- la somme de 6 000 euros au titre de l'assurance dommage ouvrage qu'ils devront souscrire pour la réalisation des travaux de reprise.
Par un jugement n°1801674 du 22 décembre 2020, le tribunal administratif d'Amiens a condamné la commune de Saulchery à verser à M. et Mme A... la somme de 6 481,30 euros portant intérêts au taux légal à compter du 1er juin 2018, la somme de 74 271,60 euros indexée sur l'évolution de l'indice BT01 à compter du 1er juin 2015, la somme de 100 000 euros au titre de leur trouble de jouissance et la somme de 3 419,10 euros au titre du cout de l'assurance dommage-ouvrage.
Procédure devant la cour :
I. Par une requête, enregistrée le 1er mars 2021, sous le n° 21DA00496, la commune de Saulchery, représentée par la SELAFA Cabinet Cassel, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) à titre principal, de rejeter la demande de M. et Mme A... ;
3°) à titre subsidiaire, de désigner un expert et de réduire le montant de la réparation à de plus juste proportions ;
4°) de mettre à la charge de M. et Mme A... une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi que les dépens en application de l'article R. 761-1 du même code.
II. Par une requête, enregistrée le 2 mars 2021, sous le n° 21DA00497, la commune de Saulchery, représentée par la SELAFA Cabinet Cassel, demande à la cour d'ordonner, sur le fondement des dispositions de l'article R. 811-15 du code de justice administrative, le sursis à exécution du jugement du tribunal administratif d'Amiens du 22 décembre 2020 et de mettre à la charge de M. et Mme A... une somme de 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle reprend les mêmes moyens que dans sa requête n° 21DA00496.
Par un mémoire en défense, enregistré le 29 mars 2021, M. et Mme A..., représentés par Me Xavier Lefevre, concluent au rejet de la requête de la commune de Saulchery et à ce qu'une somme de 1 200 euros soit mise à sa charge au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces des dossiers.
Vu :
- le code civil ;
- le code général des collectivités territoriales ;
- la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Aurélie Chauvin, présidente-assesseure,
- et les conclusions de M. Bertrand Baillard, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. Le 12 juin 2007, le mur de la maison à usage d'habitation dont M. et Mme A... sont propriétaires, située 60 route nationale à Saulchery (Ain), en contrebas de la ruelle de la fontaine du fort qui longe leur propriété au nord, s'est effondré au niveau du sous-sol à la suite d'infiltrations d'eau. Malgré la réfection du mur et la réalisation de travaux sur le réseau d'exploitation des eaux usées implanté dans la ruelle et géré par société d'aménagement urbain et rural (SAUR), les infiltrations ont persisté. Estimant que le dommage résultait d'un dysfonctionnement des réseaux, M. et Mme A... ont assigné la SAUR devant le juge des référés du tribunal de grande instance de Soissons, lequel a ordonné une expertise, étendue à la commune de Saulchery. L'expert a rendu son rapport le 1er juin 2015 dans lequel il conclut que les infiltrations ont été causées, d'une part, par le réseau d'eaux usées fuyard exploité par la SAUR et, d'autre part, par l'écoulement des eaux pluviales dont le système de collecte est géré par la commune. Par une ordonnance du 14 décembre 2017, le juge de la mise en état a déclaré le tribunal de grande instance incompétent au profit de la juridiction administrative pour connaitre du litige opposant M. et Mme A... à la commune de Saulchery. Cette dernière relève appel, sous le n° 21DA00496, du jugement du 22 décembre 2020 par lequel le tribunal administratif d'Amiens l'a condamnée à verser à M. et Mme A... la somme de 6 481,30 euros portant intérêt au taux légal à compter du 1er juin 2018, la somme de 74 271,60 euros indexée sur l'évolution de l'indice BT01 à compter du 1er juin 2015, la somme de 100 000 euros au titre de leur trouble de jouissance et la somme de 3 419,10 euros au titre du coût de l'assurance dommage-ouvrage et, par la requête n° 21DA00497, elle sollicite le sursis à exécution de ce jugement.
2. Les requêtes n° 21DA00496 et n° 21DA00497 présentées pour la commune de Saulchery sont relatives à un même jugement. Il y a lieu de les joindre pour qu'elles fassent l'objet d'un même arrêt.
