Procédure devant la cour :
Par un recours enregistré le 11 août 2014, le ministre du logement, de l'égalité des territoires et de la ruralité demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Dijon du 30 mai 2014 ;
2°) de rejeter la demande de M. et Mme D...devant le tribunal administratif de Dijon.
Il soutient que le classement du terrain de M. et Mme B...en zone constructible par la carte communale n'est pas entaché d'erreur manifeste d'appréciation.
Par un mémoire enregistré le 23 octobre 2014, M. et Mme D...concluent au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 2 500 euros soit mise à la charge de l'Etat en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que le classement du terrain de M. et Mme B...en zone constructible est entaché d'erreur manifeste d'appréciation.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Vaccaro-Planchet,
- les conclusions de M. Vallecchia, rapporteur public,
- et les observations de Me Barberousse, avocat de M. et MmeD....
1. Considérant que, par un jugement du 30 mai 2014, le tribunal administratif de Dijon a annulé l'arrêté du 28 juin 2012 par lequel le maire de la commune de Marigny a délivré au nom de l'Etat un permis de construire une maison individuelle au lieudit L'Etang à M. et Mme B... ; que le ministre du logement de l'égalité des territoires et de la ruralité relève appel de ce jugement ;
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 124-2, alors en vigueur, du code de l'urbanisme, dont les dispositions sont aujourd'hui reprises aux articles L. 161-3 et L. 161-4 : " Les cartes communales respectent les principes énoncés aux articles L. 110 et L. 121-1. /Elles délimitent les secteurs où les constructions sont autorisées et les secteurs où les constructions ne sont pas admises, à l'exception de l'adaptation, du changement de destination, de la réfection ou de l'extension des constructions existantes (...). " ;
3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, en particulier du rapport de présentation de la carte communale de la commune de Marigny, que celle-ci a décidé de privilégier l'urbanisation du bourg et du hameau du Tartre et que dans les autres hameaux et lieudits, dont le lieudit L'Etang où se situe la construction autorisée par le permis en litige, le périmètre constructible " inclut seulement les constructions existantes, hormis les constructions liées aux exploitations agricoles et les constructions non raccordées aux réseaux. Aucune surface n'est ouverte à l'urbanisation " ;
4. Considérant que les photographies produites montrent que si le terrain appartenant à M. et Mme B...renferme des bâtiments à l'état de ruine, il comporte également deux constructions existantes, soit une grange et une écurie ; que si ces constructions ont eu une vocation agricole, elles ne peuvent être regardées comme " liées aux exploitations agricoles " au sens du rapport de présentation de la carte communale dans la mesure où aucune activité agricole n'est exercée sur les terrains en cause et où ces constructions ne sont liées à aucune exploitation agricole existante ; que la grange est raccordée au réseau d'électricité et que, si elle n'est pas reliée au réseau d'eau potable, ce dernier arrive au droit du terrain, le long de la voie publique, à 40 mètres ; qu'ainsi, elle ne peut être regardée comme une " construction non reliée aux réseaux " au sens de la carte communale ; que, dans ces conditions, l'inclusion du terrain de M. et Mme B...dans le périmètre constructible de la commune par les documents graphiques de la carte communale n'est pas entachée d'erreur manifeste d'appréciation au regard du parti retenu et précisé dans le rapport de présentation de ladite carte communale ; que, par suite c'est à tort que le tribunal administratif de Dijon s'est fondé sur le motif tiré, par voie d'exception, de l'illégalité de la carte communale, pour annuler l'arrêté contesté ;
5. Considérant toutefois qu'il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. et MmeD... ;
6. Considérant qu'aux termes de l'article R. 431-8 du code de l'urbanisme : " Le projet architectural comprend une notice précisant : 1° L'état initial du terrain et de ses abords indiquant, s'il y a lieu, les constructions, la végétation et les éléments paysagers existants ; 2° Les partis retenus pour assurer l'insertion du projet dans son environnement et la prise en compte des paysages, faisant apparaître, en fonction des caractéristiques du projet : a) L'aménagement du terrain, en indiquant ce qui est modifié ou supprimé ; b) L'implantation, l'organisation, la composition et le volume des constructions nouvelles, notamment par rapport aux constructions ou paysages avoisinants ; c) Le traitement des constructions, clôtures, végétations ou aménagements situés en limite de terrain ; d) Les matériaux et les couleurs des constructions ; e) Le traitement des espaces libres, notamment les plantations à conserver ou à créer ; f) L'organisation et l'aménagement des accès au terrain, aux constructions et aux aires de stationnement. " ;
7. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que ni la notice jointe à la demande de permis de construire de M. et Mme B...ni les plans accompagnant cette demande ne faisaient apparaître le ruisseau de la Tour, qui traverse le terrain d'assiette du projet et que le chemin d'accès à la construction projetée doit franchir ; que le dossier de permis de construire ne comporte aucune information relative aux modalités de réalisation de ce chemin d'accès au droit du ruisseau ; que, dans ces conditions, le service instructeur n'a pas été mis à même de se prononcer en toute connaissance de cause, alors que le terrain d'assiette du projet est situé dans une zone humide ; que, par suite, M. et Mme D...sont fondés à soutenir que les dispositions précitées de l'article R. 431-8 du code de l'urbanisme ont été méconnues et que le permis de construire doit, pour ce motif, être annulé dans son ensemble ;
8. Considérant que, pour l'application de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, aucun autre moyen n'apparaît, en l'état de l'instruction, susceptible de fonder l'annulation de l'arrêté contesté ;
9. Considérant qu'aux termes de l'article L. 600-5-1 du même code : " Le juge administratif qui, saisi de conclusions dirigées contre un permis de construire (...) estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés, qu'un vice entraînant l'illégalité de cet acte est susceptible d'être régularisé par un permis modificatif (...) peut surseoir à statuer jusqu'à l'expiration du délai qu'il fixe pour cette régularisation (...) " ; que l'application de ces dispositions n'est possible que si la régularisation porte sur des éléments du projet pouvant faire l'objet d'un permis modificatif ; qu'un tel permis ne peut être délivré que si, d'une part, les travaux autorisés par le permis initial ne sont pas achevés - sans que la partie intéressée ait à établir devant le juge l'absence d'achèvement de la construction ou que celui-ci soit tenu de procéder à une mesure d'instruction en ce sens - et si, d'autre part, les modifications apportées au projet initial pour remédier au vice d'illégalité ne peuvent être regardées, par leur nature ou leur ampleur, comme remettant en cause sa conception générale ;
10. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, en particulier de la déclaration d'achèvement de travaux du 10 septembre 2013, que les travaux autorisés par le permis initial sont achevés ; que, dès lors, il y a lieu d'annuler le permis contesté, sans que puissent être mises en oeuvre les dispositions précitées de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme ;
11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le ministre du logement, de l'égalité des territoires et de la ruralité n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon a annulé l'arrêté en litige ;
12. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le paiement à M. et Mme D...de la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
DECIDE :
Article 1er : Le recours du ministre du logement de l'égalité des territoires et de la ruralité est rejeté.
Article 2 : L'Etat versera la somme de 1 500 euros à M. et Mme D...au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre du logement, de l'égalité des territoires et de la ruralité et à M. et Mme C...D....
Copie en sera adressé à la commune de Marigny et à M. et Mme A...B....
Délibéré après l'audience du 19 janvier 2016, à laquelle siégeaient :
M. Clot, président de chambre,
M. Picard, président-assesseur,
Mme Vaccaro-Planchet, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 9 février 2016.
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N° 14LY02619
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