Par une requête, enregistrée le 17 janvier 2020, M. et Mme E..., représentés par Me F..., demandent à la cour
1°) d'annuler ce jugement du magistrat désigné du tribunal administratif de Grenoble du 31 octobre 2019 ;
2°) d'annuler les arrêtés du 26 août 2019 par lesquels le préfet de la Savoie les a obligés à quitter le territoire français dans le délai de trente jours, a fixé le pays de destination et a prononcé à leur encontre une interdiction de retour sur le territoire d'une durée d'un an ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Savoie, à titre principal, de leur délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", dans le délai de trente jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir, subsidiairement, de réexaminer leur situation dans le même délai et, dans l'attente, de leur délivrer une autorisation provisoire de séjour dans un délai de deux jours à compter de la notification de l'arrêt ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat et au bénéfice de leur conseil une somme de 1 200 euros au titre des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.
Ils soutiennent que :
Sur l'ensemble des décisions contestées :
- les dispositions de l'article L. 743-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile méconnaissent le droit à un recours effectif prévu par l'article 13 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et le droit à se maintenir sur le territoire reconnu aux demandeurs d'asile par l'article 46 de la directive n° 2013/32/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;
Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :
- la décision attaquée est insuffisamment motivée ;
- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle méconnaît le 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;
Sur la décision fixant le pays de destination :
- la décision attaquée se fonde sur une obligation de quitter le territoire français illégale ;
- elle méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Sur la décision prescrivant une interdiction de retour sur le territoire français :
- la décision attaquée se fonde sur une obligation de quitter le territoire français illégale ;
- elle est insuffisamment motivée ;
- le préfet n'a pas procédé à un examen particulier de leur situation ;
- la décision attaquée méconnaît le III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'ils n'ont fait l'objet d'aucune mesure d'éloignement préalable et qu'ils ne constituent pas une menace pour l'ordre public ;
- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;
- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par un mémoire enregistré le 3 septembre 2020, le préfet de la Savoie conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.
M. et Mme E... ont été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 11 décembre 2019.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la directive n° 2013/32/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative ;
Le président de la formation de jugement ayant dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique, le rapport de Mme D..., présidente-assesseure ;
Considérant ce qui suit :
1. M. et Mme E..., ressortissants albanais nés respectivement le 27 février 1984 et le 13 septembre 1987, sont entrés en France le 28 octobre 2018, selon leurs déclarations. Le 28 novembre 2018, ils ont sollicité la reconnaissance du statut de réfugié. Leur demande, traitée selon la procédure accélérée prévue par le 1° du I de l'article L. 723-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, a été rejetée par des décisions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 31 mai 2019, confirmées le 26 septembre 2019 par la Cour nationale du droit d'asile. Par deux arrêtés du 26 août 2019, le préfet de la Savoie leur a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de destination et a prononcé à leur encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an. M. et Mme E... relèvent appel du jugement du 31 octobre 2019 par lequel le tribunal administratif de Grenoble, après les avoir jointes, a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation de ces arrêtés.
Sur les décisions portant obligation de quitter le territoire français :
2. En premier lieu, les arrêtés du 26 août 2019 visent l'article L. 511-1 et le 7° de l'article L. 743-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et indiquent que M. et Mme E... sont entrés très récemment sur le territoire national, que leurs demandes d'asile, traitées selon la procédure accélérée dès lors qu'ils sont originaires d'un pays d'origine sûr, ont été rejetées, qu'ils n'ont dès lors plus le droit de se maintenir en France et qu'ils font tous les deux l'objet d'une mesure d'éloignement. Par suite ces décisions, qui mentionnent les circonstances de droit et de fait qui les fondent, sont suffisamment motivées.
3. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. _ L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : / (...) 6° Si la reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire a été définitivement refusé à l'étranger ou si l'étranger ne bénéficie plus du droit de se maintenir sur le territoire français en application des articles L. 743-1 et L. 743-2, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité. (...) ". Aux termes de l'article L. 723-2 du même code : " I. L'office statue en procédure accélérée lorsque : / 1° Le demandeur provient d'un pays considéré comme un pays d'origine sûr en application de l'article L. 722-1 (...) ". Aux termes de l'article L. 743-2 de ce code : " Par dérogation à l'article L. 743-1, sous réserve du respect des stipulations de l'article 33 de la convention relative au statut des réfugiés, signée à Genève le 28 juillet 1951, et de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, adoptée à Rome le 4 novembre 1950, le droit de se maintenir sur le territoire français prend fin et l'attestation de demande d'asile peut être refusée, retirée ou son renouvellement refusé lorsque : / (...) 7° L'office a pris une décision de rejet dans les cas prévus au I et au 5° du III de l'article L. 723-2. (...) ". Par une délibération du 9 octobre 2015, le conseil d'administration de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides a inclus l'Albanie dans la liste des pays d'origine sûrs.
4. M. et Mme E... soutiennent que les dispositions de l'article L. 743-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile méconnaissent le droit à se maintenir sur le territoire reconnu aux demandeurs d'asile par l'article 46 de la directive n° 2013/32/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 relative à des procédures communes pour l'octroi et le retrait de la protection internationale ainsi que le droit à un recours effectif prévu par l'article 13 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
5. Aux termes du paragraphe 5 de l'article 46 de la directive n° 2013/32/UE du 26 juin 2013 : " Sans préjudice du paragraphe 6, les États membres autorisent les demandeurs à rester sur leur territoire jusqu'à l'expiration du délai prévu pour l'exercice de leur droit à un recours effectif et, si ce droit a été exercé dans le délai prévu, dans l'attente de l'issue du recours ". Aux termes du paragraphe 6 du même article 46 de la directive : " En cas de décision : / (...) a) considérant une demande comme manifestement infondée conformément à l'article 32, paragraphe 2, ou infondée après examen conformément à l'article 31, paragraphe 8, à l'exception des cas où les décisions sont fondées sur les circonstances visées à l'article 31, paragraphe 8, point h) / (...) une juridiction est compétente pour décider si le demandeur peut rester sur le territoire de l'État membre, soit à la demande du demandeur ou de sa propre initiative, si cette décision a pour conséquence de mettre un terme au droit du demandeur de rester dans l'État membre et lorsque, dans ces cas, le droit de rester dans l'État membre dans l'attente de l'issue du recours n'est pas prévu par le droit national. ". Enfin, aux termes du paragraphe 8 de l'article 31 de cette directive : " Les États membres peuvent décider, dans le respect des principes de base et des garanties fondamentales visés au chapitre II, d'accélérer une procédure d'examen et/ou de mener cette procédure à la frontière ou dans les zones de transit conformément à l'article 43 lorsque: / (...) b) le demandeur provient d'un pays d'origine sûr au sens de la présente directive (...) ".
6. Les dispositions du 7° de l'article L. 743-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui font dérogation au principe fixé à l'article L. 743-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, selon lequel le demandeur d'asile bénéficie du droit de se maintenir sur le territoire français jusqu'à la notification de la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou, si un recours a été formé, jusqu'à la notification de la décision de la Cour nationale du droit d'asile en cas de rejet en procédure accélérée par l'Office d'une demande émanant d'une personne provenant d'un pays sûr ne privent pas le demandeur de la possibilité d'exercer un recours contre la décision de rejet de l'Office. De plus, il résulte des dispositions combinées du 7° de l'article L. 743-2 du code l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, du 6° de l'article L. 511-1, du I bis de l'article L. 512-1 et de l'article L. 512-3 du même code qu'un ressortissant étranger issu d'un pays d'origine sûr dont la demande d'asile a été rejetée selon la procédure accélérée, s'il ne bénéficie pas du droit de se maintenir sur le territoire français jusqu'à ce que la Cour nationale du droit d'asile ait statué sur son recours, peut contester l'obligation de quitter le territoire français prise