Sur le défaut d'habilitation du maire à agir en justice :
3. Aux termes de l'article L. 2132-1 du code général des collectivités territoriales : " Sous réserve des dispositions du 16° de l'article L. 2122-22 le conseil municipal délibère sur les actions à intenter au nom de la commune ". L'article L. 2132-2 de ce code dispose que : " Le maire, en vertu de la délibération du conseil municipal, représente la commune en justice ". L'article L. 2122-22 du même code dispose que : " Le maire peut (...) par délégation du conseil municipal, être chargé (...) pour la durée de son mandat : (...) 16° D'intenter au nom de la commune les actions en justice ou de défendre la commune dans les actions intentées contre elle (...) ". Aux termes de l'article L. 2122-17 de ce code : " En cas d'absence, de suspension, de révocation ou de tout autre empêchement, le maire est provisoirement remplacé, dans la plénitude de ses fonctions, par un adjoint, dans l'ordre des nominations (...) ". Il résulte de ces dispositions que le conseil municipal peut légalement donner au maire une délégation générale pour représenter la commune en justice, en demande comme en défense, pendant la durée de son mandat.
4. Par une délibération du 9 juillet 2020, produite aux débats, le conseil municipal a, en application de l'article L. 2122-22 du code général des collectivités territoriales, régulièrement habilité le maire de Saulchery à intenter au nom de la commune les actions en justice pendant la durée de son mandat. Il est constant que le maire ainsi que plusieurs conseillers municipaux ont démissionné en octobre 2020 et qu'à la date d'enregistrement de la requête d'appel, les élections partielles avaient été reportées. M. D... C..., qui avait la première place dans l'ordre du tableau, était par suite compétent pour remplacer de plein droit le maire démissionnaire et ainsi intenter un appel à l'encontre du jugement du 22 décembre 2020 attaqué. La fin de non-recevoir opposée par les époux A... doit, par suite, être écartée.
Sur la régularité du jugement attaqué :
5. Aux termes de l'article R. 611-7 du code de justice administrative : " Lorsque la décision lui paraît susceptible d'être fondée sur un moyen relevé d'office, le président de la formation de jugement ou, au Conseil d'Etat, la sous-section chargée de l'instruction en informe les parties avant la séance de jugement et fixe le délai dans lequel elles peuvent, sans qu'y fasse obstacle la clôture éventuelle de l'instruction, présenter leurs observations sur le moyen communiqué (...) ".
6. Ces dispositions, qui sont destinées à provoquer un débat contradictoire sur les moyens que le juge doit relever de sa propre initiative, font obligation à la formation de jugement, lorsqu'elle entend soulever d'office un moyen qui n'a pas été invoqué par les parties ni relevé par son président avant l'audience, de rayer l'affaire du rôle de la séance et de communiquer le moyen aux parties.
7. Par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a retenu la responsabilité sans faute de la commune de Saulchery à l'égard de M. et Mme A... du fait des phénomènes d'humidité et d'inondation subis par leur habitation. Il résulte cependant de l'instruction que la demande des époux A... tendant à la condamnation de la commune n'était fondée devant le tribunal administratif d'Amiens que sur l'existence d'une faute de cette dernière dans l'entretien de son réseau d'eau pluviale. Si le tribunal pouvait retenir d'office la responsabilité sans faute de la collectivité publique, laquelle est d'ordre public, il ne pouvait le faire qu'après en avoir informé les parties en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative. En retenant la responsabilité sans faute de la commune sans y avoir procédé, le tribunal administratif a ainsi entaché son jugement d'irrégularité. Dès lors, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête d'appel, la commune de Saulchery est fondée à demander l'annulation du jugement attaqué du 22 décembre 2020.
