Par une requête, enregistrée le 6 juillet 2018, M. D..., représenté par Me B..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Dijon du 29 mars 2018 et l'arrêté du 13 décembre 2017 de la préfète de la Côte-d'Or ;
2°) d'enjoindre à la préfète de la Côte-d'Or de lui délivrer un titre de séjour salarié dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement à intervenir ou, à défaut, de procéder à un réexamen de sa situation dans le même délai ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros qui sera versée à Me B... en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
Sur le refus de titre de séjour :
la décision de refus de titre de séjour est illégale du fait de l'illégalité de la décision par laquelle direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRECCTE) a rejeté la demande d'autorisation de travail de son employeur, qui est encore susceptible d'annulation, celle-ci étant entachée d'une erreur sur la matérialité des faits car contrairement aux affirmations de la DIRECCTE, son employeur, la SARL My Wok a procédé à la publication d'une offre d'emploi mais les candidatures ne répondaient pas à ses attentes alors que sa propre expérience et sa connaissance de cette entreprise rendait son embauche pertinente ; la décision de la DIRECCTE est également entachée d'une erreur d'appréciation car en vertu de l'article R. 2221-20 du code du travail, doit être pris en compte l'adéquation entre la qualification, l'expérience, les diplômes et les caractéristiques de l'emploi auxquelles postule l'étranger ;
la décision de la préfète de la Côte-d'Or qui n'est pas liée par l'avis de la DIRECCTE est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de son parcours et du dossier particulièrement complet et motivé déposé par son employeur ;
Sur l'obligation de quitter le territoire français :
- elle est illégale en raison de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors qu'il vit en France depuis cinq ans, y est parfaitement intégré au terme d'un parcours scolaire et professionnel exemplaire ;
Sur le délai de départ volontaire :
- il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation dès lors qu'il vit en France depuis 2012, et qu'il est recherché en Arménie en raison de l'absence de réalisation de ses obligations militaires ;
Sur la décision fixant le pays de destination :
elle méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors qu'il encoure en Arménie des risques pour sa vie ou sa liberté.
Par un mémoire en défense, enregistré le 16 avril 2019, la préfète de la Côte-d'Or conclut au rejet de la requête.
Elle soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.
M. D... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle du 12 juin 2018.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
le code de justice administrative ;
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique, le rapport de M. Pierre Thierry, premier conseiller ;
Considérant ce qui suit :
1. M. D..., ressortissant arménien né en 1995, expose qu'il est entré en France en 2012. A la suite du rejet de sa demande d'asile et de l'obligation de quitter le territoire français dont il a fait l'objet le 6 mai 2013, il a néanmoins obtenu un titre de séjour en qualité d'étudiant à compter du 14 octobre 2015. Il relève appel du jugement du 29 mars 2018 par lequel le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 13 décembre 2017 de la préfète de la Côte-d'Or rejetant la demande de titre de séjour en qualité de salarié qu'il avait présentée sur le fondement du 1° de l'article L. 313-10 code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de 30 jours et fixant le pays de destination.
Sur le refus de titre de séjour :
2. Aux termes de l'article L. 313-10 code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Une carte de séjour temporaire, d'une durée maximale d'un an, autorisant l'exercice d'une activité professionnelle est délivrée à l'étranger : 1° Pour l'exercice d'une activité salariée sous contrat de travail à durée indéterminée, dans les conditions prévues à l'article L. 5221-2 du code du travail. Elle porte la mention " salarié ". " L'article L. 5221-2 du code du travail dispose " Pour entrer en France en vue d'y exercer une profession salariée, l'étranger présente : (...) 2° Un contrat de travail visé par l'autorité administrative ou une autorisation de travail. ". L'article R. 5221-20 du même code dispose que pour accorder une telle autorisation : " ou refuser l'une des autorisations de travail mentionnées à l'article R. 5221-11, le préfet prend en compte les éléments d'appréciation suivants : 1° La situation de l'emploi dans la profession et dans la zone géographique pour lesquelles la demande est formulée, compte tenu des spécificités requises pour le poste de travail considéré, et les recherches déjà accomplies par l'employeur auprès des organismes concourant au service public de l'emploi pour recruter un candidat déjà présent sur le marché du travail ; 2° L'adéquation entre la qualification, l'expérience, les diplômes ou titres de l'étranger et les caractéristiques de l'emploi auquel il postule ; Lorsque la demande concerne un étudiant ayant achevé son cursus sur le territoire français cet élément s'apprécie au regard des seules études suivies et seuls diplômes obtenus en France ; (...) " ;
3. Par une décision du 18 octobre 2017 la préfète de la Côte-d'Or, a rejeté la demande d'autorisation de travail formée par la SARL My Wok en vue d'embaucher M. D.... En se bornant à produire un courrier de cette société, adressé à la direction régionale de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRECCTE) dans laquelle elle expose qu'à la suite de son " offre no 056DFJP déposée auprès du Pôle emploi ", elle avait recueilli une dizaine de candidatures, M. D... n'établit pas la réalité des recherches accomplies par cette société auprès des organismes concourant au service public de l'emploi. Il n'est dès lors pas fondé à soutenir qu'en rejetant la demande d'autorisation de travail au motif que la société My Wok n'apportait pas la preuve qu'elle avait préalablement recherché des candidats disponibles sur le marché du travail, la préfète de la Côte-d'Or a entaché sa décision d'une erreur matérielle.
