Par une requête enregistrée le 29 juillet 2020 et des mémoires, enregistrés les 22 mars 2021 et 6 avril 2021, ce dernier mémoire n'ayant pas été communiqué, M. et Mme J..., représentés par la SELARLU D..., demandent à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 16 avril 2020 ;
2°) d'annuler l'arrêté de permis de construire du 1er septembre 2017 et le permis de construire modificatif du 12 juillet 2018 ;
3°) de mettre une somme de 2 500 euros à la charge de la commune de Massongy au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- ils ont intérêt pour agir ;
- le pétitionnaire n'avait pas qualité pour demander le permis de construire sur l'une des parcelles d'assiette du projet de construction ; la régularisation par le permis de construire modificatif ne saurait valoir compte tenu du lien existant entre le maire signataire du permis et l'une de ses bénéficiaires ; le permis de construire modificatif méconnaît l'article L. 422-7 du code de l'urbanisme dès lors que le maire, intéressé au projet, n'avait pas compétence pour signer ce permis ; ce moyen est un moyen de légalité externe relevant de la même cause juridique que celui tiré de la violation de l'article R. 423-1 du code de l'urbanisme soulevé dans la requête introductive d'instance ;
- le permis de construire initial méconnaît l'article UB 12 du règlement du plan d'occupation des sols en ce que le projet ne prévoit que huit places de stationnement ; ce vice n'est pas régularisé par le permis de construire modificatif qui prévoit six des quatorze places de stationnement dans l'emprise de l'emplacement réservé n° 7 ;
- le permis de construire initial méconnaît l'article UB 3 du règlement du plan d'occupation des sols compte tenu de la pente de la voie d'accès, de l'absence d'aménagement permettant de faire aisément demi-tour faisant obstacle à l'intervention du service d'enlèvement des ordures ménagères et des véhicules de lutte contre l'incendie ; ce vice n'est pas régularisé par le permis de construire modificatif qui prévoit des aires de retournement dans l'emprise de l'emplacement réservé n° 7.
Par des mémoires en défense, enregistrés les 11 février 2021 et 15 mars 2021, ce dernier mémoire n'ayant pas été communiqué, la commune de Massongy, représentée par Me I..., conclut au rejet de la requête, à titre subsidiaire, à ce qu'il soit fait application de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme et demande qu'une somme de 2 500 euros soit mise à la charge des requérants en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- les requérants ne justifient pas de leur intérêt pour agir et notamment pas de leur qualité de voisins immédiats ;
- les moyens nouveaux soulevés en appel sont irrecevables ;
- les moyens soulevés sont infondés.
Par un mémoire, enregistré le 22 mars 2021, la société Epsilot, représentée par la SELAS Cabinet Lega-Cité, conclut au rejet de la requête et demande qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge des requérants en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- les requérants ne justifient pas de leur intérêt pour agir ;
- les requérants ne sont pas recevables à contester le permis de construire modificatif devenu définitif ;
- les moyens soulevés sont infondés.
Par lettre du 19 mars 2021, la cour a, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, informé les parties qu'elle était susceptible de relever d'office l'irrecevabilité du moyen tiré de l'incompétence du signataire du permis de construire en litige, relevant d'une cause juridique distincte des moyens invoqués devant le tribunal administratif.
Par lettre du 31 mars 2021, la cour a informé les parties qu'elle était susceptible de retenir le moyen tiré de ce que le maire de Massongy, signataire du permis de construire, est intéressé au projet au sens de l'article L. 422-7 du code de l'urbanisme et de faire application des dispositions de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme en vue de la régularisation de ce vice.
La commune de Massongy a produit, en réponse, ses observations par un mémoire, enregistré le 2 avril 2021.
La clôture d'instruction a été fixée en dernier lieu au 6 avril 2021 par une ordonnance du 23 mars 2021.
La commune de Massongy a produit une pièce complémentaire, enregistrée le 19 avril 2021.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme H... F..., première conseillère ;
- les conclusions de M. Jean-Simon Laval, rapporteur public ;
- les observations de Me D... pour M. et Mme J..., celles de Me A..., substituant Me I..., pour la commune de Massongy, ainsi que celles de Me C... pour la société Epsilot ;
Et après avoir pris connaissance de la note en délibéré présentée pour la commune de Massongy, enregistrée le 29 avril 2021 ;
Considérant ce qui suit :
1. Par un arrêté du 1er septembre 2017, le maire de Massongy a accordé à la SARL Epsilot un permis de construire valant division pour la construction de quatre villas sur un terrain situé au lieudit Les Clos. Par un arrêté du 12 juillet 2018, produit en cours d'instance devant le tribunal administratif de Grenoble, il a délivré à cette société un permis de construire modificatif pour la modification des places de stationnement, de la voirie et des statuts de l'association syndicale. M. et Mme J... relèvent appel du jugement du 16 avril 2020 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté leur demande tendant à l'annulation du permis de construire initial.
Sur la légalité du permis de construire du 1er septembre 2017 :
En ce qui concerne la compétence du signataire de l'arrêté attaqué :
2. Aux termes de l'article L. 422-7 du code de l'urbanisme : " Si le maire ou le président de l'établissement public de coopération intercommunale est intéressé au projet faisant l'objet de la demande de permis ou de la déclaration préalable, soit en son nom personnel, soit comme mandataire, le conseil municipal de la commune ou l'organe délibérant de l'établissement public désigne un autre de ses membres pour prendre la décision. ". Si le maire est, en vertu des dispositions de l'article L. 422-1 du code de l'urbanisme, compétent pour délivrer une autorisation d'urbanisme, une telle autorisation peut également être compétemment délivrée, réserve faite des délégations accordées dans les conditions prévues par le code général des collectivités territoriales ou de l'application des règles de suppléance, par un membre du conseil municipal légalement désigné par celui-ci en application de l'article L. 422-7 du même code, au motif que le maire peut être légitimement regardé comme intéressé au projet devant faire l'objet de l'autorisation.
