Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 6 août 2014, la SARL Symonds, représentée par Me A..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 13 juin 2014 ;
2°) de la décharger de ces impositions et des pénalités y afférentes, pour un montant total de 64 729 euros ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
la SARL Symonds soutient que :
Sur la régularité du jugement :
- le tribunal administratif a éludé la question de l'absence de notification par l'administration de son intention de reprendre la procédure après dégrèvement.
Sur l'irrégularité de la procédure :
- les rappels de taxe sur la valeur ajoutée à régulariser figurant au passif de ses bilans ne sont pas motivés ni dans leur mode de détermination ni dans leur répartition sur l'ensemble de la période vérifiée ;
- l'administration a méconnu les droits de la défense en ne répondant pas à sa demande, formulée en réponse à la proposition de rectification, de communication de ses fichiers intermédiaires utilisés en vue de recenser les achats vendus et de déterminer le chiffre d'affaires reconstitué de sorte qu'elle s'est trouvée dans l'impossibilité de vérifier les calculs effectués par le vérificateur et d'engager avec l'administration un dialogue contradictoire ;
- la réponse aux observations du contribuable n'est pas signée ;
- l'administration n'établit pas l'avoir informée de son intention de reprendre la procédure après dégrèvement par une indication donnée dans un mémoire d'une autre instance ;
- le recours hiérarchique et le recours à l'interlocuteur départemental n'ont pas constitué des garanties effectives et n'ont servi qu'à régulariser la procédure ;
- elle n'a pas bénéficié d'un recours effectif car si l'administration a dégrevé ses impositions initiales, elle n'a pas dégrevé celles de ses associés qui s'étaient désignés comme étant bénéficiaires pour éviter l'amende de 100 % ;
- l'avis de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires est insuffisamment motivé en ce qui concerne le bien-fondé des prix appliqués par le vérificateur ; la validation des tarifs par la commission départementale va au-delà de son domaine de compétence ; elle n'a pas rendu un avis sur des impositions qui correspondent à celle qui a été notifiée.
Sur le caractère non-fondé des impositions :
- l'administration n'établit pas l'existence de graves irrégularités comptables de nature à justifier le rejet de sa comptabilité ; les griefs portés à la comptabilité ne sont pas aussi patents d'autant que les dispositions du 3° de l'article 286 du code général des impôts autorisent l'inscription globale en comptabilité des recettes quotidiennes d'un montant inférieur à 76 euros, pour les ventes au détail ;
- la méthode de reconstitution du chiffre d'affaires est radicalement viciée ; le vérificateur n'a pas tenu compte des conditions réelles d'exercice de son activité, il a procédé à une globalisation arbitraire des achats, il a écarté les tarifs pratiqués pour appliquer ceux de 2009, période non vérifiée, en les corrigeant par l'indice du coût de la construction et n'a pas pris en compte ses hausses de prix successives, a sous estimé l'incidence des " happy hours " , des pertes et des offerts et n'a pas tenu compte des boissons affectées à l'activité para-hôtelière ;
- les rappels de taxe sur la valeur ajoutée relatifs au solde créditeur de ses comptes " taxe sur la valeur ajoutée à régulariser " figurant au passif de son bilan ne sont pas fondés ; ces rappels ne résultent pas forcément d'une insuffisance déclarative, ne correspondent pas forcément à de la taxe sur la valeur ajoutée due au titre de la période concernée, ils ne visent qu'à éviter de faire apparaître une taxe sur la valeur ajoutée prescrite et comportent des doubles emplois.
Sur les pénalités :
- l'application de majorations pour manquement délibéré n'est pas fondée.
Par un mémoire en défense, enregistré le 6 février 2015, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Le ministre des finances et des comptes publics soutient que :
Sur la régularité de la procédure :
- le moyen tiré de ce que l'administration n'aurait pas informé le contribuable de son intention de reprendre la procédure après le dégrèvement manque en fait ;
- la société requérante n'est pas fondée à soutenir que la procédure de recours hiérarchique et d'interlocution départementale n'est pas régulière au motif que ces recours auraient été privés d'effectivité ; qu'au demeurant, l'administration n'était pas tenue de reprendre la procédure dès lors que la société requérante n'a formulé qu'une demande conditionnelle de saisine du supérieur hiérarchique du vérificateur et de l'interlocuteur départemental ;
- le moyen tiré de l'absence de signature de la réponse aux observations du contribuable manque en fait.
