Par un jugement n° 1400174 du 30 juin 2015, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté cette demande.
Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 4 septembre 2015, la commune de Saint-Rémy-en-Rollat, représentée par MeA..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Clermont-Ferrand du 30 juin 2015 ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du préfet de l'Allier du 3 décembre 2013 ;
3°) d'abroger le schéma départemental d'accueil des gens du voyage 2012-2018 ou, à titre subsidiaire, d'enjoindre au préfet de l'Allier de procéder à cette abrogation sur le fondement de l'article L. 911-2 du code de justice administrative ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la création d'une aire d'accueil à Saint-Rémy-en-Rollat n'étant pas prévue au schéma départemental d'accueil des gens du voyage, la communauté d'agglomération Vichy-Val d'Allier n'était pas compétente pour saisir le préfet ;
- le tribunal s'est mépris sur le lien entre l'arrêté critiqué et le schéma départemental d'accueil des gens du voyage en écartant les griefs tirés par voie d'exception de l'illégalité de celui-ci du fait de l'absence d'examen préalable des besoins, de l'irrégularité de l'avis de la commission consultative, de l'absence de consultation des communes de plus de 5 000 habitants et de l'imprécision de la localisation des aires d'accueil ;
- le tribunal a entaché son jugement d'un défaut de motivation, d'une dénaturation des pièces du dossier et d'une erreur manifeste en écartant le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation commise dans le choix du lieu d'implantation de l'aire d'accueil, située sur un site excentré au bord d'une route nationale ;
- en affirmant que la mise en oeuvre du code de l'urbanisme n'était pas à elle seule constitutive d'un détournement de pouvoir, le tribunal n'a pas répondu au moyen tiré du détournement de pouvoir consistant à lui faire supporter la charge des obligations légales d'accueil pesant sur les communes de plus de 5 000 habitants.
Par un mémoire en défense enregistré le 18 mai 2016, le ministre du logement et de l'habitat durable conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.
Par une ordonnance du 27 mai 2016, la clôture de l'instruction a été fixée au 17 juin 2016.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la loi n° 2000-614 du 5 juillet 2000 relative à l'accueil et à l'habitat des gens du voyage ;
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Antoine Gille, président-assesseur ;
- et les conclusions de M. Jean-Paul Vallecchia, rapporteur public ;
1. Considérant que, par une délibération du 27 juin 2013, le conseil de la Communauté d'agglomération Vichy-Val d'Allier a chargé son président de demander au préfet de l'Allier de qualifier de projet d'intérêt général son projet d'aménagement d'une aire d'accueil des gens du voyage comportant 8 emplacements doubles de 150 m², des blocs sanitaires, un bureau d'accueil et une aire de stockage pour la collecte des déchets ménagers sur un terrain d'une superficie d'environ 5 000 m² situé à Saint-Rémy-en-Rollat ; que, par arrêté du 3 décembre 2013, le préfet de l'Allier a fait droit à cette demande ; que la commune de Saint-Rémy-en-Rollat relève appel du jugement du 30 juin 2015 par lequel le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande dirigée contre l'arrêté préfectoral du 3 décembre 2013 ;
Sur la légalité de l'arrêté préfectoral du 3 décembre 2013 :
2. Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 121-2 du code de l'urbanisme dans sa rédaction alors en vigueur : " Dans les conditions précisées par le présent titre, l'Etat veille au respect des principes définis à l'article L. 121-1 et à la prise en compte des projets d'intérêt général ainsi que des opérations d'intérêt national. " ; qu'aux termes de l'article L. 121-9 du même code, dans sa rédaction alors en vigueur : " L'autorité administrative peut qualifier de projet d'intérêt général (...) tout projet d'ouvrage, de travaux ou de protection présentant un caractère d'utilité publique et répondant aux deux conditions suivantes :/ 1° Etre destiné à la réalisation d'une opération d'aménagement ou d'équipement, au fonctionnement d'un service public, à l'accueil et au logement des personnes défavorisées ou de ressources modestes, à la protection du patrimoine naturel ou culturel, à la prévention des risques, à la mise en valeur des ressources naturelles, à l'aménagement agricole et rural ou à la préservation ou à la remise en bon état des continuités écologiques ; / 2° Avoir fait l'objet : / a) Soit d'une délibération ou d'une décision d'une personne ayant la capacité d'exproprier, arrêtant le principe et les conditions de réalisation du projet, et mise à la disposition du public ; / b) Soit d'une inscription dans un des documents de planification prévus par les lois et règlements, approuvée par l'autorité compétente et ayant fait l'objet d'une publication. (...) " ;
