Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 17 mai 2021, Mme B... C..., représentée par Me Christelle Monconduit, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler l'arrêté du 26 février 2021 de la préfète de l'Oise ;
3°) d'enjoindre à la préfète de procéder au réexamen de sa situation et de lui délivrer, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour, ou de lui délivrer un titre de séjour portant la mention vie privée et familiale dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Anne Seulin, présidente de chambre, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme B... C..., ressortissante marocaine, née le 12 janvier 1973, est entrée en France en 2017. Elle interjette appel de l'ordonnance du 15 avril 2021 par laquelle la présidente du tribunal administratif d'Amiens a, en application des dispositions de l'article R. 222-1 du code de justice administrative, rejeté sa requête tendant à l'annulation de l'arrêté du 26 février 2021 par lequel la préfète de l'Oise lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de quatre-vingt-dix jours et a fixé le pays de destination de cette mesure.
Sur la recevabilité de la demande de première instance :
2. Aux termes du I bis de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français sur le fondement des 1°, 2°, 4° ou 6° du I de l'article L. 511-1 et qui dispose du délai de départ volontaire mentionné au premier alinéa du II du même article L. 511-1 peut, dans un délai de quinze jours à compter de sa notification, demander au président du tribunal administratif l'annulation de cette décision, ainsi que l'annulation de la décision mentionnant le pays de destination et de la décision d'interdiction de retour sur le territoire français qui l'accompagnent le cas échéant. / La même procédure s'applique lorsque l'étranger conteste une obligation de quitter le territoire fondée sur le 6° du I dudit article L. 511-1 et une décision relative au séjour intervenue concomitamment. Dans cette hypothèse, le président du tribunal administratif ou le juge qu'il désigne à cette fin statue par une seule décision sur les deux contestations. (...) ".
3. Aux termes de l'article R. 421-5 du code de justice administrative : " Les délais de recours contre une décision administrative ne sont opposables qu'à la condition d'avoir été mentionnés, ainsi que les voies de recours, dans la notification de la décision ". Pour rendre opposable le délai de recours contentieux, conformément à ce que prévoit l'article R. 421-5 du code de justice administrative, l'administration est tenue de faire figurer dans la notification de ses décisions la mention des délais et voies de recours contentieux ainsi que les délais des recours administratifs préalables obligatoires.
4. En l'espèce, il est constant que l'arrêté du 26 février 2021 de la préfète de l'Oise a été notifié à Mme C... le 4 mars 2021 suivant. Si les dispositions précitées prévoient un délai de recours contentieux de quinze jours, il ressort des termes de l'arrêté litigieux que Mme C... disposait d'un délai de trente jours pour former un recours contre cet arrêté. Ces indications erronées relatives aux voies et délais de recours que comportent la notification de la décision attaquée, font obstacle à l'application d'un délai de recours de quinze jours.
5. Sauf texte contraire, les délais de recours devant les juridictions administratives sont, en principe, des délais francs, leur premier jour étant le lendemain du jour de leur déclenchement et leur dernier jour étant le lendemain du jour de leur échéance, et les recours doivent être enregistrés au greffe de la juridiction avant l'expiration du délai. Lorsque le délai expire un samedi, un dimanche ou un jour férié ou chômé, il y a lieu, par application des règles définies à l'article 642 du code de procédure civile, d'admettre la recevabilité d'une demande présentée le premier jour ouvrable suivant.
6. En l'espèce, le délai de recours, qui avait commencé à courir le 5 mars 2021, a expiré le 6 avril 2021 à minuit, la veille étant un jour férié. La requête, enregistrée le 6 avril 2021 n'était donc pas tardive. Dès lors, c'est à tort que la présidente du tribunal administratif d'Amiens a rejeté la requête pour tardiveté.
7. Il y a lieu de se prononcer immédiatement par la voie de l'évocation sur les conclusions de Mme C... tendant à l'annulation de l'arrêté du 26 février 2021 de la préfète de l'Oise.
Sur les conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté du 26 février 2021 :
8. Il ressort du premier article de l'arrêté en litige que la préfète, en conséquence du rejet de la demande d'asile, a constaté la perte de validité de l'attestation de demande d'asile dont Mme C... disposait. En vertu des dispositions du 6° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet peut obliger un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne à quitter le territoire français si la reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire lui a été définitivement refusé. L'obligation de quitter le territoire français est, selon ces dispositions, une mesure autonome qui ne découle pas d'un refus de titre de séjour, la préfète se bornant à constater que la demande d'asile ou de protection subsidiaire a été définitivement refusée. Par suite, l'arrêté litigieux ne comportant pas de décision de refus de titre de séjour, les conclusions à fin d'annulation d'une décision inexistante sont irrecevables et ne peuvent qu'être rejetées.
9. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui".
10. Mme C... est entrée en France en 2017 accompagnée de ses deux enfants. A... elle se prévaut de la circonstance qu'ils sont scolarisés, elle ne justifie pas qu'ils ne pourraient poursuivre leur scolarité dans leur pays d'origine, ni ne justifie d'aucune insertion professionnelle ou sociale. Elle n'établit pas davantage être isolée dans son pays d'origine ou elle a vécu la majeure partie de sa vie. Par suite, Mme C... n'est pas fondée à soutenir que la décision en litige aurait porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Pour les mêmes motifs, la préfète de l'Oise n'a pas entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation.
11. Si Mme C... soutient que la décision portant obligation de quitter le territoire français méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors qu'elle l'exposerait à des menaces pour sa vie, ce moyen est inopérant à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire français, qui est une décision distincte de celle fixant le pays de destination.
12. Aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " 1. Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale. (...) ".
13. Il ressort des pièces du dossier que la cellule familiale, constituée de Mme C... et de ses enfants, peut se reconstituer au Maroc, pays dont tous les membres de la famille ont la nationalité. Dès lors, la préfète de l'Oise, dont la décision contestée n'a ni pour objet, ni pour effet de séparer la requérante de ses enfants, n'a pas porté à l'intérêt supérieur de ces derniers une atteinte méconnaissant les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant. Pour les mêmes motifs, le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation doit être écarté.
14. Il résulte de tout ce qui précède que la requête de Mme C... doit être rejetée. Il en est de même pour ses conclusions à fin d'injonction et celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DÉCIDE :
Article 1er : L'ordonnance n° 2101220 du 15 avril 2021 du tribunal administratif d'Amiens est annulée.
Article 2 : La demande de première instance de Mme C... est rejetée.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié Mme B... C... et au ministre de l'intérieur.
Copie sera transmise à la préfète de l'Oise.
N°21DA01104 2