Sur le bien-fondé des impositions :
- le rejet de la comptabilité est fondé car la comptabilité de la société Symonds comportait de graves irrégularités lui ôtant toute valeur probante ;
- la charge de la preuve du caractère exagéré des impositions litigieuses incombe à la société requérante en application de l'article L. 192 du livre des procédures fiscales dès lors qu'elles ont été établies conformément à l'avis de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires ;
- la société requérante n'établit pas que la reconstitution de ses recettes ne tient pas compte des conditions réelles d'exercice de son activité ;
- elle n'établit ni que la méthode de reconstitution de ses recettes n'était pas adaptée à son activité ni que les impositions en résultant étaient exagérées ;
- les rappels relatifs à la taxe sur la valeur ajoutée figurant au passif correspondent aux écritures comptables de la société soit aux soldes créditeurs du compte " taxe sur la valeur ajoutée à régulariser " des exercices clos en 2006 et 2007 et aux écritures de régularisation effectuées au titre des exercices clos en 2007 et 2008 ; qu'il n'y a pas cumul de taxe sur la valeur ajoutée rappelée car il a été tenu compte des régularisations successives effectuées ; ce rappel est suffisamment motivé dès lors que l'administration s'est bornée à tirer les conséquences fiscales d'écritures comptables.
Sur le bien-fondé des pénalités :
- compte tenu de la minoration systématique et importante des chiffres d'affaires sur toute la période vérifiée, de l'absence totale de conservation des pièces justificatives et de la répétition d'une rétention de taxe sur la valeur ajoutée collectée sur toute la période vérifiée, l'administration doit être regardée comme apportant la preuve du manquement délibéré de la requérante à ses obligations fiscales.
Par un mémoire en réplique, enregistré le 20 novembre 2015, la SARL Symonds persiste dans ses précédentes écritures et soutient, en outre, que :
- la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires n'a pas en taxe sur la valeur ajoutée rendu un avis sur des impositions correspondant à celle qui avait été notifiée ;
- " la " mention annexes Symonds " sur les pièces présentées par l'administration paraît être curieuse, s'agissant d'un document, la proposition de rectification, qui devrait être lié, les annexes n'ayant pas besoin d'être identifiées de cette manière ".
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Mear, président-assesseur,
- et les conclusions de M. Besse, rapporteur public.
1. Considérant que la SARL Symonds, exerce une activité de débit de boissons, de prestations para-hôtelières et de location de logements à Chamonix-Mont-Blanc ; qu'elle a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur ses exercices clos les 31 octobre 2006, 2007 et 2008 en matière d'impôt sur les sociétés et sur la période du 1er novembre 2005 au 31 octobre 2008 en matière de taxe sur la valeur ajoutée ; que le vérificateur a rejeté sa comptabilité comme étant entachée de graves irrégularités lui ôtant tout caractère probant et procédé à la reconstitution des chiffres d'affaires de son activité bar ; qu'il a, par ailleurs, procédé à des rectifications relatives aux comptes " taxe sur la valeur ajoutée à régulariser " figurant au passif du bilan de la SARL Symonds à la clôture de son exercice clos en 2008 ; que, par suite, des rappels d'impôt sur les sociétés et des droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée, assortis de la pénalité pour manquement délibéré prévue par l'article 1729 du code général des impôts, ont été mis à sa charge, selon la procédure de rectification contradictoire ; qu'un avis de mise en recouvrement de ces impositions a été émis le 23 juin 2010 ; que, toutefois, l'administration ayant constaté qu'elle n'avait pas fait droit à la demande de saisine du supérieur hiérarchique du vérificateur et de l'interlocuteur départemental et considéré qu'une erreur de procédure avait été ainsi commise, a procédé au dégrèvement des impositions initiales et repris la procédure au stade du recours hiérarchique ; qu'un nouvel avis de mise en recouvrement a été émis à l'issue de la procédure le 24 avril 2012 pour un montant total qui s'élève à 64 729 euros ; que la SARL Symonds relève appel du jugement du tribunal administratif de Grenoble du 13 juin 2014 qui a rejeté sa demande tendant à la décharge de ces impositions et des pénalités y afférentes ;
Sur la régularité du jugement :
2. Considérant que dans son mémoire en réplique, enregistré le 7 mai 2014 au greffe du tribunal administratif de Grenoble, la SARL Symonds a soutenu que la procédure d'imposition était irrégulière au motif que " la décision de rejet annexée à un mémoire en défense produit au cours de la première procédure, ne constitue pas une notification suffisante pour justifier une nouvelle mise en recouvrement " ; que les premiers juges n'ont ni visé ni répondu à ce moyen tiré d'une absence de notification par l'administration de son intention de reprendre la procédure après le dégrèvement des impositions initialement mises en recouvrement, lequel n'était pas inopérant ; que, dès lors, le jugement attaqué du 13 juin 2014 est irrégulier pour omission à statuer et doit être annulé ;
3. Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par la SARL Symonds devant le tribunal administratif de Grenoble tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre de ses exercices clos les 31 octobre 2006, 2007 et 2008, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er novembre 2005 au 31 octobre 2008, et des pénalités y afférentes ;
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
4. Considérant, en premier lieu, qu'en se bornant à faire valoir que " la " mention annexes Symonds " sur les pièces présentées par l'administration paraît être curieuse, s'agissant d'un document, la proposition de rectification, qui devrait être lié, les annexes n'ayant pas besoin d'être identifiées de cette manière ", la société requérante ne met pas à même le juge d'apprécier la portée et le bien-fondé de son moyen ; que ce moyen ne peut dès lors qu'être écarté ;
5. Considérant, en deuxième lieu qu'aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation. (...) / Lorsque l'administration rejette les observations du contribuable sa réponse doit également être motivée " ;
6. Considérant que la proposition de rectification du 17 août 2009 précise le fondement légal, les modalités de calcul et le montant du rappel de taxe sur la valeur ajoutée collectée à régulariser à la clôture de l'exercice 2008 ; que la réponse aux observations du contribuable du 16 novembre 2009 mentionne les motifs pour lesquels l'administration rejette la contestation de la société requérante tenant au défaut de justification de l'exigibilité de la taxe sur la valeur ajoutée collectée non déclarée, à un cumul de taxe sur les trois années en cause et à un défaut de motivation concernant le mode de détermination et la répartition de la taxe sur la valeur ajoutée rappelée sur l'ensemble de la période vérifiée ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que le rappel effectué ne serait pas motivé en méconnaissance des dispositions précitées de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales ne peut qu'être écarté ;
7. Considérant, en troisième lieu, que la société requérante soutient que l'administration a méconnu les droits de la défense en ne répondant pas à la demande, qu'elle aurait formulée en réponse à la proposition de rectification, de communication de ses fichiers intermédiaires utilisés en vue de recenser les achats vendus et de déterminer le chiffre d'affaires reconstitué, de sorte qu'elle s'est trouvée dans l'impossibilité de vérifier les calculs effectués par le vérificateur et d'engager avec l'administration un dialogue contradictoire ; que, toutefois, cette société, qui n'établit pas avoir formulé une telle demande, ne précise pas la nature " des fichiers intermédiaires " sollicités alors que la proposition de rectification comporte en annexe 17 tableaux recensant notamment, pour chaque produit, le nombre d'achats effectués au cours de chaque année vérifiée, établis par le vérificateur à partir des factures d'achats de la société requérante au cours de la période vérifiée, soit à partir des éléments comptables détenus par cette société, et précisant les produits regroupés, le volume global de vente des produits concernés et les modalités particulières de détermination des produits valorisés et des produits vendus sous forme de cocktails et de " shooters " ; que, dès lors, le moyen de la société requérante tiré de ce que l'administration aurait méconnu les droits de la défense doit être écarté ;
8. Considérant, en quatrième lieu, qu'il ressort de la réponse aux observations du contribuable en date du 16 novembre 2009, produite au dossier, que ce document a été signé par le vérificateur et son supérieur hiérarchique ; que, par suite, le moyen tiré de ce que ce document n'est pas signé manque en fait alors qu'au demeurant il ressort des pièces produites au dossier par l'administration que la réponse aux observations du contribuable a été adressée au représentant légal de la société qui en a accusé réception le 23 novembre 2009 ;
