I) Par une requête enregistrée le 7 décembre 2020, sous le n° 20LY03587, et un mémoire en réplique enregistré le 15 septembre 2021, la commune de Saint-Clair-du-Rhône, représentée par la Selas Adamas Affaires Publiques, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 15 octobre 2020, en tant qu'il a partiellement fait droit à la demande de M. B... ;
2°) de rejeter les conclusions de la demande de M. B... ;
3°) de mettre à la charge de M. B... la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- c'est à tort que les premiers juges ont estimé que le classement en zone naturelle des parcelles en litige reposait sur le risque de glissement de terrains identifié sur le secteur et qu'en l'absence d'un tel risque, ce classement procédait d'une erreur manifeste d'appréciation ; ce classement se justifie compte tenu des caractéristiques de la parcelle et du parti d'urbanisme retenu ;
- au demeurant, l'existence d'un risque moyen de glissement de terrain est établie, ce risque justifiant également le classement du terrain en secteur inconstructible.
- aucun des autres moyens soulevés par l'intimé n'est fondé.
Par un mémoire en défense enregistré le 2 septembre 2021, M. A... B..., représentée par Me Rigollet, conclut :
- au rejet de la requête ;
- à l'annulation de la carte des aléas en ce qu'elle classe en zone de glissement de terrain de type G2 les deux parcelles en litige ;
- à l'annulation de la délibération du 25 juin 2018 du conseil municipal de Saint-Clair-du-Rhône approuvant le PLU de la commune ;
- à ce qu'il soit dit et jugé que les parcelles cadastrées section AC n° 1241 et 170 seront classées en zone UD ;
- à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de la commune requérante au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- il a sollicité auprès de la commune en vain des documents ; il s'interroge sur la légalité du plan local d'urbanisme au regard de l'absence de référence au schéma de cohérence territorial des Rives du Rhône ainsi que sur la compétence de la commune pour la mise en œuvre du plan local d'urbanisme ;
- le classement des parcelles en litige en zone naturelle est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation tant au regard de leurs caractéristiques que du fait qu'elle n'est pas soumise à un risque de glissement de terrain, contrairement aux indications erronées de la carte des aléas.
La clôture de l'instruction a été fixée en dernier lieu au 7 octobre 2021, par une ordonnance en date du 15 septembre 2021.
II) Par une requête enregistrée le 11 décembre 2020, sous le n° 20LY03637, la communauté de communes entre Bièvre et Rhône, représentée par la SELARL Cabinet d'avocats Philippe Petit et Associés, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 15 octobre 2020, en tant qu'il a partiellement fait droit à la demande de M. B... ;
2°) de rejeter les conclusions de la demande de M. B... ;
3°) de mettre à la charge de M. B... la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- c'est à tort que les premiers juges ont estimé que le classement en zone naturelle des parcelles en litige reposait sur le risque de glissement de terrains identifié sur le secteur et qu'en l'absence d'un tel risque, ce classement procédait d'une erreur manifeste d'appréciation ; ce classement se justifie compte tenu des caractéristiques de la parcelle et du parti d'urbanisme retenu ;
- au demeurant, l'existence d'un risque moyen de glissement de terrain est établie, ce risque justifiant également le classement du terrain en secteur inconstructible.
- aucun des autres moyens soulevés par l'intimé n'est fondé.
La requête a été communiquée à M. B..., qui n'a pas produit de mémoire en défense.
La clôture d'instruction a été fixée au 15 septembre 2021, par une ordonnance en date du 26 juillet 2021.
