Par un jugement n° 1406968 du 29 janvier 2015, le tribunal administratif de Lyon a rejeté cette demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 24 février 2015, Mme A...D..., épouseE..., représentée par MeC..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 29 janvier 2015 ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet de l'Ain du 25 juillet 2014 ;
3°) d'enjoindre au préfet, sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de l'arrêt à intervenir, de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" ou, à défaut, de réexaminer sa situation ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 200 euros à verser à son avocat au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.
Elle soutient que :
S'agissant du refus de titre de séjour :
- il méconnaît les articles L. 121-1 et L. 121-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors que son époux, de nationalité espagnole, exerce de manière effective une activité professionnelle qui lui procure des ressources stables ;
- il méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, dès lors qu'elle est mariée à un ressortissant espagnol qui justifie d'une bonne insertion professionnelle, que ses liens familiaux en France sont intenses et que la réunion de sa famille n'est possible que dans ce pays ;
S'agissant de l'obligation de quitter le territoire français :
- elle est illégale du fait de l'illégalité du refus de titre de séjour ;
- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;
S'agissant de la décision fixant le pays de renvoi :
- elle est illégale du fait de l'illégalité du refus de titre de séjour et de l'obligation de quitter le territoire français.
Par un mémoire en défense, enregistré le 26 mars 2015, le préfet de l'Ain conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.
Mme D..., épouseE..., a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 15 avril 2015.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée relative à l'aide juridique ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Drouet, président assesseur, a été entendu au cours de l'audience publique.
Sur la légalité du refus de titre de séjour :
1. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 121-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, tout citoyen de l'Union européenne, tout ressortissant d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse a le droit de séjourner en France pour une durée supérieure à trois mois s'il satisfait à l'une des conditions suivantes : / 1° S'il exerce une activité professionnelle en France ; / 2° S'il dispose pour lui et pour les membres de sa famille tels que visés au 4° de ressources suffisantes afin de ne pas devenir une charge pour le système d'assistance sociale, ainsi que d'une assurance maladie ; / (...) 4° S'il est un descendant direct âgé de moins de vingt et un ans ou à charge, ascendant direct à charge, conjoint, ascendant ou descendant direct à charge du conjoint, accompagnant ou rejoignant un ressortissant qui satisfait aux conditions énoncées aux 1° ou 2° ; (...) " ; que selon l'article L. 121-3 du même code : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, le membre de famille visé aux 4° ou 5° de l'article L. 121-1 selon la situation de la personne qu'il accompagne ou rejoint, ressortissant d'un Etat tiers, a le droit de séjourner sur l'ensemble du territoire français pour une durée supérieure à trois mois. / S'il est âgé de plus de dix-huit ans ou d'au moins seize ans lorsqu'il veut exercer une activité professionnelle, il doit être muni d'une carte de séjour. Cette carte, dont la durée de validité correspond à la durée de séjour envisagée du citoyen de l'Union dans la limite de cinq années, porte la mention : "carte de séjour de membre de la famille d'un citoyen de l'Union". Sauf application des mesures transitoires prévues par le traité d'adhésion à l'Union européenne de l'Etat dont il est ressortissant, cette carte donne à son titulaire le droit d'exercer une activité professionnelle. " ; que selon le troisième alinéa l'article R. 121-4 du même code : " Lorsqu'il est exigé, le caractère suffisant des ressources est apprécié en tenant compte de la situation personnelle de l'intéressé. En aucun cas, le montant exigé ne peut excéder le montant forfaitaire du revenu de solidarité active mentionné au 2° de l'article L. 262-2 du code de l'action sociale et des familles ou, si l'intéressé remplit les conditions d'âge pour l'obtenir, au montant de l'allocation de solidarité aux personnes âgées mentionnée à l'article L. 815-1 du code de la sécurité sociale. " ;
2. Considérant qu'il résulte de ces dispositions que le ressortissant d'un Etat tiers ne dispose d'un droit au séjour en France en qualité de conjoint à charge d'un ressortissant de l'Union européenne, que dans la mesure où ce dernier remplit lui-même les conditions fixées par les dispositions précitées des 1° et 2° de l'article L. 121-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