8. Il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. et Mme A... devant le tribunal administratif d'Amiens.
Sur la fin de non recevoir tirée du défaut de demande préalable :
9. Aux termes de l'article R. 421-1 du code de justice administrative, dans sa rédaction résultant du décret n° 2016-1480 du 2 novembre 2016 portant modification du code de justice administrative : " La juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée. / Lorsque la requête tend au paiement d'une somme d'argent, elle n'est recevable qu'après l'intervention de la décision prise par l'administration sur une demande préalablement formée devant elle ". Il résulte de ces dispositions qu'en l'absence d'une décision de l'administration rejetant une demande formée devant elle par le requérant ou pour son compte, une requête tendant au versement d'une somme d'argent est irrecevable et peut être rejetée pour ce motif même si, dans son mémoire en défense, l'administration n'a pas soutenu que cette requête était irrecevable, mais seulement que les conclusions du requérant n'étaient pas fondées. En revanche, les termes du second alinéa de l'article R. 421-1 du code de justice administrative n'impliquent pas que la condition de recevabilité de la requête tenant à l'existence d'une décision de l'administration s'apprécie à la date de son introduction. Cette condition doit être regardée comme remplie si, à la date à laquelle le juge statue, l'administration a pris une décision, expresse ou implicite, sur une demande formée devant elle. Par suite, l'intervention d'une telle décision en cours d'instance régularise la requête, sans qu'il soit nécessaire que le requérant confirme ses conclusions et alors même que l'administration aurait auparavant opposé une fin de non-recevoir fondée sur l'absence de décision.
10. Lorsqu'un requérant a introduit devant le juge administratif un contentieux indemnitaire à une date où il n'avait présenté aucune demande en ce sens devant l'administration et qu'il forme, postérieurement à l'introduction de son recours juridictionnel, une demande auprès de l'administration sur laquelle le silence gardé par celle-ci fait naître une décision implicite de rejet avant que le juge de première instance ne statue, cette décision lie le contentieux. La demande indemnitaire est recevable, que le requérant ait ou non présenté des conclusions additionnelles explicites contre cette décision, et alors même que le mémoire en défense de l'administration aurait opposé à titre principal l'irrecevabilité faute de décision préalable, cette dernière circonstance faisant seulement obstacle à ce que la décision liant le contentieux naisse de ce mémoire lui-même.
11. Il résulte de l'instruction que M. et Mme A... ont saisi le 1er juin 2018 le tribunal administratif d'Amiens de conclusions tendant à l'indemnisation des infiltrations qu'ils subissent dans leur habitation à hauteur de 74 271,60 euros au titre de la reprise des travaux, de 6 841,30 euros en remboursement des travaux effectués par leurs soins pour remédier partiellement aux désordres, de 6 000 euros au titre de l'assurance dommage ouvrage qu'ils devront souscrire pour la réalisation des travaux de reprise et au titre du chef de préjudice de jouissance qu'ils évaluent à une somme de 700 euros par mois depuis le 1er juin 2007. La réclamation qu'ils ont par la suite adressée à la commune, le 13 janvier 2020, a eu pour effet de régulariser leur demande contentieuse, alors même qu'elle est postérieure à son enregistrement au greffe du tribunal, et le silence gardé par la commune sur cette réclamation a eu pour effet de faire naitre une décision implicite de rejet qui a lié le contentieux indemnitaire à l'égard des demandeurs pour l'ensemble des dommages causés par le fait générateur. Il suit de là que la fin de non-recevoir opposée par la commune doit être écartée.
Sur la prescription de la créance :
12. Aux termes de l'article 1er de la loi du 31 décembre 1968 relative à la prescription des créances sur l'Etat, les départements, les communes et les établissements publics : " Sont prescrites, au profit de l'Etat (...) toutes créances qui n'ont pas été payées dans un délai de quatre ans à partir du premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle les droits ont été acquis (...) Sont prescrites, dans le même délai et sous la même réserve, les créances sur les établissements publics dotés d'un comptable public ". Aux termes de l'article 2 de la même loi : " La prescription est interrompue par : Toute demande de paiement ou toute réclamation écrite adressée par un créancier à l'autorité administrative, dès lors que la demande ou la réclamation a trait au fait générateur, à l'existence, au montant ou au paiement de la créance, alors même que l'administration saisie n'est pas celle qui aura finalement la charge du règlement. Tout recours formé devant une juridiction, relatif au fait générateur, à l'existence, au montant ou au paiement de la créance, quel que soit l'auteur du recours et même si la juridiction saisie est incompétente pour en connaître, et si l'administration qui aura finalement la charge du règlement n'est pas partie à l'instance (...) / Un nouveau délai de quatre ans court à compter du premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle a eu lieu l'interruption. Toutefois, si l'interruption résulte d'un recours juridictionnel, le nouveau délai court à partir du premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle la décision est passée en force de chose jugée ". Il résulte de la combinaison de ces dispositions que la connaissance par la victime de l'existence d'un dommage ne suffit pas à faire courir le délai de la prescription quadriennale. Le point de départ de cette dernière est la date à laquelle la victime est en mesure de connaître l'origine de ce dommage ou du moins de disposer d'indications suffisantes selon lesquelles ce dommage pourrait être imputable au fait de l'administration.
