Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 30 mai 2016, Mme B..., représentée par Me C..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) de condamner le groupe hospitalier du Havre à lui verser la somme totale de 417 926,25 euros en indemnisation de ses préjudices ;
3°) de mettre à la charge du groupe hospitalier du Havre une somme de 2 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de la santé publique ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Dominique Bureau, première conseillère,
- et les conclusions de Mme Anne-Marie Leguin, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. Mme B..., née le 2 février 1983, était suivie pour obésité morbide depuis le 25 mai 2010 au centre hospitalier du Havre. Elle y a été hospitalisée le 28 mars 2011 et y a subi, le même jour, une intervention de " bypass " gastrique par coelioscopie. L'état occlusif constaté le lendemain de l'intervention, lors d'un examen radiographique avec produit de contraste aux hydrosolubles, a nécessité la réalisation de deux coelioscopies de reprise, les 30 mars et 2 avril suivants. Le 6 avril 2011, jour de sa sortie, Mme B... a été réhospitalisée d'urgence et a subi une ablation de la rate (splénectomie) par laparotomie en raison de la rupture de cet organe. Atteinte dans les suites de cette intervention d'une pneumopathie gauche, avec une récidive fébrile au début du mois de mai 2011, elle a été traitée par antibiothérapie et kinésithérapie. Elle a été réopérée d'urgence en clinique le 27 mai 2011, en état de choc hypovolémique. L'intervention de laparotomie a mis à jour, outre une hémorragie au niveau de la loge de splénectomie, une hémorragie au niveau de la loge intra-gastrique. Les suites ont été simples mais une éventration a été constatée en janvier 2012. Elle a bénéficié dans la même clinique, le 15 février 2012, d'une cure d'éventration par la pose d'une plaque. Sortie le 22 février 2012, Mme B... demeure atteinte de séquelles, en particulier d'une hernie résiduelle de petite taille justifiant une surveillance régulière, et de l'impossibilité de soulever des charges lourdes. Elle a obtenu une mesure d'expertise, prononcée le 19 octobre 2012 par une ordonnance n° 1202589 du juge des référés du tribunal administratif de Rouen. Le rapport d'expertise a été déposé le 15 janvier 2013. Par un jugement n° 1400105 du 31 mars 2016, le même tribunal a rejeté la demande d'indemnisation présentée par Mme B... à l'encontre du groupe hospitalier du Havre, venant aux droits et obligations du centre hospitalier du Havre, ainsi que la demande de la CPAM du Havre tendant au remboursement de ses débours. Mme B... relève appel de ce jugement.
Sur la motivation du jugement :
2. Dès lors qu'il ne retenait aucune faute imputable au centre hospitalier du Havre, le tribunal n'avait pas à se prononcer sur l'imputabilité de l'éventration subie par Mme B... à sa prise en charge dans cet établissement. La requérante n'est, par suite, pas fondée à soutenir que le jugement, insuffisamment motivé sur ce point, serait entaché d'irrégularité.
Sur la prise en compte de la note critique produite par le groupe hospitalier du Havre :
3. La circonstance que le groupe hospitalier du Havre a produit devant les premiers juges un rapport critique rédigé par un expert médical au vu des pièces que lui-même ou son assureur lui a communiqué, de sa propre initiative, en méconnaissance du secret médical qui s'impose à lui, n'est par elle-même pas de nature à affecter la régularité ou le bien-fondé du jugement, dès lors que cette pièce a été soumise au contradictoire dans le cadre de la procédure contentieuse de première instance.
Sur la responsabilité du centre hospitalier du Havre :
En ce qui concerne les fautes médicales :
4. Il résulte des dispositions du I de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique qu'en dehors des cas où elle est engagée en raison d'un défaut d'un produit de santé, la responsabilité d'un établissement de santé du fait des conséquences dommageables d'actes de prévention, de diagnostic ou de soins n'est encourue qu'en cas de faute.
