Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 28 février 2018, M. A..., représenté par Me B... C..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Rouen du 26 octobre 2017 ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet de l'Eure du 18 juillet 2017 portant refus de délivrance de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français sous trente jours et fixant le Nigéria comme pays de destination ;
3°) d'enjoindre au préfet de l'Eure, de lui délivrer une carte de séjour temporaire, valable un an et portant la mention " vie privée et familiale ", dans un délai d'un mois à compter de la décision à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou, à défaut, de lui délivrer, dans un délai de huit jours à compter de la décision à intervenir, une autorisation provisoire de séjour, dans l'attente du réexamen de sa situation, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Dominique Bureau, première conseillère, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M.A..., ressortissant nigérian né le 26 juin 1992, est entré irrégulièrement en France le 9 octobre 2015, selon ses déclarations. L'Office français de protection des réfugiés et apatrides a rejeté sa demande d'asile par une décision du 22 juillet 2016, confirmée par la Cour nationale du droit d'asile par une décision du 12 mai 2017. M. A... relève appel du jugement du 26 octobre 2017 par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 18 juillet 2017 du préfet de l'Eure portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le Nigéria comme pays de destination.
Sur la décision de refus de titre de séjour :
2. En premier lieu, la décision portant refus de titre de séjour comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait sur lesquelles elle se fonde. En particulier, le préfet de l'Eure s'est expressément référé aux articles L. 313-11 7° et L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, au regard desquels il a examiné la demande de titre de séjour de M. A... et a exposé les éléments factuels propres à la situation familiale et professionnelle de l'intéressé, ainsi qu'aux conditions de son insertion et de son séjour en France qui l'ont conduit à prendre cette décision. Celle-ci est, ainsi, suffisamment motivée. Les erreurs sur la situation personnelle de M. A... apparaissant dans l'arrêté contesté sont par elles-mêmes dépourvues d'incidence sur le caractère suffisant de cette motivation.
3. En deuxième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de l'Eure n'aurait pas procédé à un examen approfondi de la situation particulière de l'intéressé, compte tenu des éléments portés à sa connaissance. L'erreur de plume commise quant au pays d'origine du requérant, et la mention de plusieurs enfants, alors qu'il n'a qu'une fille, pour regrettables qu'elles soient, ne peuvent, à elles seules, caractériser un défaut d'examen de sa situation particulière, alors que le requérant n'établit pas avoir fait état de sa situation familiale avant l'arrêté en litige et, en particulier, que les différentes attestations produites relatives à son domicile sont postérieures à la date de la décision contestée. Au demeurant, il ressort de la décision attaquée que le préfet de l'Eure a pris en compte l'enfant de M. A...dans l'examen de sa situation personnelle et familiale. Dès lors, le moyen tiré de ce que le préfet de l'Eure aurait entaché sa décision d'un défaut d'examen sérieux de sa situation particulière doit être écarté.
4. En troisième lieu, M. A...allègue vivre en concubinage depuis le mois d'octobre 2015 avec une compatriote qui, mère d'une fillette de nationalité française, réside régulièrement en France sous couvert d'un certificat de résidence valable dix ans et avec laquelle il a eu une enfant, née le 26 octobre 2016 et reconnue par anticipation le 7 juin 2016. La preuve de leur vie commune n'est cependant pas établie par la seule attestation d'un fournisseur d'énergie en date du 15 août 2017, postérieure à l'arrêté contesté, selon laquelle un contrat a été souscrit depuis le 31 octobre 2015 aux noms de M. A... et MmeE..., dans la mesure, notamment, où M. A... s'est lui-même déclaré domicilié.dans un centre d'accueil pour demandeurs d'asile lors de la procédure d'examen de sa demande d'asile Les autres pièces produites, postérieures à la décision litigieuse, ne comportent aucun élément de nature à établir l'intensité et la stabilité de cette relation. Par ailleurs, les trois attestations émanant d'un médecin et de particuliers, non circonstanciées, ne suffisent pas à établir que M. A... contribuerait à l'entretien et à l'éducation de sa fille, ou aurait avec elle de véritables liens affectifs. En outre, il ne ressort pas des pièces du dossier que le requérant serait dépourvu de toute attache familiale dans son pays d'origine, où il a vécu jusqu'à l'âge de vingt-trois ans. Il ne fait également pas état d'une insertion sociale et professionnelle particulière, étant notamment sans emploi. Dès lors, eu égard aux conditions et à la durée du séjour de M. A...sur le territoire français, la décision lui refusant un titre de séjour n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au but poursuivi et n'a, par suite, méconnu ni les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
5. Ni les éléments dont se prévaut M.A..., décrits au point précédent, ni les risques auxquels il affirme être exposé dans son pays, sans produire de justification sur ce point, ne sont de nature à établir que le préfet de l'Eure aurait méconnu les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en estimant que son admission au séjour ne se justifiait pas par des motifs exceptionnels ou des considérations humanitaires. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.
