Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 24 juillet 2015, le préfet de la Seine-Maritime demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) de rejeter la demande présentée par Mme C...devant le tribunal administratif.
Il soutient que la décision de refus de titre de séjour contestée ne porte pas au droit au respect de la vie privée et familiale de l'intéressée une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise.
Par un mémoire en défense, enregistré le 21 octobre 2015, Mme B...C..., représentée par Me A...D..., conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de l'Etat du versement à Me A...D...de la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Elle soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.
Mme C...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 21 septembre 2015 du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Douai désignant Me A...D....
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Christian Bernier, président-assesseur, a été entendu au cours de l'audience publique.
Sur le motif d'annulation retenu par le tribunal administratif :
1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que MmeC..., ressortissante arménienne, née le 23 décembre 1985, déclare être entrée en France le 24 septembre 2011 avec son époux et leurs deux enfants, nés respectivement en 2004 et 2007 ; qu'elle s'y est maintenue depuis cette date, notamment à la faveur de sa demande d'asile qui a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides le 22 mars 2013 puis par la Cour nationale du droit d'asile le 6 novembre 2013 ; qu'alors même qu'elle s'investit dans les activités scolaires et extrascolaires de ses deux enfants scolarisés en école primaire, elle ne justifie par ailleurs d'aucune réelle insertion sociale ou professionnelle ; qu'il ressort des pièces du dossier qu'elle n'a suivi que partiellement les cours de français dispensés deux fois par semaine depuis avril 2012 ; que son époux fait également l'objet d'un refus de titre de séjour assorti d'une obligation de quitter le territoire français à destination de l'Arménie ; qu'aucune circonstance ne fait obstacle à ce que la cellule familiale, avec leurs deux enfants nés en Arménie et celui né en France en 2013 et âgé de vingt et un mois à la date de la décision contestée, ne se reconstitue dans le pays d'origine ; que, par suite, compte tenu de la durée et des conditions de son séjour, la décision de refus de titre de séjour attaquée n'a pas porté au droit au respect de la vie privée et familiale de l'intéressée une atteinte disproportionnée au but en vue duquel elle a été prise ; qu'elle n'a donc pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, par suite, le préfet de la Seine-Maritime est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif a retenu ce motif pour annuler sa décision de refus de titre de séjour du 19 janvier 2015 et, par voie de conséquence, celles portant obligation quitter le territoire français et fixant le pays de renvoi ;
2. Considérant, toutefois, qu'il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par Mme C...devant la juridiction administrative ;
Sur la légalité du refus d'un titre de séjour :
3. Considérant que la décision attaquée comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait sur lesquelles elle se fonde ; que, dès lors, le moyen tiré du défaut de motivation de l'acte attaqué doit être écarté ;
4. Considérant que pour les mêmes raisons que celles énoncées au point 1, la décision contestée n'a pas méconnu les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, pour les mêmes motifs, le préfet n'a pas entaché sa décision d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de Mme C... ;
5. Considérant que, pour les mêmes raisons que celles exposées au point 1, Mme C... ne démontre pas davantage que sa situation personnelle répondrait à des considérations humanitaires ou à des motifs exceptionnels justifiant que lui soit délivré un titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
6. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que les enfants de Mme C...étaient âgés de onze ans, huit ans et vingt et un mois à la date de la décision attaquée ; que rien ne fait obstacle, et alors même que les deux aînés sont scolarisés en école primaire, à ce qu'ils puissent suivre leurs parents qui font l'un et l'autre l'objet d'une mesure d'éloignement ; que, dès lors, le préfet de la Seine-Maritime n'a pas, par la décision en litige, porté atteinte à l'intérêt supérieur des enfants ; que, par suite, les stipulations du 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant n'ont pas été méconnues ;
7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme C...n'est pas fondée à soutenir que la décision attaquée est entachée d'illégalité ;
Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :
8. Considérant que la décision attaquée comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait sur lesquelles elle se fonde ; que, dès lors, le moyen tiré du défaut de motivation de l'acte attaqué doit être écarté ;
9. Considérant que, compte tenu de ce qui a été dit au point 7, Mme C...n'est pas fondée à soutenir que la décision l'obligeant à quitter le territoire français est dépourvue de base légale à raison de l'illégalité de la décision lui refusant un titre de séjour ;
10. Considérant que pour les mêmes raisons que celles énoncées aux points 1, 4 et 6, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, de celles du 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant et de l'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de la décision sur la situation personnelle de MmeC..., doivent être écartés ;
11. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'intéressée n'est pas fondée à soutenir que la décision attaquée est entachée d'illégalité ;
Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :
12. Considérant que la décision attaquée fait état de la nationalité arménienne de la requérante, de la délivrance d'un passeport par son ambassade et du rejet de ses demandes par l'Office français des réfugiés et apatrides puis par la Cour nationale du droit d'asile ; qu'elle comporte ainsi l'énoncé des considérations de droit et de fait sur lesquelles elle se fonde ; que, dès lors, le moyen tiré du défaut de motivation de l'acte attaqué doit être écarté ;
13. Considérant que MmeC..., dont la demande de reconnaissance de la qualité de réfugié a, au demeurant, été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides puis par la Cour nationale du droit d'asile, ne produit aucun élément probant et nouveau de nature à établir qu'elle encourrait des risques en cas de retour dans son pays d'origine ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que la décision attaquée aurait été prise en méconnaissance des dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentale, doit être écarté ;
14. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'intéressée n'est pas fondée à soutenir que la décision attaquée est entachée d'illégalité ;
15. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le préfet de la Seine-Maritime est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a annulé sa décision de refus de titre de séjour et, par voie de conséquence, celle portant obligation de quitter le territoire français et celle fixant le pays de destination ; que, par suite, les conclusions aux fins d'injonction et celles présentées par Mme C...sur le fondement des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique doivent être rejetées ;
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Rouen est annulé.
Article 2 : La demande présentée par Mme C...devant le tribunal administratif de Rouen et les conclusions d'appel présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur, à Mme B...C...et à Me A...D....
Copie en sera transmise pour information au préfet de la Seine-Maritime.
Délibéré après l'audience publique du 21 janvier 2016 à laquelle siégeaient :
- M. Olivier Yeznikian, président de chambre,
- M. Christian Bernier, président-assesseur,
- M. Hadi Habchi, premier conseiller.
Lu en audience publique le 4 février 2016.
Le président-rapporteur,
Signé : C. BERNIERLe premier vice-président de la cour,
Président de chambre,
Signé : O. YEZNIKIAN
Le greffier,
Signé : S. DUPUIS
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition conforme,
Le greffier en chef,
Par délégation,
Le greffier,
Sylviane Dupuis
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N°15DA01254 2