Procédure devant la cour :
Par une requête et des mémoires complémentaires, enregistrés les 23 août 2019, 24 juillet 2020 et 20 novembre 2020, le syndicat mixte d'assainissement et de distribution d'eau du Nord, représenté par Me A..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) de condamner la société Suez Eau France à lui verser la somme de 101 575,51 euros en exécution du titre de recette n° 691 ;
3°) de mettre à la charge de la société Suez Eau France la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des collectivités territoriales ;
- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Nil Carpentier-Daubresse, premier conseiller,
- les conclusions de M. Hervé Cassara, rapporteur public,
- et les observations de Me B... pour le syndicat mixte d'assainissement et de distribution d'eau du Nord.
Considérant ce qui suit :
1. Par une convention du 17 décembre 2004 dénommée " convention de délégation des services publics de l'assainissement collectif et de l'assainissement non collectif ", le syndicat intercommunal à vocation multiple des cantons de Bourbourg et Gravelines a délégué l'exploitation du service public de l'assainissement à la société Lyonnaise des Eaux, à compter du 1er janvier 2005, pour une durée de dix ans. Par un avenant n° 4 en date du 24 février 2014, le syndicat intercommunal à vocation multiple des Rives de l'Aa et de la Colme résultant de la fusion du syndicat intercommunal à vocation multiple de l'Aa et de celui des cantons de Bourbourg et Gravelines, décidée par un arrêté préfectoral du 21 mai 2013, a repris le contrat d'exploitation du service public de l'assainissement confié à la société Lyonnaise des Eaux. Par un avenant n° 5, la communauté de communes des Hauts de Flandre qui s'est vu confier, à la suite de l'adoption de deux arrêtés préfectoraux du 5 décembre 2014, la compétence " assainissement " que détenait le syndicat intercommunal à vocation multiple des Rives de l'Aa et de la Colme, a repris en lieu et place de ce dernier le contrat de délégation de l'exploitation du service public, qui a été prolongé jusqu'au 30 juin 2015. Par un arrêté du 30 juin 2015 des préfets du Nord, du Pas-de-Calais, de la Somme et de l'Aisne le périmètre du syndicat mixte d'assainissement et de distribution d'eau du Nord a été étendu, intégrant le territoire de la communauté de communes des Hauts de Flandre à la suite de son adhésion à ce syndicat. Ledit syndicat ayant réalisé des travaux de maintenance et nettoyage sur les ouvrages en cause à l'expiration de la convention de délégation de l'exploitation du service public de l'assainissement, a émis un titre exécutoire n° 691, le 27 octobre 2016, pour valoir paiement par la société Lyonnaise des eaux, devenue la société Suez Eau France, de la somme de 101 575,51 euros hors taxes. Le syndicat mixte d'assainissement et de distribution d'eau du Nord relève appel du jugement du 25 juin 2019 par lequel le tribunal administratif de Lille a annulé ce titre exécutoire.
Sur le bien-fondé du jugement :
2. Aux termes de l'article L. 5211-18 du code général des collectivités territoriales : " [...] le périmètre de l'établissement public de coopération intercommunale peut être ultérieurement étendu, par arrêté du ou des représentants de l'Etat dans le ou les départements concernés, par adjonction de communes nouvelles [...]. Le transfert des compétences entraîne de plein droit l'application à l'ensemble des biens, équipements et services publics nécessaires à leur exercice, ainsi qu'à l'ensemble des droits et obligations qui leur sont attachés à la date du transfert, des dispositions des trois premiers alinéas de l'article L. 1321-1, des deux premiers alinéas de l'article L. 1321-2 et des articles L. 1321-3, L. 1321-4 et L. 1321-5. [...] L'établissement public de coopération intercommunale est substitué de plein droit, à la date du transfert de compétences, aux communes qui le composent dans toutes leurs délibérations et tous leurs actes. / Les contrats sont exécutés dans les conditions antérieures jusqu'à leur échéance, sauf accord contraire des parties. La substitution de personne morale aux contrats conclus par les communes n'entraîne aucun droit à résiliation ou à indemnisation pour le cocontractant. La commune qui transfère la compétence informe les cocontractants de cette substitution. [...] ".