S'agissant de la reprise de l'anastomose :
5. Il résulte de l'instruction, en particulier du rapport de l'expert judiciaire, que l'examen radiographique avec ingestion de produit de contraste au lendemain de l'intervention initiale a montré un retard de vidange de l'anse " en Y " confectionnée lors de la réalisation du " bypass ". Le radiologue a conclu à un possible rétrécissement de l'anastomose qui réalise l'anse. Au cours de la première coelioscopie de reprise, réalisée le 30 mars 2011, le chirurgien, estimant cette anastomose parfaite, a constaté qu'elle était fermée par le point de fermeture de la brèche mésentérique et refait celui-ci, libérant et repositionnant le pied de l'anse. Devant la persistance de l'occlusion, le chirurgien a procédé, le 2 avril 2011, à une nouvelle intervention par coelioscopie, au cours de laquelle il a procédé à la réfection de l'anastomose qui lui " paraissait étroite ".
6. En faisant apparaître dans son rapport que, dès avant l'intervention du 30 mars 2011, il aurait dû être procédé à un examen scannographique qui aurait permis d'éviter la seconde réintervention, l'expert judiciaire s'est prononcé sur la conduite adoptée par le chirurgien dans le cas précis de Mme B..., qui venait de subir la réalisation d'un " bypass ", au vu des résultats de l'examen radiographique. Ainsi, l'argument de l'auteur du rapport critique, selon lequel l'examen aux hydrosolubles est l'examen de référence dans le cas d'un trouble de la vidange d'un viscère, n'est pas de nature, en raison du caractère très général de cette affirmation, à remettre en cause les conclusions du rapport d'expertise. Il en va de même de l'indication selon laquelle le suivi d'une intervention chirurgicale " n'est pas de la compétence " d'un radiologue, dès lors que la faute reprochée au chirurgien n'est pas d'avoir omis de se conformer aux orientations préconisées par le radiologue. Il n'est en outre pas contesté que la présence de la sténose (étrécissement) de l'anastomose était présente avant la première réintervention. Il s'ensuit que la responsabilité de centre hospitalier du Havre est engagée en raison de l'omission pour le chirurgien d'avoir fait procéder avant celle-ci à un examen scannographique, dont le caractère fautif doit être regardé comme établi.
7. Cette faute imputable au service hospitalier a entraîné pour Mme B... la nécessité de se soumettre à une seconde réintervention par coelioscopie, en particulier en ce qui concerne le déficit fonctionnel temporaire et les souffrances endurées. Cette coelioscopie supplémentaire a, en outre, dans les conditions précisées au point suivant, fait perdre à Mme B... une chance d'éviter la rupture de la rate, ainsi que les complications qui ont suivi, incluant l'éventration dont l'apparition a été particulièrement favorisée par la double laparotomie d'ablation de cet organe et de prise en charge de l'infection et de l'hémorragie qui s'en sont suivies. Cette chance doit, dans les circonstances de l'espèce, être évaluée à un tiers.
S'agissant de l'accident à l'origine de la rupture de la rate :
8. Il résulte, d'une part, tant du rapport de l'expertise ordonnée en référé que du rapport critique produit en défense que la rupture de la rate, qui a nécessité la réhospitalisation de Mme B... en urgence, le 6 avril 2011, et conduit à la réalisation d'une splénectomise, a pour origine un choc subi par cet organe. Celui-ci a été provoqué soit par la mise en place d'un trocart, soit par le geste chirurgical proprement dit, au cours de l'une des trois interventions réalisées sous coelioscopie les 28 mars 2011, 30 mars suivant et 2 avril 2011. Un tel accident constitue une complication relativement fréquente de ce type d'intervention. D'autre part, aucun élément précis ne peut être retenu en faveur d'une faute commise durant ces interventions, malgré l'emploi par l'expert des termes " geste malencontreux ", ou d'une insuffisance d'actes à visée exploratoire ou diagnostique. En particulier, compte tenu de la phase initiale de constitution d'un hématome sous-scapulaire, aucun épanchement sanguin n'était susceptible d'être remarqué par les opérateurs. La responsabilité du centre hospitalier du Havre n'est, par suite, pas engagée sur ce point.
