Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 28 juillet 2017, M. et MmeA..., représentés par Me Naïm, avocat, demandent à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 23 mai 2017 ;
2°) à titre principal, de prononcer, après avoir obtenu de l'administration la production des notes et instructions visées par la note interne du 11 mars 2013, la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 2010 et des pénalités correspondantes ; à titre subsidiaire, de leur accorder le report du bénéfice de la réduction d'impôt sollicitée au titre de l'année de la demande de raccordement ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 800 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- la loi n° 2010-1657 du 20 décembre 2010 de finances pour 2011 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Jean-François Papin, premier conseiller,
- et les conclusions de M. Jean-Michel Riou, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. M. et Mme A...ont bénéficié, au titre de l'année 2010, d'une réduction d'impôt sur le revenu, en application des dispositions de l'article 199 undecies B du code général des impôts, à raison d'investissements productifs réalisés outre-mer, en qualité d'associés de sociétés en participation (SEP), consistant en l'acquisition et l'installation de centrales photovoltaïques en vue de leur exploitation par des sociétés situées outre-mer. A la suite d'un contrôle sur pièces, l'administration a remis en cause cette réduction d'impôt et leur a notifié selon la procédure contradictoire de redressement, une cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu au titre de cette année 2010. M. et Mme A...relèvent appel du jugement du 23 mai 2017 du tribunal administratif de Rouen rejetant leur demande tendant, à titre principal, à la décharge de cette imposition, à titre subsidiaire, au bénéfice de la réduction d'impôt au titre de l'année de raccordement de l'installation au réseau de distribution d'électricité.
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
2. L'article L. 76 B du livre des procédures fiscales dispose que : " L'administration est tenue d'informer le contribuable de la teneur et de l'origine des renseignements et documents obtenus de tiers sur lesquels elle s'est fondée pour établir l'imposition faisant l'objet de la proposition prévue au premier alinéa de l'article L. 57 ou de la notification prévue à l'article L. 76. Elle communique, avant la mise en recouvrement, une copie des documents susmentionnés au contribuable qui en fait la demande ". Il incombe à l'administration, quelle que soit la procédure d'imposition mise en oeuvre, et au plus tard avant la mise en recouvrement, d'informer le contribuable dont elle envisage soit de rehausser, soit d'arrêter d'office les bases d'imposition, de l'origine et de la teneur des renseignements obtenus auprès de tiers qu'elle a utilisés pour fonder les impositions, avec une précision suffisante pour permettre à l'intéressé de demander que les documents qui contiennent ces renseignements soient mis à sa disposition avant la mise en recouvrement des impositions qui en procèdent. Cette obligation ne s'impose à l'administration que pour les renseignements effectivement utilisés pour fonder les rectifications.
3. D'une part, il résulte de l'instruction que l'administration fiscale, qui n'était pas tenue d'indiquer les modalités selon lesquelles elle a exercé son droit de communication, en particulier la date des demandes de communication, s'est fondée, pour établir l'imposition en litige, sur des informations relatives à la date de dépôt des demandes de raccordement, obtenues à la suite de l'exercice de son droit de communication auprès de la société EDF. L'ensemble de ces informations figurait dans la proposition de rectification. Dans ces conditions, M. et Mme A...disposaient, dès réception de la proposition de rectification, des informations suffisantes pour présenter utilement des observations afin de contester les impositions supplémentaires en litige et pouvaient également solliciter la communication de ces documents. A ce titre, il résulte de l'instruction que l'administration fiscale a joint en annexe à la proposition de rectification l'ensemble des documents obtenus dans le cadre de son droit de communication auprès d'EDF. Il ne résulte pas de l'instruction que, pour fonder les motifs et le montant des rectifications contestées, l'administration aurait eu recours à d'autres éléments ni qu'elle aurait utilisé d'autres documents obtenus de tiers. Ainsi, l'administration n'était pas tenue de communiquer aux contribuables les documents visés dans l'instruction de l'administration centrale aux services du 11 mars 2013, les propositions de rectification adressées aux sociétés dont M. et Mme A... étaient les associés, les informations obtenues dans le cadre des vérifications de comptabilité des sociétés intervenant dans la réalisation des investissements et l'intégralité des informations obtenues par les différents droits de communication exercés auprès d'EDF concernant d'autres contribuables. Par suite, et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les mesures d'instruction sollicitées, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales manque en fait et doit être écarté.
