Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 20 septembre 2018, la préfète de la Seine-Maritime demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. A...D...devant ce tribunal.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Jean-François Papin, premier conseiller, a été entendu, au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. A...D..., ressortissant de la République du Congo né le 20 juin 1963, serait entré sur le territoire français, selon ses déclarations, le 22 décembre 2001 dans le but de solliciter la protection des autorités françaises. Sa demande d'asile ayant toutefois été rejetée par une décision définitive et l'intéressé s'étant maintenu en France en dépit d'une obligation de quitter le territoire français prononcée le 14 novembre 2005, il a sollicité son admission au séjour en faisant état de difficultés de santé. Il a été mis en possession d'un titre de séjour temporaire valable du 16 février 2007 au 15 août 2007 afin de pouvoir continuer à se soigner en France. Toutefois, le renouvellement de ce titre lui a été refusé. Le 3 novembre 2008, M. A...D...a de nouveau été autorisé à se maintenir sur le territoire français pour raison médicale jusqu'au 2 novembre 2009. Ayant ensuite de nouveau sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur divers fondements, il a vu ses demandes rejetées. Cependant, le tribunal administratif de Rouen ayant annulé le refus opposé le 2 septembre 2015 à la dernière de ces demandes, formulée pour motif médical le 21 août 2014, la préfète de la Seine-Maritime a procédé à un nouvel examen de cette demande. Au terme de ce nouvel examen, cette autorité a, par un arrêté du 12 décembre 2017, refusé de délivrer à M. A...D...un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, lui a fait interdiction de retour sur ce territoire durant deux années et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office. La préfète de la Seine-Maritime relève appel du jugement du 22 août 2018 par lequel le tribunal administratif de Rouen a prononcé l'annulation de cet arrêté et lui a fait injonction de procéder à un nouvel examen de la demande de M. A...D...après avoir recueilli l'avis de la commission départementale du titre de séjour
Sur les conclusions d'appel présentées par la préfète de la Seine-Maritime :
2. Il résulte des dispositions du deuxième alinéa de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que l'autorité préfectorale est tenue de soumettre à l'avis de la commission départementale du titre de séjour la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par un ressortissant étranger qui justifie résider habituellement en France depuis plus de dix ans. En revanche, ces dispositions n'impliquent aucunement que le préfet consulte la commission du cas des ressortissants étrangers qui, justifiant de la même ancienneté de séjour habituel sur le territoire français, ont sollicité leur admission au séjour sur un autre fondement.
3. Il ressort des pièces du dossier et n'est d'ailleurs pas contesté, que la demande d'admission au séjour sur laquelle la préfète de la Seine-Maritime s'est prononcée par l'arrêté du 12 décembre 2017 en litige tendait exclusivement au renouvellement d'une carte de séjour temporaire pour raison médicale, visée au 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il ne ressort pas des pièces du dossier, ni n'est même allégué, que M. A... D...aurait, par cette demande, également sollicité le bénéfice de l'admission exceptionnelle au séjour prévue par les dispositions de l'article L. 313-14 de ce code. En outre, il ne ressort pas des motifs de l'arrêté en litige que la préfète de la Seine-Maritime aurait décidé d'office de regarder cette demande comme tendant également à ce bénéfice. Ainsi, quand bien même M. A...D...aurait justifié résider habituellement en France depuis plus de dix ans, la préfète de la Seine-Maritime n'était pas tenue de soumettre son cas à la commission départementale du titre de séjour avant de refuser, par l'arrêté en litige, de faire droit à sa demande. Il suit de là que la préfète de la Seine-Maritime est fondée à soutenir que, pour annuler cet arrêté, le tribunal administratif de Rouen a retenu à tort que celui-ci était intervenu à l'issue d'une procédure irrégulière en raison de l'absence de consultation de la commission départementale du titre de séjour.
4. Il appartient toutefois à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens invoqués par M. A...D...devant la juridiction administrative.
