Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 6 septembre 2019, M. B..., représenté par Me D... F..., demande à la cour :
1°) de réformer ce jugement en tant qu'il n'a pas fait droit à la totalité de ses conclusions indemnitaires ;
2°) de condamner Lille métropole habitat à effectuer les travaux préconisés par le rapport d'expertise ;
3°) de condamner Lille métropole habitat au paiement de la somme de 2 778,70 euros au titre du préjudice matériel, majorée des intérêts de droit à compter de la date de la première demande d'indemnisation formée le 21 décembre 2016, avec capitalisation des intérêts échus ;
4°) de condamner Lille métropole habitat au paiement de la somme de 61 170,15 euros au titre du préjudice de jouissance, à parfaire à compter du 1er septembre 2019 et jusqu'à l'arrêt à intervenir, majorée des intérêts de droit à compter de la date de la première demande d'indemnisation formée le 21 décembre 2016, avec capitalisation des intérêts échus ;
5°) de mettre à la charge de Lille Métropole Habitat une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que l'intégralité des frais de la procédure de référé et des frais d'expertise.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 2020-1379 du 14 novembre 2020 ;
- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Julien Sorin, président-assesseur,
- les conclusions de M. Bertrand Baillard, rapporteur public,
- et les observations de Me C... H... substituant Me D... F..., représentant M. B..., et les observations de Me A... E..., représentant Lille métropole habitat.
Considérant ce qui suit :
1. M. B... est propriétaire non occupant d'un immeuble à usage d'habitation sis 82 rue de France à Roubaix, mitoyen d'un immeuble d'habitation appartenant à l'office public de l'habitat dénommé " Lille métropole habitat ". Le 8 octobre 2009, il a déclaré auprès de son assurance un dégât des eaux affectant son immeuble qui, malgré des travaux de réparation, n'a pas totalement disparu notamment du fait d'un taux élevé d'humidité. Le rapport de l'expertise diligentée par le tribunal administratif de Lille à la demande de M. B..., a été remis le 7 juillet 2014. A la suite de ce rapport, M. B... a saisi Lille métropole habitat d'une demande indemnitaire préalable implicitement rejetée. M. B... a alors demandé au tribunal administratif de Lille de condamner Lille métropole habitat à l'indemniser des préjudices subis et de lui enjoindre de procéder aux travaux préconisés par l'expert judiciaire pour faire cesser les désordres. Il interjette appel du jugement du tribunal administratif de Lille en date du 5 juillet 2019 en tant qu'il n'a fait que partiellement droit à ses conclusions indemnitaires et a rejeté ses conclusions aux fins d'injonction.
Sur la responsabilité :
2. Le maître de l'ouvrage est responsable, même en l'absence de faute, des dommages que les ouvrages publics dont il a la garde peuvent causer aux tiers tant en raison de leur existence que de leur fonctionnement. Il ne peut dégager sa responsabilité que s'il établit que ces dommages résultent de la faute de la victime ou d'un cas de force majeure. Ces tiers ne sont pas tenus de démontrer le caractère grave et spécial du préjudice qu'ils subissent lorsque le dommage présente un caractère accidentel.
3. En l'espèce, il résulte de l'instruction que la présence d'une canalisation vétuste passant sous la propriété de Lille métropole habitat est à l'origine des désordres affectant la cave et le séjour de M. B.... Il y a par suite lieu, par adoption des motifs retenus par les premiers juges, de regarder la responsabilité de Lille métropole habitat engagée à l'égard de M. B... s'agissant de ces désordres.
4. En revanche, s'agissant de l'humidité des murs de la cuisine, le requérant, en se bornant à se référer au rapport d'expertise dont il ne résulte pas que cette humidité trouverait son origine dans un défaut affectant l'immeuble voisin de Lille métropole habitat, n'établit pas l'existence d'un lien de causalité entre l'immeuble appartenant à Lille métropole habitat et les désordres subis sur les murs de sa cuisine.