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Thierry Besse, président-assesseur,
- les conclusions de M. Jean-Simon Laval, rapporteur public,
- les observations de Me Buffet pour la commune de Saint-Clair-du-Rhône, celles de Me Rigollet pour M. B... et de Me Masson, substituant Me Petit, pour la communauté de communes entre Bièvre et Rhône ;
Considérant ce qui suit :
1. M. B... a demandé au tribunal administratif de Grenoble l'annulation de la délibération du 25 juin 2018 par laquelle le conseil municipal de Saint-Clair-du-Rhône a approuvé le plan local d'urbanisme de la commune. Par jugement du 15 octobre 2020, le tribunal a annulé cette délibération, en tant qu'elle classe en zone naturelle les parcelles cadastrées section AC n° 1241 et 170, et rejeté le surplus des conclusions de la demande. La commune de Saint-Clair-du-Rhône et la communauté de communes entre Bièvre et Rhône, qui exerce désormais la compétence en matière de plans locaux d'urbanisme, relèvent appel de ce jugement, en tant qu'il a partiellement fait droit à la demande. Par la voie de l'appel incident, M. B... demande l'annulation intégrale de cette délibération du 25 juin 2018.
2. Les requêtes susvisées sont dirigées contre le même jugement. Il y a lieu de les joindre pour y statuer par un seul arrêt.
Sur l'appel principal des requérantes :
3. Aux termes de l'article R. 151-24 du code de l'urbanisme : " Les zones naturelles et forestières sont dites " zones N ". Peuvent être classés en zone naturelle et forestière, les secteurs de la commune, équipés ou non, à protéger en raison : 1° Soit de la qualité des sites, milieux et espaces naturels, des paysages et de leur intérêt, notamment du point de vue esthétique, historique ou écologique (...) 3° Soit de leur caractère d'espaces naturels (...) ".
4. Il est de la nature de toute réglementation d'urbanisme de distinguer des zones où les possibilités de construire sont différentes, ainsi que des zones inconstructibles. Il appartient aux auteurs d'un plan local d'urbanisme de déterminer le parti d'aménagement à retenir pour le territoire concerné par ce plan, en tenant compte de la situation existante et des perspectives d'avenir, et de fixer en conséquence le zonage et les possibilités de construction. Leur appréciation sur ces différents points ne peut être censurée par le juge administratif qu'au cas où elle serait entachée d'une erreur manifeste ou fondée sur des faits matériellement inexacts.
5. Il ressort des pièces du dossier que les parcelles cadastrées section AC n° 1241 et 170 en litige sont situées sur les coteaux surplombant la vallée du Rhône et le centre-bourg, dans un secteur d'habitat pavillonnaire peu dense. Ces deux parcelles en pente, non construites et plantées de quelques arbres ouvrent à l'est et au sud sur des espaces naturels largement boisés. Elles sont à l'écart des deux pôles urbains de centralité qu'entendent renforcer les auteurs du plan local d'urbanisme, ainsi qu'il ressort du projet d'aménagement et de développement durable, dans un secteur où les auteurs du plan entendent limiter l'urbanisation, au regard notamment des enjeux paysagers, environnementaux et des difficultés d'accès. Bien qu'entourées de quelques maisons, ces parcelles ne constituent pas, contrairement à ce que soutient M. B..., un espace résiduel au sein d'un hameau qui pourrait à ce titre être urbanisé dans les secteurs d'habitation périphériques selon les auteurs du plan. Dans ces conditions, et indépendamment même de la question de savoir si ces terrains en pente présentent des risques de glissement de terrain, leur classement en zone naturelle n'est entaché d'aucune erreur manifeste d'appréciation. C'est par suite à tort que les premiers juges ont, pour ce motif, annulé la délibération du 25 juin 2018, en ce qu'elle approuvait ce classement.
6. Il appartient dès lors à la cour, saisie par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par l'intimé, tant en première instance qu'en appel.
7. Si M. B... fait valoir qu'il a sollicité en vain des documents relatifs à l'enquête publique auprès de la commune et qu'il s'interroge sur la légalité du plan local d'urbanisme au regard de l'absence du schéma de cohérence territorial des Rives du Rhône, il n'assortit ces éléments d'aucune précision permettant d'en apprécier le bien-fondé. Par ailleurs, si l'intimé s'interroge également sur la compétence de la commune de Saint-Clair-du-Rhône pour adopter ce plan, la compétence en matière de plans locaux d'urbanisme n'a été transférée à la communauté de communes entre Bièvre et Rhône qu'au 1er janvier 2019, postérieurement à l'adoption du plan. Par suite, les autres moyens soulevés par M. B..., relatifs au classement en zone naturelle des deux parcelles en litige, doivent être écartés.