3. Considérant que, pour contester la légalité de la décision du préfet de l'Allier du 3 décembre 2013, la requérante expose que la communauté d'agglomération Vichy-Val d'Allier, chargée de la mise en oeuvre du schéma départemental d'accueil des gens du voyage, n'était pas compétente pour saisir le préfet d'une demande tendant à ce que soit qualifiée de projet d'intérêt général la création d'une aire d'accueil sur le territoire de Saint-Rémy-en-Rollat dès lors que cette création n'était pas prévue par ce schéma ; qu'aux termes de l'article 1er de la loi du 5 juillet 2000 relative à l'accueil et à l'habitat des gens du voyage, dans sa rédaction alors applicable : " I. - Les communes participent à l'accueil des personnes dites gens du voyage et dont l'habitat traditionnel est constitué de résidences mobiles. / II. - Dans chaque département, au vu d'une évaluation préalable des besoins et de l'offre existante (...), un schéma départemental prévoit les secteurs géographiques d'implantation des aires permanentes d'accueil et les communes où celles-ci doivent être réalisées. / Les communes de plus de 5 000 habitants figurent obligatoirement au schéma départemental. Il précise la destination des aires permanentes d'accueil et leur capacité. (...) / III. - Le schéma départemental est élaboré par le représentant de l'Etat dans le département et le président du conseil général. (...) " ; qu'aux termes du I de l'article 2 de cette même loi dans sa rédaction applicable : " Les communes figurant au schéma départemental en application des dispositions des II et III de l'article 1er sont tenues, dans un délai de deux ans suivant la publication de ce schéma, de participer à sa mise en oeuvre. Elles le font en mettant à la disposition des gens du voyage une ou plusieurs aires d'accueil, aménagées et entretenues. Elles peuvent également transférer cette compétence à un établissement public de coopération intercommunale chargé de mettre en oeuvre les dispositions du schéma départemental ou contribuer financièrement à l'aménagement et à l'entretien de ces aires d'accueil dans le cadre de conventions intercommunales. " ; que, si ces dispositions prévoient que toute commune sur le territoire de laquelle le schéma départemental d'accueil des gens du voyage a prévu la réalisation d'une aire permanente d'accueil doit participer à la mise en oeuvre de ce schéma, elles n'excluent pas que cette participation soit prise en charge par un établissement public de coopération intercommunale (EPCI) dans le cas où la compétence dans ce domaine lui a été transférée ; que, dans ce cas, cet établissement public, compétent en lieu et place des communes qui en sont membres pour déterminer le terrain d'implantation de cette aire d'accueil, peut retenir un terrain situé sur le territoire d'une autre commune membre que celle figurant au schéma départemental, à la condition, toutefois, que cette commune soit incluse dans le secteur géographique d'implantation prévu par le schéma départemental ; que si un EPCI ne peut, dans les conditions rappelées ci-dessus, décider d'implanter une aire d'accueil sur le territoire d'une commune qui en est membre que dans le cas où la commune a transféré sa compétence en matière d'accueil des gens du voyage à cet établissement, il en va ainsi s'agissant de la commune de Saint-Rémy-en-Rollat qui est membre de la communauté d'agglomération Vichy-Val d'Allier ; que, par suite, le moyen tiré de l'incompétence de cette communauté d'agglomération pour saisir le préfet doit être écarté ;