9. Considérant, en cinquième lieu, qu'il résulte des dispositions du livre des procédures fiscales relatives tant à la procédure de redressement contradictoire qu'aux procédures d'imposition d'office, et en particulier de celles des articles L. 57 et suivants et de l'article L. 76 de ce livre, qu'après avoir prononcé le dégrèvement d'une imposition, l'administration ne peut établir, sur les mêmes bases, une nouvelle imposition sans avoir, préalablement, informé le contribuable de la persistance de son intention de l'imposer ; que, par lettre du 10 mars 2011, l'administration a informé la SARL Symonds du dégrèvement des impositions initialement mises à sa charge et de la persistance de son intention de poursuivre la procédure et, par lettres susmentionnées des 13 juillet et 26 septembre 2011 et du 20 février 2012, du maintien des rectifications effectuées et des pénalités appliquées ; que, dans ces conditions, l'administration ne s'étant pas bornée à l'informer de la reprise de la procédure dans le mémoire en défense qu'elle a déposé dans le cadre de l'instance distincte relative aux impositions initialement imposées, la société requérante n'est pas fondée à soutenir qu'elle n'aurait pas été " suffisamment " informée de la poursuite de la procédure d'imposition ;
10. Considérant, en sixième lieu, qu'il résulte de l'instruction que suite à la lettre du 10 mars 2011 par laquelle l'administration a informé la SARL Symonds de sa décision de dégrever les impositions initialement mises à sa charge au motif d'une erreur de procédure et de la reprise de la procédure au stade du recours hiérarchique, le représentant de la société requérante s'est entretenu avec la supérieure hiérarchique du vérificateur le 21 juin 2011 ; que, par lettre du 13 juillet 2011, elle a été informée qu'en l'absence de présentation d'élément nouveau, les conséquences financières issues des opérations de contrôle étaient maintenues ; que, par lettre du 26 septembre 2011, suite à des éléments transmis postérieurement à cet entretien relatifs aux prix des produits vendus au bar, la supérieure hiérarchique du vérificateur a explicité les motifs pour lesquels ces éléments n'étaient pas de nature à remettre en cause les résultats du contrôle et a, à nouveau, confirmé les conséquences financières de ce contrôle ; que les représentants de la société requérante ont rencontré l'interlocutrice départementale le 16 décembre 2011, laquelle, par lettre du 20 février 2012, a explicité les motifs pour lesquels, le vérificateur a retenu les tarifs en vigueur au cours du contrôle, corrigés pour tenir compte de l'inflation, et maintenu les rectifications effectuées et les pénalités appliquées ; que, par suite, si la société requérante fait valoir que le recours hiérarchique et le recours à l'interlocuteur départemental n'auraient pas constitué des garanties effectives et n'auraient servi qu'à régulariser la procédure, ce moyen doit être écarté comme manquant en fait ;
11. Considérant, en dernier lieu, que la SARL Symonds ne peut utilement faire valoir qu'elle n'aurait pas bénéficié d'un recours effectif au motif que l'administration qui a dégrevé les impositions initialement mises à sa charge n'aurait pas dégrevé celles de ses associés qui se seraient désignés bénéficiaires dès lors que l'imposition de ces derniers est sans incidence sur la régularité de la procédure d'imposition de la société requérante ;
Sur le bien-fondé des impositions :
En ce qui concerne le rejet de la comptabilité :
12. Considérant qu'il résulte de la proposition de rectification du 17 août 2009 que pour écarter la comptabilité de la SARL Symonds le vérificateur s'est fondé sur l'absence de présentation des bandes de caisse enregistreuse au titre de l'ensemble de la période vérifiée, l'absence de justificatifs du détail journalier des recettes (tickets Z) pour la période du 1er mars 2007 au 18 octobre 2007 et du 1er février 2008 au 31 mai 2008 et sur l'enregistrement global des recettes quotidiennes ne détaillant pas les modalités de règlement, la nature et le détail des produits vendus et le prix de vente ; qu'il a relevé, en outre, des anomalies comptables tenant, notamment, à la réintégration par le comptable de la société d'une somme de 20 000 euros en " recettes bar " à la clôture de l'exercice de 2006, correspondant à des règlements fournisseurs intervenus au moyen d'espèces non déclarées en chiffre d'affaires et à une somme de 8 843 euros au titre de l'exercice 2008 correspondant à des crédits bancaires dont l'origine n'a pas été justifiée ; que la société requérante n'établit pas disposer de justificatifs détaillés de ses recettes au cours de l'ensemble de la période vérifiée ; que si la société requérante entend se prévaloir des dispositions du 3° de l'article 286 du code général des impôts qui prévoient que les opérations au comptant peuvent être inscrites globalement en comptabilité à la fin de chaque journée lorsqu'elles sont inférieures à un certain montant pour les ventes au détail, ces dispositions n'ont pas pour effet d'exonérer un contribuable de l'obligation de produire des justificatifs du détail des recettes portées en comptabilité ; que, dans ces conditions, l'administration établit que c'est à bon droit que le vérificateur a écarté comme non probante la comptabilité de la SARL Symonds et procédé à la reconstitution des recettes de son activité " bar ".
