Procédure devant la cour
       Par une requête enregistrée le 5 novembre 2019, M. G..., représenté par Me B..., demande à la cour :
       1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 26 juin 2019 ;
       2°) d'annuler la décision du 6 février 2018 par laquelle le directeur de l'Office français de l'immigration et de l'intégration a suspendu le bénéfice des conditions matérielles d'accueil qui lui étaient assurées en sa qualité de demandeur d'asile ;
       3°) d'enjoindre au directeur de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, à titre principal, de lui accorder le bénéfice des conditions matérielles d'accueil et de lui verser l'allocation pour demandeur d'asile dans un délai de trois jours à compter de la notification de l'arrêt, ou, à défaut, de réexaminer sa situation dans le délai de cinq jours à compter de la notification de l'arrêt, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
       4°) de mettre à la charge de l'Etat le paiement à son conseil de la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, à charge pour ce dernier de renoncer au bénéfice de l'aide juridictionnelle.
       Il soutient que :
       - la décision attaquée est insuffisamment motivée ;
       - le directeur de l'Office français de l'immigration et de l'intégration n'a pas procédé à un examen particulier de sa situation ;
       - c'est à tort qu'il a été regardé comme étant en fuite, dès lors qu'il n'a jamais été convoqué en vue de son transfert vers l'Italie, et que s'il n'a pas respecté l'obligation de présentation à laquelle il était astreint du fait de son assignation à résidence, cette absence est uniquement imputable à une hospitalisation ;
       - la décision attaquée est entachée d'erreur manifeste d'appréciation, compte tenu de son état de vulnérabilité.
       Par un mémoire, enregistré le 9 octobre 2020, le directeur de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, représenté par Me E..., conclut au rejet de la requête.
       Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.
       La requête a été communiquée au ministre de l'intérieur et au préfet du Rhône, qui n'ont pas présenté d'observations.
       M. G... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 10 septembre 2019.
       Vu les autres pièces du dossier ;
       Vu :
       - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
       - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
       - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
       - le code de justice administrative ;
       Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
       Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
       - le rapport de Mme C..., présidente-assesseure,
       - les conclusions de Mme H..., rapporteure publique,
       - et les observations Me B..., représentant M. G... ; 
       Considérant ce qui suit :
       1. M. G..., ressortissant guinéen né le 12 mars 1983, a sollicité son admission au séjour le 22 mai 2017 en qualité de demandeur d'asile. Ayant constaté, au vu du résultat du relevé de ses empreintes décadactylaires, que l'intéressé avait été interpellé en Italie le 23 septembre 2016 pour franchissement irrégulier des frontières, le préfet du Rhône a, par un arrêté du 26 septembre 2017, décidé son transfert aux autorités italiennes responsables de l'examen de sa demande d'asile. Par un arrêté du 23 octobre 2017, le préfet a prononcé à son encontre une assignation à résidence, d'une durée maximale de quarante-cinq jours, assortie d'une obligation de présentation bihebdomadaire aux services de police. M. G... n'ayant pas respecté cette obligation de présentation, le préfet du Rhône a considéré qu'il était en fuite et a prolongé le délai de transfert jusqu'au 13 février 2019. Par une lettre du 13 décembre 2017, le directeur de l'Office français de l'immigration et de l'intégration a informé M. G... de son intention de suspendre les conditions matérielles d'accueil qui lui avaient été accordées en sa qualité de demandeur d'asile, au motif qu'il n'avait pas respecté l'obligation de se présenter aux services de police. En dépit des observations formulées par l'intéressé le 9 janvier 2018, le directeur de l'office a décidé, le 6 février 2018, de suspendre les conditions matérielles d'accueil en application de l'article L. 744-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. M. G... relève appel du jugement du 12 juin 2019 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision.
       2. Aux termes de l'article L. 744-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa version alors applicable : " Le bénéfice des conditions matérielles d'accueil peut être : 1° Suspendu si, sans motif légitime, le demandeur d'asile a abandonné son lieu d'hébergement déterminé en application de l'article L. 744-7, n'a pas respecté l'obligation de se présenter aux autorités, n'a pas répondu aux demandes d'informations ou ne s'est pas rendu aux entretiens personnels concernant la procédure d'asile (...). La décision de suspension, de retrait ou de refus des conditions matérielles d'accueil est écrite et motivée. Elle prend en compte la vulnérabilité du demandeur. La décision est prise après que l'intéressé a été mis en mesure de présenter ses observations écrites dans les délais impartis. ". Et aux termes de l'article D. 744-35 du même code, dans sa version alors applicable : " Le versement de l'allocation peut être suspendu lorsqu'un bénéficiaire : (...) 2° Sans motif légitime, n'a pas respecté l'obligation de se présenter aux autorités, n'a pas répondu aux demandes d'information ou ne s'est pas rendu aux entretiens personnels concernant la procédure d'asile. ".