6. Il résulte de ce qui précède que, compte tenu de l'absence de tout élément probant quant aux liens qui uniraient M. A...à sa fille, la décision contestée n'a pas été prise en méconnaissance de l'intérêt supérieur de l'enfant. Par suite, le moyen tiré de la violation des stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant doit être écarté.
7. Il résulte de tout ce qui précède que la décision du préfet de l'Eure refusant la délivrance du titre de séjour n'est pas entachée d'illégalité.
Sur l'obligation de quitter le territoire français :
8. En premier lieu, les dispositions de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile visées par l'arrêté contesté prévoient que l'obligation de quitter le territoire français n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle refusant le séjour dont elle découle nécessairement. Dans la mesure où la décision de refus de délivrance du titre de séjour est suffisamment motivée, comme indiqué au point 2, il en est de même pour celle portant obligation de quitter le territoire français. En outre, le préfet de l'Eure a, dans la décision litigieuse, cité l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et a pris en considération la situation personnelle de l'intéressé. Dans ces conditions, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation doit être écarté.
9. En deuxième lieu, M. A...a sollicité son admission au séjour au titre de l'asile le 14 décembre 2015. En raison même de l'accomplissement de cette démarche, qui tendait à son maintien régulier sur le territoire français, il ne pouvait ignorer qu'en cas de refus, il était susceptible de faire l'objet d'une mesure d'éloignement et d'être reconduit à destination du pays dont il a la nationalité ou de tout autre pays où il serait légalement admissible. Il a donc, à cette occasion, été mis à même de faire valoir, avant l'intervention de la décision qui lui a refusé l'admission au séjour et l'a obligé à quitter le territoire français, tout élément d'information ou arguments de nature à influer sur le contenu de cette décision. Par suite, le moyen tiré de la violation du droit d'être entendu préalablement à la décision en litige, telle qu'il est notamment consacré par le droit de l'Union européenne, doit être écarté.
10. En troisième lieu, il résulte de ce qui a été dit au point 7 que M. A... n'est pas fondé à exciper de l'illégalité du refus de titre de séjour à l'encontre de la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français.
11. En quatrième lieu, pour les même motifs que ceux énoncés au point 4 en ce qui concerne le refus de titre de séjour, la décision portant obligation de quitter le territoire français n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
12. En cinquième lieu, il résulte de ce qui a été dit aux points 4 et 6 que la décision du préfet de l'Eure obligeant M. A...à quitter le territoire dans un délai de trente jours n'a pas méconnu les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.
Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :
13. En premier lieu, l'arrêté attaqué comporte la mention des considérations de droit et de fait sur lesquelles le préfet de l'Eure s'est fondé pour désigner le Nigéria comme pays de renvoi en cas d'exécution d'office de l'obligation de quitter le territoire français. Cette décision est, par suite, suffisamment motivée.
14. En deuxième lieu, compte tenu de ce qui a été dit aux points 8 à 12, M. A... n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français à l'encontre de la décision fixant le pays de destination.
15. En troisième lieu, c'est à bon droit que le tribunal administratif de Rouen a retenu que M. A..., dont la demande d'asile a été rejetée, n'apporte aucun élément probant de nature à établir qu'il risquerait de subir, en cas de retour au Nigéria, des traitements inhumains et dégradants au sens de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Par suite, la décision fixant le pays de renvoi n'a pas méconnu l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ni les stipulations de cet article.
16. Il résulte de tout ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et d'astreinte, ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, doivent également être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D...A..., au ministre de l'intérieur et à Me B...C.dans un centre d'accueil pour demandeurs d'asile lors de la procédure d'examen de sa demande d'asile
Copie en sera transmise pour information au préfet de l'Eure.
N°18DA00442 5