Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 3 mai 2021, M. A... C..., représenté par AARPI avocats, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 2 avril 2021, ainsi que l'arrêté du 6 novembre 2020 du préfet du Puy-de-Dôme ;
2°) d'enjoindre au préfet du Puy-de-Dôme à titre principal de lui délivrer un titre de séjour mention " vie privée et familiale " et à titre subsidiaire, de réexaminer sa demande, dans le délai de sept jours à compter de l'arrêt à intervenir ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros en application des dispositions combinées des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la décision lui refusant un titre de séjour est entachée d'un vice de procédure, faute pour le préfet de justifier que l'avis du collège des médecins de l'OFII a été rendu à la suite d'une délibération collégiale et que le médecin rédacteur du rapport n'a pas siégé au sein du collège précité ;
- le refus de titre de séjour est entaché d'erreur d'appréciation ; il ne peut valablement poursuivre sa prise en charge au Nigéria, notamment la curatelle renforcée dont il fait l'objet en France ; c'est à tort que les premiers juges ont estimé qu'il ne nécessitait pas de traitement médical ; pour les mêmes motifs, cette décision est entachée d'erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur sa situation personnelle ;
- il fait partie des étrangers protégés contre le prononcé d'une mesure d'éloignement en application de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la décision lui refusant un délai de départ volontaire est entachée d'erreur d'appréciation ; il ne représente pas une menace pour l'ordre public et dispose de garanties de représentation malgré la perte de son passeport ;
- il est fondé à exciper de l'illégalité des décisions lui faisant obligation de quitter le territoire sans délai à l'encontre de la décision portant interdiction de retour ;
- la décision portant interdiction de retour pour une durée de deux ans est entachée d'erreur d'appréciation ; elle fait obstacle à l'exécution du sursis probatoire et il ne constitue pas une menace pour l'ordre public ;
Par un mémoire en défense enregistré le 1er décembre 2021, le préfet du Puy-de-Dôme conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir qu'aucun des moyens soulevés n'est fondé.
Par une décision du 7 juillet 2021, le bureau d'aide juridictionnelle a admis M. B... A... C... à l'aide juridictionnelle totale.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative ;
Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Psilakis, première conseillère.
Considérant ce qui suit :
1. Par arrêté du 6 novembre 2020, le préfet du Puy-de-Dôme a refusé à M. B... A... C..., ressortissant du Nigéria né en 1982 et entré en France en 2012, de renouveler son titre de séjour, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français, a refusé de lui accorder un délai de départ volontaire, a fixé le pays de renvoi et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de deux ans. Par arrêté du même jour, l'intéressé a été placé en rétention administrative. M. B... A... C... relève appel du jugement du 2 avril 2021 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation du premier arrêté.
2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors applicable : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. (...) La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat (...) ". Aux termes de l'article R. 313-22 de ce code : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. / L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé (...) ". Aux termes de l'article R. 313-23 de ce code : " Le collège à compétence nationale, composé de trois médecins, émet un avis dans les conditions de l'arrêté mentionné au premier alinéa du présent article. La composition du collège et, le cas échéant, de ses formations est fixée par décision du directeur général de l'office. Le médecin ayant établi le rapport médical ne siège pas au sein du collège. / Le collège peut délibérer au moyen d'une conférence téléphonique ou audiovisuelle (...) ". Selon l'article 6 de l'arrêté du 27 décembre 2016 visé ci-dessus : " (...) Cet avis mentionne les éléments de procédure. / Le collège peut délibérer au moyen d'une conférence téléphonique ou audiovisuelle. / L'avis émis à l'issue de la délibération est signé par chacun des trois médecins membres du collège. ".
3. D'une part, il ressort des pièces du dossier, en particulier des mentions figurant sur l'avis du collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) ayant examiné la situation de M. A... C..., que cet avis, signé par les trois médecins qui composent ce collège, indique expressément qu'il a été émis le 10 décembre 2019 " après délibération ". Par ailleurs, suivant ce même avis, le médecin ayant rédigé le rapport médical est différent des médecins composant le collège et ayant délibéré. Par suite, le moyen tiré de l'irrégularité de l'avis du collège de médecins de l'OFII doit être écarté dans toutes ses branches.
