Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 4 février 2019, M. B..., représenté par la SELARL Chivot-Soufflet puis par Me C..., demande à la cour :
1°) d'infirmer le jugement du tribunal administratif d'Amiens du 27 novembre 2018 ;
2°) d'annuler la décision en date du 2 juillet 2016 par laquelle le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social a rejeté son recours hiérarchique dirigé à l'encontre de la décision du 6 avril 2016 de l'inspecteur du travail de l'unité de contrôle d'Amiens Sud confirmant son inaptitude définitive au poste de conducteur de ligne de conditionnement qu'il occupe auprès de la société Nutrimaine ;
3°) de lui allouer la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code du travail ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Nil Carpentier-Daubresse, premier conseiller,
- et les conclusions de M. Hervé Cassara, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., qui occupait alors un emploi de conducteur de ligne de conditionnement auprès de la société Nutrimaine, a été victime d'un accident du travail le 23 mars 2009, à la suite duquel lui ont été prescrits plusieurs arrêts de travail successifs. A l'issue d'une visite de reprise, le 28 octobre 2015, le médecin du travail l'a déclaré définitivement inapte au poste de travail qu'il occupait. Le 6 avril 2016, l'inspecteur du travail de l'unité de contrôle d'Amiens Sud a confirmé l'inaptitude définitive de M. B.... Ce dernier relève appel du jugement du 27 novembre 2018 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 2 juillet 2016 par laquelle le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social a rejeté son recours hiérarchique dirigé à l'encontre de la décision du 6 avril 2016.
2. En premier lieu, l'article L. 4624-1 du code du travail, dans sa version alors applicable, dispose que : " Le médecin du travail est habilité à proposer des mesures individuelles telles que mutations ou transformations de postes, justifiées par des considérations relatives notamment à l'âge, à la résistance physique ou à l'état de santé physique et mentale des travailleurs. Il peut proposer à l'employeur l'appui de l'équipe pluridisciplinaire du service de santé au travail ou celui d'un organisme compétent en matière de maintien dans l'emploi. / L'employeur est tenu de prendre en considération ces propositions et, en cas de refus, de faire connaître les motifs qui s'opposent à ce qu'il y soit donné suite. / En cas de difficulté ou de désaccord, l'employeur ou le salarié peut exercer un recours devant l'inspecteur du travail. Il en informe l'autre partie. L'inspecteur du travail prend sa décision après avis du médecin inspecteur du travail. ". L'article R. 4624-31 du même code, dans sa version alors applicable, dispose que : " Le médecin du travail ne peut constater l'inaptitude médicale du salarié à son poste de travail que s'il a réalisé : 1° Une étude de ce poste ; 2° Une étude des conditions de travail dans l'entreprise ; 3° Deux examens médicaux de l'intéressé espacés de deux semaines, accompagnés, le cas échéant, des examens complémentaires. / Lorsque le maintien du salarié à son poste de travail entraîne un danger immédiat pour sa santé ou sa sécurité ou celles des tiers ou lorsqu'un examen de préreprise a eu lieu dans un délai de trente jours au plus, l'avis d'inaptitude médicale peut être délivré en un seul examen. ".
3. Il résulte des dispositions précitées des articles L. 4624-1 et R. 4624-31 du code du travail qu'en cas de difficulté ou de désaccord sur les propositions formulées par le médecin du travail concernant l'aptitude d'un salarié à occuper son poste de travail, il appartient à l'inspecteur du travail, saisi par l'une des parties, de se prononcer définitivement sur cette aptitude. Son appréciation, qu'elle soit confirmative ou infirmative de l'avis du médecin du travail, se substitue à cet avis et seule la décision rendue par l'inspecteur du travail est susceptible de faire l'objet d'un recours devant le juge de l'excès de pouvoir. Les moyens critiquant la procédure au terme de laquelle le médecin du travail avait donné son avis sont donc sans incidence sur la légalité de la décision rendue par l'inspecteur du travail.
4. Ainsi, si M. B... soutient qu'un seul examen médical a eu lieu le 28 octobre 2015 et non deux comme le prévoient les dispositions de l'article R. 4624-31 du code du travail précité, une telle irrégularité, à la supposer établie est, comme il vient d'être dit, sans incidence sur la légalité de la décision rendue par l'inspecteur du travail et a fortiori sur celle rendue, sur recours hiérarchique, par le ministre chargé du travail. En tout état de cause, il ressort des pièces du dossier que deux visites de pré-reprise sont intervenues les 25 septembre 2015 et 15 octobre 2015, de sorte que, conformément au dernier alinéa de l'article R. 4624-31 précité, l'avis d'inaptitude médicale pouvait être valablement délivré en un seul examen. Par suite, le moyen tiré du vice de procédure dont serait entachée la décision du 2 juillet 2016 doit être écarté.
5. En second lieu, l'article L. 1226-10 du code du travail, dans sa version alors applicable, dispose que : " Lorsque, à l'issue des périodes de suspension du contrat de travail consécutives à un accident du travail ou à une maladie professionnelle, le salarié est déclaré inapte par le médecin du travail à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités. / Cette proposition prend en compte, après avis des délégués du personnel, les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu'il formule sur l'aptitude du salarié à exercer l'une des tâches existant dans l'entreprise. Dans les entreprises d'au moins cinquante salariés, le médecin du travail formule également des indications sur l'aptitude du salarié à bénéficier d'une formation destinée à lui proposer un poste adapté. / L'emploi proposé est aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de postes ou aménagement du temps de travail. ".
6. Si M. B... soutient que c'est à tort que le poste d'agent de maîtrise sur lequel il allègue avoir été promu n'a pas été pris en compte pour apprécier sa capacité à exercer ses fonctions au sein de la société Nutrimaine, il résulte des termes mêmes de l'article L. 1226-10 du code du travail précité que tant l'aptitude que la recherche de reclassement s'apprécient au regard de l'emploi occupé à la date de l'accident de travail. C'est donc à bon droit que cette appréciation s'est faite au regard de l'emploi de conducteur de ligne de conditionnement qu'il exerçait le 23 mars 2009 auprès de la société Nutrimaine. Par suite, le moyen tiré de l'erreur qu'aurait commise le ministre en ne prenant pas en compte ce poste dans son appréciation doit être écarté.
7. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif d'Amiens a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de la décision du 2 juillet 2016 par laquelle le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social a rejeté son recours hiérarchique dirigé à l'encontre de la décision du 6 avril 2016 par laquelle l'inspecteur du travail de l'unité de contrôle d'Amiens Sud a confirmé son inaptitude définitive.
8. En conséquence, la requête de M. B... doit être rejetée, y compris ses conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 7611 du code de justice administrative. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. B... la somme demandée par la société Nutrimaine sur le fondement de ces mêmes dispositions.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par la société Nutrimaine au titre de l'article L. 7611 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B..., à la société Nutrimaine et à la ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion.
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N°19DA00270
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