Procédure devant la cour
Par une requête, enregistrée le 4 mai 2016, M. D..., représenté par Me C..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 26 janvier 2016 ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir les décisions du préfet de la Haute-Savoie du 6 novembre 2015 ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son avocat d'une somme de 1 300 euros en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 sur l'aide juridique.
Il soutient que :
- l'obligation de quitter le territoire français sur laquelle sont fondées les décisions contestées n'est pas suffisamment motivée dès lors qu'elle ne cite pas l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- le préfet n'a pas procédé à un examen particulier et complet de sa situation ;
- l'obligation de quitter le territoire français porte une atteinte disproportionnée à sa vie privée et familiale ;
- l'interdiction de retour sur le territoire national n'est pas motivée ;
- elle est signée par une autorité incompétente ;
- elle méconnaît le III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- la décision de placement en rétention n'est pas justifiée dès lors qu'il a toujours vécu avec sa compagne et leurs deux enfants et contribue ainsi quotidiennement à leur entretien et à leur éducation depuis leur naissance, justifie être en possession de son permis de conduire et de sa carte d'identité kosovare remise aux services de police et dispose d'une adresse stable.
La requête a été communiquée au préfet de la Haute-Savoie qui n'a pas produit d'observations.
Par une décision du 23 mars 2016, le bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Lyon (section administrative d'appel) a admis M. D... au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative ;
Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu, au cours de l'audience publique, le rapport de Mme Véronique Vaccaro-Planchet, premier conseiller et les observations de Me C...pour M.D....
1. Considérant que par un jugement du 26 janvier 2016 le tribunal administratif de Lyon a rejeté la demande de M. D..., ressortissant kosovar né le 25 avril 1987, tendant à l'annulation des décisions du 6 novembre 2015 par lesquelles le préfet de la Haute-Savoie l'a interdit de retour sur le territoire français pour une durée d'un an et l'a placé en rétention administrative ; que M. D... relève appel de ce jugement ;
2. Considérant, en premier lieu, que l'interdiction de retour sur le territoire est signée par M. F... A...du Payrat, secrétaire général de la préfecture de la Haute-Savoie, qui avait reçu délégation de signature à cet effet par un arrêté préfectoral du 30 juillet 2012 ; que le moyen tiré de l'incompétence du signataire de cette décision doit, par suite, être écarté comme manquant en fait ;
3. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction alors applicable : " I. - L'étranger qui fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français et qui dispose du délai de départ volontaire mentionné au premier alinéa du II de l'article L. 511-1 peut, dans le délai de trente jours suivant sa notification, demander au tribunal administratif l'annulation de cette décision, ainsi que l'annulation de la décision relative au séjour, de la décision mentionnant le pays de destination et de la décision d'interdiction de retour sur le territoire français qui l'accompagnent le cas échéant. L'étranger qui fait l'objet de l'interdiction de retour prévue au troisième alinéa du III du même article L. 511-1 peut, dans le délai de trente jours suivant sa notification, demander l'annulation de cette décision. / (...) Toutefois, si l'étranger est placé en rétention en application de l'article L. 551-1 ou assigné à résidence en application de l'article L. 561-2, il est statué selon la procédure et dans le délai prévu au III du présent article. / (...) III. - En cas de décision de placement en rétention ou d'assignation à résidence en application de l'article L. 561-2, l'étranger peut demander au président du tribunal administratif l'annulation de cette décision dans les quarante-huit heures suivant sa notification. (...) / Il est également statué selon la procédure prévue au présent III sur le recours dirigé contre l'obligation de quitter le territoire français par un étranger qui est l'objet en cours d'instance d'une décision de placement en rétention ou d'assignation à résidence en application de l'article L. 561-2. Le délai de soixante-douze heures pour statuer court à compter de la notification par l'administration au tribunal de la décision de placement en rétention ou d'assignation. " ;
4. Considérant qu'il résulte de ces dispositions que, lorsqu'il est placé en rétention, l'étranger dispose d'un délai de quarante-huit heures pour contester ce placement ainsi que la décision portant obligation de quitter le territoire dont il vise à assurer l'exécution, si cette obligation a été prise antérieurement et n'avait encore fait l'objet d'aucune contestation ; que M. D... n'a pas présenté de conclusions dirigées contre la décision portant obligation de quitter le territoire français prise à son encontre dans le délai de quarante-huit heures à compter de la notification de la décision portant placement en rétention, qui lui a été notifiée le 6 novembre 2015 à 10 heures ; qu'il ne produit, en appel pas plus qu'en première instance, aucun élément de nature à établir qu'une demande d'aide juridictionnelle avait été déposée dans le délai de recours contre cette obligation de quitter le territoire français, édictée le 12 septembre 2015 ; que, dans ces conditions, il ne peut utilement se prévaloir, par voie d'exception, de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français prononcée à son encontre ;
5. Considérant, en troisième lieu, que les moyens tirés de ce que l'interdiction de retour sur le territoire national ne serait pas motivée, de ce qu'elle méconnaîtrait le III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de ce que sa durée serait manifestement disproportionnée au regard de ses conséquences sur la situation personnelle du requérant doivent être écartés par adoption des motifs retenus par les premiers juges ;
6. Considérant, en quatrième lieu, que la seule circonstance que les services de police ont pu aviser M. D... chez M. B...de ce qu'il était convoqué à la gendarmerie de Thonon-les-Bains ne suffit pas à justifier de ce qu'il disposerait d'une adresse stable chez celui-ci ; que, dès lors, et, pour le surplus par adoption des motifs retenus par les premiers juges, le moyen tiré de ce que la décision de placement en rétention ne serait pas justifiée doit être écarté ;
7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande ; que ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées par voie de conséquence ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. D... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... D...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de la Haute-Savoie.
Délibéré après l'audience du 14 février 2017 à laquelle siégeaient :
M. Yves Boucher, président de chambre,
M. Antoine Gille, président-assesseur,
Mme Véronique Vaccaro-Planchet, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 14 mars 2017.
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N° 16LY01536
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