Par un jugement n° 1801740 du 10 juillet 2018, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 21 octobre 2018, M. A... E..., représenté par Me D..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 10 juillet 2018 ;
2°) d'annuler les décisions du préfet du Rhône du 22 décembre 2017 ;
3°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer une carte de séjour mention "vie privée et familiale" dans le délai de huit jours à compter de la notification de l'arrêt sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 1 200 euros au titre des dispositions combinées de l'article L 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- la commission du titre de séjour aurait dû être saisie en vertu de l'alinéa 2 de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'il établit résider sur le territoire français depuis plus de quatorze ans ;
- le refus de titre de séjour méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant, dès lors qu'il est présent depuis quatorze années en France où il a fixé ses attaches privées et familiales, qu'il est père de quatre enfants et qu'il vit en concubinage avec une ressortissante angolaise titulaire d'une carte de séjour en qualité de réfugiée, mère de ses deux derniers enfants ; il contribue à l'entretien et à l'éducation de l'ensemble de ses enfants ;
- l'obligation de quitter le territoire est illégale du fait de l'illégalité du refus de titre de séjour qui la fonde ; cette obligation méconnait l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; enfin, elle est illégale en ce que le préfet s'est estimé à tort en situation de compétence liée et n'a pas exercé son pouvoir d'appréciation ;
- la décision fixant le pays de renvoi méconnait l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
M. E... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle du 19 septembre 2018.
Par un mémoire enregistré le 27 février 2019, le préfet du Rhône conclut au rejet de la requête. Il fait valoir qu'aucun des moyens soulevés n'est fondé.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative ;
Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu, au cours de l'audience publique, le rapport de Mme Christine Psilakis, premier conseiller ;
Considérant ce qui suit :
1. Par un jugement du 10 juillet 2018, le tribunal administratif de Lyon a rejeté la demande de M. E... tendant à l'annulation des décisions du 22 décembre 2017 par lesquelles le préfet du Rhône lui a refusé la délivrance d'une carte de séjour temporaire, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être éloigné d'office. M. E... relève appel de ce jugement.
2. En premier lieu, aux termes du deuxième alinéa de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans. ".
3. Les pièces produites par le requérant devant le tribunal administratif, jugées insuffisantes par les premiers juges pour établir que le requérant réside depuis plus de dix ans, n'ont pas été complétées en appel. Ces pièces, éparses et peu nombreuses, n'établissent pas la réalité et la continuité du séjour de l'intéressé en France depuis plus de dix ans, notamment au cours de la période 2009-2014, alors qu'il a fait l'objet de plusieurs mesures d'éloignement en 2008 et 2009. Dans ces conditions, le moyen selon lequel le préfet du Rhône devait soumettre sa demande à la commission départementale du titre de séjour avant de lui opposer un refus doit être écarté.
4. En deuxième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...). / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ". Aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait (...) des tribunaux, des autorités administratives (...), l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale. ".
5. Il ressort des pièces du dossier que si M. E..., né en 1986 et ressortissant de la république démocratique du Congo (RDC), est entré irrégulièrement en France en septembre 2002, il n'établit pas sa présence habituelle sur le territoire depuis cette date. L'intéressé se prévaut de sa relation de concubinage avec Mme B... C..., une ressortissante angolaise titulaire d'une carte de résident en qualité de réfugiée, de sa présence auprès de deux enfants qui sont nés de cette relation en 2014 et 2016 aux besoins et à l'éducation desquels il allègue subvenir et de ce qu'il a gardé par ailleurs des relations avec deux autres enfants nés respectivement en 2006 et 2007 de deux mères différentes. Toutefois, il ne justifie pas de sa vie commune et ne peut apporter aucun élément au soutien de ses allégations relatives aux liens qu'il soutient avoir conservé avec les enfants qu'il a reconnus, les pièces produites attestant de son hébergement par sa concubine ainsi que de sa présence aux côté de sa fille étant postérieures à la décision en litige. Il ne peut se prévaloir d'aucune insertion particulière dans la société française, alors qu'arrivé en tant que mineur isolé, il a obtenu un diplôme de métallier en 2004. Dans ces conditions, M. E... n'est pas fondé à soutenir que le refus du préfet du Rhône de lui délivrer une carte de séjour porte à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts poursuivis ni, par suite, qu'il méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Pour les mêmes motifs, il n'est pas davantage fondé à soutenir que ce refus porte atteinte à l'intérêt supérieur de ses enfants en méconnaissance de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.
6. En troisième lieu, il résulte de ce qui est dit ci-dessus aux points 2 à 5 que M. E... n'est pas fondé à invoquer l'illégalité du refus de lui délivrer une carte de séjour pour demander l'annulation, par voie de conséquence, de l'obligation de quitter le territoire français.
7. En quatrième lieu, il ne résulte pas des motifs de ses décisions que le préfet du Rhône se serait cru à tort tenu d'assortir le refus de titre de séjour en litige d'une obligation de quitter le territoire dans un délai de trente jours avec désignation du pays de renvoi.
8. En cinquième lieu, pour les motifs déjà énoncés au point 5, M. E... n'est pas fondé à soutenir que les décisions lui faisant obligation de quitter le territoire et fixant le pays de renvoi en cas d'éloignement forcé ont été prises en violation des articles 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.
9. Il résulte de tout ce qui précède que M. E... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande. Ses conclusions à fins d'injonction sous astreinte et celles tendant à l'application, au bénéfice de son avocat, des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, doivent être rejetées par voie de conséquence.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. E... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...E...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet du Rhône.
Délibéré après l'audience du 12 mars 2019 à laquelle siégeaient :
M. Yves Boucher, président de chambre,
M. Antoine Gille, président-assesseur,
Mme Christine Psilakis, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 9 avril 2019.
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N° 18LY03849
dm