4. D'autre part, il résulte également de l'instruction que le supplément d'impôt mis à la charge de M. et Mme A... au titre de l'année 2009 résulte exclusivement de la remise en cause de la réduction d'impôt sur le revenu prévue à l'article 199 undecies B du code général des impôts dont ils se prévalaient à titre personnel à raison d'investissements productifs réalisés outre-mer. Ce supplément d'impôt ne procède pas du rehaussement du résultat des sociétés, imposable entre les mains de leurs associés au prorata de leurs parts en application de l'article 8 du code général des impôts relatif au régime d'imposition des sociétés de personnes. Dès lors, les requérants ne sauraient utilement reprocher à l'administration de ne pas avoir mentionné dans la proposition de rectification l'existence des propositions de rectification adressées aux sociétés dans lesquelles ils ont investi. Par ailleurs, M. et Mme A... ont bénéficié d'une procédure de rectification contradictoire au cours de laquelle ils ont été mis en mesure de contester les rectifications proposées par l'administration en apportant tous les éléments justificatifs qui leur paraissaient utiles et n'ont ainsi été privés d'aucune garantie. Dans ces conditions, les moyens tirés du manquement au principe de loyauté des débats, au respect du contradictoire et au principe d'impartialité doivent être écartés.
Sur le bien-fondé de l'imposition :
En ce qui concerne l'application de la loi fiscale :
5. Aux termes du premier alinéa de l'article 199 undecies B du code général des impôts, dans sa rédaction applicable au litige : " I. Les contribuables domiciliés en France au sens de l'article 4 B peuvent bénéficier d'une réduction d'impôt sur le revenu à raison des investissements productifs neufs qu'ils réalisent dans les départements d'outre-mer (...) dans le cadre d'une entreprise exerçant une activité agricole ou une activité industrielle, commerciale ou artisanale relevant de l'article 34. (...) ". Aux termes du vingtième alinéa du même article : " La réduction d'impôt prévue au premier alinéa est pratiquée au titre de l'année au cours de laquelle l'investissement est réalisé (...) ". Enfin, aux termes de l'article 95 Q de l'annexe II au même code : " La réduction d'impôt prévue au I de l'article 199 undecies B du code général des impôts est pratiquée, sous réserve des dispositions de la deuxième phrase du vingtième alinéa du I du même article au titre de l'année au cours de laquelle l'immobilisation est créée par l'entreprise ou lui est livrée ou est mise à sa disposition dans le cadre d'un contrat de crédit-bail (...) ".
6. Il résulte de la combinaison de ces dispositions que le fait générateur de la réduction d'impôt prévue à l'article 199 undecies B est la date de la création de l'immobilisation au titre de laquelle l'investissement productif a été réalisé ou de sa livraison effective dans le département d'outre-mer. Dans ce dernier cas, la date à retenir est celle à laquelle l'entreprise, disposant matériellement de l'investissement productif, peut commencer son exploitation effective et, dès lors, en retirer des revenus. Par suite, s'agissant de l'acquisition de centrales photovoltaïques installées sur les toits des habitations des particuliers et données en location à des sociétés en vue de leur exploitation pour la production et la vente d'énergie électrique, la date à retenir est celle du raccordement des installations au réseau public d'électricité, dès lors que les centrales photovoltaïques, dont la production d'électricité a vocation à être vendue par les sociétés exploitantes, ne peuvent être effectivement exploitées et, par suite, productives de revenus qu'à compter de cette date. Le raccordement est nécessaire pour une exploitation effective de ces installations, dès lors qu'il n'est pas contesté que l'électricité produite n'avait pas vocation à être consommée et stockée par les sociétés exploitantes. Il appartient au juge de l'impôt de constater, au terme de l'instruction dont le litige qui lui est soumis a fait l'objet, si un contribuable remplit ou non les conditions lui permettant de se prévaloir de l'avantage fiscal institué par l'article 199 undecies B du code général des impôts.
