Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 24 juin 2019, Mme B..., représentée par Me C... D..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté du 26 septembre 2018 ;
3°) d'enjoindre au préfet du Nord de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de la date de notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard, ou à défaut de réexaminer sa situation et de prendre une nouvelle décision dans un délai d'un mois sous la même condition d'astreinte et de lui délivrer, dans cette attente, un récépissé de demande de titre de séjour l'autorisant à travailler ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre des dispositions combinées de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n°91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Paul-Louis Albertini, président de chambre, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme B..., ressortissante bissau-guinéenne née le 4 mai 1988, serait selon ses déclarations entrée en France le 1er mai 2015, accompagnée de son fils alors âgé de six ans. Elle a déposé une demande d'asile qui a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides du 14 mars 2018, confirmée par une décision de la cour nationale du droit d'asile du 16 août 2018. Par un arrêté du 26 septembre 2018, le préfet du Nord a refusé de lui délivrer une carte de résident en qualité de réfugiée, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourrait être reconduit d'office. Mme B... relève appel du jugement du 12 décembre 2018 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur la décision de refus de titre de séjour :
2. Il ressort du jugement attaqué que le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lille a rejeté comme irrecevables les conclusions dirigées contre la décision de refus de titre de séjour au motif qu'elle présentait un caractère superfétatoire. En appel, Mme B... se borne à critiquer la légalité de cette décision sans contester l'irrecevabilité ainsi opposée à ses conclusions dirigées contre le refus de titre de séjour, mais il n'appartient pas au juge d'appel d'examiner d'office le bien-fondé de l'irrecevabilité opposée en première instance. Par suite, ses conclusions ne peuvent qu'être rejetées.
Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :
3. La décision contestée énonce les considérations de fait et de droit sur lesquelles elle se fonde. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation doit être écarté.
4. Mme B... a sollicité son admission au séjour le 9 novembre 2015 au titre de l'asile. Elle a donc été mise à même de faire valoir, avant l'intervention de l'arrêté qui l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, tous les éléments d'information ou arguments de nature à influer sur le contenu de cette mesure. Elle a d'ailleurs communiqué au préfet du Nord des éléments relatifs à sa situation personnelle. Par suite, la garantie consistant dans le droit à être entendu préalablement à l'intervention d'une mesure d'éloignement, qui est au nombre des principes fondamentaux du droit de l'Union et a été rappelé par l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, n'a pas été méconnue.
5. Mme B... excipe de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision l'obligeant à quitter le territoire.
6. Il ressort des pièces du dossier que la décision de refus de délivrance de titre de séjour contestée a été prise en réponse à la demande d'admission au séjour au titre de l'asile présentée par Mme B.... Sa demande d'admission au bénéfice de l'asile a été définitivement rejetée ainsi qu'il a été énoncé au point 1. Dès lors que le bénéfice de la protection subsidiaire ou la reconnaissance de la qualité de réfugié lui a été refusé, le préfet du Nord était tenu de lui refuser la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-13 ou du 8° de l'article L. 314-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile sans avoir à porter une appréciation sur les faits de l'espèce. Le préfet se trouvant ainsi en situation de compétence liée pour refuser le titre de séjour sollicité, le moyen tiré de ce que les décisions en litige sont insuffisamment motivées ou méconnaissent les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 et de l'article L. 311-121 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, est inopérant.
7. Si Mme B... soutient avoir informé le préfet du Nord de l'état de son fils, de sa scolarité et de ses propres efforts d'intégration, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'elle aurait néanmoins sollicité un autre titre de séjour que celui présenté au titre de l'asile. Il ne ressort pas non plus des pièces du dossier que le préfet du Nord, qui n'est pas tenu de faire état de tous les éléments relatifs à la situation de Mme B..., n'aurait pas procédé à un examen de la situation personnelle de l'intéressée.