S'agissant de la prise en charge de l'infection présentée dans les suites de l'ablation de la rate :
9. Il résulte de l'instruction qu'après la splénectomie du 6 avril 2011, Mme B... a présenté une pneumopathie du lobe inférieur gauche, traitée, avant et après sa sortie, par antibiothérapie et kinésithérapie. Se fondant sur les courriers rédigés par le pneumologue du centre hospitalier du Havre qui a pris en charge cette pathologie, l'expert désigné par le tribunal relève que les clichés radiographiques révélaient, dès le début du mois de mai 2011, la " récidive d'une pneumopathie et d'un épanchement pleural gauche important mais néanmoins modéré par rapport à la radiographie de la sortie du 12 avril ", et qu'un examen scannographique, réalisé à la demande de ce praticien, le 16 mai 2011, montrait " une ascension de la coupole diaphragmatique gauche en raison de la présence d'une " collection sous-phrénique hétérogène à parois épaissies avec des bulles aériques à l'intérieur mesurée à 80 x 42 x 77 mm tout à fait compatible avec un abcès sous-phrénique ". Par ailleurs, la patiente, toujours prise en charge par antibiothérapie, avait présenté une hypoglobulie nécessitant une transfusion sanguine. L'expert désigné par le tribunal déduit de ces éléments, confirmés par les résultats de l'angioscanner réalisé le 24 mai 2011 au cours d'une hospitalisation de quatre jours pour suspicion d'embolie, qu'une coelioscopie était alors indiquée depuis longtemps pour drainer l'abcès et en identifier les causes, et que cette prise en charge plus précoce aurait évité à la patiente d'être victime d'un choc hypovolémique, affection grave ayant imposé sa réhospitalisation en urgence dès le 27 mai 2011 pour une intervention chirurgicale qui a mis à jour des hémorragies au niveau de l'estomac résiduel et de la loge de la rate. La circonstance, relevée par l'auteur du rapport critique, que l'antibiothérapie est le traitement de première intention en l'absence de signes généraux importants, n'est pas de nature à remettre en cause le retard fautif de prise en charge souligné par l'expert, dès lors que cet auteur ne précise pas que, dans le cas particulier de Mme B..., le maintien sans succès d'une approche thérapeutique par antibiothérapie pendant près de cinquante jours était conforme aux pratiques admises.
10. En revanche, l'auteur de la note critique explique que l'échec d'une antibiothérapie doit faire envisager soit une ponction sous imagerie médicale de lavage et de drainage de l'abcès, souvent inefficace, soit une intervention chirurgicale et que, dès lors que la patiente avait déjà subi trois coelioscopies, seule une laparotomie pouvait être envisagée, points sur lesquels l'expert désigné par le tribunal n'a pas apporté de précisions. Par suite, la faute imputable au centre hospitalier du Havre, analysée au point précédent, a pour seules conséquences dommageables la survenance d'une hémorragie intra-gastrique, en particulier les souffrances supplémentaires résultant de cette complication.
En ce qui concerne le défaut d'information :
11. L'article L. 1111-2 du code de la santé publique reconnaît aux patients le droit d'être informés des risques des traitements qui leur sont proposés.
12. Il résulte du rapport de l'expert désigné en référé par le tribunal administratif de Rouen et qui n'est pas sérieusement contesté que, suivie depuis près d'un an pour obésité morbide par le centre hospitalier du Havre avant d'y subir un " bypass " gastrique, Mme B... a admis avoir été informée des risques présentés par ce type d'intervention. Ainsi, le centre hospitalier du Havre doit être regardé comme rapportant la preuve de la délivrance à la patiente de l'information prévue par les dispositions de l'article L. 1111-2.