3. M. et Mme J... soutiennent pour la première fois en appel que M. E... G..., alors maire de la commune de Massongy, signataire du permis de construire, est intéressé au projet. Les requérants n'avaient invoqué en première instance que des moyens de légalité interne. Par suite, le moyen de légalité externe tiré de l'incompétence du signataire de ce permis, relevant d'une cause juridique nouvelle en appel, est irrecevable. En tout état de cause, la circonstance que la cousine du maire serait propriétaire d'une des parcelles d'assiette du projet ne suffit pas à établir, compte tenu de ce lien de parenté distendu, l'intérêt personnel du maire au projet, alors par ailleurs que le permis en litige a été délivré à une société tierce.
En ce qui concerne la qualité de la société Epsilot pour déposer la demande de permis de construire :
4. M. et Mme J... soutiennent que la société Epsilot n'est pas propriétaire de l'ensemble de l'assiette foncière du projet. Il ressort toutefois des pièces du dossier que la société Epsilot a signé l'attestation requise par les dispositions de l'article R. 431-5 du code de l'urbanisme, dont aucun élément ne laissait apparaître, à la date de délivrance du permis de construire, un caractère frauduleux. Le permis de construire modificatif délivré le 12 juillet 2018 comporte d'ailleurs une attestation de Mme B... G... autorisant la SARL Epsilot à déposer une demande de permis de construire sur les parcelles lui appartenant. Par suite, le moyen tiré de l'absence de qualité du pétitionnaire pour déposer la demande doit être écarté.
En ce qui concerne la violation du plan d'occupation des sols :
5. Le règlement du plan d'occupation des sols, remis en vigueur suite à l'annulation du PLU par un jugement définitif du tribunal administratif de Grenoble du 29 septembre 2015, prévoit que pour les articles Nab6 à Nab13, les dispositions relatives à la zone UB s'appliquent.
S'agissant de l'article UB 12 :
6. L'article UB 12 du règlement du plan d'occupation des sols exige, pour les constructions à usage d'habitation, une place par tranche de 50 m² de surface de plancher créée, dans la limite de trois places par logement et une place de stationnement supplémentaire par tranche de trois logements pour les opérations de plus de deux logements, à destination des visiteurs.
7. Il n'est pas contesté que le permis de construire modificatif prévoit la réalisation de quatorze places de stationnement, soit un nombre suffisant au regard des dispositions citées au point précédent. M. et Mme J... soutiennent néanmoins que ce permis prévoit l'implantation de six de ces places dans l'emprise de l'emplacement réservé n° 7 destiné à la création d'une voie communale de desserte du secteur du coteau Est, de 7 mètres de plateforme. Toutefois, le projet qui prévoit la réalisation d'une voie sur une emprise d'une largeur de 9 mètres, n'est pas incompatible avec la destination assignée à cet emplacement.
S'agissant de l'article UB 3 :
8. Aux termes de l'article UB 3 du règlement du plan d'occupation des sols : " les terrains d'assiettes des constructions et installations doivent être desservis par des voies dont les caractéristiques répondent aux besoins de l'opération, notamment en ce qui concerne les conditions de circulation, la lutte contre l'incendie, le ramassage des ordures ménagères, le déneigement, en tout état de cause, la plateforme (...) et les voies en impasse seront aménagées pour permettre à leurs usagers de faire aisément demi-tour ".
9. Il ressort des pièces du dossier que le projet se raccorde, pour la prolonger, à la voirie en impasse du lotissement du " Clos d'Ella " où résident les requérants et prévoit, ainsi qu'il a été dit au point 7, la réalisation d'une voie sur une emprise d'une largeur de 9 mètres, dont 5 mètres de surface de roulement, qui permet sans difficulté en dépit d'une configuration en pente, la circulation des engins de lutte contre l'incendie, de déneigement et de ramassage des ordures ménagères. Le permis de construire modificatif prévoit l'aménagement d'une aire de retournement qui peut être prise en compte en dépit de la circonstance qu'elle se situe dans l'emprise de l'emplacement réservé n° 7, pour les motifs énoncés au point 7. Dans ces conditions, le moyen tiré de la violation des dispositions citées au point précédent doit être rejeté.
10. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée par la commune de Massongy, que M. et Mme J... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté leur demande.
Sur les frais liés au litige :
11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la somme que les requérants demandent au titre des frais qu'ils ont exposés soit mise à la charge de la commune de Massongy, qui n'est pas partie perdante. En application de ces mêmes dispositions, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge des requérants le versement d'une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par la commune de Massongy, d'une part, et par la société Epsilot, d'autre part.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. et Mme J... est rejetée.
Article 2 : M. et Mme J... verseront la somme de 1 500 euros à la commune de Massongy, d'une part, et à la société Epsilot, d'autre part, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme J..., à la commune de Massongy et à la société Epsilot.
Délibéré après l'audience du 27 avril 2021 à laquelle siégeaient :
Mme Danièle Déal, présidente de chambre,
M. Thierry Besse, président-assesseur,
Mme H... F..., première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 18 mai 2021.
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N° 20LY02042