Sur la légalité du refus de séjour :
En ce qui concerne la situation médicale de l'intéressé :
5. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : / (...) / 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. (...) ".
6. Il ressort des pièces du dossier que la préfète de la Seine-Maritime s'est prononcée sur la demande de renouvellement de titre de séjour pour raison médicale que lui avait présentée M. A...D...au vu notamment d'un avis émis le 12 août 2017 par le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration et versé au dossier. Selon cet avis, qui, contrairement à ce qui est soutenu, a été produit par la préfète devant le tribunal et communiqué au requérant, si l'état de santé de l'intéressé rend nécessaire une prise en charge médicale et si le défaut d'une telle prise en charge peut entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, il peut bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dont ce dernier dispose. Ainsi, le moyen tiré de ce que la préfète de la Seine-Maritime n'aurait pas justifié de l'existence de l'avis du collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration auquel les motifs de son arrêté se réfèrent ne peut qu'être écarté. Si M. A...D...met en doute la régularité de cet avis, il n'assortit son moyen d'aucune précision de nature à permettre d'en apprécier le bien-fondé, de sorte que celui-ci doit également être écarté.
7. Il ne ressort d'aucune des pièces du dossier que la préfète de la Seine-Maritime se serait crue à tort liée par les termes de cet avis et qu'elle ne se serait pas elle-même livrée, au vu notamment de celui-ci, à un examen particulier de la situation de M. A...D...avant de refuser de lui délivrer un titre de séjour pour raison médicale. D'ailleurs, si les motifs de l'arrêté du 12 décembre 2017 en litige reproduisent les termes de cet avis, ils révèlent, en outre, que la préfète de la Seine-Maritime a examiné les éléments avancés par M. A...D...et qu'elle a estimé qu'aucun de ceux-ci n'était de nature à introduire un doute sur ses possibilités d'accéder à des soins appropriés à son état de santé en cas de retour dans son pays d'origine.
8. Il ressort des pièces du dossier que M. A...D...est pris en charge médicalement en France depuis 2014 pour une gonarthrose bilatérale qu'un rhumatologue exerçant à Rouen qualifiait déjà d'avancée en juin 2014. Ce médecin précisait alors que cette pathologie était traitée par antalgiques et viscosupplémentation. Par un autre certificat médical émis en décembre 2014, ce médecin ajoutait avoir, en outre, pratiqué des infiltrations de corticoïdes et, par un dernier certificat peu lisible, ce même praticien aurait fait état en 2015 d'une sciatique. Un bilan radiologique réalisé en mai 2014 confirmait l'existence, chez M. A...D..., d'une gonarthrose interne bilatérale sans altération osseuse sous chondrale avec pincement modéré des interlignes et osthéophytose marginale débutante. Enfin, le 18 novembre 2016, le docteur F...prescrivait des séances de kinésithérapie de rééducation du rachis lombaire. Il n'est pas contesté qu'un défaut de prise en charge médicale des pathologies dont est ainsi atteint M. A...D...pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité. Toutefois, les seuls certificats médicaux versés ainsi au dossier ne sont pas de nature à remettre en cause l'appréciation à laquelle s'est livrée la préfète de la Seine-Maritime, au vu notamment de l'avis précité, appréciation selon laquelle M. A... D...peut effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé qui y sont disponibles. A cet égard, M. A...D..., qui n'allègue pas ne pouvoir suivre des séances de kinésithérapie au Congo, soutient que le Bethamethasone et le cortivazol qui lui sont prescrits n'y seraient pas disponibles. Il ressort toutefois des documents produits par la préfète de la Seine-Maritime devant les premiers juges que le Bethamethasone figure sur la liste des médicaments référencés au centre hospitalier universitaire de Brazzaville. S'il est vrai que le cortivazol, substance active entrant dans la composition d'un autre médicament prescrit à l'intéressé, ne figure pas sur cette liste, ni sur celle des médicaments essentiels disponibles en République du Congo, l'intéressé n'allègue pas et il ne ressort d'aucun des documents médicaux qu'il verse au dossier, que ce principe actif ne pourrait être remplacé par d'autres de la même classe qui y sont disponibles, en particulier par le prednisolone. Il suit de là que la décision de refus de séjour n'a pas été prise en méconnaissance des dispositions précitées du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