13. Si les désordres dont la réparation est demandée sont apparus le 12 juin 2007, lorsque le mur arrière en sous-sol de la propriété de M. et Mme A... s'est effondré, il n'est pas contesté que ces derniers, qui avaient sollicité une expertise auprès du juge judiciaire afin de déterminer les origines de ce sinistre, n'ont été informés de l'imputabilité éventuelle de ces désordres à la commune de Saulchery que par une note aux parties datée du 17 septembre 2013, que l'expert désigné par le juge judiciaire leur avait adressée. Ils n'ont ensuite eu connaissance certaine de ce que le système de collecte des eaux pluviales gérée par la commune était l'une des trois causes de leur dommage que le jour du dépôt de son rapport définitif par l'expert, le 1er juin 2015. Il ne résulte pas de l'instruction et il n'est pas allégué qu'ils auraient été en mesure d'identifier cette origine dès la première constatation des dommages le 12 juin 2007, ni à la date d'établissement des factures qu'ils produisent et dont ils demandent notamment le remboursement. Ainsi, le délai de prescription quadriennale à l'égard de la commune n'a commencé à courir, au plus tôt, que le 1er janvier 2014. Or, il a été interrompu par l'assignation de la commune dans la procédure en référé puis au fond devant le tribunal de grande instance de Soissons le 14 novembre 2015. Cette action, qui a abouti à une ordonnance du 14 septembre 2017 par laquelle le tribunal s'est déclaré incompétent pour en connaitre, a interrompu le délai de la prescription qui a recommencé à courir à compter du 1er janvier 2018 et n'était ainsi pas expiré le 1er juin 2018, date à laquelle les époux A... ont saisi le tribunal administratif d'Amiens. Les créances dont M. et Mme A... se prévalent n'étaient donc pas prescrites à la date d'enregistrement de leur demande. Par suite, l'exception de prescription quadriennale soulevée par la commune de Saulchery doit être écartée.
Sur la responsabilité de la commune de Saulchery :
14. Le maitre de l'ouvrage est intégralement responsable, même en l'absence de faute, des dommages que les ouvrages publics dont il a la garde peuvent causer aux tiers tant en raison de leur existence que de leur entretien ou de leur fonctionnement. Il ne peut dégager sa responsabilité que s'il établit que ces dommages résultent de la faute de la victime ou d'un cas de force majeure sans pouvoir utilement invoquer le fait d'un tiers. Dans le cas d'un dommage causé à un immeuble, la fragilité ou la vulnérabilité de celui-ci ne peuvent être prises en compte pour atténuer la responsabilité du maitre de l'ouvrage, sauf lorsqu'elles sont elles-mêmes imputables à une faute de la victime. En dehors de cette hypothèse, de tels éléments ne peuvent être retenus que pour évaluer le montant du préjudice indemnisable.
15. Il résulte de l'instruction et, notamment, du rapport d'expertise judiciaire du 1er juin 2015 que les infiltrations qui endommagent le mur contre terre donnant sur la sente altèrent la structure bois de la maison d'habitation des époux A... et y génèrent une humidité continuelle. Elles trouvent leur origine selon l'expert, d'une part, dans l'insuffisance du système de collecte des eaux de pluie qui se déversent directement dans la ruelle, amenant celle-ci à être inondée jusqu'à 7,7 fois la hauteur de la précipitation par l'effet de déverse des gouttières venant des maisons la bordant et des eaux de ruissellement de la rue du pont en amont, d'autre part, dans un système (regards et canalisations) fuyard du réseau souterrain d'évacuation des eaux pluviales dont a la charge la commune de Saulchery et, enfin, dans un système d'eaux usées fuyard, lequel réseau est exploité par l'entreprise SAUR.
