Procédure devant la Cour
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 20 juillet 2016 et le 20 avril 2017, M. C... B..., représenté par la SCP Couderc Zouine, avocat, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement n° 1601424 du 6 juillet 2016 du tribunal administratif de Lyon ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 17 septembre 2015 par laquelle le préfet du Rhône a rejeté sa demande de carte de séjour temporaire ;
3°) d'enjoindre au préfet du Rhône de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " ou " salarié " dans un délai d'un mois et de lui délivrer sans délai un récépissé de demande de titre de séjour l'autorisant à travailler ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat au profit de son conseil une somme de 1 300 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée relative à l'aide juridique.
Il soutient que :
- le préfet ne l'a pas invité à compléter sa demande de titre de séjour en adressant un dossier médical au médecin de l'agence régionale de santé ;
- le refus de titre en litige méconnaît l'article L. 311-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors que sa fille malade remplissait les conditions prévues par ce texte ;
- il méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et le 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant du 26 janvier 1990 et est entachée d'erreur manifeste d'appréciation de sa situation personnelle, dès lors qu'il réside depuis plus de huit années en France où son épouse l'a rejoint en 2010, qu'ils sont parents de quatre enfants tous scolarisés en France, dont le dernier est né dans ce pays en 2012, qu'il a travaillé quasiment sans discontinuer depuis son arrivé en France, que son épouse bénéficie d'une prise en charge médicale spécialisée qui doit se poursuivre en France et que sa fille mineure A...reçoit des soins médicaux qui doivent être poursuivis en France.
Un mémoire en défense, enregistré le 6 mars 2018 et présenté par le préfet du Rhône, n'a pas été communiqué.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée relative à l'aide juridique ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.
Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Drouet, président assesseur ;
1. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 311-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction en vigueur à la date de la décision en litige : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, une autorisation provisoire de séjour peut être délivrée à l'un des parents étranger de l'étranger mineur qui remplit les conditions mentionnées au 11° de l'article L. 313-11, sous réserve qu'il justifie résider habituellement en France avec lui et subvenir à son entretien et à son éducation, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. / L'autorisation provisoire de séjour mentionnée au premier alinéa, qui ne peut être d'une durée supérieure à six mois, est délivrée par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence, ou, à Paris, du médecin, chef du service médical de la préfecture de police, dans les conditions prévues au 11° de l'article L. 313-11. Elle est renouvelable et n'autorise pas son titulaire à travailler. Toutefois, cette autorisation peut être assortie d'une autorisation provisoire de travail, sur présentation d'un contrat de travail. " ; que selon l'article L. 313-11 dudit code dans sa rédaction en vigueur à la date de la décision en litige : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : / (...) / 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence, ou, à Paris, du médecin, chef du service médical de la préfecture de police. Le médecin de l'agence régionale de santé ou, à Paris, le chef du service médical de la préfecture de police peut convoquer le demandeur pour une consultation médicale devant une commission médicale régionale dont la composition est fixée par décret en Conseil d'Etat. " ; que l'article R. 313-22 du même code dans sa rédaction en vigueur à la date de la décision en litige dispose : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour temporaire au vu d'un avis émis par le médecin de l'agence régionale de santé compétente au regard du lieu de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général. (...) / L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin agréé ou un médecin praticien hospitalier et, d'autre part, des informations disponibles sur l'existence d'un traitement dans le pays d'origine de l'intéressé. (...) " ;
2. Considérant qu'il est constant que M. B... a saisi le préfet du Rhône le 12 mars 2013 d'une demande de carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " puis, le 20 octobre 2014, d'une d'autorisation provisoire de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " sur le fondement de l'article L. 311-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en qualité de parent de sa fille mineure malade et que ces deux demandes ont été rejetées par la décision en litige du 17 septembre 2015 ; qu'il ressort du dossier d'appel et notamment des termes non contestés sur ce point de la décision litigieuse, qu'à la suite de la saisine du 20 octobre 2014, les services de la préfecture ont remis à M. B... un protocole de soins lui expliquant qu'il devait se rendre avec sa fille chez un médecin agréé ou hospitalier à charge pour celui-ci d'adresser un rapport médical sur l'état de santé de sa fille au médecin de l'agence régionale de santé ; qu'il ne ressort pas des pièces des dossiers de première instance et d'appel que M. B... ait consulté avec sa fille un médecin agréé ou hospitalier à fin d'établissement d'un rapport médical sur l'état de santé de celle-ci ; que, dans ces conditions, le préfet n'était pas tenu de rappeler à M. B..., qui n'avait ainsi pas choisi de médecin agréé ou hospitalier, qu'un rapport médical devait être adressé au médecin de l'agence régionale de santé ;
3. Considérant, en deuxième lieu, qu'il ne ressort pas des pièces des dossiers de première instance et d'appel, et notamment pas du courrier du 5 juin 2014 du praticien hospitalier traitant de la fille mineure de M. B..., que la prise en charge médicale de cette enfant ne puisse se poursuivre en Tunisie, pays d'origine du requérant ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées de l'article L. 311-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté comme non fondé ;
4. Considérant, en dernier lieu, qu'il est constant que M. B..., né le 13 février 1961 et de nationalité tunisienne, a fait l'objet le 17 septembre 2012 d'une décision précédente de refus de titre de séjour qui n'a pas été annulée par les juridictions administratives ; que l'intégration professionnelle alléguée ne ressort pas des pièces des dossiers de première instance et d'appel, et notamment pas de l'avis défavorable à la demande de carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " émis le 9 mars 2015 par le directeur de l'unité territoriale du Rhône de la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi ; que la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " sollicitée par son épouse sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile a été refusée par une décision préfectorale du 18 septembre 2015 dont les conclusions en annulation sont rejetées ce jour par arrêt distinct de la cour ; que rien ne s'oppose à ce que la vie familiale de M. B... avec son épouse, de même nationalité que lui, et avec leurs quatre enfants mineurs, la scolarité de ceux-ci et la prise en charge médicale de l'enfant A...se poursuivent ailleurs qu'en France et notamment en Tunisie ou en Italie, pays dans lequel l'intéressé bénéficie d'un droit au séjour ; que, par suite, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, la décision contestée de refus de titre de séjour n'a pas porté au droit de M. B... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport à ses motifs et n'a, ainsi, pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni celles du 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant du 26 janvier 1990 ; que, pour les mêmes motifs, la décision en litige n'est pas entachée d'erreur manifeste d'appréciation de la situation personnelle du requérant ;
5. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, doivent être rejetées ses conclusions aux fins d'injonction et de mise à la charge de l'Etat des frais exposés et non compris dans les dépens dans les conditions prévues par les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B..., à la SCP Couderc Zouine et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet du Rhône.
Délibéré après l'audience du 20 mars 2018, à laquelle siégeaient :
M. Jean-François Alfonsi, président de chambre,
M. Hervé Drouet, président assesseur,
Mme E...D..., première conseillère.
Lu en audience publique le 10 avril 2018.
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N° 16LY02478