à son encontre. Ce recours présente un caractère suspensif et le juge saisi a la possibilité, le cas échéant, en application de l'article L. 743-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, de suspendre l'exécution de la mesure d'éloignement et de permettre, ainsi, au ressortissant étranger de demeurer sur le territoire français jusqu'à ce que la Cour nationale du droit d'asile statue sur son recours. Par suite, M. et Mme E... ne sont pas fondés à soutenir que les dispositions du 7° de l'article L. 743-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, en tant qu'elles limitent leur droit à se maintenir sur le territoire français, sont incompatibles avec les objectifs définis par l'article 46 de la directive n° 2013/32/UE du 26 juin 2013. Par ailleurs, eu égard aux garanties procédurales et juridictionnelles qui permettent notamment aux intéressés de faire valoir les risques qu'ils estiment encourir dans leur pays d'origine, les requérants, qui ont d'ailleurs introduit un recours suspensif à l'encontre des décisions leur faisant obligation de quitter le territoire, ne sont pas fondés à soutenir que les dispositions en cause méconnaissent le droit à un recours effectif garanti notamment par l'article 13 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
7. En dernier lieu, M. et Mme E... font valoir qu'ils ont été menacés en Albanie et que leur fils H..., né en France le 1er août 2019, souffre d'une luxation congénitale des deux genoux. Toutefois, les requérants, dont la demande d'asile a, au demeurant, été rejetée tant par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides que par la Cour nationale du droit d'asile, n'apportent aucun élément probant permettant d'établir qu'ils seraient effectivement exposés à des risques de traitements inhumains ou dégradants en cas de retour dans leur pays d'origine. Par ailleurs, si le certificat médical produit par M. et Mme E..., établi le 27 août 2019 par un chirurgien orthopédiste du centre hospitalier universitaire Grenoble Alpes, mentionne que leur fils doit porter une culotte d'abduction pendant deux mois, ce certificat indique également que la prise en charge antérieure de l'enfant a permis une évolution satisfaisante de son état de santé. Ni ce certificat, ni les autres pièces produites par les intéressés, consistant en une prescription médicale pour une culotte d'abduction et un certificat établi par un médecin généraliste, n'établissent la gravité de la pathologie ni l'impossibilité pour le jeune H... de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans son pays d'origine, ni encore son incapacité à voyager sans risque. En outre les requérants, qui n'étaient présents en France que depuis dix mois à la date des arrêtés attaqués, ne sont pas dépourvus d'attaches privées et familiales en Albanie, pays dans lequel ils ont vécu jusqu'à l'âge de trente-cinq et trente-et-un ans respectivement. Rien ne fait obstacle à ce que M. et Mme E... et leurs enfants mineurs reconstituent la cellule familiale dans leur pays d'origine, dont tous les membres ont la nationalité et où leurs enfants pourront être scolarisés. Dans les circonstances de l'espèce, le préfet de la Savoie, en décidant l'éloignement de M. et Mme E..., n'a pas porté au droit des intéressés au respect de leur vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels ces décisions ont été prises. Il s'ensuit que le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut être accueilli. Il n'est pas davantage établi que le préfet aurait méconnu les stipulations du 1. de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ni commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de ses décisions sur la situation personnelle et familiale des requérants.
Sur les décisions fixant le pays de destination :
8. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de ce que les décisions fixant le pays de destination devraient être annulées en conséquence de l'illégalité des décisions portant obligation de quitter le territoire français ne peut qu'être écarté.
9. En second lieu, si M. et Mme E... soutiennent qu'ils risquent de subir des traitements inhumains et dégradants en cas de retour en Albanie, ils ne produisent aucun élément précis ou probant à l'appui de cette affirmation alors, au demeurant, que tant l'Office français de protection des réfugiés et apatrides que la Cour nationale du droit d'asile ont refusé de leur reconnaître le statut de réfugié. Le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut ainsi qu'être écarté.
Sur les décisions portant interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an :
10. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de ce que les décisions portant interdiction de retour sur le territoire français devraient être annulées en conséquence de l'illégalité des décisions portant obligation de quitter le territoire français ne peut qu'être écarté.