Sur les préjudices :
En ce qui concerne la consolidation :
13. En l'absence d'indication donnée sur ce point par l'expert désigné par le tribunal et de tout autre élément contraire, Mme B... avance comme date de consolidation celle du 20 mars 2012. Il résulte de l'instruction que la petite hernie ombilicale résiduelle qu'elle conserve n'a nécessité depuis lors qu'un suivi régulier. Il y a lieu de regarder la consolidation comme acquise à cette date, laquelle, postérieure à celle de la fin du dernier " arrêt de travail " relevé par l'expert, coïncide avec la consultation de contrôle prévue auprès du chirurgien qui a réalisé l'intervention du 15 février 2012 et la fin du port d'une ceinture abdominale qui lui était prescrit.
En ce qui concerne les préjudices patrimoniaux :
S'agissant des préjudices patrimoniaux antérieurs à la consolidation :
Quant au besoin d'assistance par une tierce personne :
14. Lorsque le juge administratif indemnise dans le chef de la victime d'un dommage corporel la nécessité de recourir à l'aide d'une tierce personne, il détermine le montant de l'indemnité réparant ce préjudice en fonction des besoins de la victime et des dépenses nécessaires pour y pourvoir. Il doit à cette fin se fonder sur un taux horaire permettant, dans les circonstances de l'espèce, le recours à l'aide professionnelle d'une tierce personne d'un niveau de qualification adéquat, sans être lié par les débours effectifs dont la victime peut justifier. Il n'appartient notamment pas au juge, pour déterminer cette indemnisation, de tenir compte de la circonstance que l'aide a été ou pourrait être apportée par un membre de la famille ou un proche de la victime.
15. Il résulte du rapport d'expertise que Mme B... a eu recours à l'assistance d'une aide ménagère pour les taches domestiques, y compris pendant les périodes d'hospitalisation, du 19 avril au 8 septembre 2011, puis du 16 février au 8 mars 2012. Compte tenu de ce que Mme B..., mère de deux tout jeunes enfants, exerçait une activité professionnelle à temps partiel avant l'intervention initiale, et de ce qu'il n'est pas démontré que son état, lors de ses retours à domicile, justifiait une attention et des soins particuliers, il y a lieu d'évaluer à une moyenne de deux heures quotidiennes, y compris le dimanche, son besoin d'assistance par une tierce personne en lien direct avec les interventions de splénectomie et de cure d'éventration.
16. En tenant compte de la valeur moyenne du salaire minimum interprofessionnel de croissance sur l'ensemble des périodes considérées, augmentée des charges sociales incombant à l'employeur, du coût des congés payés et de la majoration pour dimanche et jours fériés, il sera fait une juste appréciation des préjudices qui ont résulté pour Mme B... du besoin d'une aide non spécialisée par une tierce personne en les indemnisant selon un taux horaire de 13 euros et en lui allouant, par suite, la somme de 1 430 euros.
Quant à la perte de gains professionnels :
17. Mme B..., alors employée comme agent de service par l'Association normande pour la prise en charge de l'insuffisance rénale chronique par la dialyse (ANIDER) percevait, selon son avis d'imposition à l'impôt sur le revenu au titre de l'année 2010, un salaire mensuel moyen de 476,67 euros. Il résulte de l'instruction, en particulier de l'attestation de paiement des indemnités journalières émise par la CPAM du Havre, des fiches de paie produites et des indications relevées dans le rapport d'expertise que Mme B... a bénéficié d'arrêts de travail du 28 mars 2011 au 31 août 2011, puis du 4 novembre 2011 au 4 décembre 2011, après avoir repris son activité professionnelle à mi-temps en septembre et en octobre 2011.
18. Il y a lieu de considérer qu'au-delà des quinze jours d'arrêt de travail qui, selon l'expert, auraient été normalement nécessaires, quatre jours d'arrêt pour hospitalisation, correspondant à un salaire supplémentaire de 66,22 euros et qui ont donné lieu au versement d'indemnités au taux journalier net de 9,10 euros, laissant Mme B... supporter une perte de gains professionnels non compensée de 29,82 euros, sont imputables à la nécessité de procéder à deux reprises coelioscopiques au lieu d'une seule et, par suite, à la faute commise par le chirurgien en ne décidant pas la réalisation d'un scanner. Il y a lieu de mettre cette somme à la charge du groupe hospitalier du Havre.