En ce qui concerne l'atteinte portée à sa vie privée et familiale :
9. M. A...D...soutient qu'entré sur le territoire français en décembre 2001, il y résidait habituellement depuis plus de seize ans à la date à laquelle l'arrêté du 12 décembre 2017 en litige a été pris, dont un peu plus de quatre années en situation régulière. Il fait, en outre, état des formations qu'il a suivies en 2007 afin d'acquérir les compétences du métier d'électricien qu'il a exercé jusqu'en 2012. Il ajoute qu'il a bénéficié successivement, en 2016 et en 2018, de deux promesses d'embauche. Il est toutefois constant que la majeure partie du séjour de l'intéressé en France, à en supposer l'ancienneté établie, a été effectuée par lui dans des conditions irrégulières et qu'il s'est notamment maintenu en dépit de l'intervention, dès le 14 novembre 2005, d'une obligation de quitter le territoire français, d'autres mesures d'éloignement ayant au demeurant été prononcées ensuite à son égard. En outre, si M. A... D... a effectivement suivi plusieurs formations dans le but notamment d'acquérir les compétences requises pour exercer le métier d'électricien, son activité professionnelle se limite, à l'exception d'une période de six mois durant laquelle il a été salarié d'une enreprise d'électricité générale, à une succession de missions d'intérim pendant un peu moins de cinq années. Les deux promesses d'embauche dont il se prévaut émanent d'ailleurs d'une société de placement de travailleurs intérimaires, ce qui ne peut être regardé comme une perspective pérenne d'insertion professionnelle. Par ailleurs, si M. A...D...fait état de la présence sur le territoire français de son frère, il ne l'établit pas par les seules attestations produites, tandis qu'il ne conteste pas ne pas être dépourvu d'attaches familiales proches dans son pays d'origine, dans lequel résident, selon ses propres déclarations à l'administration, ses parents et ses deux enfants et où il a lui-même habituellement vécu durant trente-sept ans, en tenant pour établie la date de son entrée en France. Ainsi compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce et eu égard notamment aux conditions du séjour de M. A...D...et en dépit des liens amicaux qu'il aurait noués sur le territoire français, la décision de refus de délivrance d'un titre de séjour ne porte pas, à son droit au respect de sa vie privée et familiale, une atteinte excessive. Dès lors, cette décision ne méconnaît pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
10. M. A... D...ne peut se prévaloir, malgré les formations qu'il a suivies, de perspectives pérennes et stables d'insertion professionnelle, ni d'indices d'une intégration notable à la société française. Pour ce motif ainsi que pour ceux exposés au point précédent, il n'est pas établi que, pour lui refuser la délivrance d'un titre de séjour, la préfète de la Seine-Maritime aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle de l'intéressé.
En ce qui concerne les autres moyens :
11. Ainsi qu'il a été dit au point 3, il est constant que la demande de titre de séjour de M. A... D...sur laquelle la préfète de la Seine-Maritime s'est prononcée par l'arrêté du 12 décembre 2017 en litige était exclusivement fondée sur le 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dont les dispositions concernent les ressortissants étrangers qui sollicitent une admission au séjour pour pouvoir se soigner en France. En outre, il ne ressort pas des motifs de cet arrêté que la préfète de la Seine-Maritime aurait examiné d'office si M. A...D...aurait pu bénéficier d'une admission au séjour sur un autre fondement que celui invoqué. Il suit de là que les moyens tirés de ce que la décision de refus de séjour prononcée par cet arrêté aurait été prise en méconnaissance des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'article L. 313-14 de ce code doivent être écartés comme inopérants.
Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :
12. Pour les motifs énoncés au point 6 et en tout état de cause, le moyen tiré de ce que la décision faisant obligation à M. A... D...de quitter le territoire français serait intervenue à l'issue d'une procédure irrégulière, faute pour la préfète de la Seine-Maritime de justifier de l'existence de l'avis du collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration auquel l'arrêté en litige fait référence, ne peut qu'être écarté. Si M. A...D...soutient que, par cet avis, le collège médical ne se serait pas prononcé sur sa capacité à voyager sans risque, il ressort de l'examen de ce document, versé au dossier, que ce moyen manque en fait.
13. Il résulte de ce qui a été dit aux points 2 à 11 que la décision refusant de délivrer un titre de séjour à M. A... D...n'est entachée d'aucune des illégalités invoquées. Par suite, le moyen tiré de ce que la décision faisant obligation, à l'intéressé, de quitter le territoire français devrait être annulée par voie de conséquence de l'annulation de ce refus ne peut qu'être écarté.
14. Pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 8, il n'est pas établi que M. A... D... aurait été, à la date de l'arrêté en litige, au nombre des ressortissants étrangers visés au 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui ne peuvent légalement faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français. Par suite, en prenant une telle mesure à son égard, la préfète de la Seine-Maritime n'a pas méconnu cette disposition.
15. Pour les mêmes motifs que ceux énoncés aux points 9 et 10, les moyens tirés de ce que la décision faisant obligation à M. A... D...de quitter le territoire français aurait été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et qu'elle serait entachée d'erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressé doivent être écartés.
Sur la légalité de l'interdiction de retour sur le territoire français :
16. En vertu du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, assortir l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français dont elle détermine la durée, en tenant compte de la durée de la présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français.
17. Il ressort des termes mêmes de ces dispositions que l'autorité compétente doit, pour décider de prononcer à l'encontre de l'étranger soumis à l'obligation de quitter le territoire français une interdiction de retour et en fixer la durée, tenir compte, dans le respect des principes constitutionnels, des principes généraux du droit et des règles résultant des engagements internationaux de la France, des quatre critères que ces dispositions énumèrent, sans pouvoir se limiter à ne prendre en compte que l'un ou plusieurs d'entre eux. La décision d'interdiction de retour doit comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement, de sorte que son destinataire puisse, à sa seule lecture, en connaître les motifs.
18. En l'espèce, il ressort des motifs de l'arrêté en litige que, pour faire interdiction à M. A... D...de retour sur le territoire français, la préfète de la Seine-Maritime a tenu compte des conditions d'entrée et de séjour en France de l'intéressé, qui avait déclaré y être arrivé le 22 décembre 2001 sans en apporter la preuve. Il ressort des mêmes motifs que cette autorité a également tenu compte du fait que l'intéressé avait fait l'objet de plusieurs mesures d'éloignement, confirmées par les juridictions compétentes, décisions malgré lesquelles il s'est maintenu irrégulièrement sur le territoire français. La préfète a retenu, en outre, que l'intéressé vivait précairement sur le territoire français et qu'il ne contestait pas disposer dans son pays d'origine de l'essentiel de ses attaches familiales proches, malgré la présence d'un frère en France. Enfin, cette autorité a estimé que, même si la présence de M. A... D...ne représentait pas une menace pour l'ordre public, il convenait de lui faire interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans. Par suite, la préfète de la Seine-Maritime, qui a examiné l'ensemble des critères prévus par les dispositions précitées du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, a suffisamment motivé sa décision en fait et en droit.
