Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire enregistrés le 28 juin 2016 et le 13 décembre 2016 le service départemental d'incendie et de secours de la Drôme, représenté par Me B..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du 17 mai 2016 ;
2°) de rejeter la demande de première instance de M. A... ;
3°) de mettre à charge de M. D... A... une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- seules les heures au-delà de la durée annuelle établie par l'article 4 du décret du 31 décembre 2001 peuvent donner lieu à une rémunération ; ce régime d'équivalence n'est pas illégal au regard du droit de l'Union européenne ;
- M. A...pour l'année 2012, a effectué 1 597,55 heures soit 64,35 heures supplémentaires dues qui ont été indemnisées à hauteur de 60 heures, les 4,35 heures restantes ayant été reportées en déduction du temps de travail annuel à effectuer en 2013 ;
Par un mémoire en défense, enregistré le 7 octobre 2016 M. D... A..., représenté par Me C..., conclut au rejet de la requête et à la condamnation du service départemental d'incendie et de secours de la Drôme à lui verser 1 794 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et 35 euros au titre de la contribution à l'aide juridique ;
Il soutient qu'aucun moyen de la requête n'est fondé.
L'instruction a été close le 11 janvier 2017 à 16 h 30 par une ordonnance du 14 décembre 2016 prise sur le fondement de l'article R. 613-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la directive 93/104/CE du Conseil du 23 novembre 1993 modifiée concernant certains aspects de l'aménagement du temps de travail ;
- la directive 2003/88/CE du Parlement européen et du Conseil du 4 novembre 2003 concernant certains aspects de l'aménagement du temps de travail ;
- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;
- le décret n° 2001-623 du 12 juillet 2001 ;
- le décret n° 2001-1382 du 31 décembre 2001 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Marc Clément, premier conseiller ;
- les conclusions de M. Samuel Deliancourt, rapporteur public ;
- et les observations de Me B...pour le service départemental d'incendie et de secours de la Drôme et, de Me C...pour M.A....
Des notes en délibéré ont été enregistrées les 4 et 5 avril 2018 respectivement pour M. A... et le service départemental d'incendie et de secours de la Drôme.
1. Considérant que par sa requête susvisée le service départemental d'incendie et de secours (SDIS) de la Drôme relève appel du jugement du 17 mai 2016 par lequel le tribunal administratif de Grenoble l'a condamné à verser à M. A..., sapeur-pompier professionnel, une somme correspondant à la rémunération qu'il a estimé lui être due pour 25 heures supplémentaires accomplies au cours de l'année 2012 ;
2. Considérant qu'aux termes de l'article 2 du décret du 25 août 2000 relatif à l'aménagement de la réduction de temps de travail dans la fonction publique de l'Etat, rendu applicable aux agents des collectivités territoriales par l'article 1er du décret du 12 juillet 2001 pris pour l'application de l'article 7-1 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 et relatif à l'aménagement et à la réduction du temps de travail dans la fonction publique territoriale : " La durée du travail effectif s'entend comme le temps pendant lequel les agents sont à la disposition de leur employeur et doivent se conformer à ses directives sans pouvoir vaquer librement à des occupations personnelles. " ; que, par ailleurs, aux termes de l'article 1er du décret du 31 décembre 2001 relatif au temps de travail des sapeurs-pompiers professionnels, dans sa rédaction applicable au présent litige, pris en application du même article 7-1 de la loi du 26 janvier 1984 issu de l'article 21 de la loi du 3 janvier 2001 relative à la résorption de l'emploi précaire et à la modernisation du recrutement dans la fonction publique ainsi qu'au temps de travail dans la fonction publique territoriale : " La durée de travail effectif des sapeurs-pompiers professionnels est définie conformément à l'article 1er du décret du 25 août 2000 susvisé auquel renvoie le décret du 12 juillet 2001 susvisé et comprend : / 1. Le temps passé en intervention ; / 2. Les périodes de garde consacrées au rassemblement qui intègre les temps d'habillage et déshabillage, à la tenue des registres, à l'entraînement physique, au maintien des acquis professionnels, à des manoeuvres de la garde, à l'entretien des locaux, des matériels et des agrès ainsi qu'à des tâches administratives et techniques, aux pauses destinées à la prise de repas ; / 3. Le service hors rang, les périodes consacrées aux actions de formation définies par arrêté du ministre de l'intérieur dont les durées sont supérieures à 8 heures, et les services de sécurité ou de représentation. " ; qu'aux termes de l'article 3 du même décret : "Compte tenu des missions des services d'incendie et de secours et des nécessités de service, un temps de présence supérieur à l'amplitude journalière prévue à l'article 2 peut être fixé à 24 heures consécutives par le conseil d'administration du service départemental d'incendie et de secours après avis du comité technique./ Ce temps de présence est suivi obligatoirement d'une interruption de service d'une durée au moins égale. / Lorsque la durée du travail effectif s'inscrit dans un cycle de présence supérieur à 12 heures, la période définie à l'article 1er ne doit pas excéder 8 heures. Au-delà de cette durée, les agents ne sont tenus qu'à effectuer les interventions." ; qu'enfin, aux termes de l'article 4 de ce décret : " Lorsqu'il est fait application de l'article 3 ci-dessus, une délibération du conseil d'administration après avis du comité technique fixe un temps d'équivalence au décompte annuel du temps de travail. / La durée équivalente ne peut être inférieure à 2 280 heures ni excéder 2 520 heures. / A compter du 1er janvier 2005, elle ne peut être inférieure à 2160 heures ni excéder 2400 heures " ;