16. Si les dommages sont ainsi imputables pour une partie évaluée à 15% par l'expert, au fait d'un tiers, cette circonstance n'est pas, par application des principes rappelés au point 14 qui régissent la responsabilité sans faute du maitre de l'ouvrage public, de nature à atténuer la responsabilité encourue par la commune de Saulchery qui peut seulement, si elle s'y croit fondée, exercer devant les juridictions compétentes tels recours que de droit contre le tiers responsable du fait qu'elle invoque. Ainsi, la commune doit être regardée comme intégralement responsable des dommages subis par M. et Mme A... par suite de ces infiltrations, sous la réserve, éventuellement, d'une faute de la victime ou d'un cas de force majeure.
17. A cet égard, la commune de Saulchery invoque une carence des époux A... à faire procéder aux travaux d'étanchéité nécessaires de leur maison. Il résulte toutefois de l'instruction que ces derniers ont fait procédé à leurs frais à des travaux de reprise consistant notamment dans la pose d'un drain parallèlement au mur pour capter les eaux d'infiltration, dont l'utilité a été reconnue par l'expert judiciaire. Il n'est par ailleurs pas démontré qu'ils auraient eu conscience de s'exposer à un risque d'humidité au moment de l'acquisition de leur maison, alors même que celle-ci avait été successivement acquise et revendue à brève échéance et à bas prix. Il n'est ainsi pas établi que les époux A... aient commis une négligence ou une imprudence de nature à exonérer la commune de tout ou partie de sa responsabilité. Celle-ci ne peut davantage utilement se prévaloir de la topographie des lieux et du déversement par les propriétaires des fonds voisins des eaux de pluie. Il s'ensuit, sans qu'il soit besoin d'ordonner une expertise, que doit être mise à la charge de la commune la réparation de la totalité des dommages subis par M. et Mme A....
Sur l'évaluation des préjudices :
18. Lorsqu'un dommage causé à un immeuble engage la responsabilité d'une collectivité publique, le propriétaire peut prétendre à une indemnité couvrant, d'une part, les troubles qu'il a pu subir jusqu'à la date à laquelle, la cause des dommages ayant pris fin et leur étendue étant connue, il a été en mesure d'y remédier et, d'autre part, une indemnité correspondant au coût des travaux de réfection. Ce coût doit être évalué à cette date, sans pouvoir excéder la valeur vénale, à la même date, de l'immeuble exempt des dommages imputables à la collectivité.
19. En premier lieu, il n'est pas contesté que M. et Mme A... ont procédé à leur frais à des travaux dont l'utilité a été reconnue par l'expert consistant notamment dans la pose d'un drain parallèlement au mur pour capter les eaux d'infiltration. Ils justifient par la production de factures établies à leur nom avoir exposé pour ces travaux préalables et nécessaires une somme totale 6 841,30 euros qui doit être mise à la charge de la commune responsable. M. et Mme A... ont droit ainsi qu'ils le demandent aux intérêts sur cette somme à compter du 1er juin 2018, date d'enregistrement de leur requête au greffe du tribunal administratif d'Amiens.
20. En deuxième lieu, il résulte de l'instruction et, notamment, du rapport d'expertise du 1er juin 2015 que le coût des travaux de reprise consistant au niveau de la maison des époux A..., à " étancher le mur contre terre qui est imbibé d'eau, désolidariser la structure du mur contre terre et remplacer les éléments bois altérés par l'eau " a été chiffré à partir de devis retenus par l'expert à une somme 74 271,60 euros. Si le coût de ces travaux, qui sont nécessaires pour remédier aux désordres résultant des infiltrations, apparait supérieur au prix d'achat de la maison en 2004, il ne résulte pas de l'instruction que son montant serait supérieur à la valeur vénale du bien immobilier à la date à laquelle les époux A... peuvent être regardés comme ayant été en mesure d'agir. En application des principes énoncés au point 18, il y a donc lieu de mettre à la charge de la commune la somme de 74 271,60 euros.