19. Pour le surplus, le préjudice résultant de la perte de salaires subie par Mme B..., exclusivement imputable à la rupture de la rate et aux complications qui ont suivi, s'établit à 3 235, 39 euros. Le préjudice ayant été compensé à hauteur de 1 682,85 euros par des indemnités journalières, laissant Mme B... supporter un préjudice non compensé de 1 552,54 euros, il y a lieu d'allouer à la requérante l'intégralité de la somme de 1 078, 46 euros devant être mise à la charge du centre hospitalier du Havre, compte tenu du taux de perte de chance déterminé au point 7.
20. En revanche, s'il résulte du rapport d'expertise qu'un nouvel arrêt de travail a été prescrit à Mme B..., après la cure d'éventration, du 20 février 2012 au 20 mars 2012, il résulte des fiches de paie produites que Mme B... n'était déjà plus salariée de l'ANIDER depuis le courant du mois de décembre 2011. Elle ne justifie avoir, temporairement, retrouvé un emploi auprès d'un service de nettoyage que le 20 avril 2012, soit postérieurement à la consolidation, avant d'être engagée par contrat à durée déterminée sur un emploi d'agent de service auprès du groupe hospitalier du Havre. Dès lors qu'aucun lien de causalité entre la fin du contrat de Mme B... auprès de l'ANIDER et son état de santé n'est démontré, la requérante n'est pas fondée à demander l'indemnisation d'une perte de gains professionnels durant cette seconde période antérieure à la consolidation.
S'agissant des préjudices postérieurs à la consolidation :
Quant au besoin d'aide par une tierce personne :
21. En se bornant à faire valoir l'incapacité dans laquelle elle se trouve de porter des charges lourdes, admise par l'expert, et à produire sur ce point une attestation de son mari, Mme B... n'établit pas qu'elle se trouvera à l'avenir dans la nécessité de recourir à l'aide d'une tierce personne, que le même expert n'a d'ailleurs pas relevée.
Quant aux préjudices professionnels :
22. Compte tenu de la nature des emplois occupés par Mme B..., qui n'était âgée que de vingt-neuf ans à la date de consolidation, et de l'impossibilité dans laquelle elle se trouve de porter des charges lourdes, l'incidence professionnelle, incluant celle sur la retraite, de la rupture de la rate et des complications qui ont suivi doit être évaluée à 12 000 euros. Compte tenu du taux de perte de chance et de la circonstance que la CPAM du Havre n'a fait état dans le relevé de ses débours fournis en première instance d'aucune prestation versée à Mme B... en compensation d'une incapacité postérieure aux périodes d'arrêt de travail, il y a lieu de lui allouer l'intégralité des 4 000 euros dont il incombe au groupe hospitalier du Havre de supporter la charge.
23 En revanche, Mme B... ne démontre pas l'existence d'un " préjudice de retraite " distinct de l'incidence évaluée au point précédent.
En ce qui concerne les préjudices extrapatrimoniaux :
S'agissant des préjudices antérieurs à la consolidation :
24. En premier lieu, il résulte de ce qui a été dit au point 17 que, du fait de l'absence de réalisation d'un scanner, Mme B... a subi quatre jours d'hospitalisation supplémentaires, durant lesquels le déficit fonctionnel temporaire doit être évalué à 100 %. Il en sera fait une juste appréciation en lui allouant la somme de 54 euros.
25. Il résulte, en outre, de l'instruction que, du fait de la splénectomie et de ses complications, Mme B... a subi vingt-et-un jours d'hospitalisation, s'est vu prescrire neuf mois et neuf jours d'arrêt de travail hors hospitalisation, et a été contrainte d'exercer son activité d'agent de service à mi-temps durant une période de deux mois. Le déficit fonctionnel temporaire qu'elle a subi durant ces périodes n'est pas assimilable à l'incapacité temporaire de travail à l'origine des arrêts de travail et d'un aménagement de sa durée, mais correspond à l'invalidité subie par la victime dans sa sphère personnelle, incluant le préjudice sexuel. Il en sera fait une juste appréciation en l'évaluant à 1 800 euros et en allouant à Mme B..., compte tenu du taux de perte de chance défini, la somme de 600 euros.