11. En deuxième lieu, aux termes du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative, par une décision motivée, assortit l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français, d'une durée maximale de trois ans à compter de sa notification, lorsque aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger ou lorsque l'étranger n'a pas satisfait à cette obligation dans le délai imparti. Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative ne prononce pas d'interdiction de retour. (...) Lorsqu'elle ne se trouve pas en présence du cas prévu au premier alinéa du présent III, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, assortir l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée maximale de deux ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français. / La durée de l'interdiction de retour mentionnée au premier alinéa du présent III ainsi que le prononcé et la durée de l'interdiction de retour mentionnée au quatrième alinéa sont décidés par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français (...) ".
12. Il résulte de ces dispositions que l'autorité compétente qui prend une décision d'interdiction de retour doit indiquer dans quel cas susceptible de justifier une telle mesure se trouve l'étranger. Elle doit, par ailleurs, faire état des éléments de la situation de la personne concernée au vu desquels elle a arrêté, dans son principe et dans sa durée, sa décision, eu égard notamment à la durée de la présence de l'étranger sur le territoire français, à la nature et à l'ancienneté de ses liens avec la France et, le cas échéant, aux précédentes mesures d'éloignement dont il a fait l'objet. Elle doit aussi, si elle estime que figure au nombre des motifs qui justifient sa décision une menace pour l'ordre public, indiquer les raisons pour lesquelles la présence de l'intéressé sur le territoire français doit, selon elle, être regardée comme une telle menace. En revanche, si, après prise en compte de ce critère, elle ne retient pas cette circonstance au nombre des motifs de sa décision, elle n'est pas tenue, à peine d'irrégularité, de le préciser expressément.
13. Il ressort des pièces du dossier que, pour justifier l'interdiction de retour sur le territoire français d'un an faite à M. et Mme E..., le préfet de la Savoie, après avoir visé le quatrième alinéa du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, a indiqué que les requérants, qui font tous les deux l'objet d'une mesure d'éloignement, sont entrés très récemment en France, qu'ils ne justifient pas y posséder de liens stables et intenses et qu'ils pourront reconstituer leur cellule familiale avec leurs deux enfants en Albanie. Dans ces conditions, et alors que l'autorité administrative n'était pas tenue de préciser davantage le parcours des intéressés, ces décisions sont suffisamment motivées en droit et en fait. Par suite, le moyen tiré du défaut de motivation ne peut qu'être écarté.
14. En troisième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de la Savoie ne se serait pas livré à un examen particulier de la situation de M. et Mme E.... Par suite, le moyen tiré du défaut d'un tel examen ne peut être accueilli.
15. En quatrième lieu, le préfet de la Savoie, qui a pris en considération la durée de la présence sur le territoire français de M. et Mme E... ainsi que la nature et l'ancienneté de leurs liens avec la France ainsi qu'il résulte de ce qui a été dit au point 13, n'a pas inexactement appliqué les dispositions précitées du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en prenant à leur encontre une mesure d'interdiction de retour en France d'une durée d'un an, alors même qu'ils ne se sont pas soustraits à une précédente mesure d'éloignement et que leur présence en France ne représentait pas une menace pour l'ordre public.
16. En dernier lieu, pour les mêmes motifs que ceux indiqués au point 7 ci-dessus, les moyens tirés de ce que les décisions prononçant une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an méconnaissent l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de ce qu'elles sont entachées d'une erreur manifeste d'appréciation de leurs conséquences sur la situation personnelle des requérants doivent être écartés.
17. Il résulte de ce qui précède que M. et Mme E... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné du tribunal administratif de Grenoble a rejeté leurs demandes. Par voie de conséquence, leurs conclusions aux fins d'injonction et celles présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. et Mme E... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... E..., à Mme G... C... épouse E... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de la Savoie.
Délibéré après l'audience du 15 octobre 2020, à laquelle siégeaient :
M. Pruvost, président de chambre,
Mme D..., présidente-assesseure,
Mme K..., première conseillère.
Lu en audience publique le 12 novembre 2020.
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N° 20LY00264
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