4. M. D... soutient que son expérience acquise au sein de la société My Wok au cours de sa formation ainsi que sa qualification et son diplôme du certificat d'aptitude professionnelle d'agent polyvalent de restauration étaient en adéquation avec les caractéristiques de l'emploi auxquelles il postulait. Il ne ressort cependant pas des pièces du dossier que l'emploi en cause, qui était prévu, selon la demande d'autorisation, pour des fonctions de " cuisson des aliments, mise en place des sauces, mise en boîte, appel client, nettoyage plan de travail et ustensiles ", nécessitait des compétences particulières dont les autres candidats auraient été dépourvus, alors, de surcroît, que les services de la DIRRECTE précisent que, dans le département de la Côte-d'Or, sont recensées 450 demandes pour des emplois de ce type, pour seulement 29 offres d'emploi. Il en découle que M. D... n'est pas fondé à soutenir que la décision qu'il attaque est entachée d'une erreur d'appréciation.
Sur l'obligation de quitter le territoire français :
5. Il résulte de ce qui précède que les conclusions à fin d'annulation la décision de refus de titre de séjour doivent être rejetées. Par suite M. D... n'est pas fondé à soutenir que la décision l'obligeant à quitter le territoire français doit être annulée par voie de conséquence.
6. A la date de la décision attaquée, M. D... séjournait en France, où il est arrivé peu de temps avant sa majorité, depuis un peu plus de 5 ans, et y a suivi un parcours de formation qui lui a permis d'obtenir un certificat d'aptitude professionnelle. Il ressort toutefois des pièces du dossier qu'il est célibataire, sans enfant et ne fait pas état de liens sociaux ou familiaux qui constitueraient des attaches fortes et durables en France. Dans ces circonstances le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.
Sur le délai de départ volontaire :
7. Les circonstances que M. D... vit en France depuis 2012, et qu'il serait recherché en Arménie en raison de ce qu'il n'a pas accompli ses obligations militaires, ne permettent pas d'établir qu'il devrait, pour des motifs exceptionnels, disposer d'un délai supérieur à trente jour pour quitter volontairement le territoire français.
Sur la décision fixant le pays de destination :
8. M. D... soutient que le retour dans son pays d'origine l'exposera à des traitements proscrits par l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Toutefois, et alors, d'ailleurs, que sa situation au regard du droit d'asile a fait l'objet d'un examen par l'Office français pour la protection des réfugiés et apatrides et par la Cour nationale du droit d'asile sans convaincre ces instances, aucune des pièces qu'il produit, ne permet de tenir pour établis ni une menace directe et personnelle sur sa vie ou sa liberté en cas de retour dans son pays d'origine ni le risque qu'il y soit exposé à la torture ou à des peines ou traitements inhumains ou dégradants.
9. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que M. D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté de la préfète de la Côte-d'Or du 13 décembre 2017.
Sur les conclusions à fin d'injonction et les frais lié à l'instance :
10. Les conclusions à fin d'annulation de M. D... devant être rejetées, il s'ensuit que doivent l'être également, d'une part, ses conclusions à fin d'injonction, puisque la présente décision n'appelle ainsi aucune mesure d'exécution et, d'autre part, celles tendant à l'application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, celles-ci faisant obstacle à ce que la cour fasse bénéficier la partie la partie perdante du paiement par l'autre partie d'une somme au titre des honoraires et frais non compris dans les dépens que le bénéficiaire de l'aide auraient exposés s'ils n'avaient pas eu cette aide.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. D... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... D..., à Me B...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera délivrée au préfet de Côte-d'Or.
Délibéré après l'audience du 23 avril 2019 à laquelle siégeaient :
M. Jean-François Alfonsi, président de chambre,
M. Pierre Thierry, premier conseiller,
Mme E...C..., première conseillère.
Lu en audience publique, le 21 mai 2019.
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N° 18LY02521