Sur l'appel incident de M. B... :
8. En premier lieu, M. B... ne critique pas en appel l'irrecevabilité opposée à sa demande, en ce qu'elle tendait à l'annulation de la carte des aléas annexée au plan local d'urbanisme. Par suite, les conclusions qu'il dirige contre cet acte ne peuvent qu'être rejetées.
9. En deuxième lieu, et pour les motifs exposés au point 7, les moyens de M. B... dirigés, de manière générale, contre la délibération du 25 janvier 2018 doivent être écartés.
10. Enfin, M. B... peut être regardé comme demandant l'annulation de la décision d'identifier au plan de zonage son terrain en zone d'aléa moyen au regard du risque de glissement de terrain, cette zone concernant notamment les terrains en pentes moyennes à fortes, sans antécédent de glissement connu, mais qui présentent des indices de solifluxion superficielle et une nature de sol favorisant les glissements de terrain. Il ressort des pièces du dossier, y compris de l'étude géotechnique produite par l'intimé, que les terrains en cause présentent une forte pente, d'environ 27%, des signes de solifluxion au droit de la butte, et un sous-sol de terre végétale limoneuse ou graves assez instable sur une profondeur d'environ un mètre. Si les sondages effectués lors de l'étude n'ont pas mis en évidence d'argile sableuse, comme sur des terrains voisins, ou de présence d'eau sous-terraine, alors que des études géologiques plus générales ont relevé une circulation hydrologique en sous-sol importante sur le secteur, les parcelles en litige, situées à proximité de zones ayant connu des glissements de terrains, présentent les caractéristiques physiques, rappelées précédemment, des zones classées en risque d'aléa moyen de glissement de terrain. Dans ces conditions, si l'étude géotechnique produite conclut, sous réserve d'études complémentaires, à la possibilité de construire des bâtiments, en utilisant des techniques adaptées, notamment en calant les fondations dans le substrat rocheux, le classement en zone G2 inconstructible sauf exceptions de ces terrains ne peut être regardé, compte tenu des caractéristiques du terrain et du secteur dans lequel il se situe, comme entaché d'une erreur manifeste d'appréciation.
11. Il résulte de ce qui précède, d'une part que la commune de Saint-Clair-du-Rhône et la communauté de communes Entre Bièvre et Rhône sont fondées à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a partiellement annulé la délibération du 25 novembre 2018 approuvant le plan local d'urbanisme de la commune, d'autre part que l'appel incident de M. B... doit être rejeté.
Sur les frais d'instance :
12. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par les requérantes tendant à la mise à la charge de M. B... des frais non compris dans les dépens qu'elles ont exposés. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions présentées par M. B..., partie perdante, tendant à la mise à la charge de la commune de Saint-Clair-du-Rhône des frais non compris dans les dépens qu'il a exposés.
DÉCIDE :
Article 1er : Les articles 1er et 2 du jugement du tribunal administratif de Grenoble sont annulés.
Article 2 : Les conclusions de la demande de M. B... devant le tribunal administratif de Grenoble tendant à l'annulation du classement en zone naturelle des parcelles cadastrées section AC n° 1241 et 170 et le surplus des conclusions des parties en appel sont rejetés.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Saint-Clair-du-Rhône, à la communauté de communes entre Bièvre et Rhône et à M. A... B....
Délibéré après l'audience du 4 janvier 2022 à laquelle siégeaient :
Mme Danièle Déal, présidente de chambre,
M. Thierry Besse, président-assesseur,
M. François Bodin-Hullin, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 25 janvier 2022.
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N° 20LY03587-20LY03637