Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 26 juillet 2018, la SARL Garnier, représentée par Me D..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 12 juin 2018 du tribunal administratif de Dijon ;
2°) de prononcer la décharge de ces impositions et pénalités ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
La SARL Garnier soutient que :
- l'administration a fondé la remise en cause du bénéfice du crédit d'impôt recherche sur les conclusions du représentant du ministère de la recherche retenant une appréciation manifestement erronée s'agissant de projets qui relevaient d'opérations de recherche appliquée et de développement expérimental, au sens de l'article 49 septies F de l'annexe III au code général des impôts, éligibles au crédit impôt recherche ;
- elle est fondée à se prévaloir de la documentation administrative référencée BOI-BI-RICI-10-10-10-20-n° 20 ;
- l'expertise et la contre-expertise ont été réalisées par la même personne alors que les projets relèvent d'une grande variété de domaines techniques de sorte que la contre-expertise, menée par l'auteur de la première, ne peut être regardée comme un complément d'expertise.
Par un mémoire en défense, enregistré le 7 février 2019, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Le ministre expose qu'aucun des moyens soulevés par la société requérante n'est fondé.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative ;
Vu la décision par laquelle le président de la cour a désigné Mme C... pour exercer temporairement les fonctions de rapporteure publique en application des articles R. 222-24, 2nd alinéa et R. 222-32 du code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Dominique Pruvost, président rapporteur,
- et les conclusions de Mme E... C..., rapporteure publique,
Considérant ce qui suit :
1. La SARL Garnier, qui a pour activités l'ingénierie, la formation, le conseil en technique et analyse de laboratoire, le développement et la commercialisation de techniques et de produits pour analyses, l'étude et la conception de matériel électronique, l'automatisation, et l'élaboration de projets industriels, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 1er avril 2009 au 31 mars 2012. A l'issue de ce contrôle, le vérificateur a remis en cause les dépenses déclarées par la société au titre du crédit d'impôt pour les dépenses de recherche de l'article 244 quater B du code général des impôts en se fondant sur un rapport rendu le 25 juillet 2013 par l'expert désigné par la direction régionale de la recherche et de la technologie concluant à l'inéligibilité des quatre projets déclarés au titre de l'année 2010 et des neuf projets déclarés au titre de 2011. Les observations présentées par la SARL Garnier ont conduit l'administration à demander la réalisation d'une contre-expertise afin d'examiner les nouveaux documents produits. La direction régionale de la recherche et de la technologie a désigné le même expert qui a estimé que ces documents ne remettaient pas en cause ses conclusions initiales. Par un jugement du 12 juin 2018, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande de décharge des compléments d'impôt sur les sociétés auxquels elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2011 et 2012 du fait de la remise en cause du crédit d'impôt recherche. Par la présente requête, la SARL Garnier relève appel de ce jugement.
2. Aux termes de l'article 244 quater B du code général des impôts, dans sa rédaction applicable : " Les entreprises industrielles et commerciales ou agricoles imposées d'après leur bénéfice réel (...) peuvent bénéficier d'un crédit d'impôt au titre des dépenses de recherche qu'elles exposent au cours de l'année. (...) ". En vertu de l'article 49 septies F de l'annexe III au même code, sont considérées comme opérations de recherche scientifique et technique, pour l'application des dispositions de l'article 244 quater B du même code relatives au crédit d'impôt pour dépenses de recherche, celles des " opérations de développement expérimental " qui sont " effectuées, au moyen de prototypes ou d'installations pilotes, dans le but de réunir toutes les informations nécessaires pour fournir les éléments techniques des décisions, en vue de la production de nouveaux matériaux, dispositifs, produits, procédés, systèmes, services, ou en vue de leur amélioration substantielle ". En outre, par amélioration substantielle, on entend les " modifications qui ne découlent pas d'une simple utilisation de l'état des techniques existantes et qui présentent un caractère de nouveauté ".
3. Il résulte de l'instruction que la SARL Garnier a déclaré, au titre du crédit d'impôt pour les dépenses de recherche de l'année 2010, quatre projets relatifs au développement d'espaces de test et de confinement sensoriel en vue de la réalisation d'analyses sensorielles, au développement d'un dispositif de lecture de document et de badge pour les cabines de péage, au développement de microcapteurs susceptibles d'être utilisés pour la détection et la mesure d'éléments caractéristiques pour le secteur agro-alimentaire et à l'adaptation à des véhicules industriels d'un brevet portant sur les mélanges stoechiométriques et gazeux air-essence avant admission dans les cylindres d'un moteur à explosion. Au titre de l'année 2011, elle a déclaré neuf projets au titre de travaux relatifs au dessin et la conception d'un microcapteur, à la conception d'un outil de mesure du pH dans les fromages sans altération ni destruction des produits, à l'évaluation de l'historique thermique du lait et ses conséquences sur ses aptitudes fromagères à l'aide de moyens de mesure dédiés, à l'aide à la contribution scientifique et technique aux travaux d'un doctorant, au développement d'espaces de test et de confinement sensoriel en vue de la réalisation d'analyses sensorielles, à la mise au point d'une interface d'acquisition multi-voies et au développement d'une technologie innovante de comptage et de pesage de véhicules roulants basée sur les fibres optiques à réseaux de Bragg.
4. La SARL Garnier reprend en appel les moyens invoqués en première instance tirés de ce que c'est à tort que l'administration a estimé que ses travaux n'étaient pas éligibles au crédit impôt recherche, d'une part, et de ce qu'ils relèvent des paragraphes 20, 40, 60 et 70 de la documentation administrative référencée BOI-BIC-RICI-10-10-20 du 12 septembre 2012, invoqués sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, d'autre part, sans émettre aucune critique à l'encontre du jugement attaqué, ni apporter aucun élément nouveau en appel. Il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus par le tribunal administratif de Dijon.
5. Si la société requérante soutient en outre que la contre-expertise est " dénuée de toute pertinence " au motif qu'elle a été " réalisée par la même personne que la première expertise ", elle n'invoque la méconnaissance d'aucun texte ni d'aucune règle de droit de sorte que ce moyen doit être écarté comme dépourvu des précisions suffisantes pour en apprécier le bien-fondé.
6. Il résulte de ce qui précède que la SARL Garnier n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.
DECIDE :
Article 1er : La requête de la SARL Garnier est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL Garnier et au ministre de l'action et des comptes publics.
Délibéré après l'audience du 26 novembre 2019, à laquelle siégeaient :
M. Pruvost, président de chambre,
Mme B..., présidente-assesseure,
Mme A..., première conseillère.
Lu en audience publique le 17 décembre 2019.
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N° 18LY02904
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