Procédure devant la cour
Par une requête et un mémoire ampliatif enregistrés les 11 juin et 9 août 2018 ainsi qu'un mémoire en réplique enregistré le 4 janvier 2019 qui n'a pas été communiqué, M. C... A..., représenté par la SCP Yves Richard, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 5 avril 2018 ;
2°) d'annuler la décision du maire de Lucinges du 13 février 2017 rejetant sa demande d'abrogation partielle du PLU ;
3°) d'enjoindre à la commune de Lucinges d'engager une procédure de modification du PLU dans le délai d'un mois sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de la commune de Lucinges la somme de 3 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient qu'eu égard aux caractéristiques et à la localisation des parcelles en litige et alors que le jugement ne caractérise pas leur potentiel au regard des prévisions de l'article R. 151-22 du code de l'urbanisme, c'est à tort que les premiers juges ont écarté le moyen selon lequel le classement de ces parcelles était entaché d'une erreur manifeste d'appréciation.
Par un mémoire en défense enregistré le 31 octobre 2018, la commune de Lucinges, représentée par la SCP Avocats associés Bergeras-Monnier (AABM), conclut au rejet de la requête et demande que la somme de 5 000 euros soit mise à la charge du requérant en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que la requête n'est pas recevable en tant qu'elle porte sur la parcelle cadastrée section C n° 2226 dont M. A... n'est pas propriétaire, et que les moyens de la requête ne sont pas fondés.
La clôture de l'instruction a été fixée au 7 janvier 2019 par une ordonnance du même jour prise en application de l'article R. 611-11-1 et du dernier alinéa de l'article R. 613-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Antoine Gille, président-assesseur ;
- les conclusions de Mme Véronique Vaccaro-Planchet, rapporteur public ;
- et les observations de Me B... pour la commune de Lucinges ;
Considérant ce qui suit :
1. Par une délibération du 22 février 2007, le conseil municipal de Lucinges a approuvé la révision du plan local d'urbanisme (PLU) de la commune. M. A... a, au mois de janvier 2017, sollicité du maire de Lucinges l'abrogation de ce document en tant qu'il classe en zone agricole les parcelles cadastrées section C n° 2226 et 2227. M. A... relève appel du jugement du 5 avril 2018 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du maire de Lucinges du 13 février 2017 refusant de faire droit à cette demande d'abrogation.
Sur la légalité du refus du maire d'engager une procédure d'abrogation partielle du PLU de Lucinges :
2. Aux termes de l'article R. 151-22 du code de l'urbanisme : " Les zones agricoles sont dites "zones A". Peuvent être classés en zone agricole les secteurs de la commune, équipés ou non, à protéger en raison du potentiel agronomique, biologique ou économique des terres agricoles ". Il appartient aux auteurs d'un PLU de déterminer le parti d'aménagement à retenir pour le territoire concerné par ce plan, en tenant compte de la situation existante et des perspectives d'avenir, et de fixer en conséquence le zonage et les possibilités de construction. Leur appréciation ne peut être censurée par le juge administratif qu'au cas où elle est entachée d'une erreur manifeste ou fondée sur des faits matériellement inexacts.
3. Le PLU dont le requérant a demandé l'abrogation classe en zone agricole les parcelles cadastrées section C n° 2226 et 2227 situées au lieu-dit "La Ravoire". Pour soutenir que le refus du maire de Lucinges de donner suite à sa demande d'abrogation est entaché d'illégalité, M. A... soutient que le classement de ces terrains est lui-même illégal. Il fait pour cela valoir que la valeur agronomique de ces parcelles n'est pas établie, que la parcelle n° 2226 qui lui appartient a été identifiée comme constructible lorsqu'ont été précisées les modalités d'application du règlement national d'urbanisme dans la commune, que ces parcelles, dont l'une est bâtie, sont viabilisées, desservies par la voie publique et se trouvent à proximité d'autres parcelles bâties, relevant ainsi d'un secteur urbanisé.
4. Si les parcelles dont M. A... conteste le classement ne font pas l'objet d'une exploitation agricole et se trouvent à faible distance d'autres secteurs où l'habitat a pu se développer, il ressort des pièces du dossier, notamment des documents photographiques produits par les parties, qu'elles se trouvent dans la partie nord d'un vaste espace à caractère rural, bordé, à l'est, par la route reliant le hameau de Milly à celui de Fin de Milly et par un cours d'eau, le nant de Chamagnou, puis, à l'ouest, par les bois du nant de la Follieuse, constitué pour l'essentiel de terrains, qui s'étendent également sur le territoire de la commune de Bonne, en nature de pâturage ou de prés et vierges de construction, à l'exception des bâtiments d'exploitation d'une ferme, distante seulement d'une centaine de mètres des terrains en litige. Alors que, comme l'envisage l'article L. 151-2 du code de l'urbanisme, la présence d'une habitation sur la parcelle C 2226 ne fait pas obstacle à son classement en zone agricole, à l'instar d'autres parcelles bâties situées alentour, les orientations générales du projet d'aménagement et de développement durables (PADD) du PLU de Lucinges évoquent notamment le recentrage du développement urbain autour du village et des hameaux déjà structurés ainsi que la limitation de la consommation de l'espace agricole ou la conservation des grandes entités agricoles homogènes et des circulations agricoles. Dans ces conditions, les circonstances dont M. A... fait état ne suffisent pas, alors même que les parcelles en cause ne présenteraient pas de valeur agricole particulière, pour considérer que le maintien du classement de la parcelle bâtie C 2226 en secteur de zone agricole bâtie Ab ainsi que de l'essentiel de la parcelle C 2227 en zone A procèderait d'une erreur manifeste d'appréciation.
5. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
6. Le présent arrêt, qui confirme le rejet des conclusions de M. A... tendant à l'annulation de la décision du maire de Lucinges du 13 février 2017, n'appelle aucune mesure d'exécution.
Sur les frais liés au litige :
7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la somme que M. A... demande au titre des frais qu'il a exposés soit mise à la charge de la commune de Lucinges, qui n'est pas partie perdante. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu, en application de ces mêmes dispositions, de mettre à la charge de M. A... le versement de la somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par la commune de Lucinges.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. C... A... est rejetée.
Article 2 : M. C... A... versera la somme de 2 000 euros à la commune de Lucinges au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A...et à la commune de Lucinges.
Délibéré après l'audience du 22 février 2019, à laquelle siégeaient :
M. Yves Boucher, président de chambre ;
M. Antoine Gille, président-assesseur ;
M. Thierry Besse, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 19 mars 2019.
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N° 18LY02129
dm