7. Il résulte de l'instruction, notamment des renseignements obtenus par l'administration auprès de la société EDF qu'aucune des centrales photovoltaïques au titre desquelles a été opérée la réduction d'impôt litigieuse n'avait fait l'objet, au cours de l'année 2009, d'un raccordement au réseau électrique, condition pourtant nécessaire à l'exploitation des installations. A cet égard, si M. et Mme A...soutiennent que les installations photovoltaïques sont susceptibles de fonctionner de manière autonome sans être raccordées au réseau public d'électricité, ils n'établissent pas avoir vendu, ni même stocké, de l'électricité produite par les centrales photovoltaïques données en location aux SEP dont ils sont associés. Par suite, et dès lors qu'au 31 décembre de l'année en cause, les investissements litigieux n'étaient pas en capacité d'être productifs, c'est par une exacte application des dispositions précitées de l'article 199 undecies B du code général des impôts, et sans ajouter à la loi, que l'administration a estimé que les investissements déclarés par les requérants, qui ne sauraient se prévaloir de la seule livraison du matériel, n'avaient pas été effectivement réalisés au cours de l'année 2010 et a remis en cause la réduction d'impôt correspondante. Le motif retenu ci-dessus étant, à lui seul, de nature à fonder le rehaussement contesté, l'administration était fondée, sans ajouter à la loi, à remettre en cause la réduction d'impôt appliquée par M. et Mme A... sur leur impôt sur le revenu de l'année 2009.
En ce qui concerne l'application de la doctrine :
8. M. et Mme A...se prévalent, sur le fondement des dispositions de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, du paragraphe n° 148 de l'instruction référencée 5 B-2-07 du 30 janvier 2007 aux termes duquel : " Conformément aux dispositions du vingtième alinéa du I de l'article 199 undecies B, la réduction d'impôt est pratiquée au titre de l'année au cours de laquelle l'investissement est réalisé. Le premier alinéa de l'article 95 Q de l'annexe II prévoit que l'année de réalisation de l'investissement s'entend de l'année au cours de laquelle l'immobilisation est créée, c'est-à-dire achevée, par l'entreprise ou lui est livrée au sens de l'article 1604 du code civil, ou est mise à disposition dans le cadre d'un contrat de crédit-bail. ". Ces dispositions sont susceptibles d'être invoquées par les contribuables pour faire échec à un redressement opéré par l'administration fiscale lorsque les conditions posées par l'instruction sont remplies, notamment celle qui est énoncée au paragraphe 22, qui définit les investissements ouvrant droit à réduction d'impôt dans les termes suivants : " Conformément aux dispositions du premier alinéa du I de l'article 199 undecies B et de l'article 95 K de l'annexe II, les investissements productifs dont l'acquisition, la création ou la prise en crédit-bail est susceptible d'ouvrir droit à réduction d'impôt doivent avoir la nature d'immobilisations neuves, corporelles et amortissables. La notion même d'investissement productif implique l'acquisition ou la création de moyens d'exploitation, permanents ou durables capables de fonctionner de manière autonome. ". Ainsi, il ne ressort pas des énonciations de l'instruction du 30 janvier 2007 que l'administration a entendu donner, en ce qui concerne le fait générateur de la réduction d'impôt, une interprétation du texte fiscal différente de celle énoncée au point 6, qui lui serait opposable sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales.
9. M. et Mme A...ne peuvent utilement se prévaloir d'une interprétation de la loi n° 2010-1657 du 29 décembre 2010, ni des commentaires apportés sur cette nouvelle loi dans une instruction référencée 7 S-5-11 du 9 décembre 2011, ni du rescrit 2012/36 publié le 29 mai 2012, ces extraits de doctrine administrative étant postérieurs à l'année d'imposition en litige. Ils ne sauraient davantage se prévaloir, eu égard à sa date, d'une réponse ministérielle du 24 juin 2014. Au demeurant, le bénéfice des dispositions transitoires prévues par l'article 36 de cette loi du 29 décembre 2010 est, en tout état de cause, subordonné, en vertu du 1 du VI de cet article, au respect des conditions énoncées au point 6 du présent arrêt, qui ne sont pas satisfaites en l'espèce, ainsi qu'il a été dit au point 7.
