Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 31 décembre 2015, M.F..., représenté par Me G...C..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif d'Amiens du 1er décembre 2015 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 10 août 2015 du préfet de l'Oise ;
3°) d'enjoindre au préfet de l'Oise de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ou, à défaut, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans l'attente du réexamen de sa situation.
Il soutient que :
- l'arrêté attaqué est insuffisamment motivé ;
- il justifie de circonstances justifiant son admission exceptionnelle au séjour ;
- l'arrêté méconnaît l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- il méconnaît également l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par un mémoire en défense, enregistré le 21 mars 2016, le préfet de l'Oise conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens présentés par M. F...ne sont pas fondés.
M. F...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 18 janvier 2016.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Laurent Domingo, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.
1. Considérant que M.F..., ressortissant arménien né le 6 janvier 1980, relève appel du jugement du 1er décembre 2015 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 10 août 2015 du préfet de l'Oise refusant de lui délivrer un titre de séjour et lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours à destination de son pays d'origine ;
2. Considérant que l'arrêté en litige comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement ; qu'il est donc suffisamment motivé ; que la circonstance, à la supposer établie, que l'avis de la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi qu'il cite ne lui a pas été joint est sans incidence sur la légalité de la décision attaquée ;
3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10, peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard de motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7 (...) " ;
4. Considérant qu'en présence d'une demande de régularisation présentée sur le fondement de l'article L. 313-14, par un étranger qui ne serait pas en situation de polygamie et dont la présence en France ne présenterait pas une menace pour l'ordre public, il appartient à l'autorité administrative de vérifier, dans un premier temps, si l'admission exceptionnelle au séjour par la délivrance d'une carte portant la mention " vie privée et familiale " répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard de motifs exceptionnels, et à défaut, dans un second temps, s'il est fait état de motifs exceptionnels de nature à permettre la délivrance, dans ce cadre, d'une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " ou " travailleur temporaire " ;
5. Considérant que si M. F...fait valoir qu'il a quitté son pays en 2011 en raison des risques qu'il encourait dans son pays d'origine et qu'il a bénéficié du soutien de ses beaux-parents présents en France, pays dans lequel s'est reconstituée la cellule familiale avec l'arrivée de sa femme et ses deux enfants l'année suivante, ces circonstances, alors que sa demande d'asile a été rejetée tant par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, par une décision du 28 février 2014, que par la Cour nationale du droit d'asile, par une décision du 3 février 2015, ne constituent pas des motifs exceptionnels ou des considérations humanitaires d'admission au séjour au sens de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par suite, le préfet de l'Oise n'a pas entaché son arrêté d'erreur manifeste d'appréciation en refusant de délivrer à l'intéressé un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ; qu'enfin, la circonstance que M. F...dispose d'une promesse d'embauche en qualité de maçon, dont il n'est au demeurant pas établi que ce secteur d'activité connaisse des difficultés de recrutement nécessitant un savoir-faire particulier, n'est pas de nature à établir que le préfet de l'Oise aurait entaché son arrêté d'une erreur manifeste d'appréciation en refusant de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " sur le fondement de ces dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
6. Considérant qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale " ; qu'il résulte de ces stipulations que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ; que la double circonstance que les deux enfants du requérant, nés le 16 avril 2007 et le 10 janvier 2010, soient scolarisés en France, et que leurs grands-parents maternels résideraient en France, ne suffit pas à établir que le préfet de l'Oise aurait porté atteinte à l'intérêt supérieur de ces enfants ; qu'en outre, il ressort des pièces du dossier que MmeE..., mère des enfants, fait également l'objet d'une mesure d'éloignement prononcée à son encontre le 20 août 2015 ; que, dès lors, rien ne s'oppose à ce que les enfants repartent avec leurs parents et qu'ils soient à nouveau scolarisés en Arménie ;
7. Considérant que si M. F...fait valoir qu'il encourrait des risques en cas de retour en Arménie en raison de ses convictions politiques, il n'apporte aucun élément probant de nature à établir qu'il serait soumis de manière personnelle et actuelle à des traitements inhumains et dégradants en cas de retour en Arménie ; que par suite, le requérant, dont la demande d'asile a été au demeurant rejetée en dernier lieu par la Cour nationale du droit d'asile le 3 février 2015, n'est pas fondé à soutenir que le préfet de l'Oise aurait méconnu les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. F...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. F...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D...F..., au ministre de l'intérieur et à Me G...C....
Copie sera adressée au préfet de l'Oise.
Délibéré après l'audience publique du 24 mai 2016 à laquelle siégeaient :
- M. Marc Lavail Dellaporta, président-assesseur, assurant la présidence de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,
- Mme B...A..., première conseillère,
- M. Laurent Domingo, premier conseiller.
Lu en audience publique le 7 juin 2016.
Le rapporteur,
Signé : L. DOMINGOLe président-assesseur,
Signé : M. H...
Le greffier,
Signé : M.T. LEVEQUE
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition conforme,
Le greffier
Marie-Thérèse Lévèque
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N°15DA02103