En ce qui concerne la reconstitution des recettes :
13. Considérant qu'aux termes de l'article L. 192 du livre des procédures fiscales, dans sa version alors applicable : " Lorsque l'une des commissions visées à l'article L. 59 est saisie d'un litige ou d'une rectification, l'administration supporte la charge de la preuve en cas de réclamation, quel que soit l'avis rendu par la commission. / Toutefois, la charge de la preuve incombe au contribuable lorsque la comptabilité comporte de graves irrégularités et que l'imposition a été établie conformément à l'avis de la commission. La charge de la preuve des graves irrégularités invoquées par l'administration incombe, en tout état de cause, à cette dernière lorsque le litige ou la rectification est soumis au juge (...) " ;
14. Considérant que, dans son avis en date du 2 avril 2010, la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires de la Haute-Savoie a émis un avis favorable au maintien des rectifications effectuées par l'administration ; que si la société requérante fait valoir que l'avis de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires est insuffisamment motivé en ce qui concerne le bien-fondé des prix appliqués par le vérificateur, que la validation des tarifs par la commission départementale va au-delà de son domaine de compétence et que la commission départementale n'a pas en taxe sur la valeur ajoutée rendu un avis sur des impositions correspondant " à celle qui avait été notifiée ", ces moyens doivent être écartés comme manquant en fait ; que les impositions litigieuses ayant été établies conformément à l'avis de cette commission, il incombe à la SARL Symonds d'établir le caractère exagéré des rectifications litigieuses, conformément aux dispositions précitées de l'article L. 192 précité du livre des procédures fiscales ;
15. Considérant que pour reconstituer les recettes de l'activité " bar " de la SARL Symonds, le vérificateur a déterminé les quantités de produits vendus à partir des factures d'achat de la société requérante et de la variation de ses stocks ; qu'il a sur la base des réponses apportées par la société requérante à son questionnaire du 16 juin 2009 et des éléments mentionnés sur le journal de bord établi au titre de la période du 4 juin au 14 juillet 2009, fixé pour chaque produit un taux d'offerts et de prélèvements personnels et un taux approximatif de vente en période " d'happy hours " ; qu'il a également pris en compte un taux d'offert pour les bières pression de 10/15 % selon la marque vendue ; qu'il a fixé les prix de vente en période normale des différents produits à partir des tarifs 2009 de chaque produit et les a minorés pour prendre en compte l'inflation, en fonction de l'indice du coût de la construction de chaque année vérifiée ;
16. Considérant que le vérificateur a reconstitué les recettes de la société requérante en fonction de ses factures d'achats et des informations qu'elle a elle-même fournies en réponse au questionnaire qui lui a été adressé et dans le cadre du tableau de bord qu'elle a établi en 2009 ; que si la société requérante fait valoir que le vérificateur n'a pas pris en compte les augmentations tarifaires successives auxquelles elle a procédé au cours de la période vérifiée elle ne justifie pas avoir procédé à de telles augmentations ; que si elle conteste le fait que le vérificateur a déterminé les prix de vente en fonction des tarifs qu'elle a pratiqués en 2009, soit postérieurement à la période vérifiée, et pendant une période estivale, elle n'établit ni que sa comptabilité ou les cartes présentées auraient permis de déterminer les prix pratiqués dans son établissement au cours de la période vérifiée ni que les tarifs retenus par le vérificateur sont excessifs, ni que ce dernier aurait sous estimé l'incidence des " happy hours " et des pertes et des offerts ni qu'il n'aurait pas tenu compte des boissons affectées à l'activité para-hôtelière ; que, par suite, la société requérante n'est pas fondée à soutenir que le vérificateur n'a pas pris en compte les conditions réelles d'exercice de son activité ;