19. Il résulte de ce qui a été dit aux points 12 à 15 que la décision faisant obligation à M. A... D...de quitter le territoire français n'est entachée d'aucune des illégalités invoquées. Par suite, le moyen tiré de ce que la décision faisant interdiction à l'intéressé de retour sur ce territoire durant deux ans devrait être annulée par voie de conséquence de l'annulation de l'obligation de quitter le territoire français sur le fondement de laquelle elle est prise ne peut qu'être écarté.
20. Ainsi qu'il a été dit au point 9, M. A... D..., dont l'ancienneté du séjour résulte principalement de ce qu'il s'est soustrait à plusieurs mesures d'éloignement prononcées à son égard, ne justifie pas de liens stables et anciens sur le territoire français, tandis qu'il a conservé l'essentiel de ses attaches familiales proches dans son pays d'origine. Il ne peut davantage se prévaloir de perspectives stables et pérennes d'insertion professionnelle en France, où ses conditions de vie et de ressources sont précaires. Enfin, si sa présence ne représente pas une menace pour l'ordre public, les conditions de son séjour ne caractérisent pas une volonté notable d'intégration à la société française. Dans ces conditions, en retenant qu'il y avait lieu, malgré la régularité d'une partie de son séjour, de lui interdire tout retour sur le territoire français durant deux ans, la préfète de la Seine-Maritime n'a pas commis d'erreur d'appréciation, alors au demeurant que les dispositions du dernier alinéa du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile donnent à l'intéressé la faculté de solliciter l'abrogation de cette mesure de police administrative dès son retour dans son pays d'origine.
Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :
21. Aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants " et aux termes du dernier alinéa de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ".
22. La Cour européenne des droits de l'homme a rappelé qu'il appartenait, en principe, au ressortissant étranger de produire les éléments susceptibles de démontrer qu'il serait exposé à un risque de traitement contraire aux stipulations précitées, à charge ensuite pour les autorités administratives " de dissiper les doutes éventuels " au sujet de ces éléments (28 février 2008, Saadi c. Italie, n° 37201/06, paragraphes 129-131 et 15 janvier 2015, AA. c. France, n° 18039/11).
23. M. A... D..., qui se borne à alléguer, sans apporter aucune précision circonstanciée ni produire aucune pièce nouvelle au soutien de cette assertion, qu'il ne saurait, sans mettre sa vie ou sa sécurité en danger, retourner dans son pays d'origine, n'établit pas ainsi de manière probante qu'il pourrait être actuellement et personnellement exposé à des traitements inhumains ou dégradants en cas de retour en République du Congo. Au demeurant, comme il a été dit au point 1, la demande d'asile que M. A... D...a formée en 2004 a été rejetée par une décision définitive et il en est de même de la demande de nouvel examen qu'il a présentée en 2005. Par suite, le moyen tiré de ce que, pour désigner la République du Congo comme le pays à destination duquel l'intéressé pourrait être reconduit d'office, la préfète de la Seine-Maritime aurait méconnu les dispositions précitées du dernier alinéa de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.
24. Il résulte de tout ce qui précède que la préfète de la Seine-Maritime est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement du 22 août 2018, le tribunal administratif de Rouen a annulé son arrêté du 12 décembre 2017 et lui a fait injonction de procéder à un nouvel examen de la situation de M. A...D...après avoir recueilli l'avis de la commission départementale du titre de séjour. En outre, la demande présentée par l'intéressé devant ce tribunal doit être rejetée. Par voie de conséquence, les conclusions à fin d'injonction assortie d'astreinte et celles présentées au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, qu'il formule en appel, doivent être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement du 22 août 2018 du tribunal administratif de Rouen annulant l'arrêté pris le 12 décembre 2017 par la préfète de la Seine-Maritime à l'égard de M. A... D... est annulé.
Article 2 : La demande présentée par M. A...D...devant ce tribunal et les conclusions qu'il présente en cause d'appel sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur, à M. E... D... et à Me C...B....
Copie en sera transmise à la préfète de la Seine-Maritime.
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N°18DA01932