Par un jugement n° 1803507 du 16 octobre 2018, le tribunal administratif de Lyon a annulé ces décisions du 1er mars 2018 et a enjoint au préfet du Rhône de délivrer à M. C... une carte de séjour mention "vie privée et familiale", dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement.
Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 24 octobre 2018, le préfet du Rhône, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 16 octobre 2018 ;
2°) de rejeter la demande de M. C... devant ce tribunal.
Il soutient que sa requête est recevable et que, contrairement à ce qu'ont retenu les premiers juges, le refus de titre de séjour opposé à M. C... ne méconnaît pas l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par un mémoire enregistré le 27 février 2019, M. E... C..., représenté par Me D..., conclut au rejet de la requête et demande à la cour :
1°) d'enjoindre au préfet du Rhône de lui délivrer une carte de séjour ou à défaut de réexaminer sa situation et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour, dans le délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt, sous astreinte de 75 euros par jour de retard ;
2°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son avocat d'une somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la décision lui refusant un titre de séjour méconnait l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- les décisions l'obligeant à quitter le territoire et fixant le pays de renvoi sont illégales du fait de l'illégalité de la décision lui refusant un titre de séjour.
M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle du 16 janvier 2019.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative ;
Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu, au cours de l'audience publique, le rapport de Mme Christine Psilakis, premier conseiller ;
Considérant ce qui suit :
1. Par décisions du 1er mars 2018, le préfet du Rhône a refusé la délivrance d'un titre de séjour à M. C..., ressortissant gabonais et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours. Le préfet du Rhône relève appel du jugement du 16 octobre 2018 par lequel le tribunal administratif de Lyon a annulé ces décisions et lui a enjoint de délivrer une carte de séjour à l'intéressé.
Sur le bien-fondé du motif d'annulation retenu par les premiers juges :
2. D'une part, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...). / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".
3. D'autre part, le 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile prévoit la délivrance d'une carte de séjour à un étranger dont les liens personnels et familiaux en France sont tels qu'un refus d'admission au séjour porterait une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale.
4. Il ressort des pièces du dossier que le requérant, ressortissant gabonais né en avril 1993, est entré en France régulièrement le 6 avril 2016 sous couvert d'un visa de vingt-cinq jours pour y rejoindre sa mère et ses demi-frères et soeurs, de nationalité française et qu'il s'est maintenu sur le territoire à compter de cette date. Il est constant que l'intéressé vit séparé de sa mère depuis l'année 2003, date à compter de laquelle il a bénéficié de transferts financiers de sa part pour un montant global de 10 000 euros jusqu'en 2014. S'il se prévaut de ce qu'il a ainsi continué à entretenir des liens avec sa mère pour demander une carte de séjour, il ressort toutefois des pièces du dossier que sa présence en France, où il est arrivé à l'âge de vingt-trois ans, est récente. Le maintien de relations avec sa mère et ses demi-frères et soeurs ne saurait suffire à lui conférer un droit au séjour permanent alors qu'il peut bénéficier de visas de court séjour pour se rendre auprès de sa famille présente en France. Par ailleurs, il ne justifie pas d'une insertion particulière par la seule production d'une promesse d'embauche dans une entreprise de nettoyage du 14 mars 2017. Dans ces conditions, le préfet du Rhône est fondé à soutenir que c'est à tort que, pour annuler ses décisions, les premiers juges se sont fondés sur le caractère excessif de l'atteinte portée au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale.
5. Il y a lieu, au titre de l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens de M. C....
Sur les autres moyens soulevés par M. C... :
6. En premier lieu, la décision de refus de séjour a été signée par Mme A... B..., directrice des migrations et de l'intégration, titulaire d'une délégation de signature à cet effet en vertu d'un arrêté du préfet du Rhône du 31 octobre 2017, régulièrement publié au recueil spécial des actes administratifs de la préfecture du 3 novembre 2017. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'acte attaqué manque en fait.
7. En deuxième lieu, pour les motifs exposés au point 3, M. C... n'est pas fondé à soutenir que le préfet du Rhône a commis une erreur manifeste d'appréciation en ne l'admettant pas au séjour à titre de régularisation pour des considérations humanitaires ou pour motifs exceptionnels, sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ni qu'il commis une erreur manifeste d'appréciation quant aux conséquences de sa décision sur la situation personnelle de l'intéressé.
8. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 314-11 du CESEDA : " Sauf si la présence de l'étranger constitue une menace pour l'ordre public, la carte de résident est délivrée de plein droit, sous réserve de la régularité du séjour : (...) 2° A l'enfant étranger d'un ressortissant de nationalité française si cet enfant est âgé de dix-huit à vingt et un ans ou dans les conditions prévues à l'article L. 311-3 ou s'il est à la charge de ses parents ainsi qu'aux ascendants d'un tel ressortissant et de son conjoint qui sont à sa charge, sous réserve qu'ils produisent un visa pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois ; (...) ". Il est constant qu'à la date de sa demande de titre de séjour, M. C..., entré en France sous couvert d'un visa d'une durée inférieure à trois mois, était âgé de vingt-quatre ans. Par voie de conséquence, le préfet n'a pas fait une inexacte application des dispositions citées au point 8 en lui refusant une carte de résident en qualité d'enfant de ressortissant français.
9. En quatrième lieu, il résulte de ce qui est dit aux points 2 à 8 que M. C... n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de la décision rejetant sa demande de titre de séjour à l'encontre de la décision l'obligeant à quitter le territoire français. De même, l'intéressé n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de la décision l'obligeant à quitter le territoire français à l'encontre de la décision fixant le pays de renvoi.
10. Il résulte de tout ce qui précède que le préfet du Rhône est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a annulé ses décisions du 1er mars 2018 portant refus de délivrer une carte de séjour à M. C..., assorti d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et de la désignation du pays de renvoi. Le préfet est par suite fondé à demander l'annulation de ce jugement et le rejet de la demande de M. C... devant le tribunal administratif.
Sur les autres conclusions de M. C... :
11. Le présent arrêt, qui rejette les conclusions de M. C... dirigées contre les décisions du préfet du Rhône du 1er mars 2018, n'implique pas que l'administration prenne des mesures pour son exécution. Les conclusions de M. C... tendant à ce que de telles mesures soient prescrites sous astreinte au préfet doivent, dès lors être rejetées.
12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la somme dont M. C... demande le versement à son avocat au titre des frais exposés soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas partie perdante
DECIDE :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Lyon du 16 octobre 2018 est annulé.
Article 2 : La demande de M. C... devant le tribunal administratif de Lyon est rejetée.
Article 3 : Le surplus des conclusions de M. C... est rejeté.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à M. E... C....
Copie en sera adressée au préfet du Rhône.
Délibéré après l'audience du 12 mars 2019 à laquelle siégeaient :
M. Yves Boucher, président de chambre,
M. Antoine Gille, président-assesseur,
Mme Christine Psilakis, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 9 avril 2019.
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N° 18LY03878
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