10. M. et Mme A...ne sont pas plus fondés à se prévaloir du bulletin officiel des impôts BOI-IS-GEO-10-30-20-20-2012 du 12 septembre 2012, reprenant la doctrine antérieure, qui concerne les réductions d'impôt pour les opérations de mécénat et les dons en faveur d'oeuvres d'intérêt général ou d'organismes agréés.
Sur la demande subsidiaire tendant au bénéfice de la réduction d'impôt au titre de l'année de la demande de raccordement :
11. Aux termes de l'article 199 undecies B du code général des impôts, complété par les articles 95 K et 95 Q de l'annexe II au même code, institue une réduction d'impôt sur le revenu au bénéfice de laquelle peuvent prétendre les contribuables qui ont réalisé, directement ou par l'intermédiaire d'une société, des investissements productifs neufs, à compter de l'année au cours de laquelle les immobilisations correspondant à ces investissements ont été livrées dans un département d'outre-mer et ont pu être effectivement exploitées et productives de revenus. Toutefois, il résulte des dispositions de l'article 36 de la loi du 29 décembre 2010 que : " I. La réduction d'impôt prévue au premier alinéa ne s'applique pas aux investissements portant sur des installations de production d'électricité utilisant l'énergie radiative du soleil. (...) / VI. 1. Les I et III s'appliquent à compter du 29 septembre 2010. Toutefois, la réduction ou la déduction d'impôt restent applicables, dans les conditions prévues par les dispositions antérieures à la présente loi : / a) Lorsque le bénéfice de la réduction ou de la déduction d'impôt n'est pas subordonné à l'agrément préalable du ministre chargé du budget prévu aux II de l'article 199 undecies B et II quater de l'article 217 undecies du code général des impôts, d'une part, aux investissements pour l'acquisition desquels le bénéficiaire de la réduction ou de la déduction a accepté un devis et versé un acompte avant le 29 septembre 2010 et, d'autre part, à ceux réalisés par les sociétés et groupements mentionnés aux dix-neuvième et vingt-septième alinéas du I de l'article 199 undecies B et à l'avant-dernière phrase du premier alinéa du I et au II de l'article 217 undecies, lorsque la réduction d'impôt ou la déduction à laquelle ils auraient ouvert droit en application de ces mêmes articles a été obtenue à raison d'acquisitions ou de souscriptions de parts faites avant le 29 septembre 2010 ; (...). ". L'article 98 de la même loi dispose, quant à lui, que sont également exclus du bénéfice de la réduction d'impôt tous les investissements qui ont été réalisés par des sociétés en participation postérieurement au 1er janvier 2011.
12. Il résulte de ces dispositions, et sans qu'il ait été nécessaire que le ministre en précise la portée par un arrêté, que les investissements réalisés par l'intermédiaire d'une société en participation dans le domaine photovoltaïque n'ouvrent droit à la réduction prévue par l'article 199 undecies B du code général des impôts qu'à la double condition que le contribuable ait souscrit des parts dans la société en participation avant le 29 septembre 2010 et que les immobilisations correspondant à l'investissement en cause aient été livrées dans un département d'outre-mer et mises en état d'être effectivement exploitées et productrices de revenu avant le 1er janvier 2011. Il ne résulte pas de l'instruction que les centrales exploitées par les sociétés, dont M. et Mme A...sont associés, auraient été réalisées, au sens et pour l'application des dispositions de l'article 199 undecies B du code général des impôts, avant le dépôt du dossier complet de demande de raccordement au réseau électrique des centrales photovoltaïques acquises par cette société et de l'attestation de conformité aux prescriptions de sécurité visée par le Consuel, et donc antérieurement au 1er janvier 2011. Dès lors, M. et Mme A...ne sont pas fondés à solliciter, sur le terrain de la loi fiscale, le bénéfice de la réduction d'impôt au titre de l'année 2011 à raison des investissements réalisés par les sociétés en participation dont ils sont associés.
13. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme A...ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté leur demande. Par voie de conséquence, leurs conclusions présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. et Mme A...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme B...C...A...et au ministre de l'action et des comptes publics.
Copie en sera transmise à l'administrateur général des finances publiques chargé de la direction spécialisée de contrôle fiscal Nord.
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N°17DA01526