Par une requête et un mémoire, enregistrés les 9 mai et 6 décembre 2019, l'Union locale des syndicats Confédération Générale du Travail de Lille et environs, représentée par la SCP Manuel Gros, Héloïse Hicter et Associés, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) à titre principal, d'annuler la décision du 12 décembre 2016 par laquelle le maire de Lille a rejeté sa demande tendant au versement de la subvention de fonctionnement votée au titre de l'année 2016 pour un montant de 132 247 euros ;
3°) d'enjoindre au maire de Lille de prendre une décision tendant au versement de cette subvention ;
4°) à titre subsidiaire, de condamner la commune de Lille à lui verser la somme de 132 247 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 17 novembre 2016 et de la capitalisation des intérêts ;
5°) de mettre à la charge de la commune de Lille une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Anne Khater, première conseillère,
- les conclusions de M. Jean-Philippe Arruebo-Mannier, rapporteur public,
- et les observations de Me d'Halluin représentant l'Union locale des syndicats Confédération Générale du Travail de Lille et environs et de Me Delescluse représentant la commune de Lille.
Considérant ce qui suit :
1. Par une délibération n°16/370 du conseil municipal en date du 17 juin 2016, la commune de Lille a alloué à l'Union locale des syndicats Confédération Générale du Travail de Lille et environs, à l'instar de six autres organisations syndicales locales qui occupent depuis novembre 2012 des locaux dans un ensemble immobilier dénommé " nouvelle bourse du travail " à Fives Cail Babcock mis à disposition par la commune, une subvention de fonctionnement, au titre de l'année 2016, dont le montant a été fixé à 132 247 euros. Par cette délibération, la commune de Lille a conditionné l'octroi de cette subvention notamment à la conclusion d'une convention d'objectifs et à l'occupation régulière des locaux mis à disposition à la nouvelle bourse du travail, dans le respect des obligations fixées au contrat de bail. Faute d'avoir signé le contrat de bail proposé par la commune de Lille afférent à cet ensemble immobilier, et d'avoir acquitté le loyer annuel stipulé, l'Union locale des syndicats Confédération Générale du Travail de Lille et environs n'a pas bénéficié du versement de cette subvention. Par une décision du 12 décembre 2016, le maire de Lille a rejeté la demande de l'Union locale des syndicats Confédération Générale du Travail de Lille et environs de Lille tendant au versement de cette subvention. Par un jugement du 17 mars 2019, le tribunal administratif de Lille a rejeté la demande de cette organisation syndicale tendant, à titre principal, à l'annulation de la décision du 12 décembre 2016 et, à titre subsidiaire, à la condamnation de la commune de Lille à lui verser la somme de 132 247 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 17 novembre 2016 avec capitalisation. L'Union locale des syndicats Confédération Générale du Travail de Lille et environs relève appel de ce jugement.
Sur les conclusions en excès de pouvoir :
2. Aux termes de l'article L. 2251-3-1 du code général des collectivités territoriales : " Les communes (...) peuvent attribuer des subventions de fonctionnement aux structures locales des organisations syndicales représentatives dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat. (...) ". Aux termes de l'article R. 2251-2 de ce code : " Les communes ou leurs groupements peuvent attribuer des subventions de fonctionnement aux structures locales des organisations syndicales représentatives qui sont dotées de la personnalité morale et qui remplissent des missions d'intérêt général sur le plan communal ou intercommunal. (...) / Les subventions sont attribuées par les assemblées délibérantes de ces collectivités ou leurs groupements. Les conventions conclues, le cas échéant, avec les structures locales des organisations syndicales représentatives, en application de l'article 10 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 modifiée relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations et du décret n° 2001-495 du 6 juin 2001 pris pour son application, sont jointes aux délibérations attribuant ces subventions lors de la transmission prévue aux articles L. 2131-1 et L. 2131-2 ".
3. Une décision qui a pour objet l'attribution d'une subvention constitue un acte unilatéral qui crée des droits au profit de son bénéficiaire. Toutefois, de tels droits ne sont ainsi créés que dans la mesure où le bénéficiaire de la subvention respecte les conditions mises à son octroi, que ces conditions découlent des normes qui la régissent, qu'elles aient été fixées par la personne publique dans sa décision d'octroi, qu'elles aient fait l'objet d'une convention signée avec le bénéficiaire, ou encore qu'elles découlent implicitement mais nécessairement de l'objet même de la subvention.
4. En premier lieu, il ne résulte d'aucun principe ni d'aucune disposition légale ou règlementaire que la commune de Lille, en subordonnant l'octroi de la subvention en litige au respect des conditions énoncées au point 1 du présent arrêt et notamment au respect par l'organisation syndicale des conditions d'occupation des locaux de la nouvelle bourse du travail prévues au contrat de bail, aurait méconnu les dispositions précitées de l'article L. 2251-3-1 du code général des collectivités territoriales alors qu'au surplus, l'Union locale des syndicats Confédération Générale du Travail de Lille et environs n'a pas excipé, dans le cadre de cette instance, de l'illégalité de la délibération n°16/370 du conseil municipal en date du 17 juin 2016. Le moyen tiré de l'erreur de droit doit donc être écarté.