4. D'autre part, par son avis du 10 décembre 2019, le collège des médecins de l'OFII a estimé que l'état de santé de M. A... C... nécessite une prise en charge médicale, dont le défaut peut entraîner de conséquences d'une exceptionnelle gravité mais qu'il peut bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine. Pour contester le refus de titre de séjour opposé par le préfet du Puy-de-Dôme au vu de cet avis, M. A... C... se prévaut des certificats médicaux déjà versés en première instance et faisant état d'un traitement de douleurs arthritiques en octobre 2020, d'une insuffisance rénale, d'une pathologie cardiaque pour laquelle il a été opéré en 2015 et de pathologies psychiatriques lourdes ayant mené à son hospitalisation d'office pour une durée de plusieurs jours en juin 2020. Cependant ces certificats et les considérations générales dont l'intéressé fait état sur le système de soins nigérian ne sont pas suffisants pour remettre en cause l'appréciation portée par le préfet du Puy-de-Dôme. Pour ces mêmes motifs, cette décision n'est pas entachée d'erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur sa situation personnelle.
5. En deuxième lieu, en se bornant à affirmer qu'" il fait partie des étrangers protégés contre le prononcé d'une mesure d'éloignement en application de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ", le requérant n'assortit pas son moyen de précisions suffisantes pour qu'il y soit répondu.
6. En troisième lieu, le requérant soutient que la décision lui refusant un délai de départ volontaire est entachée d'erreur d'appréciation puisqu'il ne constitue pas une menace pour l'ordre public et qu'il présente des garanties de représentation suffisantes malgré la perte de son passeport, dès lors qu'il bénéficie d'un logement et du suivi d'un curateur. Pour refuser d'accorder un délai de départ volontaire au requérant, le préfet du Puy-de-Dôme s'est fondé sur les dispositions du 1° et du 3°, f) de l'article L. 511-1, II du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et sur les circonstances que le comportement du requérant constitue une menace à l'ordre public et qu'il ne dispose pas de garanties de représentation. Il ressort des pièces du dossier que l'intéressé a fait l'objet de multiples condamnations entre 2014 et 2017 pour des faits de violences n'ayant pas entraîné d'incapacité, d'outrages à une personne chargée de mission de service public et de menaces de mort réitérées et a été condamné par le tribunal correctionnel de Lyon le 21 septembre 2020 à une peine d'emprisonnement délictuelle de huit mois pour des faits de violences avec usage ou menace d'une arme suivi d'incapacité n'excédant pas huit jours, en récidive et de harcèlement d'une personne étant ou ayant été conjoint, concubin ou partenaire lié par un pacte civil de solidarité sans incapacité. Dans ces conditions, le préfet a procédé à une exacte application du 1° de l'article L. 511-1, II du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et aurait pu fonder sa décision sur ce seul motif. Par suite et nonobstant les garanties de représentation dont se prévaut l'intéressé, le moyen soulevé n'est pas fondé.
7. En quatrième lieu, il résulte de ce qui a été dit précédemment que l'intéressé n'est pas fondé à exciper de l'illégalité des décisions lui faisant obligation de quitter le territoire sans délai à l'encontre de la décision portant interdiction de retour.
8. En cinquième et dernier lieu, le requérant réitère en appel sans y ajouter de nouveau développement son moyen tiré de ce que la décision lui interdisant le retour sur le territoire pour une durée de deux ans est entachée d'erreur d'appréciation. Il convient de l'écarter par adoption des motifs retenus par le tribunal au point 14 du jugement.
9. Il résulte de ce qui précède que M. A... C... n'est pas fondé à demander l'annulation du jugement attaqué. Ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement des dispositions combinées des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées par voie de conséquence.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. A... C... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... C... et(/nom)(ano)A(/ano) au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet du Puy-de-Dôme.
Délibéré après l'audience du 22 février 2022 à laquelle siégeaient :
Mme Daniele Déal, présidente ;
M. Thierry Besse, président-assesseur ;
Mme Christine Psilakis, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 15 mars 2022.
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N° 21LY01398