3. Il résulte de ces dispositions que le transfert d'une compétence par une commune à un établissement public de coopération intercommunale implique le transfert des biens, équipements et services nécessaires à l'exercice de ces compétences ainsi que des droits et obligations qui leur sont attachés. Ainsi, les dispositions précitées ne visent que les délibérations et les actes se rapportant aux biens, équipements et services nécessaires à l'exercice des compétences transférées, et n'ont dès lors ni pour objet, ni pour effet d'inclure les créances qui résultent de contrats conclus par la commune et venus à expiration avant le transfert, alors même que ces contrats auraient été conclus dans le cadre de l'exercice de ces compétences ultérieurement transférées.
4. Il résulte de l'instruction que le contrat de délégation de l'exploitation du service public de l'assainissement conclu, en dernier lieu, entre la communauté de communes des Hauts de Flandre et la société Lyonnaise des eaux a expiré le 30 juin 2015. Si le transfert de la compétence d'assainissement de la communauté de communes des Hauts de Flandre au syndicat mixte d'assainissement et de distribution d'eau du Nord, par un arrêté interdépartemental portant modifications statutaires de celui-ci en date du 30 juin 2015, entraîne de plein droit le transfert des biens, équipements et services nécessaires à l'exercice de cette compétence à compter du 1er juillet 2015, tel n'est pas le cas, à défaut de dispositions contraires prévues dans l'acte de transfert ou fixées d'un commun accord entre les parties, des créances qui résultent du contrat précité qui est venu à expiration avant ce transfert. Contrairement à ce que soutient le syndicat requérant, ce principe s'applique également aux créances résultant des stipulations de l'article 76 de la convention de délégation de service public de l'assainissement en cause qui prévoient, à l'expiration du contrat, que les biens doivent être remis en bon état d'entretien, de fonctionnement et nettoyés par le fermier et qu'à défaut, la collectivité peut exécuter aux frais du fermier les opérations de maintenance nécessaires. Ainsi la seule circonstance que le syndicat mixte d'assainissement et de distribution d'eau du Nord ait effectué les travaux de réparation et de nettoyage des ouvrages et équipements dont s'agit n'a pas eu pour effet de le rendre bénéficiaire des créances dont la communauté de communes des Hauts de Flandre pouvait être, le cas échéant, titulaire du fait de manquements contractuels qu'aurait commis son cocontractant. Enfin, il ne résulte pas du procès-verbal annexé à l'arrêté interdépartemental du 30 juin 2015 portant modifications statutaires du syndicat mixte d'assainissement et de distribution d'eau du Nord que la communauté de communes des Hauts de Flandre aurait transféré audit syndicat les créances résultant du contrat précité qui est venu à expiration au 30 juin 2015.
5. Par suite, le syndicat mixte d'assainissement et de distribution d'eau du Nord n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a annulé, pour ce motif, le titre exécutoire n° 691 émis le 27 octobre 2016 à l'encontre de la société Lyonnaise des eaux, devenue la société Suez Eau France, pour un montant de 101 575,51 euros hors taxes. En conséquence, ses conclusions tendant à l'annulation du jugement attaqué doivent être rejetées.
Sur les conclusions tendant à la condamnation de la société Suez Eau France au paiement de la somme de 101 575,51 euros :
6. Il résulte de ce qui précède que le syndicat mixte d'assainissement et de distribution d'eau du Nord, qui ne se prévaut d'aucun autre fondement d'engagement de la responsabilité de la société Suez Eau France que celui qui découlerait du contrat de délégation de l'exploitation du service public de l'assainissement qui a expiré le 30 juin 2015, ne saurait se prévaloir d'une créance de 101 575,51 euros sur la société Lyonnaise des eaux devenue société Suez Eau France. Ses conclusions aux fins de condamnation de celle-ci à lui verser cette somme doivent donc, en tout état de cause, être rejetées.
Sur les conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la société Suez Eau France, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que demande le syndicat mixte d'assainissement et de distribution d'eau du Nord au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. En revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce de mettre à la charge dudit syndicat la somme de 1 500 euros à verser à la société Suez Eau France au titre de ces mêmes dispositions.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête du syndicat mixte d'assainissement et de distribution d'eau du Nord est rejetée.
Article 2 : Le syndicat mixte d'assainissement et de distribution d'eau du Nord versera à la société Suez Eau France la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Me A... pour le syndicat mixte d'assainissement et de distribution d'eau du Nord (SIDEN-SIAN) et à Me C... pour la société Suez Eau France.
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N°19DA01988
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N°"Numéro"