1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté ;
3°) d'enjoindre à la préfète de la Seine-Maritime, dans un délai d'un mois et sous astreinte de 100 euros par jour de retard, à titre principal, d'autoriser le regroupement familial en faveur de son épouse et de son fils et, à titre subsidiaire, de réexaminer sa demande ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 61-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Paul-Louis Albertini, président de chambre,
- et les observations de Me A... C..., représentant M. D....
Considérant ce qui suit :
1. M. D..., ressortissant marocain né le 1er janvier 1978, déclare être entré sur le territoire français en septembre 2011 accompagné de son épouse et de son fils. Il a été mis en possession d'un titre de séjour valable jusqu'au 21 mars 2021. Par un arrêté du 25 mai 2016, la préfète de la Seine-Maritime a rejeté sa demande tendant à ce que lui soit accordé le bénéfice du regroupement familial en faveur de son épouse et de son fils. M. D... relève appel du jugement du 9 octobre 2018 par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté.
2. Il ressort des pièces du dossier que l'arrêté attaqué cite les dispositions de l'article L. 411-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et mentionne l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Si le requérant soutient que l'arrêté en litige est insuffisamment motivé en droit dès lors qu'elle ne mentionne pas les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant, cette seule circonstance n'est pas de nature à faire regarder l'arrêté en litige comme insuffisamment motivé. Dès lors, l'arrêté en litige comporte l'ensemble des considérations de droit qui en constituent le fondement. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation doit être écarté.
3. Aux termes de l'article L. 421-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative statue sur la demande dans un délai de six mois à compter du dépôt par l'étranger du dossier complet de cette demande. Il informe le maire de la décision rendue. / La décision autorisant l'entrée en France des membres de la famille est caduque si le regroupement n'est pas intervenu dans un délai fixé par voie réglementaire ". Aux termes de l'article R. 421-20 du même code : " L'autorité compétente pour délivrer l'autorisation d'entrer en France dans le cadre du regroupement familial est le préfet et, à Paris, le préfet de police. Cette autorité statue sur la demande de regroupement familial dans le délai de six mois prévu à l'article L. 421-4. L'absence de décision dans ce délai vaut rejet de la demande de regroupement familial ".
4. Il ressort de ces dispositions que le silence gardé par le préfet sur une demande de regroupement familial vaut décision implicite de rejet après expiration d'un délai de six mois. Le requérant ne pouvait utilement se prévaloir de la circonstance que la durée du délai d'instruction de sa demande était excessif et anormalement long et avait eu des conséquences néfastes sur sa vie privée et familiale dès lors que sa demande devait nécessairement être considérée comme ayant été rejetée après écoulement d'un délai de six mois. Par suite, le moyen de ce que l'arrêté en litige méconnaîtrait les dispositions de l'article L. 421-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est inopérant et ne peut qu'être écarté.
5. Aux termes des dispositions de l'article L. 411-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Peut être exclu du regroupement familial (...) / 3° Un membre de la famille résidant en France ".
6. Il résulte de ces dispositions, que, lorsqu'il se prononce sur une demande de regroupement familial, le préfet est en droit de rejeter la demande en cas de présence anticipée sur le territoire français du membre de la famille bénéficiaire de la demande. Il dispose toutefois d'un pouvoir d'appréciation et n'est pas tenu par les dispositions précitées, notamment dans le cas où il est porté une atteinte excessive au droit de mener une vie familiale normale tel qu'il est protégé par les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
7. M. D... soutient que la préfète de la Seine-Maritime a commis une erreur de droit en fondant sa décision d'obligation de quitter le territoire français sur les seules dispositions de l'article L. 411-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile sans examiner la situation du requérant, de son épouse et de son fils au regard des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant. Or, il ressort des termes de la décision attaquée, qui n'avait pas à reprendre expressément et de manière exhaustive la situation personnelle du requérant, que la préfète de la Seine-Maritime a examiné la situation de celui-ci tant personnelle que familiale au regard des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et qu'elle a fait mention des conditions d'entrée et de présence en France de son épouse et de son fils. Par suite, le moyen tiré de ce que l'arrêté en litige est entaché d'une erreur de droit et d'un défaut d'examen particulier de la situation du requérant doit être écarté.
8. M. D... fait valoir que la décision en litige aurait pour effet de rompre l'unité de la cellule familiale en ce qu'elle aurait pour effet de contraindre son épouse et son fils à retourner au Maroc. Or, l'arrêté attaqué ne lui oppose qu'un refus à sa demande de regroupement familial et n'a ni pour objet ni pour effet de contraindre son épouse et son fils à quitter le territoire français. En tout état de cause, il ressort aussi des pièces du dossier qu'à la date de la décision en litige, Mme D... était en possession d'un titre de résidence permanent en Espagne, valide jusqu'au 29 juin 2017. Elle était en mesure de circuler librement entre l'Espagne et la France, sous couvert de ce titre de séjour, durant la durée d'instruction d'une demande de regroupement familial. Au demeurant, le requérant allègue qu'il n'a jamais été séparé de son épouse depuis 2005, date à laquelle elle l'a rejoint en Espagne où est né leur fils en 2009, et que ceux-ci sont entrés sur le territoire français en 2011. Il ressort toutefois des pièces du dossier que Mme D... et leur enfant ont quitté le territoire marocain le 29 août 2013. Il résulte qu'ils n'étaient en France que depuis trois ans à la date de l'arrêté attaqué. Par suite, M. D... n'est pas fondé à soutenir que la décision en litige aurait porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale et ainsi méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
9. Aux termes des stipulations de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " 1. Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale (...) ". Il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant.
10. Il résulte de ce qui a été dit au point 8 que l'arrêté en litige n'a ni pour objet ni pour effet de contraindre le fils du requérant à quitter le territoire français. En tout état de cause, la décision de la préfète de la Seine-Maritime en litige n'a pas pour effet de séparer l'appelant et son épouse de leur jeune fils, dès lors que celui-ci, compte tenu de sa minorité, est en toute hypothèse insusceptible de faire l'objet d'une mesure d'éloignement. Dans ces conditions l'arrêté ne méconnaît pas les stipulations de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant. Par suite, le moyen doit être écarté.
11. Il résulte de tout ce qui précède que M. D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction assorties d'une astreinte ainsi que la demande présentée par son conseil au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. D... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... D..., au ministre de l'intérieur et à Me A... C....
Copie en sera transmise pour information au préfet de la Seine-Maritime.
N°19DA00761 2