Procédure devant la cour :
Par un recours et un mémoire, enregistrés le 5 juillet 2016 et le 18 novembre 2016, le ministre des finances et des comptes publics demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif d'Amiens du 23 juin 2016 ;
2°) de remettre à la charge de M. et Mme B...les cotisations d'impôt sur le revenu et de contributions sociales dont ils ont été déchargés par les premiers juges.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Muriel Milard, premier conseiller,
- les conclusions de M. Jean-Michel Riou, rapporteur public,
- et les observations de Me C...D..., représentant M. et MmeB....
1. Considérant que M. et Mme B...ont, le 16 septembre 2013, cédé une maison d'habitation, située 10, rue de la Mare du Four à Bresles dans le département de l'Oise, dont ils sont propriétaires, et qu'ils avaient occupée comme résidence principale jusqu'au 1er juin 2011, pour un montant de 171 000 euros ; que l'administration a mis à leur charge des cotisations d'impôt sur le revenu et de contributions sociales au titre de l'année 2013 à raison de la plus-value résultant de cette cession ; que le 6 novembre 2013, ils ont contesté ces impositions et demandé la restitution de la plus-value immobilière de ce bien pour un montant de 16 279 euros ; que, par un jugement du 23 juin 2016, le tribunal administratif d'Amiens a prononcé la décharge de ces impositions ; que le ministre des finances et des comptes publics relève appel de ce jugement ;
Sur la réclamation :
2. Considérant que, par une lettre du 6 novembre 2013, M. et Mme B...ont saisi l'administration fiscale d'un " recours " à l'encontre de l'imposition mise à leur charge à la suite de la plus-value de cession de leur bien immobilier situé 10, rue de la Mare du Four à Bresles ; que cette demande, qui conteste ainsi le bien-fondé des impositions en litige, présentait le caractère d'une réclamation contentieuse ; que l'administration fiscale a d'ailleurs regardé cette demande à la fois comme une réclamation contentieuse et comme une demande de remise gracieuse et, par une décision du 6 janvier 2014, l'a rejetée en cette double qualité en précisant les délais et voies de recours ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la demande présentée par M. et Mme B...présentait le caractère d'une demande gracieuse doit être écarté ;
Sur le bien-fondé des impositions en litige :
3. Considérant qu'aux termes de l'article 150 U du code général des impôts : " I. - (...) les plus-values réalisées par les personnes physiques ou les sociétés ou groupements qui relèvent des articles 8 à 8 ter, lors de la cession à titre onéreux de biens immobiliers bâtis ou non bâtis ou de droits relatifs à ces biens, sont passibles de l'impôt sur le revenu (...). / II. - Les dispositions du I ne s'appliquent pas aux immeubles, aux parties d'immeubles ou aux droits relatifs à ces biens : / 1° Qui constituent la résidence principale du cédant au jour de la cession (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions que les plus-values réalisées à l'occasion de la cession, par un contribuable, de sa résidence principale sont exonérées d'impôt sur le revenu et, par voie de conséquence, de contributions sociales ; que pour être considéré comme résidence principale au sens de ces dispositions, l'immeuble en cause doit constituer la résidence habituelle et effective du cédant ;
4. Considérant que pour l'application de ces dispositions, un immeuble ne perd pas sa qualité de résidence principale du cédant au jour de la cession du seul fait que celui-ci a libéré les lieux avant ce jour, à condition que le délai pendant lequel l'immeuble est demeuré inoccupé puisse être regardé comme normal ; qu'il en va ainsi lorsque le cédant a accompli les diligences nécessaires, compte tenu des motifs de la cession, des caractéristiques de l'immeuble et du contexte économique et réglementaire local, pour mener à bien cette vente dans les meilleurs délais à compter de la date prévisible du transfert de sa résidence habituelle dans un autre lieu ;
5. Considérant que le service a estimé que la cession de la résidence principale des époux B...était intervenue plus de deux ans et sept mois après la mise en vente de ce bien le 9 février 2011, soit un délai anormal, et à un prix de vente initial surévalué ; qu'il résulte de l'instruction que M. et Mme B...avaient mis en vente leur maison le 9 février, et donné mandat à plusieurs agences immobilières les 5, 9 et 19 février 2011 pour procéder à cette vente ; que le prix de vente, pour une surface habitable de 120 m², avait été fixé à 250 000 euros, soit le montant le plus bas de l'évaluation de sa valeur vénale estimée, le 22 mars 2011, à une valeur comprise entre 250 000 euros et 255 000 euros par le Crédit du Nord dans le cadre de la garantie du prêt relais accordé aux requérants, une seule agence ayant mis en vente ce bien à 259 000 euros frais d'agence inclus ; que la justesse de l'évaluation ainsi faite de ce bien est, en outre, corroborée par une autre estimation, effectuée le 8 février 2011 par une étude notariale ; que le prix de 250 000 euros était conforme à l'état du marché immobilier sur le secteur concerné dont le prix au m² était de 2 100 euros à la fin de l'année 2010 avant de remonter à 2 450 euros au moment de l'évaluation du bien en cause ; qu'en outre, la comparaison avec une autre maison située à proximité mais de plus petite surface, faisait apparaître un prix au m² de 2 353 euros, ce qui correspondait, pour une surface de 120 m², à un prix de vente de 282 360 euros ; que les requérants ont baissé le prix de vente de leur bien à 235 000 euros le 30 juin 2011, à 227 000 euros le 5 novembre 2011, à 195 000 euros le 17 décembre 2012, puis à 180 000 euros le 27 février 2013 en raison de la forte baisse du marché immobilier en 2012 ; qu'il résulte de l'ensemble de ces éléments que M. et Mme B...avaient accompli les diligences nécessaires à la vente de leur bien et qu'ainsi, le délai pendant lequel l'immeuble est demeuré inoccupé entre le 1er juin 2011, date à laquelle M. et Mme B...ont quitté les lieux et la signature du compromis de vente le 13 avril 2013, soit un délai de deux ans et deux mois, peut être regardé comme normal ; que, par suite, la cession intervenue le 16 septembre 2013 a porté sur un bien qui devait être regardé comme ayant constitué, à la date de l'opération en cause, la résidence principale de M. et MmeB... ; que dans ces conditions, ces derniers pouvaient prétendre au bénéfice de l'exonération prévue par les dispositions précitées de l'article 150 U du code général des impôts, comme l'ont estimé à bon droit les premiers juges ;
6. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, que le ministre des finances et des comptes publics n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a accordé à M. et Mme B...la décharge des cotisations d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2013 à raison de la plus-value résultant de la cession de leur bien immobilier ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme que M. et Mme B... demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : Le recours du ministre des finances et des comptes publics est rejeté.
Article 2 : L'Etat versera à M. et Mme B...une somme de 1 200 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme A...B...et au ministre de l'action et des comptes publics.
Copie sera adressée à l'administrateur général des finances publiques chargé de la direction spécialisée de contrôle fiscal Nord.
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N°16DA01239