5. Il résulte ensuite de l'instruction et, notamment, des mentions du rapport d'expertise, des photographies produites et des bordereaux relatifs aux travaux réalisés par Lille métropole habitat qu'au cours du second semestre de l'année 2014, et au plus tard jusqu'au 31 décembre 2014, l'office a réalisé les travaux préconisés par l'expert de nature à mettre un terme aux désordres constatés. Si M. B... soutient que les travaux n'ont été réalisés que partiellement, d'une part, il n'apporte à l'appui de ses allégations aucun élément de nature à en établir le bien-fondé et, d'autre part, il n'établit pas la persistance des désordres qu'il invoque après le 31 décembre 2014. Il suit de là que la période de responsabilité de Lille métropole habitat doit s'étendre du 10 juin 2012, date de départ du dernier locataire, au 31 décembre 2014, soit une durée de trente mois, dont il convient de retrancher une durée de neuf mois correspondant aux travaux prévus de longue date réalisés par M. B... dans son logement, qui ont en tout état de cause empêché sa location, ce qui a pour effet de ramener à vingt-et-un mois la période totale de responsabilité de Lille métropole habitat, ainsi qu'il ressort du rapport d'expertise.
Sur les préjudices :
6. Contrairement à ce que soutient Lille métropole habitat, il résulte de l'instruction que le montant du loyer perçu par M. B... s'élevait, avant l'apparition des premiers désordres, à la somme de 686 euros. Il y a, par suite, lieu de porter la somme de 8 489,46 euros accordée par les premiers juges au titre du préjudice de jouissance, à la somme de 14 406 euros. S'agissant des travaux de remise en état de la cave, les premiers juges ont déjà accordé la somme de 2 778,70 euros à M. B..., qui n'est plus recevable à la réclamer en appel. Il suit de là qu'il y a lieu de porter la somme totale de 11 268,16 euros accordée par les premiers juges, incluant la somme de 2 778,70 euros, à la somme totale de 17 184,70 euros.
Sur l'injonction :
7. Lorsque le juge administratif condamne une personne publique responsable de dommages qui trouvent leur origine dans l'exécution de travaux publics ou dans l'existence ou le fonctionnement d'un ouvrage public, il peut, saisi de conclusions en ce sens, s'il constate qu'un dommage perdure à la date à laquelle il statue du fait de la faute que commet, en s'abstenant de prendre les mesures de nature à y mettre fin ou à en pallier les effets, la personne publique, d'enjoindre à celle-ci de prendre de telles mesures. Pour apprécier si la personne publique commet, par son abstention, une faute, il lui incombe, en prenant en compte l'ensemble des circonstances de fait à la date de sa décision, de vérifier d'abord si la persistance du dommage trouve son origine non dans la seule réalisation de travaux ou la seule existence d'un ouvrage, mais dans l'exécution défectueuse des travaux ou dans un défaut ou un fonctionnement anormal de l'ouvrage et, si tel est le cas, de s'assurer qu'aucun motif d'intérêt général, qui peut tenir au coût manifestement disproportionné des mesures à prendre par rapport au préjudice subi, ou aucun droit de tiers ne justifie l'abstention de la personne publique. En l'absence de toute abstention fautive de la personne publique, le juge ne peut faire droit à une demande d'injonction, mais il peut décider que l'administration aura le choix entre le versement d'une indemnité dont il fixe le montant et la réalisation de mesures dont il définit la nature et les délais d'exécution.
8. Pour la mise en oeuvre des pouvoirs décrits ci-dessus, il appartient au juge, saisi de conclusions tendant à ce que la responsabilité de la personne publique soit engagée, de se prononcer sur les modalités de la réparation du dommage, au nombre desquelles figure le prononcé d'injonctions, dans les conditions définies au point précédent, alors même que le requérant demanderait l'annulation du refus de la personne publique de mettre fin au dommage, assortie de conclusions aux fins d'injonction à prendre de telles mesures. Dans ce cas, il doit regarder ce refus de la personne publique comme ayant pour seul effet de lier le contentieux.
9. En l'espèce, ainsi qu'il a été dit au point 5, il ne résulte pas de l'instruction que le dommage perdure à la date du présent arrêt. Par suite, les conclusions en injonction présentées sur le fondement des principes rappelés aux points précédents ne peuvent qu'être rejetées.
Sur les frais liés à l'instance :
10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de M. B..., qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que Lille métropole habitat demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de Lille métropole habitat une somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par M. B... et non compris dans les dépens.
DÉCIDE :
Article 1er : La somme de 11 268,16 euros que le jugement attaqué a condamné Lille métropole habitat à verser à M. B... est portée à la somme de 17 184,70 euros.
Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Lille du 5 juillet 2019 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 3 : Lille métropole habitat versera à M. B... une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. G... B... et à Lille métropole habitat.
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N°19DA02101