Procédure devant la cour :
       Par une requête, enregistrée le 23 mai 2018, le préfet du Nord, représenté par Me B...C..., demande à la cour :
       1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Lille du 16 mars 2018 ; 
       2°) de rejeter la demande de première instance.
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       Vu les autres pièces du dossier.
       Vu :
       - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; 
       - l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 ;
       - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
       - le code des relations entre le public et l'administration ; 
       - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
       - le code de justice administrative.
       Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
       Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
       Le rapport de M. E...Albertini, président-rapporteur, a été entendu au cours de l'audience publique.
       Considérant ce qui suit : 
       1. M.D..., ressortissant marocain né le 25 novembre 1973, serait selon ses déclarations entré en France en 1987. Le 1er juin 2012, il a sollicité un titre de séjour temporaire en qualité de salarié. Par un arrêté du 1er octobre 2012, le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui délivrer un  titre de séjour, lui a enjoint de quitter le territoire français dans le délai de trente jours, a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office et lui a interdit de retourner sur le territoire français pour une durée de deux ans. Par un jugement du 7 février 2013, le tribunal administratif de Montreuil a annulé cet arrêté et a enjoint au préfet de la Seine-Saint-Denis de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de trois mois à compter de la notification du jugement. Par un arrêté du 19 février 2018, le préfet du Nord a enjoint à M. D... de quitter le territoire, a refusé de lui accorder un délai de départ volontaire, a fixé le pays de destination de cette mesure d'éloignement et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans. Le préfet du Nord relève appel du jugement par lequel le magistrat désigné par le tribunal administratif de Lille a annulé cet arrêté.
       Sur les conclusions à fin d'annulation :
       2. Il ressort des pièces du dossier que M. D...a été scolarisé en France, à Saint Geneviève des Bois, dès l'année scolaire 1987-1988, et qu'il y a été hébergé dans un foyer de 1992 à 2003. Il a produit ses avis d'impôt sur le revenu de 2009 jusqu'à 2017, des bulletins de salaire délivrés à partir de 2014 ainsi qu'un contrat à durée indéterminée conclu en 2016, et divers documents émanant de l'assurance maladie et de Pôle emploi lui permettant de justifier d'une insertion professionnelle en France de 2009 à 2018. M. D...a aussi justifié d'une communauté de vie ancienne et stable avec une ressortissante française, qui a débuté en 2002,  relevée par le jugement du 7 février 2013 du tribunal administratif de Montreuil cité au point 1 au regard du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Il est en outre constant que M. D...a sollicité le renouvellement du titre de séjour qui lui a été accordé en 2013, en 2014 puis en 2015. Il justifie aussi avoir demandé un titre de séjour le 22 septembre 2016 auprès du préfet de l'Essonne. Toutefois, le préfet du Nord ne fait pas état de ces circonstances et indique même dans l'arrêté en litige que M. D...n'a pas sollicité la délivrance d'un titre de séjour, en indiquant qu'il a fait l'objet d'une mesure d'éloignement le 22 février 2017, à laquelle il s'est soustrait, sans toutefois produire au dossier, y compris en cause d'appel, cette décision d'éloignement. Il ressort aussi des pièces du dossier que le père de M. D...réside en France, que son frère y résidait avant son décès en 2018, que sa belle-soeur, qui l'a hébergé, réside aussi en France et qu'il n'a aucune attache familiale au Maroc. Le préfet du Nord ne s'est pas prononcé au regard de ces circonstances et précise, dans les motifs de la décision en litige, que M. D...est signalé pour de nombreux troubles à l'ordre public, qu'il ne justifie pas de l'ancienneté de son séjour en France, qu'il y serait isolé et qu'il est sous le coup d'une obligation de quitter le territoire français. Dans les circonstances particulières de l'affaire, le préfet du Nord, qui n'a ainsi pas procédé à un examen particulier et sérieux de la situation personnelle de M.D..., n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le magistrat désigné par le tribunal administratif de Lille a annulé, pour ce motif, l'obligation de quitter le territoire français prise à l'encontre de M. D....
       3. Compte tenu de ce qui a été dit et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, l'obligation de quitter le territoire français du 19 février 2018 prononcée à l'encontre de M. D...doit être annulée ainsi que, dès lors qu'elles sont dépourvues de base légale, la décision lui refusant un délai de départ volontaire, celle fixant le pays de destination de la mesure d'éloignement et la décision lui interdisant le retour sur le territoire français avant l'expiration du délai de deux ans.
       4. Il résulte de tout ce qui précède que le préfet du Nord n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le magistrat désigné par le tribunal administratif de Lille a annulé l'arrêté du 19 février 2018 en litige à l'encontre de M.D.... 
       Sur les conclusions présentées sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 : 
       5. M.D..., qui n'a pas déposé de demande d'aide juridictionnelle, ne peut utilement se prévaloir des dispositions de l'article 37 de la loi susvisée de 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative pour demander que soit versée, dans les conditions prévues par cette disposition, une somme à son avocat, sous réserve de sa renonciation au versement de la part contributive de l'Etat.
       DÉCIDE :
       Article 1er : La requête du préfet du Nord est rejetée.
       Article 2 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à M A...D....
       Copie en sera adressée, pour information, au préfet du Nord.
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N°18DA01038
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