21. A la date à laquelle l'expert a estimé les dommages subis par les époux A..., leur cause n'ayant pas pris fin, il ne pouvait être procédé aux travaux destinés à y remédier. Dans ces conditions, M. et Mme A... sont fondés à demander l'indexation du montant des réparations sur l'indice BT 01 du coût de la construction à compter du rapport d'expertise.
22. En troisième lieu, il résulte de l'instruction que la maison d'habitation des époux A... a été inondée à plusieurs reprises ce qui les a notamment conduits à ne plus utiliser le rez-de-chaussée. Il est constant que les dommages affectant leur maison ont ainsi rendu impossible l'occupation de 40% de la surface et fragilisent l'ensemble de la structure bois de la maison sans toutefois les priver de la jouissance de leur bien immobilier. Il sera fait une juste appréciation des troubles importants qu'ils subissent dans leurs conditions d'existence depuis le mois de juin 2007, date de déclaration du premier sinistre, en condamnant la commune à leur verser une indemnité de 30 000 euros à ce titre.
23. En quatrième lieu, si les époux A... réclament l'indemnisation du montant de l'assurance dommage ouvrage qu'ils devront souscrire pour la réalisation des travaux de reprise, ce préjudice n'est pas établi dans son principe ni dans son ampleur. Leur demande sur ce point doit, par suite, être rejetée.
24. Il résulte de ce qui a été exposé précédemment que le montant des préjudices subis par M. et Mme A... s'élève à la somme totale de 111 112,90 euros. Toutefois, par un jugement du 4 février 2021, le tribunal judiciaire de Soissons a condamné la société SAUR à leur verser les sommes de 1 026,19 euros en réparation des travaux qu'ils ont partiellement effectués pour juguler les infiltrations, 11 140,74 euros au titre des travaux à effectuer avec indexation selon l'indice BT01 du coût de la construction à compter du 1er juin 2015 et 4 500 euros en réparation de leur trouble de jouissance, soit un total de 16 666,93 euros qu'il y a lieu de déduire respectivement des sommes de 6 841,30 euros, 74 271,60 euros et 30 000 euros allouées au titre des mêmes préjudices par le présent arrêt.
25. Il résulte de tout ce qui précède qu'il y a lieu de condamner la commune de Saulchery à verser à M. et Mme A... la somme de 5 815,11 euros en réparation des travaux qu'ils ont partiellement effectués pour juguler les infiltrations avec intérêts au taux légal ainsi qu'ils le demandent à compter du 1er juin 2018, la somme de 63 130,86 euros au titre des travaux à effectuer en réparation des désordres avec indexation selon l'indice BT01 du coût de la construction à compter du 1er juin 2015 et la somme de 25 500 euros en réparation des troubles dans leurs conditions d'existence.
Sur les conclusions de la requête n° 21DA00497 tendant au sursis à l'exécution du jugement du 22 décembre 2020 :
26. La cour se prononçant, par le présent arrêt, sur les conclusions de la commune de Saulchery tendant à l'annulation du jugement du 22 décembre 2020, les conclusions tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution de ce jugement sont privées d'objet. Il n'y a pas lieu, par suite, d'y statuer.
Sur les frais liés à l'instance :
27. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de M. et Mme A..., qui ne sont pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que la commune de Saulchery demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de la commune une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. et Mme A... et non compris dans les dépens.
D É C I D E :
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête n° 21DA00497 tendant au sursis à l'exécution du jugement.
Article 2 : Le jugement du tribunal administratif d'Amiens en date du 22 décembre 2020 est annulé.
Article 3 : La commune de Saulchery est condamnée à verser à M. et Mme A... la somme de 5 815,11 euros en réparation des travaux qu'ils ont partiellement effectués pour juguler les infiltrations, avec intérêts au taux légal à compter du 1er juin 2018, la somme de 63 130,86 euros au titre des travaux à effectuer, avec indexation selon l'indice BT01 du cout de la construction à compter du 1er juin 2015 et la somme de 25 500 euros en réparation des troubles dans leurs conditions d'existence.
Article 4 : La commune de Saulchery versera à M. et Mme A... une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.
Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Saulchery et à M. et Mme A....
N°s 21DA00496-21DA00497 2