26. En second lieu, l'expert a évalué à 2 sur une échelle de 7 les souffrances endurées par Mme B.... Il sera fait une juste appréciation, d'abord, des souffrances endurées par la requérante du fait d'une coelioscopie supplémentaire, ensuite, de la perte de chance d'un tiers d'éviter les souffrances liées à la splénectomie et à la nécessité de subir deux laparotomies et une cure d'éventration et, enfin, à la complication liée à la survenance d'une hémorragie gastrique, en accordant à Mme B... la somme globale de 750 euros.
S'agissant des préjudices postérieurs à la consolidation :
27. Il résulte du rapport d'expertise que Mme B..., âgée de 29 ans à la date de consolidation, demeure atteinte d'un déficit fonctionnel permanent de 4 % en raison de la hernie qu'elle conserve à la suite de la cure d'éventration. Il sera fait une juste appréciation de ce préjudice en l'évaluant à 5 810 euros et en accordant à Mme B..., compte tenu du taux de perte de chance, la somme de 1 940 euros.
28. Mme B... ne justifie d'aucun préjudice d'agrément spécifique lié à l'impossibilité de pratiquer régulièrement une activité spécifique sportive ou de loisirs antérieure, lui ouvrant droit à une indemnisation distincte à ce titre.
29. Il sera fait une juste appréciation, d'une part, du préjudice esthétique résultant d'une coelioscopie supplémentaire, et, d'autre part, de la fraction indemnisable, compte tenu du taux de perte de chance, du préjudice esthétique consécutif à deux laparotomies et à l'éventration, en accordant à Mme B... la somme de 750 euros.
30. La persistance, postérieurement à la consolidation, d'un préjudice sexuel résultant selon Mme B... de l'appréhension systématique, non rapportée médicalement, d'une nouvelle complication n'est pas établie.
Sur les droits de Mme B... :
31. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée à la requête en tant que les conclusions indemnitaires de Mme B... excèdent la somme de 364 332,57 euros, que celle-ci est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande en indemnisation des préjudices résultant des complications de l'intervention de " bypass " gastrique qu'elle a subie dans cet établissement le 28 mars 2011 et qu'elle est seulement fondée à demander, à ce titre, la condamnation du groupe hospitalier de Havre à lui verser la somme de 10 602,46 euros.
Sur les frais d'expertise :
32. En application des dispositions de l'article R. 761-1 du code de justice administrative, il y a lieu de mettre à la charge solidaire du groupe hospitalier du Havre les frais de l'expertise ordonnée par le tribunal administratif, taxés et liquidés à la somme de 2 580 euros par ordonnance du 1er février 2013 du président du tribunal administratif de Rouen.
Sur les conclusions présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
33. En application de ces dispositions, il y a lieu de mettre à la charge du groupe hospitalier du Havre une somme de 1 500 euros à verser à Mme B... au titre des frais exposés par elle dans la présente instance et non compris dans les dépens.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1400105 du 31 mars 2016 du tribunal administratif de Rouen est annulé.
Article 2 : Le groupe hospitalier de Havre est condamné à verser à Mme B... la somme de 10 602,46 euros en indemnisation de ses préjudices.
Article 3 : Les frais d'expertise, taxés et liquidés à la somme de 2 580 euros par ordonnance du 1er février 2013 du président du tribunal administratif de Rouen, sont mis à la charge du groupe hospitalier du Havre.
Article 4 : Le groupe hospitalier du Havre versera à Mme B...une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme B...est rejeté.
Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B...et au groupe hospitalier du Havre.
Copie sera adressée à la caisse primaire d'assurance maladie du Havre et à la caisse des dépôts et consignations.
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N°16DA00990