3. Considérant que le régime d'horaire d'équivalence constitue un mode particulier de comptabilisation du travail effectif qui consiste à prendre en compte la totalité des heures de présence tout en leur appliquant un mécanisme de pondération tenant à la moindre intensité du travail fourni pendant les périodes d'inaction ; qu'il s'ensuit que les dispositions précitées doivent être interprétées comme disposant que seules peuvent constituer des heures supplémentaires ouvrant droit à un complément de rémunération les heures de garde assurées par les sapeurs-pompiers au-delà du temps d'équivalence au décompte annuel du temps de travail fixé, dans les limites prévues par l'article 4 du décret du 31 décembre 2001, par le conseil d'administration du SDIS ;
4. Considérant qu'au titre de l'année 2012, le temps de travail annualisé de M. D... A... était de 1 533,20 heures ; qu'en vertu du régime horaire d'équivalence en vigueur pour les gardes de 24 heures, le total annualisé des heures de travail effectif de M. A... s'est élevé pour l'année 2012 à 1 597,55 heures ; que c'est dès lors à bon droit que l'administration a appliqué à l'ensemble des heures de garde effectuées le régime d'équivalence avant tout calcul d'heures supplémentaires ; qu'ainsi, et dès lors qu'il n'est pas contesté que les 64,35 heures supplémentaires qui résultent de ce décompte ont été rémunérées à hauteur de 60 heures et reportées à hauteur de 4,33 heures en déduction du temps de travail pour l'année 2013, le SDIS de la Drôme est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble l'a condamné à verser à M. A... une somme correspondant à la rémunération de 25 heures supplémentaires en sus de celles qui lui avaient déjà été payées ou qui avaient fait l'objet d'une récupération ;
5. Considérant que par l'effet dévolutif de l'appel, il y a lieu pour la cour, de statuer sur les autres moyens de la demande de M. A... devant le tribunal administratif de Grenoble ;
6. Considérant que M. A..., qui soutient que les dispositions du décret du 31 décembre 2001 fixant un système d'équivalence horaire pour les gardes de 24 heures conduisent à méconnaître les dispositions des directives 93/104/CE du Conseil du 23 novembre 1993 et 2003/88/CE du Parlement européen et du Conseil du 4 novembre 2003 concernant certains aspects de l'aménagement du temps de travail, ne précise cependant pas quelles dispositions de ces directives auraient été méconnues alors que celles-ci ne font pas obstacle à l'application de rapports d'équivalence aux durées maximales de travail fixées par le droit national, dès lors que le respect de l'intégralité des prescriptions minimales qu'elles édictent en vue de protéger de manière efficace la sécurité et la santé des travailleurs est assuré ;
7. Considérant que M. A... n'a produit, pas plus en appel qu'en première instance, d'élément qui permettrait d'établir que, comme il le soutient, deux périodes de 7h30 n'auraient pas été comptabilisées dans les heures d'activités fonctionnelles retenues au titre de l'année 2012 par l'administration ; que ses conclusions tendant à l'indemnisation de ces périodes doit, dès lors, être rejetée ;
8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède qu'il y a lieu d'annuler le jugement attaqué du tribunal administratif de Grenoble et de rejeter la demande présentée par M. A... devant ce tribunal ;
9. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que le SDIS de la Drôme qui n'est pas partie perdante dans la présente instance, soit condamné à verser à M. A... la somme qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de M. A... la somme de 1 500 euros au titre de ces mêmes dispositions ;
DECIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1302674 du 17 mai 2016 du tribunal administratif de Grenoble est annulé.
Article 2 : La demande présentée devant le tribunal administratif de Grenoble par M. A... est rejetée.
Article 3 : M. A... versera au service départemental d'incendie et de secours de la Drôme une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au service départemental d'incendie et de secours de la Drôme et à M. D... A....
Délibéré après l'audience du 3 avril 2018 à laquelle siégeaient :
M. Jean-François Alfonsi, président de chambre ;
M. Hervé Drouet, président-assesseur ;
M. Marc Clément, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 2 mai 2018.
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N° 16LY02165
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