre 2017, le préfet de l'Eure a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. M. H...relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté.
Sur la décision de refus de titre de séjour :
2. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : / (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat (...) ". Aux termes de l'article R. 313-22 du même code : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. / L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé (...) ". Aux termes de l'article R. 313-23 de ce code : " Le rapport médical mentionné à l'article R. 313-22 est établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration à partir d'un certificat médical établi par le médecin qui suit habituellement le demandeur ou par un médecin praticien hospitalier inscrits au tableau de l'ordre, dans les conditions prévues par l'arrêté mentionné au deuxième alinéa de l'article R. 313-22. Le médecin de l'office (...) transmet son rapport médical au collège de médecins. / Sous couvert du directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration le service médical de l'office informe le préfet qu'il a transmis au collège de médecins le rapport médical. (...) / Le collège à compétence nationale, composé de trois médecins, émet un avis dans les conditions de l'arrêté mentionné au premier alinéa du présent article. La composition du collège et, le cas échéant, de ses formations est fixée par décision du directeur général de l'office. Le médecin ayant établi le rapport médical ne siège pas au sein du collège. / (...) L'avis est transmis au préfet territorialement compétent, sous couvert du directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration ".
3. Il ressort des pièces versées au dossier par le préfet de l'Eure, en particulier de l'indication du nom du médecin qui a établi le rapport médical, donnée au préfet par les services de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII), figurant sur le bordereau de transmission de l'avis émis par le collège des médecins de l'Office, que le rapport médical sur l'état de santé de M. H...prévu à l'article R. 313-22 ci-dessus reproduit du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, a été établi par le docteurA..., et a été transmis au collège des médecins de l'Office composé par les docteursF..., D...etE.... Cette circonstance est confirmée par une attestation établie le 21 septembre 2018 par le directeur territorial de Rouen de l'OFII. Les médecins composant ce collège ont, en outre, été désignés par une décision du directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration du 8 juin 2017 publiée au bulletin officiel du ministère de l'intérieur du 15 juillet 2017. Dès lors, M. H...n'est pas fondé à soutenir que la décision de rejet de sa demande de titre de séjour est entachée d'un vice de procédure au regard des dispositions de l'article R. 313-23 du code précité.
4. Il ressort des pièces du dossier que M. H...souffre de troubles psychologiques. Par un avis du 14 août 2017, le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration a considéré que l'état de santé de l'intéressé nécessite une prise en charge mais que le défaut ne devrait pas entrainer de conséquences d'une exceptionnelle gravité et qu'il peut voyager sans risque vers son pays d'origine. Pour remettre en cause cette appréciation de son état de santé, M. H...n'a versé au dossier qu'un seul certificat médical qui a été émis le 6 février 2018 par un médecin exerçant au nouvel hôpital de Navarre, à Evreux. Ce document indique seulement que l'intéressé fait l'objet d'un suivi régulier au sein de cet établissement, formulation qui n'est ainsi pas de nature à remettre en cause cette appréciation, pas plus que les ordonnances médicales versées au dossier. Dans ces conditions et en admettant même qu'un traitement approprié à la prise en charge de l'intéressé ne serait pas disponible en République démocratique du Congo, la décision refusant de lui délivrer un titre de séjour n'a pas été prise en méconnaissance des dispositions précitées du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
5. Ainsi qu'il a été dit au point 1, M. H...déclare être entré en France le 23 décembre 2012. Il est célibataire et sans enfant à charge en France. Il ne ressort pas non plus des pièces du dossier que l'intéressé serait dépourvu de toute attache familiale dans son pays d'origine, où il a vécu au moins jusqu'à l'âge de trente-deux ans. Il ne démontre pas également qu'il aurait noué des liens sociaux et professionnels d'une particulière intensité sur le territoire français. En effet, si le requérant verse au débat des attestations de suivi de deux sessions de formations intitulées " acquérir et développer des compétences " ainsi que des fiches de paie établissant qu'il a exercé une activité professionnelle durant trois jours au cours de l'année 2017, ces éléments ne suffisent pas à établir une insertion professionnelle en France. Dans ces conditions et en dépit de la durée de son séjour en France, le préfet de l'Eure n'a pas porté au droit au respect de la vie privée et familiale de l'intéressé une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels le refus de séjour a été pris. Par suite, cette autorité n'a pas méconnu les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Pour les mêmes raisons, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.
6. Aux termes des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 313-2. / (...). ".
7. Compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, et pour les motifs énoncés au point 5, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'admission au séjour de M. H...répondait à des considérations humanitaires ou se justifierait au regard des motifs exceptionnels. Dès lors, en refusant de l'admettre exceptionnellement au séjour, le préfet de l'Eure n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions citées au point précédent.
8. Il résulte de ce qui précède que la décision de refus de titre de séjour n'est pas entachée d'illégalité.
Sur la décision portant obligation de quitter le territoire :
9. Il résulte de ce qui a été dit au point 8, que la décision de refus de titre de séjour n'est pas entachée d'illégalité. Dans ces conditions, le moyen tiré de l'illégalité de cette décision, invoqué à l'appui des conclusions dirigées contre la décision portant obligation de quitter le territoire doit être écarté.
10. Ainsi qu'il a été dit au point 3, le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration a été saisi de la situation médicale de M. H...et a émis un avis le 14 août 2017. Par suite, le moyen tiré de ce que le préfet n'aurait pas saisi pour avis le collège de médecin de l'OFII doit être écarté.
11. Aux termes des dispositions de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : / (...) / 10° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ; ".
12. Ainsi qu'il a été dit au point 4, il n'est pas établi qu'un défaut de prise en charge médical de M. H...pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité. Par suite, il n'était pas, à la date à laquelle l'arrêté en litige a été pris, au nombre des ressortissants étrangers visés par les dispositions précitées du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui ne peuvent légalement faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français. Dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions doit être écarté.
13. Pour les mêmes raisons que celles énoncées au point 5, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.
14. Il résulte de tout ce qui précède que la décision portant obligation de quitter le territoire français n'est pas entaché d'illégalité.
Sur la décision fixant le pays de destination :
15. Il y a lieu, par adoption de motifs retenus à bon droit par les premiers juges, d'écarter les moyens tirés de l'insuffisance de motivation de la décision contestée et de l'article L. 512-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
16. Il résulte de tout ce qui précède que M. H...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fins d'injonction assorties d'une astreinte ainsi que la demande présentée par son conseil au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. H...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...H..., au ministre de l'intérieur et à Me C...G....
Copie en sera transmise pour information au préfet de l'Eure.
N°19DA00100 6