4. Considérant qu'ainsi que l'ont précisé les premiers juges et conformément aux dispositions du a) du 2° de l'article L. 121-9 du code de l'urbanisme citées au point 2, la délibération du conseil de la communauté d'agglomération Vichy-Val d'Allier du 27 juin 2013 arrêtant le principe et les conditions de réalisation du projet soumis au préfet de l'Allier, à laquelle était joint un plan faisant apparaître sa localisation et ses caractéristiques principales, a été mise à disposition du public selon des modalités publiées dans la presse régionale ; qu'alors que, comme le rappelle la requérante, l'aire d'accueil en litige n'est pas au nombre des aménagements prévus par le schéma départemental d'accueil des gens du voyage, l'arrêté critiqué ne saurait être regardé comme ayant été pris pour l'application de ce schéma et n'y trouve pas davantage sa base légale ; que, dans ces conditions et ainsi que l'ont à bon droit retenu les premiers juges, la requérante ne saurait en tout état de cause se prévaloir utilement à l'encontre de l'arrêté du 3 décembre 2013 de l'illégalité qui, selon elle, entache ce schéma départemental ;
5. Considérant que, pour soutenir que le choix du lieu d'implantation de l'aire d'accueil en litige par la communauté d'agglomération Vichy-Val d'Allier est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation, la commune de Saint-Rémy-en-Rollat souligne la localisation excentrée du site retenu et l'existence de nuisances et risques auxquels seront exposés les usagers de cette aire du fait de la proximité d'une route nationale et soutient que le tribunal administratif a omis de prendre en considération ces éléments de fait ; que, cependant, pour écarter le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation, les premiers juges se sont, contrairement à ce que soutient la requérante, fondés sur des motifs circonstanciés, qu'il a lieu en l'espèce d'adopter ; qu'alors que le projet contesté entend répondre à l'insuffisance des capacités d'accueil des gens du voyage par l'aménagement d'un terrain dont la communauté d'agglomération a la maîtrise, les inconvénients dont fait état la commune de Saint-Rémy-en-Rollat ne sont pas de nature à retirer à ce projet son caractère d'utilité publique ;
6. Considérant que la commune requérante fait encore valoir que le projet critiqué a pour objet de faire échapper les communes de plus de 5 000 habitants à leurs obligations légales en matière d'accueil des gens du voyage en imposant l'implantation d'aires d'accueil sur le territoire de collectivités moins influentes qui ne sont pourtant pas soumises aux mêmes obligations ; qu'alors qu'ainsi qu'il a été dit, les dispositions de la loi susvisée du 5 juillet 2000 autorisent l'établissement public compétent pour déterminer l'implantation d'une aire d'accueil à retenir pour celle-ci un terrain situé sur le territoire de toute commune membre incluse dans le secteur géographique d'implantation prévu par le schéma départemental, le détournement de pouvoir ainsi allégué n'est pas établi ;
7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la commune de Saint-Rémy-en-Rollat n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand, qui n'était pas tenu de répondre à tous les arguments développés devant lui pour écarter les moyens qui lui étaient soumis, a rejeté sa demande dirigée contre l'arrêté préfectoral du 3 décembre 2013 ;
Sur les conclusions relatives au schéma départemental d'accueil des gens du voyage 2012-2018 :
8. Considérant que la commune de Saint-Rémy-en-Rollat demande à la cour "d'abroger le schéma départemental d'accueil des gens du voyage 2012-2018 au vu de son illégalité manifeste et subsidiairement, enjoindre au préfet de l'Allier de procéder à cette abrogation sur le fondement de l'article L. 911-2 du code de justice administrative " ; que les moyens de la requête ne sont cependant dirigés que contre le jugement du tribunal administratif de Clermont-Ferrand du 30 juin 2015 et l'arrêté du préfet de l'Allier du 3 décembre 2013 ; que le présent arrêt, qui confirme le rejet des conclusions de la requérante à fin d'annulation de ce jugement et de cet arrêté, n'implique aucune mesure d'exécution ; que, dans ces conditions, les conclusions susvisées ne peuvent qu'être rejetées ;
Sur les frais d'instance :
9. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la somme que la requérante demande au titre des frais qu'elle a exposés soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas partie perdante dans la présente instance ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de la commune de Saint-Rémy-en-Rollat est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Saint-Rémy-en-Rollat et au ministre du logement et de l'habitat durable.
Copie en sera adressée au préfet de l'Allier.
Délibéré après l'audience du 7 mars 2017, à laquelle siégeaient :
M. Yves Boucher, président de chambre ;
M. Antoine Gille, président-assesseur ;
Mme Véronique Vaccaro-Planchet, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 28 mars 2017.
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N° 15LY03050
mg