Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés respectivement les 20 juillet 2016 et 11 janvier 2017, M. B... A..., représenté par MeD..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 17 mai 2016 en tant que le tribunal administratif de Lyon a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de la décision du 23 juillet 2015 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour ;
2°) d'annuler ce refus de titre de séjour du 23 juillet 2015 ;
3°) d'enjoindre au préfet du Rhône, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour dans le mois suivant la notification de l'arrêt sous astreinte de 100 euros par jour de retard, ou, subsidiairement, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ;
4°) d'enjoindre au préfet, en cas d'annulation du refus de séjour pour illégalité externe, de lui délivrer dans le mois suivant la notification de l'arrêt, une autorisation provisoire de séjour avec autorisation de travail, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
5°) de fixer le délai de réinstruction du dossier à deux mois, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
6°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ou, subsidiairement, en cas d'obtention de l'aide juridictionnelle, le versement à son avocat d'une somme de 1 500 euros en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve qu'il renonce au bénéfice de l'aide juridictionnelle.
Il soutient que :
- le jugement est insuffisamment motivé s'agissant de la réponse à son moyen tiré de la méconnaissance du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le refus de séjour est insuffisamment motivé ;
- le préfet n'a pas procédé à un examen particulier de sa situation ;
- le refus de séjour méconnaît les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation de son état de santé ;
- le refus de titre de séjour méconnaît les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le refus de titre est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile permettant de délivrer une carte de séjour pour des considérations humanitaires ou des motifs exceptionnels ;
- ce refus viole les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- ce refus est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation.
Par un mémoire en défense et un mémoire complémentaire, enregistrés les 1er et 19 décembre 2016, le préfet du Rhône conclut au rejet de la requête et demande à la cour, par voie d'appel incident, d'annuler le jugement du tribunal administratif de Lyon du 17 mai 2016 en tant qu'il lui a enjoint de délivrer à M. A...une autorisation provisoire de séjour.
Il soutient que :
- il s'en rapporte à ses écritures de première instance s'agissant de l'appel de M. A... ;
- concernant son appel incident, c'est à tort que le tribunal lui a enjoint de délivrer une autorisation provisoire de séjour à M. A...sur le fondement de l'article L. 311-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors que les conditions requises n'étaient pas remplies au regard de l'état de santé de l'enfant du requérant.
Par une décision du bureau d'aide juridictionnelle du 29 juin 2016, confirmée par ordonnance du 29 août 2016 du président de la cour administrative d'appel de Lyon, la demande d'aide juridictionnelle de M. A...a été rejetée.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique et le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 pris pour son application ;
- le code de justice administrative ;
Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu, au cours de l'audience publique, le rapport de M. Juan Segado ;
1. Considérant que M.A..., ressortissant du Kosovo né le 18 septembre 1969, est entré en France le 6 janvier 2013 selon ses déclarations, avec sa compagne et leurs deux enfants mineurs ; qu'il a sollicité le bénéfice de l'asile qui lui a été refusé par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 29 mars 2013, confirmée par décision de la cour nationale du droit d'asile du 24 avril 2014 ; qu'il a sollicité ensuite la délivrance d'un titre de séjour en raison de son état de santé ; que, par décisions du 23 juillet 2015 le préfet du Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français, a fixé un délai de départ volontaire de trente jours et a désigné le pays à destination duquel il pourra être éloigné d'office ; que, par un jugement du 17 mai 2016, le tribunal administratif de Lyon a annulé les décisions du préfet du Rhône du 23 juillet 2015 portant obligation pour M. A...de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et désignation du pays de renvoi et a enjoint au préfet de procéder au réexamen de la situation de M. A..., dans un délai de deux mois suivant la notification du jugement en lui délivrant dans l'attente une autorisation provisoire de séjour ; que M. A...relève appel de ce jugement en tant qu'il a rejeté les conclusions de sa demande tendant à l'annulation du refus de titre de séjour ; que, par voie d'appel incident, le préfet du Rhône demande l'annulation de ce même jugement en tant qu'il lui enjoint de délivrer au requérant une autorisation provisoire de séjour ;
Sur l'appel principal de M.A... :
2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés " ;
3. Considérant que le jugement attaqué précise les raisons, de droit et de fait, pour lesquelles le refus de séjour ne méconnaît pas les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et n'est ainsi entaché, sur ce point, d'aucune insuffisance de motivation ;
4. Considérant, en deuxième lieu, que les moyens du requérant selon lesquels le refus de titre de séjour serait insuffisamment motivé, serait entaché d'une erreur de droit en ce que le préfet n'aurait pas procédé à un examen particulier de sa situation, méconnaîtrait le 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant, et serait entaché d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de sa situation personnelle, ont été écartés à bon droit par les premiers juges par des motifs qu'il y a lieu pour la cour d'adopter ;
5. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction alors applicable : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : / (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence (...). " ;
6. Considérant, qu'il ressort des pièces du dossier et notamment des certificats médicaux produits par le requérant, que ce dernier souffre d'un syndrome post-traumatique et d'une insuffisance respiratoire chronique résultant de séquelles tuberculeuses associées à une obstruction bronchique significative nécessitant un suivi tous les quatre à six mois et un traitement médicamenteux à base de broncho-dilatateur et de cortisone associé à une physiothérapie ; que selon l'avis du médecin de l'agence régionale de santé du 8 juillet 2014, l'état de santé de M. A... nécessite une prise en charge médicale d'une durée de deux ans dont le défaut peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sans qu'il existe un traitement approprié dans son pays d'origine ; que, toutefois le préfet du Rhône, qui n'était pas lié par l'avis consultatif du médecin de l'agence régionale de santé, se prévaut de l'ensemble des éléments relatifs aux capacités locales en matière de soins médicaux et de médicaments disponibles au Kosovo, résultant notamment de la liste des médicaments disponibles dans le pays, de différents rapports fournis par l'ambassade de France au Kosovo en date des 11 mars 2009, 22 août 2010 et 6 mai 2011, ainsi que d'un télégramme diplomatique du 18 mars 2013 transmis par l'ambassade de France au Kosovo d'après des éléments communiqués par le ministère de la santé du Kosovo en date du 4 octobre 2013 ; qu'il a en outre produit devant le tribunal un extrait de la liste nationale des médicaments disponibles dans ce pays établi par les autorités locales concernant le traitement médicamenteux suivi par l'intéressé ; que les ordonnances et autres pièces médicales produites par le requérant ne permettent pas de remettre en cause les éléments ainsi exposés par le préfet établissant l'existence d'un traitement approprié à son état dans son pays ; que, dès lors, le préfet n'a pas fait une inexacte application des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ni commis d'erreur d'appréciation en refusant à M. A... un titre de séjour sur le fondement de ces dispositions ;
7. Considérant, en quatrième et dernier lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction applicable : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7 (...) " ;
8. Considérant que M. A...se prévaut de son état de santé et de celui son filsC... ; qu'il ressort des pièces du dossier que son enfant souffre d'un glaucome congénital bilatéral sévère ayant conduit à la perte de son oeil droit nécessitant une prise en charge médicale ; que le tribunal a, par un jugement du 17 mai 2016, confirmé par un arrêt de la cour de ce jour, enjoint au préfet de délivrer à Mme E..., mère de l'enfant, une autorisation provisoire de séjour dont la durée ne saurait être supérieure à six mois, sur le fondement de l'article L. 313-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors qu'un défaut de prise en charge de l'enfant peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité et que les soins requis n'étaient pas disponibles dans son pays ; que la présence de cet enfant et de Mme E...sur le territoire français est liée à l'évolution à l'état de santé du jeune C...ainsi qu'à celle des capacité sanitaires du Kosovo ; qu'à la date de la décision en litige, l'état de santé du jeune C...n'était pas de nature à justifier que lui-même ou ses parents résident durablement en France ; que, dans ces conditions, ni l'état de santé de l'enfant, ni celui du requérant compte tenu de ce qui a été dit au point 6, ne font apparaître un motif humanitaire ou une circonstance exceptionnelle permettant de regarder le refus du préfet de délivrer une carte de séjour temporaire à M. A...comme étant entaché d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation au regard des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande d'annulation du refus de titre de séjour qui lui a été opposé ; que ses conclusions tendant à ce qu'il soit fait injonction à l'administration de lui délivrer, sous astreinte, une carte de séjour ou une autorisation provisoire de séjour avec autorisation de travail, doivent être rejetées par voie de conséquence ;
Sur les conclusions incidentes du préfet :
10. Considérant que le tribunal s'est borné à enjoindre au préfet de réexaminer la situation de M. A... dans un délai de deux mois à compter du jugement et de délivrer à l'intéressé dans cette attente une autorisation provisoire de séjour du fait de l'annulation de l'obligation de quitter le territoire comme entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur la situation personnelle et familiale du requérant ; que, contrairement à ce que soutient le préfet, le tribunal ne lui a pas enjoint de délivrer l'autorisation provisoire de séjour sur le fondement de l'article L. 311-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile au motif que l'intéressé en remplirait les conditions eu égard à l'état de santé de son fils ; que, par suite, il ne saurait soutenir, à titre incident, que c'est à tort que le tribunal lui a enjoint de délivrer une autorisation provisoire de séjour sur un tel fondement ;
Sur les frais d'instance :
11. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions que le requérant présente sur leur fondement à l'encontre de l'Etat, qui n'est pas partie perdante dans la présente instance ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. A...et les conclusions incidentes du préfet du Rhône sont rejetées.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...A...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet du Rhône.
Délibéré après l'audience du 7 mars 2017 à laquelle siégeaient :
M. Yves Boucher, président de chambre,
M. Antoine Gille, président-assesseur,
M. Juan Segado, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 28 mars 2017.
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N° 16LY02531
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