3. Considérant que le préfet de l'Ain soutient, sans être aucunement contredit sur ce point par la requérante, qui est de nationalité marocaine, que l'époux de celle-ci, de nationalité espagnole, percevait, avant la décision du 25 juillet 2014, des salaires d'un montant mensuel moyen de 671 euros ; que, dans ces conditions, le foyer ne disposait pas, à la date de la décision contestée du 25 juillet 2014, compte tenu de la composition de la famille constituée d'un couple et de trois enfants telle que déclarée dans la demande de titre de séjour de l'intéressée, des ressources suffisantes pour subvenir à ses besoins au sens des dispositions précitées du 2° de l'article L. 121-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le montant mensuel forfaitaire du revenu de solidarité active mentionné au 2° de l'article L. 262-2 du code de l'action sociale et des familles s'élevant à 1 248 euros pour un couple avec trois enfants ; que Mme D... ne saurait utilement se prévaloir de ce que son époux a bénéficié, le 22 septembre 2014, postérieurement à la décision en litige, d'un contrat à durée indéterminée, ni de bulletins de paie délivrés pour les mois d'octobre à décembre 2014 ; que, par suite, elle n'est pas fondée à soutenir que le préfet de l'Ain a fait une inexacte application des dispositions précitées du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en lui refusant la délivrance d'un titre de séjour sur leur fondement ;
4. Considérant, en second lieu, que l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales stipule : " 1. / Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ;
5. Considérant que Mme D..., née le 18 juillet 1978 et de nationalité marocaine, fait valoir qu'elle a épousé, le 5 avril 2014, un ressortissant espagnol avec lequel elle vit en France, qu'elle est bien intégrée sur le territoire français, qu'elle s'occupe des deux enfants de son mari, nés en 1997 et 1998, issus d'une précédente union et dont il a la garde, que le second d'entre eux présente des problèmes de santé et fait l'objet d'un suivi psychologique auquel elle contribue ; que, toutefois, il est constant que l'intéressée, qui a déclaré être entrée en France le 2 juin 2013, s'est maintenue irrégulièrement sur le territoire ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier qu'elle serait dépourvue d'attaches familiales dans son pays d'origine où elle a vécu jusqu'à l'âge de trente-quatre ans ; que, dans ces conditions et eu égard notamment aux conditions et à la durée du séjour en France de la requérante, la décision contestée de refus de titre de séjour ne peut être regardée comme portant au droit de Mme D... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport à ses motifs, ni, par suite, comme méconnaissant les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :
6. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de ce qui a été dit aux points 1 à 5 que le moyen selon lequel l'obligation de quitter le territoire français serait illégale du fait de l'illégalité du refus de séjour, doit être écarté ;
7. Considérant, en second lieu, que pour les motifs déjà exposés au point 5 dans le cadre de l'examen de la légalité de la décision de refus de titre de séjour, la décision obligeant Mme D... à quitter le territoire français ne peut être regardée comme méconnaissant les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et n'apparaît pas entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur sa situation personnelle et familiale ;
Sur la légalité de la décision fixant le pays de renvoi :
8. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit aux points 1 à 7 que le moyen selon lequel la décision fixant le pays de renvoi serait illégale du fait de l'illégalité du refus de séjour et de l'obligation de quitter le territoire français, doit être écarté ;
9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme D... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande ; que ses conclusions accessoires à fin d'injonction sous astreinte et celles qu'elle présente pour son avocat au titre des frais non compris dans les dépens, sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, doivent être rejetées par voie de conséquence ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de Mme D... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...D..., épouseE..., à Me B... C...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de l'Ain.
Délibéré après l'audience du 30 juin 2016, à laquelle siégeaient :
- M. Boucher, président de chambre ;
- M. Drouet, président assesseur ;
- Mme Peuvrel, premier conseiller.
Lu en audience publique le 12 juillet 2016.
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N° 15LY00635