       3. En premier lieu, il résulte de l'instruction que la décision du 6 février 2018 portant suspension des conditions matérielles d'accueil de M. G... vise les articles L. 744-8 et D. 744-35 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Après avoir rappelé que l'intéressé avait présenté une demande d'asile et qu'il avait accepté les conditions matérielles d'accueil proposées par l'Office, cette décision indique que, constatant qu'il ne s'était pas présenté aux services de police, le préfet du Rhône l'avait déclaré en fuite le 21 novembre 2017. Par suite, et alors même qu'elle ne fait pas mention des dates auxquelles M. G... a manqué à son obligation de présentation aux service de police, cette décision, qui comporte les considérations de fait et de droit sur lesquelles elle se fonde, est suffisamment motivée.
       4. En deuxième lieu, il ne ressort d'aucune des pièces du dossier que le directeur de l'Office français de l'immigration et de l'intégration n'aurait pas procédé à un examen particulier de la situation de M. G... avant de prendre la décision attaquée.
       5. En troisième lieu, M. G... fait valoir qu'il ne satisfait pas aux conditions prévues par l'article L. 744-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile permettant la suspension des conditions matérielles d'accueil. Il résulte toutefois de l'instruction, et, notamment, des termes mêmes de la décision attaquée ainsi que de la lettre de l'Office français de l'immigration et de l'intégration informant l'intéressé de son intention de suspendre ses conditions matérielles d'accueil, que, pour prendre la décision attaquée, le directeur de l'Office s'est fondé sur la circonstance que M. G... ne s'était pas présenté aux services de police dans le cadre de son assignation à résidence. Il est constant que le requérant n'a jamais satisfait à cette obligation qui lui a été faite par l'arrêté du 23 octobre 2017 portant assignation à résidence, lequel lui a été notifié en mains propres le même jour. Si M. G... fait valoir qu'il a subi des opérations chirurgicales aux deux yeux, qu'il a été hospitalisé du 18 octobre 2017 au 27 février 2018 et qu'il en a averti le préfet du Rhône par un courrier du 25 octobre 2017, le certificat établi par la responsable du pôle éducatif et social de la Villa d'Hestia, structure assurant un service de halte soins-santé pour les personnes en situation de précarité dont l'état de santé ne justifie pas l'hospitalisation, qui indique que l'intéressé a été hébergé de façon temporaire pour la durée des soins à compter du 18 octobre 2017, ne permet pas, dans les termes où il est rédigé, de justifier de l'impossibilité pour M. G... de respecter son obligation de présentation aux autorités de police à compter de la notification, le 23 octobre 2017, de l'arrêté portant assignation à résidence, lequel a, au demeurant, été remis en mains propres au requérant à cette même date. En outre, le certificat médical, établi par un médecin ophtalmologiste le 26 octobre 2017, qui indique que l'intéressé a subi une intervention chirurgicale le 19 octobre 2017 et qu'il doit subir une nouvelle intervention le 16 novembre 2017, se borne à faire état de soins post-opératoires d'une durée d'un mois, nécessitant l'instillation de collyres plusieurs fois par jour et la réalisation de contrôles post-opératoires une semaine et un mois après chaque intervention, sans faire état d'aucune impossibilité pour le requérant de se déplacer. Si le M. G... produit un second certificat, du même médecin daté du 16 novembre 2017 indiquant qu'il a été opéré le 16 novembre 2017 et qu'au vu du risque de complications, son état de santé a nécessité une hospitalisation, un tel certificat ne saurait justifier la défaillance de M. G... à ses obligations de présentation entre le 23 octobre 2017, date de la notification de l'arrêté portant assignation à résidence, et le 16 novembre 2017. Enfin, la circonstance qu'il ait adressé au préfet du Rhône un courrier le 25 octobre 2017 mentionnant qu'il avait subi une intervention chirurgicale ne le dispensait pas, à elle seule, et à défaut de motif justifiant sa défaillance, de se présenter aux services de police. Dans ces conditions, M. G... n'est pas fondé à soutenir qu'un motif légitime justifie qu'il n'ait pas pu satisfaire à son obligation de présentation aux service de police. Par suite, le requérant satisfaisait aux conditions prévues au 1° de l'article L. 744-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, permettant au directeur de l'Office français de l'immigration et de l'intégration de suspendre les conditions matérielles d'accueil si l'intéressé n'a pas respecté l'obligation de se présenter aux autorités.
       6. En dernier lieu, M. G... fait état des interventions chirurgicales qu'il a subies aux deux yeux. Toutefois, il ne résulte pas de l'instruction que le requérant, qui est âgé de trente-sept ans, célibataire et sans enfant, et qui n'apporte aucune précision, notamment, sur les suites opératoires éventuelles ou les conséquences sur son état de santé de ces interventions, serait dans une situation de vulnérabilité particulière, ni que la décision attaquée serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.
       7. Il résulte de ce qui précède que M. G... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et celles présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. G... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. J..., au ministre de l'intérieur et au directeur de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. Copie en sera adressée au préfet du Rhône.
Délibéré après l'audience du 15 octobre 2020, à laquelle siégeaient :
M. Pruvost, président,
Mme C..., présidente-assesseure,
Mme I..., première conseillère.
Lu en audience publique, le 12 novembre 2020.
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N° 19LY04066
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