8. Ainsi qu'il est rappelé au point 6, la demande de Mme B... tendant à obtenir la qualité de réfugiée ou la protection subsidiaire ayant été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, le préfet était, par suite, tenu de lui refuser la délivrance du titre de séjour demandé sur le fondement des dispositions du 8° de l'article L. 314-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il ressort cependant des termes même de l'arrêté en litige que le préfet a examiné l'ensemble de la situation de l'intéressée au regard des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Mme B... peut, dès lors, utilement se prévaloir, à l'appui du refus qui lui a été opposé, de ces stipulations.
9. Aux termes de l'article L. 743-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger auquel la reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire a été définitivement refusé ou qui ne bénéficie plus du droit de se maintenir sur le territoire français en application de l'article L. 743-2 et qui ne peut être autorisé à demeurer sur le territoire à un autre titre doit quitter le territoire français, sous peine de faire l'objet d'une mesure d'éloignement prévue au titre Ier du livre V et, le cas échéant, des pénalités prévues au chapitre Ier du titre II du livre VI ". Ces dispositions n'ont ni pour objet, ni pour effet de faire obligation au préfet d'examiner d'office si le ressortissant étranger, auquel la reconnaissance de la qualité de réfugié a été définitivement refusée, serait susceptible de bénéficier de la délivrance d'un titre de séjour sur un autre fondement. Si Mme B... a communiqué diverses pièces médicales sur la santé de son fils et sa scolarité, ces seuls éléments ne suffisent pas à établir qu'elle serait en droit de se voir délivrer un titre de séjour à un autre titre que l'asile. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 743-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.
10. Mme B... soutient qu'elle réside en France depuis 2015. Elle fait valoir que son fils, qui est scolarisé, doit bénéficier d'un suivi médical suite à une intervention chirurgicale subie en France en 2016 pour une malformation génitale. Elle se prévaut également de son insertion sociale. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que la présence en France de Mme B... est récente. Elle n'est pas isolée dans son pays d'origine où résident son époux et ses deux autres enfants mineurs. Il ressort des pièces médicales produites que l'état de santé du fils de Mme B... requiert seulement un contrôle médical à ses treize ans. Il ne ressort pas, en outre, des pièces du dossier qu'elle ou son fils encourrait, en Guinée-Bissau, des risques qui l'empêcherait d'y poursuivre une vie privée et familiale. Dans ces conditions, le préfet du Nord n'a pas porté, au droit de la requérante au respect de sa vie privée et familiale, une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels la décision contestée a été prise et n'a, dès lors, pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Au regard de ces mêmes éléments, le préfet du Nord n'a pas commis une erreur manifeste d'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle de Mme B....
11. Aux termes du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant du 26 janvier 1990 : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale. ". Il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant. Elles sont applicables non seulement aux décisions qui ont pour objet de régler la situation personnelle d'enfants mineurs mais aussi à celles qui ont pour effet d'affecter, de manière suffisamment directe et certaine, leur situation.
12. Pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 10, et alors que Mme B... n'apporte aucun élément probant sur les risques qu'encourrait son fils en raison de sa malformation génitale dans son pays d'origine, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations du 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant doit être écarté.
13. Il résulte de ce qui a été dit aux points 6 à 12 que Mme B... n'est pas fondée à exciper de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour à l'appui de ses conclusions d'annulation dirigées contre la décision l'obligeant à quitter le territoire.
Sur la décision fixant le pays de destination :
14. Il résulte de ce qui a été dit aux points 3 à 13 que Mme B... n'est pas fondée à invoquer, par la voie de l'exception, l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français.
15. Mme B..., dont la demande d'asile a au demeurant été rejetée, n'apporte aucun élément quant aux risques qu'elle-même ou son fils pourrait encourir en cas de retour dans leur pays d'origine. Par suite, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'erreur manifeste d'appréciation doivent être écartés.
16. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction, assorties d'astreinte, ainsi que celles présentées au titre des dispositions combinées de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B..., au ministre de l'intérieur et à Me C... D....
Copie en sera adressée pour information au préfet du Nord.
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N°19DA01444
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