5. En deuxième lieu, dès lors que la délibération n°16/370 du 17 juin 2016 dispose que toutes les organisations syndicales bénéficiaires d'une subvention de fonctionnement au titre de l'année 2016 sont soumises aux mêmes conditions de versement, l'Union locale des syndicats Confédération Générale du Travail de Lille et environs, qui est d'ailleurs la seule organisation syndicale à ne pas occuper régulièrement les locaux mis à disposition par la commune de Lille, n'est pas fondée à invoquer la méconnaissance du principe d'égalité.
6. En troisième lieu, dès lors que la subvention accordée au titre de l'année 2016 a été majorée du montant du loyer annuel prévu par le bail portant sur la nouvelle bourse du travail, l'Union locale des syndicats Confédération Générale du Travail de Lille et environs n'a subi, du fait de la condition posée au versement de la subvention en litige, aucune diminution de ses moyens de fonctionnement. En conséquence, elle n'est, en tout état de cause, pas fondée à soutenir que la décision attaquée a été prise en méconnaissance de la liberté syndicale telle que reconnue par l'alinéa 6 du Préambule de la constitution de 1946, la convention de l'organisation internationale du travail n°87 du 9 juillet 1948, l'article 5 de la charte sociale européenne du 18 octobre 1961 et l'article 11 de la charte communautaire des droits sociaux fondamentaux des travailleurs du 9 décembre 1989. Ce moyen doit donc être écarté.
7. En quatrième et dernier lieu, si l'Union locale des syndicats Confédération Générale du Travail de Lille et environs soutient que la décision attaquée a été prise dans le but de la contraindre à conclure un nouveau contrat de bail, elle n'est pas fondée à soutenir que les conditions d'occupation de l'ancienne bourse du travail, notamment l'absence de stipulation d'un loyer, devaient s'appliquer à un ensemble immobilier différent. L'organisation syndicale n'est pas davantage fondée à soutenir qu'il aurait été procédé à son relogement par mise en œuvre de la clause de force majeure alors que ce relogement s'inscrit dans un déménagement global des organisations syndicales auparavant hébergées à Lille dans les locaux de l'ancienne bourse du travail. En tout état de cause, il ne ressort d'aucune pièce du dossier que la condition relative à une occupation régulière des locaux mis à disposition par la commune de Lille dans la nouvelle bourse du travail serait étrangère à l'intérêt général alors qu'au demeurant, la subvention accordée au titre de l'année 2016 a été majorée, en comparaison à celle précédemment accordée au titre de l'année 2015, du montant du loyer annuel prévu par le bail en question. Le moyen tiré du détournement de pouvoir doit donc également être écarté.
8. Il résulte de ce qui a été dit aux points 2 à 7 que l'Union locale des syndicats Confédération Générale du Travail de Lille et environs n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 12 décembre 2016 par laquelle le maire de Lille lui a refusé de faire procéder au versement de la subvention de fonctionnement votée au titre de l'année 2016 ainsi que, par voie de conséquence, les conclusions aux fins d'injonction dont cette demande était assortie.
En ce qui concerne les conclusions indemnitaires :
9. Il résulte de ce qui a été dit aux points 2 à 8 que la commune de Lille, en refusant de verser à l'Union locale des syndicats Confédération Générale du Travail de Lille et environs la subvention de fonctionnement au titre de l'année 2016, n'a commis aucune illégalité fautive susceptible d'engager sa responsabilité.
10. L'Union locale des syndicats Confédération Générale du Travail de Lille et environs n'est pas davantage fondée à invoquer la responsabilité sans faute de la commune de Lille au titre de la rupture d'égalité devant les charges publiques, alors qu'ainsi qu'il a été énoncé au point 5 du présent arrêt, toutes les organisations syndicales auxquelles la commune de Lille a décidé d'octroyer une subvention de fonctionnement au titre de l'année 2016 ont été soumises aux mêmes conditions subordonnant le versement de cette subvention.
11. Il résulte de ce qui a été dit aux points 9 à 10, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la fin de non-recevoir opposée par la commune de Lille tirée du défaut de liaison du contentieux, que les conclusions indemnitaires présentées par l'Union locale des syndicats Confédération Générale du Travail de Lille et environs doivent être rejetées.
12. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la fin de non-recevoir opposée par la commune de Lille, que la requête de l'Union locale des syndicats Confédération Générale du Travail de Lille et environs doit être rejetée, ensemble les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
13. Enfin, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Union locale des syndicats Confédération Générale du Travail de Lille et environs le versement à la commune de Lille d'une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de l'Union locale des syndicats Confédération Générale du Travail de Lille et environs est rejetée.
Article 2 : L'Union locale des syndicats Confédération Générale du Travail de Lille et environs versera à la commune de Lille une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à l'Union locale des syndicats Confédération Générale du Travail de Lille et environs et à la commune de Lille.
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N°19DA01073