17. Considérant qu'il résulte de la proposition de rectification et des tableaux qui lui sont annexés que le vérificateur a procédé à la reconstitution des recettes en regroupant l'ensemble des produits en dix sept familles de produits de même nature et a notamment défini les produits composés et les modalités de leurs prises en compte ; qu'en se bornant à contester la " banalisation des produits " la société requérante ne précise ni n'établit en quoi ce regroupement de produits serait pénalisant et conduirait à majorer indûment ses recettes ;
18. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SARL Symonds n'apporte la preuve ni du caractère trop sommaire ou radicalement vicié de la méthode de reconstitution de ses recettes mise en oeuvre par le vérificateur ni du caractère exagéré des bases d'imposition retenues par l'administration ;
En ce qui concerne le rappel de taxe sur la valeur ajoutée figurant au passif du bilan :
19. Considérant qu'il résulte de l'instruction que le compte " taxe sur la valeur ajoutée collectée à régulariser " figurant au passif du bilan de la SARL Symonds présentait un solde créditeur de 5 418 euros à la clôture de l'exercice clos en 2006, de 6 491 euros à la clôture de l'exercice clos en 2007 et un montant net de taxe sur la valeur ajoutée à régulariser de 11 942 euros à la clôture de l'exercice clos en 2008 ; que l'administration a rappelé un montant de taxe sur la valeur ajoutée de 5 418 euros au titre de l'exercice clos en 2006, un montant de 1 073 euros (6 491-5 418) euros au titre de l'exercice clos en 2007 et un montant de 4 614 euros (11 942 - 837 correspondant au solde débiteur non régularisé à la clôture de la période vérifiée - 6 491 euros) au titre de l'exercice clos en 2008 ; que l'administration soutient que le compte " taxe sur la valeur ajoutée collectée à régulariser " était soldé au cours de l'exercice suivant et que le montant correspond à de la taxe qui n'a pas été mentionnée sur les déclarations de taxe sur la valeur ajoutée ;
20. Considérant que si la société requérante fait valoir que les rappels de taxe sur la valeur ajoutée à régulariser ne résultent pas forcément d'une insuffisance déclarative, ne correspondent pas forcément à de la taxe sur la valeur ajoutée due au titre de la période concernée, que ces rappels ne visent qu'à éviter de faire apparaître une taxe sur la valeur ajoutée prescrite et comportent des doubles emplois, elle n'apporte aucune précision ni justification sur l'origine et le détail des sommes en cause ; que, dès lors, la SARL Symonds n'est pas fondée à contester les rappels de taxe sur la valeur ajoutée correspondant aux comptes " taxe sur la valeur ajoutée collectée à régulariser " figurant au passif des bilans de ses exercices clos en 2006, 2007 et 2008 ;
Sur les pénalités :
21. Considérant qu'aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : a. 40 % en cas de manquement délibéré (...) " ;
22. Considérant qu'en faisant valoir, d'une part, l'absence de conservation des pièces justificatives et la minoration systématique et importante des recettes et, d'autre part, le fait que la société requérante a procédé systématiquement à une rétention de taxe sur la valeur ajoutée collectée, l'administration établit l'intention de la SARL Symonds d'éluder ses impôts et, par suite, le bien-fondé de l'application des pénalités pour manquement délibéré aux cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et aux rappels de droit de taxe sur la valeur ajoutée litigieux ;
23. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SARL Symonds n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande ;
Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
24. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat qui n'a pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante, verse à la SARL Symonds la somme qu'elle réclame au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1204796, du tribunal administratif de Grenoble en date du 13 juin 2014 est annulé.
Article 2 : La demande de la SARL Symonds et le surplus des conclusions de sa requête sont rejetés.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL Symonds et au ministre des finances et des comptes publics.
Délibéré après l'audience du 2 février 2016 à laquelle siégeaient :
M. Bourrachot, président de chambre,
Mme Mear, président-assesseur,
Mme Duguit-Larcher, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 1er mars 2016.
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N° 14LY02531
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